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Moi, toi, nous. Un programme d’animations-santé d’enfants mené par Cultures & Santé – Promosanté de 2000 à 2003

Le 30 Déc 20

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Cet article relate la première partie d’un projet triennal de promotion de la santé d’enfants qui s’est déroulée de 2000 à 2002 dans cinq écoles de la région bruxelloise. Le projet, qui s’inscrit dans une logique de recherche-action, consiste à mener avec des groupes d’enfants un programme de dix animations-santé visant un mieux-être. Ce programme s’adresse aux enfants du troisième cycle (troisième et quatrième année du fondamental) (1) .

L’analyse de la situation

Les objectifs du programme et son public-cible ont été choisis sur base de l’analyse de plus de 200 animations ponctuelles effectuées avec des enfants de 6 à 12 ans dans le cadre du programme « Jouons-Santé » de 1997 à 2000 dans des écoles (zones à discrimination positive) et des maisons de quartier de la Région bruxelloise, ainsi qu’au cours de deux « Etés Jeunes » en partenariat avec « Une Maison en Plus » (Forest, Région bruxelloise).
Sur base de ces animations, les animatrices de Cultures & Santé ont fait les constatations suivantes:
-ces enfants possèdent de nombreuses connaissances sur la santé et la prévention; mais ils semblent la plupart du temps répéter un savoir, sans véritable appropriation par une conviction personnelle ou une explication;
-ces enfants n’ont pas une vision globale de leur santé; ils ne sont pas conscients des ressources qui leur permettent d’agir sur celle-ci. Bien qu’ils fassent régulièrement état de mal-être psychique, la plupart d’entre eux n’ont pas le sentiment de pouvoir y réagir;
-beaucoup d’enfants manquent de confiance en eux. Ils ont des difficultés à s’exprimer ou à faire une demande sans en venir à l’agression verbale ou physique, et à respecter le travail des autres;
-ces enfants expriment le besoin d’appartenir à un groupe de pairs dans lequel ils sont à l’aise et trouvent leur place, et ils cherchent à être valorisés, que ce soit par l’adulte ou par le groupe d’enfants auquel ils appartiennent;
-ils aiment donner leur avis sur ce qui les touche au quotidien: leurs réussites, leurs peurs, leurs découragements et leurs questions parfois très profondes, empreintes de valeurs telles que la liberté, la tolérance, le respect des droits de l’homme et de ceux de l’enfant.
Ces constatations ont forgé chez les animatrices le sentiment global que les enfants de cette tranche d’âge et dans ces quartiers vivent fréquemment les relations en collectivité sur un mode peu satisfaisant, mais ne trouvent pas les moyens de modifier cet état de chose. En même temps, les animatrices développaient la perception des nombreuses ressources des enfants, sur lesquelles elles pourraient s’appuyer pour obtenir un changement.

Le public-cible

L’analyse de ces expériences nous a amenés à déterminer comme public-cible pour un premier programme les enfants de 8 à 10 ans d’écoles à discrimination positive de la Région bruxelloise. Le niveau de troisième et quatrième année de l’enseignement fondamental constitue une période idéale pour amener l’enfant à réfléchir sur lui-même et ses relations. En effet, cette période de son développement est caractérisée par un intérêt sans limite pour la plupart des choses. En outre, l’enfant de cet âge est passé d’une pensée basée sur l’intuition au raisonnement logique. Sur le plan de la vie relationnelle, il apprend à respecter les règles du groupe, mais aussi à défendre son propre point de vue, à reconnaître ses capacités et ses limites en même temps qu’il reconnaît celle des autres.
Au niveau des techniques que l’on peut lui proposer, il s’investit dans des jeux physiques de précision ou d’endurance, mais aime aussi l’expression plastique. Ceci ouvre la porte à toutes sortes de choix de techniques.
Dans un souci de pérennité de nos actions, nous avons décidé que toutes les classes visées appartiendraient à des écoles différentes.

La formulation des objectifs

L’objectif général de santé pour chaque année du programme a été formulé de la façon suivante: « Faire découvrir et adopter de nouveaux comportements de bien-être et améliorer les comportements existants, chez des enfants de 8 à 10 ans dans trois classes situées dans des établissements différents de zones à discrimination positive de la Région bruxelloise ».
Les objectifs spécifiques ont été choisis en fonction des trois comportements apparus comme les plus problématiques dans la phase d’analyse. Ces objectifs sont d’amener l’enfant à découvrir et améliorer:
– le comportement d’expression (Moi)
– le comportement d’écoute vis-à-vis de ses pairs (Toi)
– le comportement participatif (Nous!)

La durée du programme

Ce programme a reçu l’appui du Ministère de l’Aide à la jeunesse et de la Santé de la Communauté française pour une durée de trois ans. Dans cet article, nous relatons l’expérience des deux premières années, concernant cinq écoles; nous les désignons dans cet article par un chiffre romain allant de I à V.
La première année fut une année pilote, qui a permis au projet de fonctionner dès la deuxième année à sa vitesse de croisière.

Le choix des méthodes

Nous estimions que l’idéal était un programme agissant sur l’ensemble de la communauté, comme le propose la stratégie du réseau « d’Ecoles en santé ». Mais la chose ne nous paraissant pas possible dans un premier temps, nous avons décidé de partir d’un groupe-classe, en espérant qu’il soit le premier moteur d’un changement au sein d’une structure plus vaste. Comme nous le verrons plus loin, le déroulement du projet nous a donné raison; en effet, des relais se sont mis en place dans plusieurs écoles et sont à l’origine d’une extension de notre programme initial.
Pour ce programme qui relève de l’éducation pour la santé pédagogique, nous avons choisi des méthodes s’inspirant du travail communautaire et de la pédagogie du projet. Les animations sont préparées et réalisées en collaboration étroite avec les partenaires de l’école et ceux du PMS et de l’équipe PSE.
Les premières animations ont pour but d’instaurer un climat de confiance; celles qui suivent visent à permettre aux enfants de répondre à la question suivante: « qu’est-ce qui me manque pour me sentir bien à l’école ? ». A partir de ce diagnostic social, les animations restantes ont pour but de conduire progressivement le groupe vers l’autonomie pour la conception d’un projet, qui sera réalisé après la fin des animations; simultanément, les animations poursuivent des objectifs pédagogiques définis. Le projet de classe, destiné à devenir à un certain moment le moteur principal du groupe, est ainsi aux yeux des animatrices le « prétexte » offrant l’occasion de poursuivre leurs objectifs pédagogiques. La réalisation de ce projet de classe sera poursuivie avec l’accompagnement de l’enseignant(e) et d’autres membres de la communauté scolaire. Les animatrices de Cultures & Santé restent disponibles pour accompagner l’enseignant(e) et sa classe lorsqu’ils en expriment le besoin.
Les techniques d’animation nous paraissaient tout à fait de nature à aider l’enfant à se rencontrer lui-même, poser des choix en rapport avec son bien-être et développer un projet de santé en collectivité. Notre expertise avec les enfants nous orientait évidemment vers les techniques essentiellement ludiques. Un large éventail d’activités ludiques ont été utilisées. Certaines sont décrites dans « Jouons Santé », qui a reçu le Premier Prix Européen d’Education à la Santé (1997), mais plusieurs autres ont été créés depuis.
Ci-dessous, nous détaillons les étapes de la mise en place et de la réalisation du programme.

L’établissement des collaborations

Qui sont les partenaires

?
Les personnes-clés sont les enseignants des classes concernées, qui assisteront et participeront à toutes les animations, ainsi que les travailleurs psycho-médico-sociaux chargés de la promotion de la santé à l’école ( infirmier ( e ), psychologue ou assistant ( e ) social ( e ) PSE ou PMS …).
Le soutien de la direction de l’établissement dès le début du projet est tout à fait nécessaire. L’enthousiasme de l’enseignant du groupe-classe visé est évidemment tout aussi important.
Il nous a paru également utile de nous entourer d’emblée d’un comité d’accompagnement formé de personnes expérimentées provenant de différents secteurs; de plus, chacune des écoles où se déroule le programme est représentée au comité d’accompagnement par la direction, l’enseignant(e) de la classe avec laquelle se déroulent les activités, et différents travailleurs médico-sociaux de l’établissement ou des équipes PSE et PMS (infirmier(e), psychologue ou travailleur social).
Et les parents ? Il s’est avéré difficile de les associer activement, compte tenu de nos ressources. Nous avons alors décidé de les tenir régulièrement au courant du travail que nous faisions avec leurs enfants, notamment via les travailleurs PSE/PMS. Certains de ceux-ci en ont profité pour interroger les parents sur leurs priorités en matière de santé de leurs enfants. A l’avenir, nous aimerions que les enfants présentent aux parents le résultat de leur projet de groupe.

Comment les avons-nous recrutés

?
Une première sensibilisation a été faite au moyen d’un courrier adressé à tous les centres PSE et PMS des zones à discrimination positive de la Région bruxelloise; nos relais auprès des enseignants étaient donc les travailleurs de ces Centres. Nous avons eu des contacts avec les personnes qui se sont montrées intéressées suite à ce courrier; après quoi nous demandions aux partenaires qui restaient intéressés de signer un contrat de collaboration .
A ce stade, nous avons essayé de constituer dans chaque école un petit groupe de soutien à l’enseignant ou aux enseignants qui choisissait de porter le projet; ce groupe devient aussi le relais par qui le projet peut se poursuivre l’année suivante dans une autre classe.
Ensuite, un travail d’information doit être réalisé au sein de l’école. En outre, nous pensons que dans tous les cas, il serait approprié, en accord avec les partenaires, de présenter le projet au conseil de participation de l’école, via la direction.
Des rencontres de sensibilisation (quatre « midis ») réunissant les personnes des différentes écoles qui assisteront aux animations-santé, nous ont alors permis de leur expliquer les détails du projet ainsi que de faire le bilan des ressources et des obstacles perçus par les participants. Ceux-ci pourront choisir de co-animer avec les animatrices de Cultures et Santé – Promosanté, ou de prendre un rôle d’observateur.
Dès le départ et tout au long de l’action , nous avons veillé à informer tous les partenaires de façon régulière et structurée. On donne ainsi aux personnes le sentiment d’être reconnues et respectées, ce qui favorise leur implication, mais aussi on évite les dysfonctionnements dus à des peurs ou des doutes non exprimés, ou des « bruits de couloir » .

Les animations

Objectifs pédagogiques: tout le temps en vue


Au fil des séances, nous avons développé une pédagogie ludique de découverte, de prise de conscience et de savoir-faire par rapport aux objectifs spécifiques. Ceux-ci ont été déclinés en dix-neuf objectifs pédagogiques; dans chaque animation, on travaille de deux à quatre objectifs pédagogiques. La notion de « règle » est systématiquement « remise sur le tapis » au début de chaque animation. Pour la dixième animation, aucun objectif n’est déterminé à l’avance; elle s’adapte aux besoins propres à chaque groupe, au moment de se quitter et à l’aube de la réalisation de leur projet.
L’accent est mis tout au long du programme sur le développement de l’estime de soi, la connaissance de soi, de son corps, de sa santé et de ses besoins, l’écoute de sa « petite voix intérieure », le respect de soi, des autres et de l’environnement ainsi que la responsabilité de chacun en tant qu’acteur dans la recherche de sa santé et son bien-être.

Le climat de confiance

Les deux premières animations ont pour but d’établir la confiance, de faire comprendre la notion de règle et de favoriser la solidarité. Selon Germain Duclos ) (2) , le climat de confiance est la première étape à réaliser pour le développement de l’estime de soi de l’enfant. Pour établir et maintenir un climat de confiance au sein d’une classe, il est important de satisfaire le besoin de sécurité des enfants, en garantissant des repères spatio-temporels, des relations stables avec des adultes de référence, et une conduite éducative cohérente, ni trop permissive, ni trop répressive. Il faut gérer le stress des enfants par des jeux moteurs, des chants, des pauses « blagues et fou-rires », des dessins libres…
L’analyse critique des techniques utilisées lors de cette phase du programme, nous a permis de constater que la relaxation est particulièrement appréciée par les enfants les plus turbulents. Les enfants ont été conduits par la visualisation à se remémorer un souvenir relationnel agréable. Toutefois, nous n’avons pas réussi à les amener à faire le lien entre les conditions qui ont permis cette expérience heureuse, et l’utilité de la règle. Nous en déduisons l’importance de replacer la recherche du sens de l’existence des règles dans un contexte plus général et plus concret, tel que le règlement d’ordre intérieur de l’école, la loi au niveau national, les chartes internationales reprenant les droits et devoirs des enfants.
Un jeu coopératif a aussi été utilisé dans cette phase; il a sans doute été proposé trop tôt aux enfants. En effet, l’enfant s’intéresse d’abord à lui-même, avant de s’intéresser aux autres. La solidarité et la coopération doivent être envisagées comme un but à atteindre, un chantier à déblayer!

Le diagnostic social (1) et le projet-prétexte

La troisième et la quatrième animation visent à mettre en évidence ce qui, à l’école, pose problème, et ce qui, à l’école, est favorable au bien-être. Ce diagnostic social est obtenu au moyen de techniques ludiques telles que le photolangage . C’est une première approche pour apprendre à nommer ses émotions, et à séparer les faits des opinions. En outre, l’écoute de l’autre est importante pour la consolidation du climat de confiance.
Dans toutes les écoles concernées, ce diagnostic social fait état de l’insécurité physique et psychique ressenties dans la cour de récréation et dans les toilettes, ainsi que de la dégradation de ces dernières. Si les enfants évoquent d’emblée des problèmes concrets liés à l’environnement, très vite ils enchaînent sur des problèmes relationnels. Les problèmes environnementaux ont été relayés par l’enseignant vers la direction. Les problèmes relationnels étant plus particulièrement du ressort des enfants, il a été choisi d’orienter le travail dans ce domaine.
Les enfants ont progressé dans l’aptitude à reconnaître leurs propres besoins et ceux des autres, notamment par le biais du jeu « L’homme des cavernes » conçu par l’Université de Paix (Namur). Ce jeu fait émerger la notion des besoins de la pyramide de Maslow. Les enfants adhèrent facilement et avec beaucoup de spontanéité à cette activité. Parler des besoins de l’autre semble plus facile que de parler des siens !
Les élèves ont alors défini ensemble la situation problématique précise qu’ils considèrent comme prioritaire. Nous avons constaté que les enfants ont tendance à abandonner leur opinion au profit de l’amitié et ce d’autant plus lorsqu’il s’agit d’un vote à main levée. De plus, l’écoute et le partage d’opinions entre élèves ne sont pas évidents. L’utilisation du « bâton de parole » (nous utilisons un micro non branché) est nécessaire pour faire respecter le temps de parole et l’avis de chacun.
Dans les animations suivantes, les enfants ont cherché les causes du problème. Cette étape demande aux enfants un effort d’abstraction ardu pour eux, qui ont encore tendance à confondre causes et effets. Ensuite, ils ont cherché les solutions possibles. Il a été difficile aux animateurs de leur faire entrevoir d’autres solutions que la répression: la création d’une « police de la cour », l’installation de caméras de surveillance etc. étaient au départ les seules idées émises dans le groupe ! Heureusement, au terme d’un travail patient, d’autres types de réaction possible leurs sont apparus.
Enfin, les élèves ont pris conscience de leurs ressources propres et de celles de leur réseau social. Diverses techniques ludiques peuvent les y aider.
Finalement, ils ont décidé de leur projet, destiné à résoudre ou améliorer la situation à problème, et donc accroître le bien-être à l’école. Les projets ayant émergé dans les cinq écoles sont résumés dans le tableau.

L’évaluation des animations

Les animations ont été évaluées auprès de enfants et faisaient en outre l’objet d’un rapport des animatrices. L’évaluation auprès des adultes présents a été réalisée pour la première, la cinquième et la dixième animation.
Les enfants recevaient un petit questionnaire –suffisamment simple-, à remplir après l’animation. Il teste le niveau de satisfaction, l’atteinte d’un des objectifs pédagogiques poursuivis pendant l’animation, ainsi que, trois fois au cours du programme, l’établissement du climat de confiance.

Résultats auprès des enfants

Le pourcentage d’enfants satisfaits , pour l’ensemble des classes et des animations , avoisine 90 et, quand on analyse pourquoi les enfants sont satisfaits, on trouve dans la majorité des cas que c’est le contenu de l’animation qu’ils apprécient.
Le climat de confiance était testé par la question suivante: « Ai-je osé dire ce que je pense ? ». Pour l’ensemble des réponses, la moyenne est de 73%, ce qui est un bon niveau.
Le résultat de l’évaluation des objectifs pédagogiques varie selon les animations de 98% à 63% de bonnes réponses, si l’on excepte la septième animation, pour laquelle le critère de performance était « citer au moins une ressource personnelle qui peut être mise à profit pour le projet de groupe » (moins d’un tiers des enfants parviennent à se reconnaître une qualité et à la mettre en mots !). Ces pourcentages donnés ont été établis sur l’ensemble des questionnaires, toutes écoles confondues.

Evaluation par les adultes

Les partenaires ensemble, au sein du comité d’accompagnement, ont élu les critères qui leur montreraient que les objectifs spécifiques sont atteints après la série d’animations:
– comportement d’écoute: capacité de lever son doigt avant de prendre la parole; d’attendre que l’autre ait fini de parler pour s’exprimer;
– comportement d’expression: capacité de soutenir son opinion, d’expliquer ses choix;
– comportement participatif: capacité de terminer l’activité, d’aider ou d’encourager un camarade, de désigner un rapporteur, de laisser l’initiative à un plus petit ou à un plus timide, sans se moquer, d’oser demander de l’aide ou une explication.
A la fin des animations n°1, n°5 et n°10, on demande aux adultes présents pour quelle proportion (0, 25, 50, 75, 100%) d’élèves chacun de ces comportements était augmenté. Le résultat est encourageant: le comportement d’écoute, le comportement d’expression et le comportement participatif se sont améliorés pour plus de 50% des enfants.

L’évaluation d’impact

L’évaluation d’impact examine les changements réalisés après la fin du programme. Ils sont représentés par l’aboutissement des projets de classe et par les changements de comportement à moyen terme perçus par l’institutrice et les autres partenaires actifs. On en trouvera la synthèse dans le tableau.

Conclusion

Les enfants du troisième cycle demandent une meilleure qualité de vie dans les espaces communs de l’école. Leur mal-être est surtout lié au manque de respect mutuel, au manque de solidarité et à l’agressivité. Des aptitudes visant un mieux-être ensemble ont été développées au moyen du programme ‘Moi, toi, nous’ qui permet en même temps le développement d’un projet de groupe visant l’amélioration d’une situation à problème.
Les objectifs spécifiques du programme ont été atteints chez plus de la moitié des enfants. Dans quatre des cinq écoles, les partenaires du programme ont donné une extension à celui-ci par la création de nouveaux projets. Les limites de ce type de programme viennent de ce qu’il exige une bonne implication de toutes les personnes concernées; si des personnes-clés de la vie de l’établissement y restent indifférentes, l’impact et la pérennité du programme en sont fortement réduits.

Dr Marianne Flament , chargée de projets à Cultures & Santé Nous remercions chaleureusement tous les partenaires du programme ‘Moi, toi, nous’.

TABLEAU : NATURE ET DEROULEMENT DES PROJETS EMERGEANT DANS LES CINQ ECOLES

Année + école

Nature du projet Réalisations au 30/6/2003 Accompagnateurs actifs Commentaires et prolongements
2000-2001 I (4e) Réaliser une pièce de théâtre sur la violence dans la cour de récréation La pièce a été écrite, créée et jouée devant toute l’école et a été enregistrée sur cassette vidéo; des pistes de résolution des conflits y sont explorées. Après la pièce, les enfants ont offert du jus d’orange aux spectateurs pour témoigner de leur seconde priorité: l’énergie et l’alimentation. Non précisé L’enregistrement vidéo a servi de matériel d’animation dans de nouvelles écoles engagées dans le projet l’année suivante.
2000-2001 II (3e) Réaliser un tournoi sportif entre les différentes classes de l’école afin de favoriser la rencontre entre enfants d’âges différents, dans le respect des règles de convivialité. Les enfants de la classe ont créé les équipes, choisi le matériel, localisé les activités et élaboré les parcours et épreuves Institutrice, professeur de gymnastique, infirmière PSE et directrice
2001-2002 III Apprendre aux enfants des techniques de gestion des conflits. La fin de l’année fut lourde pour l’institutrice, et ce n’est qu’à la rentrée suivante que, retrouvant la même classe, elle a pu enclencher des projets. Elle a proposé aux enfants d’instaurer un conseil de coopération au sein de la classe et d’apprendre à s’auto-évaluer et à exprimer leurs sentiments. Ce projet plus modeste que le projet initial est aussi plus réaliste: l’apprentissage de l’expression des sentiments et de la coopération précède la capacité de gestion des conflits. Institutrice, dans un cadre institutionnel intéressé par la coopération. La travailleuse sociale de l’école et l’infirmière PMS veulent à leur tour réaliser un projet MTN dans d’autres classes d’âge. Les animatrices de C&S; restent personnes ressources.
2001-2002 IV Créer un répertoire de jeux pour la cour de récréation Le répertoire a été conçu, rédigé, dactylographié, illustré et photocopié par les enfants, qui sont allés le présenter à toutes les autres classes. Les élèves de la classe pilote organisent des jeux pendant les récréations. La patience des enfants a été mise à rude épreuve pour ce travail demandant ténacité et méticulosité; mais ils sont fiers du résultat. L’ambiance de la classe a complètement changé: les enfants qui étaient isolés ne le sont plus, ils sont tous plus souriants et mettent rapidement fin à leurs disputes en faisant la paix.
Professeurs d’informatique, d’adaptation à la langue française, de psychomotricité et de gymnastique. Ce projet s’inscrit dans un projet d’école, coordonné par un éducateur; en effet, à travers les conseils de coopération réalisés dans l’ensemble des classes de cet établissement, les enfants avaient souligné les problèmes de vie ensemble pendant les récréations. Les aires de jeux ont été divisées en aires spécifiques pour les jeux calmes, pour le basket et pour le football; du matériel de jeu a été acheté pour chaque classe. La nouvelle année scolaire fait apparaître les limites du projet d’école: éclatement de la classe pilote, départ de l’éducateur, désactivation des conseils de participation… Une nouvelle éducatrice a été recrutée et relance le projet.
2001-2002 V Organiser un débat inter-classes autour d’une vidéo sur la violence dans la cour de récréation; ensuite, créer des conseils de coopération dans les classes, aboutissant à la création d’un conseil d’école. Le projet de classe a été réalisé, mais le projet d’école n’a pas abouti; la direction a retiré son appui pour une raison inconnue et une partie des enseignants n’est pas intéressée. Deux institutrices soutenues par l’infirmière PMS. L’organisation de structures participatives requiert l’adhésion de toutes les personnes impliquées, ce qui a fait défaut ici et a empêché le projet d’école de se développer.


(1) Soutenu par le Ministère de l’Aide à la jeunesse et de la Santé de la Communauté française (Cabinet de Madame Nicole Maréchal) et par la Commission communautaire française de la région de Bruxelles-Capitale (Cabinet de Monsieur Didier Gosuin)
(2) Germain Duclos, L’estime de soi un passeport pour la vie, Hôpital Sainte-Justine, Montréal, 2000.
(3) Il peut paraître paradoxal de placer le paragraphe «diagnostic» après le paragraphe «objectifs pédagogiques»; cependant, rappelons ici que le diagnostic social n’avait pas pour but le fondement des objectifs pédagogiques, qui ont été fixés au moment de la construction du programme; mais bien de favoriser l’émergence d’un projet de groupe, « projet-prétexte » pour la poursuite des objectifs pédagogiques.

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Communes en santé

Le 30 Déc 20

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Le 6 mai dernier, à l’occasion d’une visite à Neufchâteau (une des quatorze municipalités retenues lors de l’appel à projets locaux, voir plus bas), Nicole Maréchal rappelait en ces termes la philosophie qui sous-tend son engagement de longue date pour la promotion de la santé au niveau local.
Il est toujours intéressant et motivant pour moi de me rendre compte directement, sur le terrain, de vos espoirs, de vos possibilités et de vos difficultés d’acteurs en première ligne.
Vous savez que, durant mon mandat, j’ai souhaité favoriser les politiques locales et communales de promotion de la santé. Ce souhait n’est pas né du hasard, ni d’un caprice.
Les actions de promotion de la santé se développent dans la participation des individus ou des groupes, dans l’intersectorialité (la santé n’étant plus l’apanage du seul secteur médical ) et dans la proximité. L’objectif essentiel est de travailler sur les facteurs qui déterminent la santé.
On sait en effet combien le statut social ou professionnel, le niveau d’éducation, le cadre de vie physique mais aussi relationnel, culturel, affectif sont des facteurs déterminants de la santé. Il faut donc les prendre en compte dans une approche globale et par des stratégies mobilisant divers secteurs de la vie sociale.
Il paraît assez évident que, grâce à la proximité entre la population et les pouvoirs publics au niveau d’une commune, la participation des habitants est facilitée.
La distance entre le bourgmestre, les échevins, les conseillers communaux et les habitants n’est pas trop grande et permet aux uns d’être plus directement à l’écoute et aux autres de se faire entendre.
Si à priori la commune dispose de compétences limitées en matière de santé (hygiène publique, application de la loi sanitaire, gestion des hôpitaux via les CPAS, de maisons de repos, de services d’aides familiales…), sitôt qu’on aborde les décisions prises en matière d’environnement, d’enseignement, d’aménagement du territoire, de politiques sociales, on constate qu’elles influencent l’état de santé des populations.
La proximité au sein des communes entre les différents secteurs et avec les pouvoirs locaux favorise également leurs collaborations. Les gens se croisent, se parlent, se rencontrent… Or, la participation des citoyens aux projets qui concernent leur santé, et le partenariat entre les acteurs de différents domaines sont deux objectifs prioritaires en promotion de la santé. Voilà pourquoi j’ai voulu développer au niveau communal la promotion de la santé.
Dans cette optique, j’ai lancé un premier appel à projets à l’intention des communes en 2002. En 2004, comme les deux années précédentes, une enveloppe budgétaire de quelque 250.000€ a été réservée à cet effet. Une quinzaine de projets ont ainsi été retenus.
A chaque fois, trois critères essentiels ont guidé mes choix. Ce sont:
– l’amélioration de la santé et de la qualité de vie des citoyens;
– la réduction des inégalités sociales en s’appuyant sur l’intersectorialité et les collaborations locales;
– une participation citoyenne réelle tant dans la définition des besoins que dans la construction du projet qui vise à y répondre.
Je pense que de tels projets montrent que la participation des citoyens et les partenariats ne sont pas des gadgets à la mode mais bien des manières d’agir qui sont efficaces, qui portent de plus beaux fruits que les projets menés sans implication des habitants et sans dépassement des barrières entre le social, l’éducation, l’environnement… et la santé.
La volonté des pouvoirs publics de s’engager pour la santé de la population, avec la population, est une chance pour les habitants d’une commune.
Afin de soutenir ces volontés au sein des communes, j’ai également initié la mise en oeuvre d’un réseau de mandataires communaux (il compte aujourd’hui environ 350 mandataires pour 280 communes). La décision de proposer une structure en réseau se base sur la conviction que ce cadre permet de construire une force collective plus importante que la juxtaposition des forces particulières.
La mise en contact et la confrontation d’expériences créent au fil du temps une expertise en promotion de la santé communale.
Nicole Maréchal , ancienne ministre de la santé de la Communauté française

Les projets retenus

Suite au deuxième appel à projets communaux (1), 27 dossiers ont été introduits, et 14 d’entre eux ont été retenus.

Anderlecht

Le projet a pour but de promouvoir la santé des habitants de différents quartiers très défavorisés de la commune via la mise en circulation d’un bus Info-Santé. Ce projet est largement pris en charge par la commune (achat du bus, prise en charge du salaire du personnel infirmier…). Le projet repose sur un partenariat local. Il est le résultat d’une large concertation. L’objectif du projet est d’aller à la rencontre de certains publics qui éprouvent des difficultés à consulter des services existants ou qui résident dans des quartiers manquant de structures de santé. L’absence de budget pour engager un chauffeur pour le bus semble actuellement freiner le développement du projet.

Binche

Le projet vise l’amélioration de la santé mentale et physique des jeunes mères de 18 à 25 ans (bénéficiant du RIS) ainsi que celle de leurs enfants. Il se base sur les attentes que certaines de ces jeunes femmes ont adressées à l’assistante sociale du CPAS.
Les objectifs du projet sont multiples:
– préparer l’arrivée de l’enfant;
dédramatiser la précarité sociale dans laquelle vivent ces jeunes femmes;
– aider ces jeunes mères à prendre soin de leur enfant au quotidien (hygiène, alimentation, prévention accidents domestiques, suivi médical…);
– stimuler l’éveil de l’enfant tout en favorisant les interactions mère – enfant;
– favoriser la requalification de ces femmes au niveau social, professionnel…

Charleroi

Le projet vise à permettre aux habitants du quartier de Dampremy d’acquérir, de s’approprier et d’utiliser des outils pour l’amélioration de leur propre santé. Il prévoit l’analyse, la récolte des besoins et demandes des habitants, puis la mise sur pied d’une «Maison des familles» afin de développer des projets en collaboration avec les partenaires et les habitants.

Chastre

La commune a développé un processus communautaire local avec mise en place d’une pratique de réseau (plans sociaux intégrés, action de lutte contre l’exclusion sociale).
Dans le cadre de la prévention des assuétudes, les partenaires ont établi une cellule de réflexion qui a élaboré une stratégie d’action ayant abouti à la création d’un vidéogramme par des jeunes sur le thème de la consommation de cannabis. La demande porte sur la suite du projet qui vise à exploiter l’outil dans le cadre de séances d’information à destination des jeunes et d’un public familial élargi (2 ateliers: un pour les jeunes, l’autre pour les adultes). Dans ces ateliers, on aborderait la dépendance et ses représentations au départ du thème du cannabis. A la suite de ces soirées-débat, de nouveaux constats devraient permettre d’ouvrir de nouvelles pistes d’actions.

Durby

Projet de recherche-action. Analyse / enquête sur la santé, les besoins et les ressources, puis mise en place d’une politique concertée de promotion de la santé avec des projets investissant les comités de village.

Enghien

Le projet prévoit la création d’un centre de documentation, d’outils pédagogiques et formations visant à offrir aux relais locaux un espace de formation permanente en promotion de la santé. Le projet repose sur une demande des acteurs locaux. Il prévoit un partenariat intersectoriel. L’opérateur semble avoir une bonne expérience des projets participatifs.
La Bibliothèque communale chargée de promouvoir le projet en assurera la pérennité.

Jette

Le projet vise à récolter la parole des personnes âgées afin de mettre en place des actions pour améliorer leur intégration dans le quartier et ainsi leur bien-être. Le projet se base sur une coordination des partenaires et la mise en place d’activités qui impliqueraient progressivement les personnes dans le projet. Planification sur deux ans.

Liège

Le projet vise le soutien d’un groupe de pilotage interdépartemental chargé d’organiser «la semaine santé» et d’une manière plus générale «d’influer sur la mise en œuvre de politiques efficaces». En 2003, certaines actions se sont déjà déroulées: les exemples donnés sont des informations générales principalement à destination du personnel communal (tuberculose, ostéoporose, séropositivité dans les pays en voie de développement).

Manage

Continuation et renforcement d’un projet déjà existant. Plusieurs actions s’additionnent autour du thème de la santé: une journée santé, un calendrier santé, une campagne d’information diététique, des fiches santé avec médiatisation accrue par rapport à ce qui a été fait jusqu’à présent. Un coordinateur permettra d’établir des liaisons entre les anciens et les nouveaux partenaires et avec la population, d’aller vers des populations ne participant généralement pas aux activités, de guider dans la mise en place de nouveaux projets. Le financement pendant deux ans permettra d’établir une structure plus élargie.

Mons

Le projet vise à mettre en place une plate-forme d’observation et d’actions en matière de santé. Il s’inscrit dans les démarches déjà initiées au sein de la commune (plates-formes d’observations et d’actions en faveur des personnes vulnérables).
Le projet, en ce qui concerne les conditions d’adhésion communale, est au stade des intentions. Il est néanmoins intéressant dans ses objectifs d’établir un inventaire des ressources, de discuter entre partenaires publics et privés (milieu associatif) en vue de mettre en place des synergies et des partenariats entre les différents acteurs. La création de groupes de travail au sein de la plate-forme devrait permettre dans un second temps de dégager des pistes d’actions.
La participation de la population est explicitement prévue.

Neufchâteau

Le projet repose sur l’identification de deux besoins:
– mieux repérer les ressources locales en matière de santé et d’accompagnement social en vue de créer une plate-forme sociale;
– réduire les inégalités de santé en prenant en compte leurs racines sociales: sensibilisation de la population mais aussi adoption de mesures visant à améliorer les conditions de vie en matière de logement, accès aux activités sportives et culturelles…

Quiévrain

Un projet d’éducation à la santé en milieu précarisé en faisant des enfants des ambassadeurs de santé. La Commune estime que la santé s’est dégradée chez les habitants de l’entité (alcoolisme, drogue, alimentation), faute de promotion de la santé. En sensibilisant les enfants des milieux précarisés, via les écoles et les associations en contact avec les familles, la Commune veut faire des enfants «des vecteurs de santé».

Soumagne

Le projet vise des personnes âgées: enquête pour analyser leurs besoins la première année (questionnaire et contacts directs); la seconde année sera consacrée à la mise en place des actions découlant de l’analyse. Ces actions seront évaluées par le Conseil communal des aînés mis en place au début de l’année 2004. Objectif: rendre la vie plus agréable aux personnes âgées (meilleure insertion, aide dans la vie quotidienne…).

Villers-Le-Bouillet

Le projet abordera trois quartiers défavorisés de l’entité. Au départ d’une analyse de la situation (et de la population) pertinente réalisée avec les groupes concernés, des pistes sont proposées en partenariat avec les habitants à partir d’une réflexion sur les constats des habitants et sur les éléments d’intervention possibles (appartenance au quartier, image du quartier, conflits intergénérationnels, relations quartier – extérieur.
L’implication de la commune, du CPAS et de la Société de logement est acquise.
Outre certaines améliorations déjà entreprises, un éducateur de rue va être engagé et un lieu de rencontre au centre des quartiers sera mis en place.
Informations fournies par le Cabinet de Nicole Maréchal
(1)Lire ‘Deuxième appel à projets communaux de promotion de la santé’ (n°183)

Migrations: grandir entre deux mondes

Le 30 Déc 20

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Pris entre la culture de leurs parents et les valeurs de l’école, les enfants de migrants ont souvent du mal à se structurer. Un mal-être auquel une clinique de psychopathologie transculturelle de la région parisienne tente de remédier.
A priori, c’est une clinique française comme les autres: la propreté de ses sols, le calme de ses couloirs décorés sobrement, une famille qui attend patiemment que l’on s’occupe d’elle, quelques livres, des contes pour enfants afin que le temps paraisse moins long aux plus petits…
Ici, les patients affluent de toute la région parisienne, voire de province, pour venir consulter dans la clinique transculturelle, spécialisée dans l’enfance et l’adolescence, située dans une annexe de l’hôpital Avicenne, à Bobigny dans la banlieue de Paris. Avicenne constitue un peu le dernier recours pour ces familles de migrants quand les démarches antérieures, auprès de médecins, psychothérapeutes ou assistantes sociales se sont révélées vaines. Ou quand elles éprouvent le besoin de parler des ‘choses du pays’, comme l’intercession des ancêtres. Et la liste d’attente est longue. Vingt-cinq nouvelles familles se présentent chaque semaine. Il n’est pas rare de devoir attendre une année avant d’obtenir un rendez-vous.
Les enfants de migrants sont doublement vulnérables: ‘ S’il n’y a pas de souffrance spécifique à ces enfants , ils ont en revanche deux fois plus de travail à faire que les autres pour se structurer’, explique la directrice du service, Marie Rose Moro . Car les parents, déjà plus touchés que la moyenne par les difficultés sociales, ne disposent pas toujours des outils nécessaires pour préparer leur progéniture à entrer dans un monde, à commencer par l’école, qu’eux-mêmes comprennent parfois mal, voire qu’ils ressentent comme hostile ou effrayant.
La migration génère non seulement des malentendus mais, surtout, elle malmène brutalement la transmission des savoirs entre les générations. Toutefois, ‘ le plus délicat , pour les enfants , n’est pas de se structurer dans un monde et dans l’autre mais de passer d’un monde à l’autre , d’apprendre à faire le lien’, souligne le Dr Moro.

Bilinguisme à deux vitesses

Une aventure périlleuse qui peut devenir angoissante et hasardeuse sans l’aide des ‘ passeurs culturels ‘, que constitue l’équipe des 70 thérapeutes d’Avicenne, venus de tous horizons, et des traducteurs (pour les patients qui préfèrent s’exprimer dans leur langue maternelle). Sans cette médiation, l’enfant risque de souffrir d’une perte de repères et de développer des troubles du comportement, des accès de violence ou même un repli identitaire qui, face à un sentiment de rejet, le conduit à vouloir ‘ imposer sa propre identité , quitte à la caricaturer ‘. Autant de souffrances qui mènent tout droit à l’échec scolaire. Un véritable ‘ gâchis ‘ aux yeux du Dr Moro.
Mamadou (8 ans), lui, s’est réfugié dans le mutisme. À l’école, il ne parlait que très peu, bien que la maîtresse attende de lui qu’il se montre curieux et pose des questions. Mais son père, imprégné des traditions bambara du Mali, son pays d’origine, jugeait qu’un enfant ne doit pas questionner mais attendre d’être mûr pour comprendre. Alors, pris entre ces deux logiques contradictoires, face à un dilemme visiblement insoluble, le petit Mamadou a préféré se taire en classe plutôt que d’avoir à choisir entre les deux mondes. Avec l’aide des thérapeutes, il a progressivement appris à faire co-exister en lui ces deux mondes, familial et scolaire, si différents, et à aller et venir entre les deux, sans avoir l’impression de renier son père ou de tourner le dos à son identité d’origine. Ce qui, peu à peu, lui a permis de s’ouvrir et de progresser en classe. En général, il suffit de trois mois pour débloquer ces problèmes de mutisme.
Autre exemple: le bilinguisme. ‘ Il est valorisé quand il s’agit du japonais , de l’anglais ou de l’allemand mais vu comme une difficulté , un obstacle , dès que l’enfant parle le soussou ou le wolof ‘, poursuit le Dr Moro. Des études ont pourtant montré que le bilinguisme, quel qu’il soit, améliore les capacités langagières. Mais face aux préjugés extérieurs, qui leur renvoient une image dévalorisante d’eux-mêmes, ‘ moins de 10 % des enfants de migrants sont bilingues , parlent un français approximatif et s’appauvrissent ‘, déplore la psychiatre.

Un défi pour l’école française

Et selon cette dernière, loin de concerner quelques individus déboussolés en mal de reconnaissance, ces questions constituent un véritable ‘défi’ pour l’école française dans son ensemble. La thérapeute invite le pays à repenser, sans le mettre en cause, son principe fondateur qu’est l’universalité républicaine, trop abstrait pour que l’égalité de principe puisse s’opérer dans les faits. Car selon les chiffres officiels, en France, plus de 4 millions des 58,7 millions d’habitants sont d’origine étrangère, dont 1,7 million viennent d’Afrique, avec un solde migratoire qui voit en moyenne 50.000 nouveaux venus chaque année. C’est relativement peu mais assez, en ces temps de mondialisation, pour rendre le métissage inéluctable.
Le Dr Moro invite donc l’école à intégrer ces réalités, à être plus ‘ à l’écoute ‘ des différentes cultures qui la peuplent et à faire preuve de ‘ créativité ‘ afin de s’enrichir de cette altérité, au lieu d’en faire une source de conflit. Parmi ses propositions concrètes: des ateliers de langues ou d’histoire censés ouvrir (tous) les enfants sur le monde… Mais, pour l’instant, il est peu probable que le système scolaire s’attelle à de telles innovations alors qu’il est déjà en crise avec la suppression annoncée de plusieurs milliers de postes d’enseignants et d’aides éducateurs dans les deux années à venir.
Chrystelle Carroy , InfoSud – Syfia
Pour en savoir plus: Enfants d’ici venus d’ailleurs , Marie Rose Moro (Hachette Littératures, 2002)

Un premier bilan complet du démarrage du programme mammotest

Le 30 Déc 20

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L’Agence Intermutualiste (AIM) est une asbl dont le travail consiste à traiter les données de différents organismes assureurs, à les analyser et à établir des recommandations pour améliorer le système des soins de santé. Elle publie aujourd’hui son deuxième rapport sur le programme de dépistage du cancer du sein, couvrant la période de 1999 à 2002.
En accord avec les recommandations de L’Europe contre le cancer (1) , le programme de dépistage du cancer du sein a pour but de dépister toutes les femmes âgées de 50 à 69 ans une fois tous les deux ans au moyen d’une mammographie de dépistage. En Flandre, le dépistage du cancer du sein par mammographie a débuté le 15 juin 2001. En Wallonie et à Bruxelles, les programmes ont commencé un an plus tard, en juin 2002 (2).
Le premier rapport de l’Agence intermutualiste, publié en 2002 avait, à l’époque, suscité beaucoup d’intérêt de la part des services et institutions en charge de l’organisation et de l’évaluation de ce programme de dépistage sur le terrain. Les organismes assureurs disposent en effet de données auxquelles les centres de dépistage n’ont pas accès, telles que les caractéristiques sociales des femmes, les mammographies hors campagne et les échographies du sein.
Dans son deuxième rapport, l’Agence intermutualiste développe tout d’abord une analyse prudente du taux de couverture atteint grâce au programme en comparant la période 1999-2000 avec la période 2001-2002 au cours de laquelle les différentes campagnes ont démarré dans les trois régions du pays. Ensuite, elle étudie en détails les examens complémentaires réalisés suite à une mammographie avant de jeter un coup d’œil aux coûts associés au dépistage du cancer du sein.
L’Agence intermutualiste espère que les différents acteurs de terrain considéreront ce rapport comme un instrument utile afin d’évaluer leurs activités et de les améliorer si nécessaire.

Amélioration sensible de la couverture totale

A partir de juin 2001, un code spécifique de la nomenclature en soins de santé a été prévu pour la mammographie de dépistage (ou mammotest ), venant s’ajouter à l’ancienne mammographie ‘diagnostique’. Cet examen de dépistage peut seulement être exécuté dans des centres radiologiques agréés où appareillage, méthodes de travail et personnel doivent satisfaire à de sévères exigences de qualité. En outre, la mammographie de dépistage doit être obligatoirement accompagnée d’une deuxième lecture indépendante. L’objectif dans le cadre d’un dépistage organisé du cancer du sein est de substituer à la mammographie diagnostique existante cette mammographie de dépistage, qui offre de meilleures garanties de qualité. Les résultats présentés dans ce rapport laissent entrevoir que dans la pratique ce changement ne s’est pas encore fait de manière satisfaisante.
Etant donné que la situation est encore en pleine évolution, ce rapport désigne par ‘couverture totale’ le taux de couverture quel que soit le type d’examen utilisé: mammographie de dépistage ou mammographie diagnostique. Voici ce que cela donne:

Couverture totale par région et par période de 2 ans

1999-2000 2001-2002
Bruxelles-Capitale 45% 52%
Flandre 33% 49%
Wallonie 45% 49%
Total 38% 50%

Source: Agence intermutualiste, juin 2004La couverture totale en Belgique passe de 38% en 1999-2000 à 50% en 2001-2002. On peut donc estimer qu’en Belgique, une femme sur deux appartenant au groupe cible a été effectivement examinée. Plus de 80% de ces femmes se font dépister une seule fois tous les deux ans, comme prévu par le programme. A côté de celles-ci, 15% des femmes se font examiner une fois par an. Grâce à la campagne de dépistage, la Flandre rattrape son retard par rapport à Bruxelles et à la Wallonie.
Au cours de la période 1999-2000, nous constatons que la couverture totale est plus grande chez les femmes plus jeunes (50-54 ans). En 2001-2002, la couverture croît plus fortement chez les femmes plus âgées et dans le groupe des pensionnées. Ceci réduit la différence entre les groupes d’âges mais ne l’efface pas entièrement.

Mammographie diagnostique ou mammotest?

Depuis le début de la campagne, un transfert de la mammographie diagnostique vers la mammographie de dépistage réalisée dans les centres reconnus s’opère en Flandre. Lors du second semestre de 2002, en Flandre, presque la moitié des mammographies ont eu lieu dans un centre agréé, et ont donc été suivies d’une seconde lecture.
En Wallonie, où la campagne n’a débuté que fin 2002, le rapport est seulement de 7,5%. La Région de Bruxelles-Capitale occupe une place intermédiaire avec 23%.
Un des indicateurs de l’efficacité de la campagne est le pourcentage de cas où on fait des examens d’imagerie médicale complémentaires (échographie, IRM) après une mammographie: selon L’Europe contre le cancer , cela devrait se produire dans moins d’1 cas sur 20. Et en effet, en 2002, un examen complémentaire n’est réalisé en Belgique que pour 5% des mammographies de dépistage, conformément aux critères de qualité européens.
Par contre, 79% des mammographies diagnostiques sont suivies d’un examen complémentaire, principalement par une échographie du sein. Vu leur grand nombre, nous devons pourtant conclure que ces examens complémentaires sont bien utilisés de façon prépondérante à des fins de dépistage. Une telle approche diagnostique dans une population en grande majorité saine doit inévitablement mener à un très grand nombre de résultats faussement positifs et à leur cortège d’inquiétude et de médicalisation inutile, sans pour autant que la qualité et le suivi soient suffisamment contrôlés. En outre, la sécurité sociale paie ici un coût élevé injustifié: actuellement, la combinaison d’une mammographie diagnostique et d’une échographie coûte deux fois plus qu’une mammographie de dépistage!En résumé, nous pouvons dire qu’une évolution favorable est constatée en ce qui concerne la couverture et le recours à l’examen de dépistage de qualité. Toutefois, il reste encore du chemin à parcourir. Médecins et population doivent être mieux informés quant aux garanties de qualité qu’offre un bon dépistage, ainsi qu’aux dangers d’une utilisation inappropriée de l’approche diagnostique dans une population de femmes en grande majorité saines.Kristel Degauquier, Anne Remacle, Valérie Fabri et Raf Mertens, Programme de dépistage du cancer du sein, Période 1999 – 2002, Rapport n°2 de l’Agence intermutualiste. Adresse: IMA-AIM, chée St Pierre 373, 1040 Bruxelles.
Le rapport complet peut être téléchargé à partir du site des différentes mutualités: https://www.mc.be , https://www.mutualites-neutres.be , https://www.mutsoc.be , https://www.mut400.be , https://www.mloz.be , https://www.caami-hziv.fgov.be . Il peut aussi être consulté sur le site https://www.cin-aim.be (mise en ligne prévue en septembre 2004).
(1) L’Europe contre le cancer est un programme de l’Union européenne basé sur un partenariat multidisciplinaire entre scientifiques, autorités, organisations non gouvernementales, groupes de pression et médias. Son objectif est de soutenir la prévention et le dépistage du cancer et de contribuer à la formation et à l’information en matière de cancer.
(2) Lire notamment ‘Evaluation du programme mammotest: premiers chiffres’ (n)188) et ‘Evaluation du programme mammotest: complément’ (n°189)

Prenons le temps de vivre ensemble’. Un slogan pour deux campagnes de promotion de la bientraitance

Le 30 Déc 20

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Le contexte que nous connaissons actuellement autour de la maltraitance est empreint, à juste titre, d’une très forte émotion. Le procès Dutroux a envahi notre quotidien pendant plusieurs mois, et pouvait dans une certaine mesure donner une fausse image de la maltraitance. Très clairement, les données statistiques démontrent que les faits de maltraitance sont commis majoritairement au sein de la famille ou de l’entourage proche de l’enfant.
Un pervers du type «Dutroux» est donc heureusement exceptionnel. Je tenais absolument à donner une autre résonance à ce qui est apparu un peu trop rapidement comme étant le cas représentatif de la maltraitance des enfants. Afin d’étayer cette réflexion, il suffit de se pencher sur les données recueillies par les 14 équipes S.O.S. Enfants. Les pères représentent 18 % des auteurs de maltraitance, les mères 13,5%, le couple parental 26%, un membre de la famille élargie 7%, un ami de la famille ou du voisinage 3,5%… et un inconnu en dehors de la sphère familiale et/ou proche de la victime seulement 4,5%
Il est de la responsabilité du ministre chargé de l’aide aux enfants victimes de maltraitance de mettre en œuvre les politiques qui permettront d’une part de prévenir la maltraitance et d’autre part d’assurer une prise en charge optimale des victimes.
Il m’a donc semblé indispensable de diffuser certains outils et d’élaborer une campagne spécifique à destination des enfants. Mais ces outils ponctuels ne pourraient être utiles et efficaces sans une assise. C’est pourquoi depuis 2000, j’ai tenu à mettre en place une véritable politique de prévention en matière d’aide aux enfants victimes de maltraitance, à l’attention des professionnels mais aussi du grand public.

La campagne Yapaka, vers les adultes

Parce que prévenir la maltraitance, c’est agir sur la parentalité, sur les relations entre parents et enfants, il s’agissait de sensibiliser les parents qui ont une responsabilité éducative à l’importance d’un dialogue, d’une certaine disponibilité envers leurs enfants. Adultes et enfants ne vivent pas les choses de la même façon ni au même rythme, il est sans doute utile de le rappeler sans pour autant culpabiliser. Il me paraît évident que certaines situations de vulnérabilité générées par le quotidien, comme le stress, les difficultés financières, le manque de temps, les conflits de couple… peuvent entraîner des comportements de négligence ou de violence vis-à-vis des enfants.
Destinée au grand public, la campagne «Yapaka» a pour objectif de remettre au cœur des familles la nécessité de parler, de prendre un peu de temps, pour se comprendre et ainsi mieux vivre ensemble. Fondés sur une approche globale et positive du développement de l’enfant, les spots audiovisuels, le magazine «Yapaka» distribués auprès de 750.000 familles et professionnels, et les autocollants qui invitaient les enfants à créer eux-mêmes des messages ont ainsi été élaborés sur base de dialogues de la vie quotidienne entre adultes et enfants.
En avril 2002, une première diffusion de spots, à partir de huit scènes de la vie quotidienne, «mises en bulles», poursuivait l’objectif de sensibiliser les adultes à la différence de rythme, de regard et de perception entre adultes et enfants. Cette mise en perspective de la relation du parent avec son enfant dans un contexte de tous les jours invitait à une prise de recul, un questionnement sur sa façon d’être.
Soutenir des relations parents-enfants harmonieuses favorisant le bon développement de l’enfant prévient des situations ou des évènements de maltraitance qui peuvent survenir dans des contextes à risque ou des situations de fragilité.
En continuité, une seconde série de spots ouvre à la parole cette année. Huit témoignages donnent le ton et illustrent le fait que parler n’est pas dangereux. En parler, demander un coup de main, offrir son aide, solliciter une personne compétente… sont autant d’actes vers la bientraitance. Inviter à la parole, à des conseils extérieurs et faire percevoir que dans certains cas, c’est grâce à l’aide apportée par un ami, un voisin, un professionnel… que l’on a pu se sortir d’une situation compliquée. Demander de l’aide n’a rien de honteux, la compétence parentale et éducative se construit dans le recours aux autres, à l’autre parent, à sa famille, son réseau, ainsi qu’aux professionnels.
Parallèlement, cette campagne véhicule également un autre message: ce sont bien les adultes qui sont responsables du bon développement de l’enfant, de son bien-être. C’est sur ces constats que se fonde une autre approche de la prévention de la maltraitance par la promotion de la bientraitance. Le slogan «Prenons le temps de vivre ensemble» souligne également la confiance en l’adulte et table sur ses potentialités de parent et d’éducateur.
Evoquer la responsabilité des adultes, c’est aussi, en filigrane, évoquer la sécurité des enfants. Certaines anciennes campagnes de prévention visaient à alerter l’enfant, à développer sa vigilance… Bref, à le rendre responsable. L’analyse de ces campagnes a fait prendre conscience du poids trop lourd qui pesait sur les épaules des enfants.
De nombreuses évaluations portant sur des actions de prévention auprès des enfants attestent, non seulement, de leurs difficultés à se protéger en situation de risque mais aussi des effets secondaires négatifs que pouvaient générer ces campagnes. De tels effets négatifs, comme des manifestations d’angoisse, ont ainsi été très clairement identifiés suite à une information que les enfants n’étaient pas capables d’entendre ni de comprendre car il était tout simplement trop tôt, les enfants n’étant pas encore suffisamment développés sur le plan psychologique et affectif.
Avant 2000, et cela durant plus de 15 ans, des actions de prévention ont été développées mais de façon ponctuelle et locale. Ces actions, même si certaines étaient positives, restaient limitées dans leurs effets et dans leurs relais. On évitait, par exemple, de replacer l’action dans son contexte: on parlait ainsi d’abus sexuel sans parler de relation affective et sexuelle. La diversité et la disparité des actions ainsi que le manque de stratégie pédagogique étaient même préoccupantes quant aux conséquences (et inconséquences) des messages et des effets.

Une vie de chien? , pour les enfants

Si l’inefficacité de la grande majorité des actions évaluées a été démontrée, il n’empêche que l’on doit reconnaître à l’enfant une part active et une capacité à développer lui-même une action de protection.
Auprès des jeunes, il convenait donc d’imaginer une action à leur niveau de compétence et d’aptitude. En effet, l’enfant est acteur de son histoire. Il est un interlocuteur indispensable de toute action pensée à son profit… mais dans une démarche ajustée à ses capacités et à ses moyens.
Ces réflexions ont abouti à une œuvre : «Une vie de chien?», qui s’inscrit en toute «simplicité» dans la vie quotidienne de l’enfant.
Distribué à tous les élèves de 4e primaire, ce livre contient l’information quant aux droits de l’enfant et un carnet d’adresses qui permet à chaque enfant de constituer son répertoire de ressources et d’aide. Ce carnet d’adresses invite, en effet, l’enfant à faire le point sur son réseau de relations et d’aide, d’abord à partir de ses ressources familiales et amicales mais aussi à partir d’un réseau de professionnels auxquels il peut faire appel. Cette information a été donnée par les enseignants qui ont été chargés de la distribution du livret dans le courant de l’année scolaire 2003-2004. L’enseignant dispose, par ailleurs, d’une lettre d’information explicative quant à la démarche et ses objectifs ainsi que d’une liste des différents services accessibles à l’enfant.
«Une vie de chien?» propose à l’enfant, mais aussi à l’adulte, de s’inscrire dans la démarche que je viens d’évoquer. En d’autres termes, il importe d’impliquer l’enfant à partir de son questionnement au quotidien, à partir de ses doutes, de ses craintes mais aussi de ses ressources et de celles de son environnement. Ce sont les illustrations qui permettent à l’enfant et à l’adulte d’entrer dans un univers de questions. En partant de sa propre réalité, chacun, enfant et adulte, pourra construire une réflexion.
Ce livre a été offert à 60.000 enfants, autant d’enfants qui ont relayé ce message en famille, entre amis… participant ainsi à l’ouverture de la parole.
C’est l’attention accordée aux enfants, à leurs parents, à la famille dans le respect de leur histoire qui participe à une véritable prévention en terme de bientraitance.
En partenariat avec RTL, Club RTL, Bel RTL, Nostalgie et N.R.J. ainsi que les télévisions communautaires, j’ai tenu à donner un relief supplémentaire à ce livre. C’est ainsi qu’ Une vie de chien ? a donné naissance à huit spots télé et radio avec le même slogan final que celui de la campagne destinée aux adultes, «Prenons le temps de vivre ensemble».
L’idée de la réalisation d’une version radio – télé de l’outil vient des enfants et des adultes, enseignants et parents. Le partage d’un repas, l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite sœur, le respect de son intimité, le temps accordé pour rêver… autant de réalités qui permettent d’aborder la prévention de la maltraitance de manière globale et non stigmatisante, en parlant du bien-être de l’enfant dans son développement au quotidien. Dans le contexte du procès de Marc Dutroux, cette approche répondait au besoin de rassurer l’enfant, de lui donner un cadre sécurisant. C’est pourquoi nous avons pensé à mettre en images et en mots ce livret.
En effet, l’accueil favorable par l’ensemble des classes l’est aussi par la réaction enthousiaste qu’il a suscitée auprès de tous: des enfants qui retiennent principalement les thèmes des câlins et des disputes jusqu’aux enseignants qui sont touchés par des thématiques telles que la violence et la colère.
Des parents et grands-parents adressent des demandes afin d’en parler avec les frères et sœurs. L’utilisation et le plaisir qui se dégagent autour du livre Une vie de chien ? traduisent l’importance de l’aspect relationnel entre adultes et enfants et de la confiance entre eux. «Prenons le temps de vivre ensemble» prend ici tout son sens.
Avec le nouveau décret relatif à l’aide aux enfants victimes de maltraitance qui renforce les équipes S.O.S. Enfants dans leurs missions de prévention et de prise en charge, avec le livre Procès Dutroux , penser l’émotion , recueil de trente textes qui nous invitent à la réflexion et avec ces campagnes Yapaka et Une vie de chien ?, ma volonté était de travailler à une véritable démarche de prévention au niveau de toute la Communauté française par le biais d’un programme de fond sur lequel s’appuient des actions plus spécifiques et plus ponctuelles lorsque des événements l’imposent.
Nicole Maréchal , ancienne ministre de la santé de la Communauté française
Pour tout renseignement sur les campagnes et les outils: https://www.yapaka.be

Des généralistes préviennent…

Le 30 Déc 20

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Le cœur de 90 médecins généralistes et de 9000 de leurs patients bat au rythme de la prévention. Initié et soutenu par la Communauté française, le projet pilote de dépistage et de prévention du risque cardiovasculaire global bat son plein depuis le début de cette année, avec pour objectif plus large une évolution des pratiques en médecine générale vers plus de prévention et de promotion de la santé. Premiers résultats attendus dans les semaines qui viennent.
Responsables d’un décès sur trois, les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité en Communauté française. A l’origine, des facteurs de risque liés à notre style de vie tels que la consommation de tabac ou d’alcool, l’obésité, le stress, la sédentarité ou d’autres facteurs comme l’hypertension, l’hypercholestérolémie et le diabète.
En 2003, Nicole Maréchal , alors ministre de la Santé pour la Communauté française, avait fait de la prévention de ce problème de santé publique son cheval de bataille. « Les facteurs impliqués dans l’apparition des troubles cardiovasculaires ayant été clairement identifiés , il faut maintenant les combattre à la racine’ , chercher à influencer certains styles de vie et proposer un dépistage adapté et ciblé », estimait-elle.
Un combat d’envergure auquel la ministre a tenu à associer le médecin généraliste, dont le rôle « est reconnu à la fois par la population qui voit en lui un scientifique de proximité librement choisi et par les décideurs politiques et les responsables sanitaires qui le considèrent comme le maillon essentiel de la réussite des actions de santé ». C’est ainsi qu’était lancé, en octobre 2003, un «Programme de prévention cardiovasculaire en médecine générale», en association avec différents partenaires (Société scientifique de médecine générale, Fédération des maisons médicales, Centres universitaires de médecine générale de l’ULB, l’ULg et l’UCL, Observatoire de la Santé du Hainaut, Ecole de Santé Publique de l’UCL, Question Santé, Forum des Associations de généralistes…).
Après une phase préparatoire (concertation, état des lieux des actions de prévention menées en Communauté française, définition des fonctions nécessaires à un programme de prévention cardiovasculaire, identification des intervenants potentiels), une phase expérimentale met, aujourd’hui encore, à contribution quelque 90 médecins traitants, volontairement impliqués. Objectif: l’identification et le suivi du risque cardiovasculaire global.

Un projet

Concrètement, huit associations de médecins (deux de plus que prévu initialement), réparties sur tout le territoire de la Communauté française, ont répondu à l’appel. Dans chacune d’elles, 10 à 15 généralistes ont accepté de participer au projet, soit 90 généralistes impliquant 9000 patients. Après avoir suivi une formation au dépistage cardiovasculaire global et à la prise en charge des facteurs de risque, ces médecins généralistes ont pour mission de sensibiliser, avec leur accord préalable, 90 patients réguliers de 30 à 75 ans pris au hasard (3 patients successifs d’une même consultation, trois fois par semaine, entre le 15 février et le 15 mai 2004) et de recueillir soigneusement, sur base d’un protocole, non seulement les données sanitaires de ces derniers mais aussi des «élément de facilitation en vue d’une amélioration des pratiques», à commencer par la réaction de la patientèle à l’initiative et ce qu’elle évoque comme facteurs freinant ou favorisant la prévention.
Pour son fonctionnement, chaque groupe a reçu un budget de 7500 euros.

Un Centre coordinateur

En amont de ce long parcours, il y a la mise en place l’an dernier en Communauté française d’un Centre expérimental de référence pour la promotion cardiovasculaire en médecine générale, réunissant les différents associés au projet (lire plus haut). Le pilotage de ce Centre de référence a été confié à la SSMG et à la Fédération des maisons médicales, avec l’appui de l’expertise du Professeur Benoît Boland .
Après avoir défini un consensus de tous les partenaires sur les recommandations en prévention cardiovasculaire en médecine générale, le Centre a rédigé un protocole détaillé reprenant les paramètres à relever en terme de dépistage (tabagisme, sédentarité, alimentation, tension artérielle, poids, indice de masse corporelle, risque cardiovasculaire global, cholestérol et glycémie).
Il a ensuite organisé les formations destinées aux généralistes participants. Pour ce faire, chaque association a envoyé deux ou trois délégués dans les réunions de formation, délégués qui ont ensuite servi de formateurs-relais auprès de leurs confrères participants.
Chargé de centraliser les données, le Centre de référence devrait tirer ces jours-ci un premier bilan de l’expérience avant de développer des outils d’information adaptés, à destination des patients et des professionnels concernés par la prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire (généralistes, cardiologues mais également diététiciens, kinés, psychologues et autres professionnels de première ligne).

Des outils pratiques

Pour les aider dans leur tâche de dépistage et de prévention, les généralistes participants disposent de deux outils.
Une plaquette qui leur indique «Comment déterminer le risque cardiovasculaire (RCV) global». Une démarche rapide, centrée sur l’anamnèse et l’examen clinique, destinée à être immédiatement intégrée à la pratique courante. En posant simplement quelques questions précises, le médecin peut regrouper ses patients dans trois catégories: les patients à faible risque cardiovasculaire, les patients à haut risque et les patients à risque intermédiaire ou moyen, dont le risque est à déterminer par un examen supplémentaire (prise de sang). « Pour cette première phase pilote , il a été demandé aux médecins de suivre en priorité les patients à haut risque en danger potentiel d’avoir un accident cardiovasculaire sérieux dans les dix prochaines années », explique le Dr Jean Laperche , représentant de la Fédération des maisons médicales (FMM) et l’un des responsables du projet. Ces patients à risque sont donc invités à une deuxième consultation centrée uniquement sur la ‘santé cardiovasculaire’.
Pour ce faire, un deuxième outil a été créé, un guide d’entretien qui suggère au médecin qui revoit le patient à risque, quelques questions lui permettant de rencontrer le monde du patient, de parler avec lui de ses projets de vie, ses envies de changement, ses possibilités de changement, ses préférences dans le choix des sujets de discussion (tabac, alimentation, activité physique, excès de poids…). Il s’agit ici d’un outil destiné à aider le médecin dans l’accompagnement de son patient. L’objectif étant bien entendu de trouver des pistes permettant de travailler plus avant avec le patient autour des facteurs de risque qui le concernent, dans une négociation commune et une confiance réciproque.

Des outils d’évaluation

En parallèle de ces consultations, les médecins sont invités à répondre à des questionnaires dont les résultats permettront d’évaluer l’acceptabilité par les médecins généralistes de la stratégie mise en place et des outils conçus pour l’appliquer, ainsi que la faisabilité de cette démarche. L’impact à court terme de ce projet devrait être analysé très bientôt.
Au niveau des patients, Jean Laperche rappelle que « d’autres études ont déjà montré que les patients sont très contents que le médecin s’intéresse à eux et à autre chose que le motif initial de la consultation . Ils aiment bien qu’on les prenne en charge et qu’on s’intéresse à leur santé .» Selon lui, « quand un patient est prêt et qu’il estime que c’est une priorité dans sa vie , il revient facilement . Tant qu’il n’est pas prêt , il ne faut pas le lui proposer . Mais s’il a envie de faire quelque chose pour son poids ou pour son cœur , il revient pour en parler . Le médecin peut alors petit à petit voir ce qu’il y a moyen de mettre en place pour la fois suivante : une consultation chez une diététicienne , un peu d’exercice physique Des petites choses toutes simples mais qui ont été validées dans la littérature et qui apportent des bénéfices rapidement et visiblement , ce qui est encourageant pour le patient
Par contre, côté médecins, il semblerait que la cause ne soit pas encore entièrement gagnée. « Les médecins sont un peu déstabilisés parce qu’ils ne sont pas habitués à ce type d’approche », explique le Dr Laperche. « Outre le fait qu’une certaine résistance persiste encore dans le chef des praticiens en matière de prévention , les médecins adhérant au projet doivent assumer une surcharge de travail ( notamment administratif ), et une consultation supplémentaire essentiellement axée sur l’entretien et la communication dans laquelle certains sont parfois un peu moins à l’aise
L’un des objectifs de ce projet est d’ailleurs aussi de faire naître des changements dans le comportement du généraliste. Un ‘questionnaire sur la prévention cardiovasculaire’ (remplis par les médecins participants en début et en milieu de parcours) permettra ainsi d’évaluer l’évolution des connaissances, attitudes et pratiques déclarées. Enfin, des baromètres (intérêt, utilité, utilisation…) et un ‘questionnaire d’évaluation finale’ seront soumis en octobre prochain à l’ensemble des médecins participants.

Une philosophie au long cours

« C’est vraiment une dynamique positive d’approche centrée sur la personne », explique le Dr Jean Laperche. « Les généralistes sont notre premier public . On leur donne des outils pour les aider et on leur fait confiance . Le généraliste est habitué à faire confiance au patient . Nous , nous faisons confiance au généraliste .» Une philosophie d’action plus efficace que les contraintes ou les interdits, et par ailleurs appréciée, commente le Dr Laperche.
Cette expérience de prévention cardiovasculaire devrait, à terme (c’est-à-dire en septembre 2005 selon le calendrier initial), être généralisée à l’ensemble de la Communauté française. Mais le Dr Laperche reste prudent. « On va d’abord élargir le projet à quatre autres groupes de praticiens et suivre ces 12 groupes à partir de septembre 2004 .» Outre les inévitables impératifs budgétaires, Jean Laperche prône pour une évolution progressive, préférant la diffusion en tâche d’huile aux grands chambardements…
En aval devraient également intervenir les autres professionnels – médecins spécialistes et autres intervenants de première ligne. Un Comité scientifique, dont la composition reflète les propositions de chacun des partenaires de 2003, se penchera sur ce projet début octobre 2004. « On devra aussi établir des liens avec les autres centres de référence : dépistage du cancer du sein , sida …», explique Jean Laperche. « Ca paraît éloigné mais quand on dépasse l’aspect maladie ( cancer , cœur …), on se rend compte qu’en amont , les déterminants de santé sont les mêmes : tabac , style de vie , activité physique , etc . On a intérêt à avoir un socle commun pour une approche globale de la santé et qui passe toujours aussi par la médecine générale . C’est vers ça que l’on tend maintenant . Et il faudra que ça ait une pertinence et une cohérence pour le généraliste qui va être sur sollicité …»
Un programme en parfaite harmonie avec le décret de promotion de la santé revu l’an dernier et qui intègre maintenant la médecine préventive. « Ce décret oblige les acteurs à se concerter », remarque le Dr Jean Laperche. « Si pour les médecins , les obstacles réels sont nombreux quand ils veulent faire de la prévention , au niveau des mentalités , le grand public , les patients sont prêts , ils sont demandeurs . L’adage Mieux vaut prévenir que guérir’ fait partie de la culture . Le problème se pose au niveau des médecins qui sont d’abord préoccupés par les maladies , qui veulent une réponse concrète à une demande immédiate . , il faut tout doucement les sensibiliser à ne pas donner qu’ une réponse immédiate et penser aussi à des choses que les gens ne demandent pas . Ca bouge un peu mais il y a encore du chemin à faire …»
Myriam Marchand
Centre expérimental de référence pour la promotion cardiovasculaire en médecine générale, c/o SSMG, rue de Suisse 6, 1050 Bruxelles. Courriel: ssmg@ssmg.be.

Sans latex t’es déjà mon ex. Une campagne de prévention du sida et des maladies sexuellement transmissibles à l’attention des jeunes

Le 30 Déc 20

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La campagne en quelques mots

La campagne ‘Sans latex t’es déjà mon ex’ est un programme destiné aux jeunes afin de les informer et de les sensibiliser sur les risques du sida mais aussi des autres maladies sexuellement transmissibles (MST) et de rappeler l’importance de l’utilisation du préservatif. Cette campagne a la particularité d’avoir été construite en étroite collaboration avec un groupe de jeunes âgés de 15 à 20 ans.
Cette campagne vise trois publics: les jeunes hétérosexuels belges, ceux d’origine étrangère et les jeunes homosexuels.
En résumé, cette action se décline selon plusieurs axes:
– la diffusion en Communauté française de 200.000 pochettes ‘In Ze Pocket’, contenant un préservatif et des informations sur la prévention du sida et des maladies sexuellement transmissibles;
– la diffusion de trois spots TV et radio sur les chaînes de la Communauté française visant à rappeler l’importance de l’utilisation du préservatif lors des relations sexuelles, que l’on soit hétérosexuel, homosexuel, belge ou d’origine étrangère. Ces spots font également la promotion des pochettes que l’on peut commander via le 0800/20 000 ou via https://www.preventionsida.org ;
– la diffusion de trois visuels déclinés en affiches, annonces dans certains magazine et cartes postales Boomerang en Communauté française et à la côte belge;
– des animations de l’Ecole du Cirque lors de divers festivals de musique;
– le renforcement de la distribution gratuite de préservatifs via les organismes de prévention du sida: 1.000.000 de préservatifs seront distribués gratuitement en 2004.

Une concertation multiple

Avec le secteur de la prévention du sida et de la promotion de la santé

La Plate-Forme Prévention Sida a pour objectif de mettre en place un processus de concertation avec les acteurs particulièrement sensibles à la prévention du sida. Ensemble, ils travaillent à la réflexion, la conception et la mise en place d’outils et de campagnes de prévention.
Pour la réalisation de la campagne ‘Sans latex t’es déjà mon ex’, la Plate-Forme Prévention Sida a travaillé en collaboration avec les associations suivantes:
– Ex æquo, association de prévention du sida et des MST à l’attention des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes;
– Sireas, association de prévention du sida et des MST à l’attention des personnes migrantes;
– le Centre local de promotion de la santé de Bruxelles;
– Modus Vivendi, association de prévention du sida et des MST à l’attention des usagers de drogues;
– Le Centre de planning familial Séverine;
– l’asbl Question Santé.
Il est également important de souligner que l’agence de communication Euro RSCG a participé depuis le début à la réflexion sur la campagne et a pu ainsi alimenter sa maturation quant à son contenu et sa forme.
Les informations médicales ont été supervisées par des médecins du Centre de référence sida de l’ULB (Hôpital Saint-Pierre).

Implication des publics cibles

Comme déjà évoqué plus haut, cette campagne a été pensée et construite grâce à l’implication d’une quinzaine de jeunes âgés de 15 à 20 ans.
En effet, au début du projet, nous avons, avec l’aide de certaines associations, réuni un groupe de jeunes qui étaient intéressés par le sujet et qui représentaient le public cible de cette nouvelle campagne. Durant plusieurs semaines, à raison d’une après-midi par semaine, nous avons tenté de définir ensemble un maximum d’éléments qui se rapprochaient le plus de leur réalité, de leurs questions, de leurs envies. La dynamique du groupe, la richesse des échanges, l’ouverture, la créativité et l’esprit critique de ces jeunes qui se sont investis jusqu’au bout nous ont été d’un précieux apport dans la réalisation de la campagne.
C’est donc ce groupe, en concertation avec les associations et la Plate-Forme Prévention Sida, qui a déterminé le contenu mais aussi la forme de la campagne: les textes, slogans et visuels ont été discutés à chaque étape avec cet échantillon du public cible.

Mobilisation des acteurs et des pouvoirs publics

Les recommandations finales de la Conférence de lutte contre le sida, qui s’est déroulée le 30 mars dernier après un important travail préparatoire, viennent de paraître.
On en retiendra 4 spécifiques:
– contribuer à l’amélioration de la politique et des pratiques de prévention en tenant compte des pratiques à risques et des situations de vulnérabilité;
– améliorer les conditions d’accès à la prévention, aux soins et à l’accompagnement;
– contribuer à la réduction des discriminations et de leurs conséquences à l’égard des personnes séropositives;
– contribuer à l’amélioration de la cohérence, de la pertinence et de la qualité de la politique et des pratiques de dépistage.
A côté de cela, des recommandations en matière d’intersectorialité, de développement de réseaux et de formation sont aussi faites.
La plaquette de 24 pages ‘Conférence de lutte contre le sida. Pour une mobilisation des acteurs et des pouvoirs publics’ (juin 2004) peut être obtenue auprès de Sabine Piérard, à la DG Santé (02 413 26 34, sabine.pierard@cfwb.be).

Pour chacune des problématiques retenues, trois types de recommandations sont proposées: mise en évidence de principes éthiques et de logiques d’action; pratiques existantes à aménager; nouvelles orientations des pratiques et des politiques. Dans la mesure où des publics spécifiques sont visés dans le cadre de cette action, la Plate-Forme Prévention Sida a proposé à Ex æquo et à Sireas de pré-tester les scénarios des spots.
Ex Aequo et Sireas font partie du groupe de travail qui a suivi l’élaboration de la campagne et ces deux associations étaient donc totalement impliquées dans sa conception.
Pour les deux associations, les pré-tests se sont faits en deux étapes:
– présentation (par un permanent de la Plate-Forme) de la campagne dans son ensemble et des diverses déclinaisons envisagées au niveau de la promotion à l’équipe et discussion;
– pré-tests auprès du public cible de l’association (groupe composé d’environ 8 à 10 personnes âgées de 17 à 35 ans). On notera la difficulté de recruter des jeunes appartenant à ces deux publics cibles, surtout dans le public homosexuel.

Pourquoi une campagne de prévention des MST?

Depuis peu et partout en Europe, on assiste à un élargissement de l’objet social des associations de lutte contre le sida puisque le thème d’une campagne d’information et de prévention n’est plus uniquement le sida mais bien l’ensemble des MST. Cette évolution est normale, certaines de ces maladies, comme les hépatites ou l’herpès touchant un plus grand nombre de personnes que le VIH. On constate également une recrudescence récente de la syphilis et des Chlamydia par exemple.
Il ne s’agit donc pas de minimiser l’importance du sida – puisqu’il n’est toujours pas possible d’en guérir – mais bien d’informer le public sur l’ensemble des risques de transmission des MST et sur la manière de s’en protéger.

Epidémiologie du VIH/SIDA et des maladies sexuellement transmissibles en Belgique

Au cours de l’année 2003, 1032 nouveaux diagnostics de VIH ont été rapportés dans le pays. Ce chiffre, qui est en hausse de 4,5% par rapport à l’année 2002, fait suite à l’importante augmentation qui avait été observée entre 1997 et 2000 (+37%) et à la hausse plus modérée des années 2001 et 2002. Sur l’ensemble de la période 1997 – 2003, le nombre annuel de nouveaux diagnostics VIH a augmenté de 49%.
En ce qui concerne la répartition par sexe, par groupe d’âge et par catégorie de transmission, aucune modification significative n’est observée en 2003 par comparaison avec 2002.
En ce qui concerne les autres MST, il apparaît que, après une diminution très marquée au cours des décennies 80 et 90, la tendance s’inverse. Le réseau des Laboratoires Vigies a signalé une recrudescence des enregistrements de gonococcies depuis 2001, et des diagnostics de Chlamydia trachomatis depuis 2002. Parallèlement, un nombre croissant de diagnostics de syphilis a été enregistré depuis l’année 2000 par le Réseau Sentinelle des Cliniciens, principalement chez des patients masculins mentionnant des contacts homosexuels. Dans plus de 60% de ces cas, une infection par le VIH est aussi rapportée.
Données fournies par André Sasse et Ann Defraye de l’Unité de surveillance épidémiologique du VIH/SIDA à l’Institut scientifique de santé publique

Pourquoi ce changement ?
D’abord, le plan communautaire de la prévention du sida indique qu’il faut ‘maintenir des programmes de prévention et d’information à l’attention du public général, en incluant des thématiques spécifiques.’
C’est ainsi que le plan souligne l’importance de maintenir la question du sida à l’ordre du jour pour éviter l’installation d’un climat de démobilisation et de relâchement. Les campagnes moins ciblées, plus généralistes permettent d’éviter la stigmatisation des publics vulnérables et réduisent l’illusion selon laquelle seuls ces publics seraient encore concernés par l’épidémie. De plus, en élargissant à l’ensemble des MST, un public plus étendu peut prendre connaissance des informations actualisées. Et être ainsi sensibilisé.
Ensuite, les campagnes à l’attention du public général doivent aussi intégrer la question des autres MST.
Depuis 1997, on assiste à une recrudescence des cas de transmissions par le VIH dans notre pays. Les données épidémiologiques disponibles pour les autres MST vont dans le même sens (voir encadré). On peut donc supposer que le relâchement des attitudes préventives contre le VIH a également eu un impact négatif sur le nombre de contaminations par les autres MST. Pour lutter efficacement contre la recrudescence des MST, il est important d’offrir une information adéquate, continue et adaptée.

Cadre général et objectifs de la campagne

Les jeunes de 15 à 24 ans constituent le public cible pour cette campagne qui vise à les informer et les sensibiliser aux risques du sida et des MST et à l’utilisation du préservatif.
Le programme quinquennal de la promotion de la santé précise: ‘Il convient de promouvoir un comportement responsable, dans le respect de l’autre et de soi-même, tout en visant à promouvoir des actions de communication vers la population générale, dans le sens de la prévention mais aussi de la solidarité vis-à-vis des personnes atteintes.’
C’est pourquoi, la Plate-Forme Prévention Sida a défini les objectifs suivants.
Objectif de santé : réduire l’incidence du sida et des autres maladies sexuellement transmissibles, en prévenant leur transmission par voie sexuelle.
Objectifs éducatifs:
– encourager les jeunes à maintenir ou à développer une attitude de vigilance par rapport au sida et aux autres MST (se protéger, protéger les autres), notamment à l’occasion des vacances et lors des festivals de musique;
– favoriser l’accès des jeunes à l’utilisation du préservatif;
– améliorer les connaissances et l’aptitude des jeunes quant aux modes de transmission des maladies sexuellement transmissibles et à l’utilisation du préservatif;
– contribuer à lever les tabous et à banaliser l’usage du préservatif auprès des jeunes.
Objectifs de communication:
– valoriser l’attitude de vigilance vis-à-vis du sida que l’on soit hétérosexuel, homosexuel, belge ou étranger;
– favoriser l’adhésion à la valeur ‘se protéger, protéger les autres’;
– rappeler les règles de bon usage du préservatif.
Mais sur quels leviers convient-il de s’appuyer pour concrétiser ces objectifs ?
De multiples facteurs interviennent dans l’adoption, le maintien ou le changement des attitudes et comportements en matière de santé. Sans prétendre à l’exhaustivité ni tenter de les hiérarchiser, citons, dans le domaine de la prévention du sida et des MST:
– les facteurs socioculturels (normes, représentations en matière de sexualité, acceptation du préservatif);
– les facteurs socioéconomiques (accessibilité financière du préservatif);
– les facteurs environnementaux (disponibilité du préservatif);
– les facteurs institutionnels (présence de lieux accessibles où trouver aide et information);
– les facteurs éducatifs (aptitude individuelle à s’exprimer à propos de la sexualité, de la prévention…);
– les facteurs cognitifs (connaissance du problème, perception du risque…);
– les habitudes (comportements de prévention déjà bien ancrés ou pas encore installés);
– les facteurs relationnels (rôle de l’entourage, pression des pairs, attitude des partenaires sexuels);
– les facteurs affectifs (image de soi et de ses capacités à agir, image du corps…).
Tous ces facteurs interviennent dans le maintien ou la modification des comportements; aucun ne constitue LE levier unique ou suffisant pour aboutir aux changements escomptés. Ils interviennent de manières différentes selon le groupe, l’âge, le milieu social, l’histoire de l’individu, les réseaux dans lesquels il se trouve, le type de relation amoureuse…
Conformément à nos objectifs, nous optons pour une stratégie qui met en jeu:
– des facteurs culturels (familiarisation avec le préservatif, promotion des valeurs d’autoprotection et de protection d’autrui);
– un facteur économique (accessibilité économique du préservatif);
– des facteurs cognitifs (appel à la vigilance, rappel des connaissances de base);
– des facteurs affectifs (image de soi positive, liée à une valeur de responsabilité personnelle).

Similitude

La campagne été 2004 en France s’est également caractérisée par une intensification des actions envers les populations les plus touchées. Avec un slogan générique moins percutant mais tout aussi explicite, ‘Restez fidèles au préservatif’, elle a accordé une attention particulière aux homosexuels et aux populations originaires d’Afrique sub-saharienne et de départements français d’Amérique.

Quant à l’impact de notre travail, il convient de rester modeste sur le plan de la santé comme sur le plan éducatif. Il est en effet impossible d’établir une relation causale entre les campagnes d’information et de sensibilisation, d’une part, l’évolution de l’endémie et des comportements, d’une autre part.
En effet, il ne faut pas surestimer l’impact des campagnes de communication dans la modification des attitudes et des comportements, surtout dans un domaine aussi complexe que la sexualité; de manière générale, il est très difficile d’évaluer les actions de prévention du sida; enfin, les campagnes de communication des années précédentes ont vraisemblablement contribué à améliorer certaines connaissances et attitudes, mais leur rôle spécifique n’est pas directement mesurable.
Le choix de l’été s’explique par l’hypothèse suivante: les vacances d’été seraient plus propices à des relations sexuelles non protégées avec des partenaires de rencontre, d’où une augmentation possible des MST à la rentrée. La pertinence des campagnes d’été est donc probable.
La stratégie que nous proposons repose principalement sur la diffusion d’un outil de communication généraliste (s’adressant à la population générale), mais offrant des ouvertures vers des problématiques/populations spécifiques (homosexualité…). Cet outil s’appuie sur des spots tv/radio et des affiches et cartes postales.
La diffusion repose non seulement sur la collaboration avec les CLPS, mais aussi sur des partenariats avec d’autres relais à même de toucher les divers publics-cibles.

Plus concrètement

Durant cet été, 200.000 pochettes ‘In Ze Pocket’ existant en quatre versions, auront été distribuées. Réalisées avec l’implication d’un groupe de jeunes, elles contiennent un préservatif aux fruits, des informations sur la prévention du sida et des maladies sexuellement transmissibles ainsi que des adresses où passer un test de dépistage ou tout simplement se renseigner.
A côte de cela, 800.000 préservatifs viendront renforcer la distribution réalisée via les organismes de prévention du sida: dans le milieu festif, dans le milieu de la prostitution, des usagers de drogues, des personnes d’origine étrangère, dans le réseau commercial et associatif homosexuel, dans les centres de jeunes… Au total, pas moins d’1.000.000 de préservatifs seront donc distribués en 2004.
En deux vagues en juillet et en août, trois spots TV et radios ont été diffusés sur l’ensemble des chaînes de la Communauté française: ceux-ci mettent en situation un couple dans les prémisses amoureuses jusqu’au moment où un des partenaires souhaite aller plus loin mais en n’utilisant pas le préservatif lors de la relation sexuelle. Alors, l’autre partenaire refuse catégoriquement la relation sans préservatif et s’exclame que ‘Sans latex t’es déjà mon ex’. Il est ensuite rappelé que le sida se soigne mais ne se guérit pas encore et qu’il convient de continuer à se protéger et à protéger les autres des MST.
Chaque spot met en scène un couple différent: un couple de jeunes hétérosexuels, de jeunes d’origine étrangère et de jeunes homosexuels. Ceci renforce l’idée que le sida touche tout le monde sans distinction de sexe, d’âge, de couleur et d’orientation sexuelle.
Ces spots sont déclinés en trois visuels, visant les mêmes publics, sous forme d’affiches, de cartes postales Boomerang diffusées en Communauté française et à la côte et d’annonces dans certains magazines soucieux de soutenir la prévention du sida.

Notre prochaine lettre d’information électronique proposera un texte de l’asbl Ex-Aequo expliquant la pertinence de la déclinaison de la campagne été 2004 vers le public des jeunes homosexuels masculins.
Nous y reprendrons aussi un communiqué de l’OMS sur ‘l’Aggravation de la menace du sida dans l’ensemble de l’Europe’.
Si vous souhaitez vous y abonner, il vous suffit d’aller visiter notre site https://www.educationsante.be

Vu le succès rencontré par cette action l’été passé, les jeunes de l’École du Cirque ont joué cette année encore les rôles du préservatif, du virus et du spermatozoïde en revêtant d’insolites costumes. Ils ont circulé dans les festivals de musique en attirant l’attention du public, de manière sympathique et ludique, sur la prévention du sida et des MST.
Deux modes de diffusion ont été mis en œuvre: vers les particuliers par le 0800 20000 et le site https://www.preventionsida.org , vers les relais par les Centre locaux de promotion de la santé. En outre, dans la mesure où la campagne vise également des publics spécifiques qui sont de la compétence des organismes thématiques, tout le matériel a également été diffusé via ces organismes afin de toucher ces publics particulièrement vulnérables lors d’actions de terrain réalisées par exemple dans le milieu commercial gay.
Thierry Martin , Directeur Plate-Forme
Adresse de l’auteur: Plate-Forme Prévention sida, av. Emile de Béco 67, 1050 Bruxelles. Tél.: 02 733 72 99. Fax: 02 646 89 68.

Dépistage des cancers du sein et du col de l’utérus: attitudes et comportements de la population féminine liégeoise

Le 30 Déc 20

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Introduction

En Belgique, le cancer du sein est le cancer le plus fréquent et la première cause de mortalité parmi les femmes de 45 à 64 ans. Le cancer du col de l’utérus est le quatrième en incidence dans la population féminine ( 1 , 2 ). Les recommandations pour le dépistage de ces deux types de cancers font l’objet d’un consensus européen ( 3 , 4 ):
– une mammographie bisannuelle de dépistage chez les femmes de 50 à 69 ans pourrait réduire la mortalité liée au cancer du sein de 30 à 50 %;
– un frottis cervicovaginal tous les trois ans chez les femmes de 20 à 60 ans préviendrait 90% des cancers du col utérin à condition qu’il soit réalisé chez toutes les femmes et qu’un suivi adéquat des lésions détectées soit proposé.
En comparaison avec ces recommandations européennes, la situation actuelle est loin d’être satisfaisante. Que ce soit en France (5) ou en Belgique (6), de nombreuses études ont montré que 70% seulement des femmes ont réalisé un frottis au cours des trois dernières années. Cette proportion semble cependant surestimée en raison du nombre de femmes qui subissent ce test à un intervalle plus court. En effet, une étude réalisée auprès de la population belge néerlandophone a montré qu’une proportion de la population féminine avait subi un frottis trop fréquemment, cependant qu’une autre fraction de cette population était «sous-dépistée» ( 7 ). Dans la population belge francophone, on estime que 40% des femmes n’ont jamais eu de frottis du col ( 8 ).
La situation est encore plus inquiétante en ce qui concerne le cancer du sein: seules 40 à 50% des femmes de 50 à 69 ans ont subi une mammographie au cours des deux dernières années en Communauté française de Belgique ( 9 ). Depuis novembre 2000, le Gouvernement Fédéral belge ainsi que les Communautés flamande et francophone ont décidé de proposer gratuitement une mammographie bisannuelle de dépistage du cancer du sein à toutes les femmes âgées de 50 à 69 ans ( 10 ). La présente étude a été réalisée dans ce contexte de réorganisation des politiques de dépistage du cancer du sein.
Du point de vue de la santé publique, la mise en œuvre de programmes de dépistage des cancers ne doit pas seulement prendre en compte des recommandations scientifiques, mais aussi les implications éthiques et en particulier les principes d’autonomie et d’équité. L’autonomie signifie le respect des choix individuels, y compris le choix de non-participation, à condition que ce choix soit fait en toute connaissance de cause par la personne. Le principe d’équité consiste à cibler toute la population et pas seulement les personnes les mieux éduquées ou les mieux intégrées. Dans ce contexte, de nombreux freins à la participation à un dépistage ont été décrits. D’après le modèle PRECEDE-PROCEED ( 11 ), trois types de facteurs (prédisposants, favorisants et renforçants) sont susceptibles de jouer un rôle dans l’adoption d’un comportement donné.
La participation à un examen de dépistage est influencée en effet par le niveau de connaissances, les perceptions, attitudes et représentations de la population ciblée. Plusieurs études ont montré que le niveau moyen de connaissances à propos du cancer et de sa prévention est souvent peu élevé ( 12 , 13 , 14 ), particulièrement parmi les femmes peu qualifiées.( 12 ). Un haut niveau de connaissances favorise la participation active à un examen de dépistage ( 15 , 16 , 17 ). Les représentations de la maladie jouent aussi un rôle: si la gravité du cancer est perçue par une majorité de femmes, le cancer signifiant la mort pour 43% des Français ( 18 ), le sentiment de vulnérabilité est moins marqué ( 5 , 13 , 14 , 18 ). La perception de l’efficacité du test de dépistage (capacité à détecter la maladie et impact sur la curabilité) peut également influencer la participation à un programme de dépistage ( 14 ). Certains sous-groupes, particulièrement dans les populations défavorisées ou rurales, ont une vue fataliste par rapport au cancer: pour eux, la prévention ne signifie rien ( 19 , 20 , 21 ).
La manière de gérer sa propre santé peut également exercer une influence importante sur le comportement de prévention. Les personnes dont le «health locus of control» (traduisible littéralement comme «le lieu de contrôle de la santé») est de type externe attribuent la bonne santé à la chance ou à l’action des professionnels de la santé. En conséquence, de nombreux patients attendent des propositions d’actions préventives émanant de leur médecin (généraliste, gynécologue)(5,13,14,22,23). Le rôle et les attitudes du médecin de famille ou du gynécologue peuvent, de ce fait, revêtir une importance primordiale à l’induction d’un comportement préventif chez les patients (13,14,24).
Des facteurs socio-économiques entrent également en ligne de compte dans la mesure où état de santé et position sociale sont liés (25). En l’occurrence, les femmes qui ne participent pas à un programme de dépistage sont plus souvent isolées, leur niveau d’études est plus faible et elles appartiennent à des catégories socioprofessionnelles peu élevées (13,26).
L’accessibilité des structures sanitaires peut être considérée comme un facteur facilitant, influençant de façon positive l’adoption du comportement. Les études concernant l’influence de l’organisation de programmes de dépistage sur la participation des femmes donnent cependant des résultats contradictoires (5,13). Le coût peut se révéler un frein (trop ou pas assez cher) ou un incitant (s’il augmente l’accessibilité pour tous) (5,19).
La poursuite du comportement de dépistage peut être fonction du vécu ressenti par la personne elle-même ou par ses pairs à l’issue d’une première expérience. Se sentir rassurée après une mammographie est, en soi, un bénéfice positif qui renforcera le comportement préventif (13,27). Une expérience négative (un résultat faussement positif, la douleur au moment de l’examen, un mauvais accueil) peut à l’inverse constituer un frein à la participation aux examens ultérieurs (13,14).
Tenant compte de ces obstacles et difficultés et dans le but de promouvoir la participation de toute la population féminine à des programmes de dépistage des cancers, une enquête a été réalisée en mars et avril 2001 auprès de la population de Liège , avec les buts spécifiques suivants:
– établir un profil des femmes dont le comportement préventif est inadéquat;
– évaluer le pourcentage de la population dont le niveau des connaissances est insuffisant par rapport au cancer du sein, au cancer du col utérin et à l’efficacité du dépistage;
– mettre en évidence des facteurs influençant les comportements préventifs (croyances, attitudes et perceptions) et susceptibles d’être modifiés.

Méthodologie

Population étudiée

Deux groupes d’âges ont été définis pour l’étude: l’un composé de femmes de 25 à 37 ans, qui sont concernées par la prévention du cancer du col utérin, mais pas encore par celle du cancer du sein, l’autre constitué de femmes de 45 à 57 ans, concernées par les deux types de prévention. Une comparaison entre ces deux groupes a été réalisée concernant leurs connaissances, leurs perceptions et leurs comportements. L’administration communale de la Ville de Liège a fourni un échantillon aléatoire tiré du registre de la population, de 500 femmes dans chaque groupe d’âge. La population cible est donc constituée de 1000 femmes résidant à Liège, extraites d’une population totale de 189 502 habitants.

Questionnaire

L’enquête a été basée sur un questionnaire auto-administré, comportant 38 questions. Présenté sous un format A4 recto-verso, il inclut 20 questions évaluant les facteurs prédisposants (connaissance (4), perceptions (5), attentes (1), gestion de la santé (10)); sept questions se rapportent aux facteurs facilitants (coût, accessibilité et visibilité des centres de prévention) et trois questions sont consacrées aux facteurs renforçants (expérience antérieure de la personne elle-même, attitudes des professionnels de la santé). Deux questions visent l’exploration du profil socio-économique des répondantes et dix autres analysent leurs comportements préventifs. Le questionnaire a été prétesté auprès de 30 femmes âgées de 25 à 60 ans.

Procédure d’enquête

Grâce à la participation financière de la Province de Liège, le questionnaire a été adressé aux personnes sélectionnées, accompagné d’une enveloppe « port payé par le destinataire », ainsi que d’une lettre d’explications mentionnant un numéro de téléphone de contact.

Analyse des données

Les données ont été encodées en DBASE. Les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel EPIINFO version 6. Le test du chi-carré a été utilisé pour tester la signification des associations bivariées. Le niveau de signification est fixé à p=0,01.

Résultats

Parmi les 1000 questionnaires envoyés, 979 ont réellement atteint les personnes sélectionnées. Un total de 444 femmes (45,4%) ont renvoyé le questionnaire: 207 dans la tranche d’âge de 25 à 37 ans (désignées plus loin comme les « jeunes ») et 237 dans la tranche d’âge 45-57 ans (désignées plus loin comme les « âgées »). Le taux de réponse était significativement plus élevé chez les femmes de nationalité belge: 48% versus 31,2%, (Chi²=15,09; p<0,001). Toutes les répondantes ont apporté une réponse à chaque question. Les principaux résultats sont présentés ci-après.

Comportements par rapport au dépistage

Les femmes étudiées ont été interrogées à propos de la réalisation d’un frottis et d’une mammographie. A la question « Vous a t on déjà fait un frottis du col ?», 14% des répondantes de 25 à 37 ans et 5,1% de celles âgées de 45 à 57 ans ont répondu «non». Un total de 403 femmes déclarent avoir déjà subi un frottis. A la question « De quand date votre dernier frottis du col ?», 4/5 déclarent l’avoir subi au cours des trois dernières années.
A la question ‘ Avez vous déjà passé une mammographie ?”, 23,2% des répondantes du groupe «jeunes» et 85,2% du groupe «âgées» ont répondu positivement. Dans ce dernier groupe, la dernière mammographie a été réalisée au cours des deux à trois dernières années pour 9,9% des femmes et depuis plus de trois ans pour 8,9% d’entre elles.

Comportements de dépistage et caractéristiques des répondantes

L’étude a analysé les caractéristiques des femmes dont le comportement préventif peut être qualifié de non satisfaisant. Il s’agit en particulier des 81 répondantes qui n’ont jamais subi de frottis cervico-vaginal ou l’ont subi il y a plus de trois ans, tandis que les 363 autres l’ont subi au cours des trois dernières années, comme le recommande le consensus européen.
En comparant les profils respectifs de ces deux sous-groupes, on peut observer que les répondantes dont le comportement préventif vis-à-vis du cancer du col utérin n’est pas satisfaisant sont plus souvent sans emploi, avec un niveau d’éducation peu élevé, avec une perception médiocre de leur santé, souffrant d’une maladie chronique ou d’un handicap et non suivies régulièrement par un gynécologue. Une femme sur cinq parmi ces répondantes pense qu’une lettre d’invitation émise par un centre de prévention constituerait un incitant à sa participation à un examen de dépistage.
En ce qui concerne la mammographie de dépistage, les femmes «âgées» se répartissent de la façon suivante: 164 d’entre elles ont réalisé le test au cours des deux dernières années et 73 n’ont jamais réalisé ce test ou l’ont réalisé il y a plus de deux ans.
Les mêmes différences socioculturelles sont observées par rapport à la compliance au dépistage par mammographie que celles observées dans le cadre du dépistage du cancer du col utérin.

Compréhension de la démarche préventive

A la question “pour réaliser un examen de dépistage du cancer, il est nécessaire de présenter déjà un ou des signes d’alerte”, 57 femmes (12,8%) répondent «je ne sais pas», «plutôt d’accord» ou «d’accord». Ce type de réponse suggère qu’elles n’ont pas compris la logique d’une stratégie de dépistage. Ce sous-groupe se montre significativement différent (p<0,01) des 387 autres femmes qui répondent «plutôt pas d’accord» ou «pas d’accord» à cette question (le tableau 1 précise ces données).

Tableau 1: comparaison des profils de 387 femmes qui comprennent la logique d’une stratégie de dépistage et de 57 qui ne la comprennent pas.

Bonne compréhension (n=387) (%) Pas de compréhension (n=57) (%) Chi²; p
Sans emploi 32,8 56,1 11,76; <0,001
Bas niveau d’études (*) 11,9 33,3 21,98; <0,0001
Santé perçue médiocre (**) 17,8 43,9 20,17; <0,00001
Pas de suivi par un gynécologue 7,5 19,3 8,45; =0,01

( 444 femmes liégeoises 2000 )
(*) pas de diplôme ou niveau primaire
(**) moyenne, mauvaise ou très mauvaise

Ici encore, le sous-groupe de femmes qui ne semblent pas comprendre la logique du dépistage présente les mêmes facteurs défavorables concernant l’emploi, le niveau d’éducation, les perceptions de la santé et le suivi par un gynécologue.

Connaissances et croyance en la curabilité du cancer s’il est détecté précocement

A l’affirmation “Quand on découvre un cancer, il est toujours trop tard”, 109 femmes (24,5%) répondent «je ne sais pas», «plutôt d’accord» ou «d’accord». Le tableau 2 montre les profils respectifs de ce sous-groupe en comparaison avec les 335 autres femmes qui répondent «plutôt pas d’accord» ou «pas d’accord».

Tableau 2: comparaison des profils de 335 femmes qui croient en la curabilité d’un cancer détecté tôt, et de 109 qui n’y croient pas.

Croient à la curabilité (n=335) (%) Ne croient pas à la curabilité (n=109) (%) Chi²; p
Sans emploi 31,3 49,5 11,85; <0,001
Bas niveau d’études (*) 8,7 33,0 46,24; =0,000..
Santé perçue médiocre (**) 16,4 35,8 18,47; <0,0001

( 444 femmes liégeoises 2000 )
(*) pas de diplôme ou niveau primaire
(**) moyenne, mauvaise ou très mauvaise

Il n’est pas surprenant de constater que les femmes qui ne croient pas en la curabilité du cancer détecté précocement sont plus souvent sans emploi, des femmes avec un niveau d’éducation bas et une perception médiocre de leur santé.

Perception de l’efficacité des tests

Pour étudier la perception de l’efficacité du frottis cervical, il a été demandé aux répondantes de prendre position par rapport à l’affirmation suivante: “On peut éviter le cancer du col de l’utérus en pratiquant régulièrement un frottis du col”. Les réponses sont significativement différentes (p<0,01) entre les deux groupes d’âges. Les femmes qui répondent «pas d’accord» ou «plutôt pas d’accord» représentent 26,5% du groupe des «jeunes» (25-37 ans) et seulement 9,7% du groupe des «âgées» (45-57 ans).
On n’observe pas de différence aussi significative concernant la perception de l’efficacité de la mammographie: 13,5% des femmes du groupe «jeunes» et 10,2% du groupe «âgées» ne croient pas en l’efficacité de la mammographie (p=0,2).
La perception de l’efficacité de ces tests de dépistage semble être reliée à la compréhension de la démarche préventive et à la croyance en la curabilité de la maladie. En effet, parmi les femmes qui ne croient pas en l’efficacité du test de dépistage, une sur cinq appartient au groupe qui comprend mal la logique de l’approche préventive (mais une sur dix parmi celles qui ont une bonne compréhension)(p<0,01). De même, une femme sur quatre appartient au groupe qui ne croit pas à la curabilité du cancer s’il est détecté précocement (mais une sur dix qui croit à la curabilité).

Attentes des répondantes

La question suivante a été posée afin d’évaluer les attentes des répondantes: «A votre avis, qu’est-ce qui pourrait inciter une femme à passer un examen de dépistage du cancer si elle ne l’a jamais fait?». Les réponses correspondantes par groupes d’âge sont reprises dans le tableau 3.

Tableau 3: Incitants à la réalisation d’un test de dépistage.

Groupe d’âge

Invitation d’un centre de prévention Invitation d’un médecin Publicité Medias Gratuité Proximité d’un centre médical Conseil d’un proche Rien Autres
25-37 12,1 % 51,7 % 3,9 % 15,0 % 2,4 % 6,8 % 2,9 % 5,3 %
45-57 11,0 % 54,4 % 4,6 % 12,2 % 4,6 % 7,6 % 1,7 % 3,8 %

(444 femmes liégeoises – 2001)

Dans les deux groupes d’âges, plus de la moitié des sujets désignent le médecin de famille ou l’invitation du gynécologue comme incitant. Les femmes qui répondent «autres» invoquent: «un symptôme au niveau du sein», «un cancer dans la famille», «l’âge» ou «des facteurs de risque».

Discussion

Une population avec un profil plus favorable que la moyenne

Cette enquête de population a obtenu un taux de réponse plutôt élevé, bien que réalisée par voie postale. Ce résultat favorable pourrait être attribué aux caractéristiques du questionnaire: il était court, facile à compléter et à renvoyer. Il semble cependant que les femmes d’origine étrangère dont la langue maternelle n’est vraisemblablement pas le français ont éprouvé des difficultés à répondre au questionnaire, dans la mesure où leur taux de réponse est différent de celui des femmes de nationalité belge.
Par comparaison aux valeurs de référence disponibles, selon le cas, pour les populations belges, wallonne ou liégeoise, l’échantillon comporte une surreprésentation de:
– femmes de niveau d’études universitaires:16,4% contre 4,4% des femmes vivant à Liège (28);
– femmes de 45 à 57 ans professionnellement actives: 62% contre 49,6% des femmes de 45 à 54 ans vivant en Wallonie (6);
– femmes ne souffrant pas de maladie chronique: 78,8% contre 44,7% des femmes belges (6 );
– fumeuses dans le groupe «âgées»: 35,9% contre 25% des femmes belges de 45 à 54 ans (6).
Cependant, les répondantes sont assez représentatives de la population de référence en ce qui concerne:
– les femmes isolées: 23% contre 24,6% des femmes vivant en Province de Liège (29);
– les femmes dont la perception de la santé est «bonne» ou «très bonne»: 78,8% contre 78% des adultes belges (6);
– les femmes suivies par un médecin de famille: 94,6% contre 93% des adultes belges (6).
Certains biais dans les résultats sont donc probables, étant donné le taux élevé de femmes de niveau universitaire parmi les répondantes. Ce taux élevé pourrait être attribué à une attitude de sympathie vis-à-vis d’un mémoire de fin d’études ou résulter du niveau culturel, le souci de la santé étant classiquement relié positivement avec le niveau d’études. Un autre facteur confondant pourrait être lié à la proportion importante des répondantes signalant une expérience de la maladie chez un proche souffrant d’un cancer (75%). Cette proportion semble élevée; cependant, à notre connaissance, aucune statistique comparative n’est disponible. Une dernière source de biais potentiel est l’environnement d’une ville telle que Liège, qui offre une bonne accessibilité aux services médicaux.
L’échantillon de répondantes semble donc présenter un profil favorable par rapport à une activité de dépistage: ces femmes ont un niveau d’éducation plutôt élevé, et elles sont bien intégrées dans la société dans la mesure où elles sont nombreuses à avoir un emploi. Cette hypothèse est confirmée par les résultats: la proportion de répondantes ayant effectué un frottis (81,8%) ou une mammographie (69,2%) selon la périodicité recommandée est plus élevée dans cette enquête que celle habituellement rapportée pour la population belge ou française. Dans la dernière enquête belge de population (6), 70% des femmes de 25 à 65 ans déclarent avoir réalisé un frottis au cours des trois dernières années. Deux enquêtes récentes (8,30) réalisées auprès de la population belge francophone ont montré une proportion de 60 et 64 % de femmes « en ordre » pour le frottis. En France, les chiffres correspondants sont de 70,5% (5).
En ce qui concerne le dépistage du cancer du sein, 40 à 50 % des femmes belges francophones de 50 à 69 ans sont «en ordre» pour la mammographie (9).
Une partie des différences observées pourrait découler du fait que, dans les études citées, les populations observées ne vivent pas uniquement en ville mais aussi dans des campagnes où les centres de santé sont plus éloignés. Il faut cependant noter qu’une enquête postale (13) conduite dans la province de Namur a obtenu des résultats similaires à ceux présentés ici: 71% des répondantes avaient subi une mammographie au cours des deux années précédant l’enquête. Ces auteurs attribuaient eux aussi ces résultats à un profil particulièrement favorable pour les comportements préventifs parmi les répondantes à leur enquête.

Quelques résultats inquiétants ou surprenants

Néanmoins, en dépit du profil favorable de notre échantillon, certains résultats obtenus sont inquiétants: par exemple, le fait que 14,4% des femmes du groupe «jeunes» affirment n’avoir jamais réalisé un frottis apparaît comme une proportion étonnamment élevée. Il n’est pas exclu cependant que ce chiffre surestime la réalité dans ce groupe d’âge où 9,2% seulement des femmes n’ont pas de gynécologue et il est donc possible qu’aucun frottis n’ait été réalisé chez elles. Mais les 5,2% restants pourraient correspondre à des femmes qui ont un gynécologue mais ignorent que celui-ci réalise régulièrement un frottis. Il est également possible que certaines répondantes n’aient pas compris le terme médical «frottis du col».
Un autre résultat surprenant concerne la perception de l’efficacité du frottis de col: plus d’une femme sur quatre dans le groupe 25-37 ans n’en est pas convaincue. Cette proportion est alarmante quand on sait que ce sont principalement les femmes jeunes qui sont affectées par ce cancer et qu’il est maintenant évident que la détection précoce et le traitement de lésions dysplasiques du col préviennent leur évolution vers la cancérisation (3,4). En outre, si on tient compte du profil favorable des répondantes à cette enquête, on peut émettre l’hypothèse que la proportion de femmes ayant des connaissances inappropriées en matière de prévention est en réalité plus élevée dans la population générale.

Le programme de dépistage du cancer du sein

Depuis deux ans environ, un programme de dépistage du cancer du sein chez les femmes âgées de 50 à 69 ans est en cours en Communauté française, dans le cadre d’un accord entre tous les niveaux de pouvoir concernés par la santé dans notre pays.
La Direction générale de la santé du Ministère de la Communauté française vient de publier une brochure faisant le point sur le programme ‘mammotest’. Le document, qui vise un public d’intervenants en matière de santé publique, aborde les questions suivantes:
– justification d’un programme de dépistage organisé;
– objectifs du programme;
– ressources du programme;
– fonctionnement du programme;
– assurance de qualité, suivi, évaluation.
Il est complété par une trentaine de pages d’annexes contenant aussi bien des textes officiels que des documents d’informations destinés aux médecins et aux femmes et des courriers utilisés dans le cadre de la campagne.
Le lecteur trouvera dans cette brochure un maximum d’informations concrètes lui permettant d’appréhender le programme de façon globale.
C.D.B.
BEGHIN D., VANDENBROUCKE A., CHERBONNIER A., FABRI V., Le programme de dépistage du cancer du sein, DG Santé, 70 pages, mars 2004.
Disponible (en petites quantités) auprès de sabine.pierard@cfwb.be

Des populations peu sensibles à la ‘culture’ du dépistage

Les résultats de cette enquête montrent donc clairement que des facteurs socioculturels et socio-économiques contribuent à un manque de compréhension de la logique du dépistage, à des croyances erronées quant à la curabilité du cancer détecté précocement, et à une perception négative de l’efficacité des tests de dépistage. Ceci se traduit par un comportement préventif inadéquat, voire même absent dans une frange importante de la population.
Ces observations sont en concordance avec celles rapportées par d’autres auteurs (12,14,26,31). Collignon et Martin (13) ont relevé une surreprésentation de femmes peu instruites parmi celles qui ne participent pas aux examens de dépistage. Doumont et Libion (14), dans leur revue de littérature (concernant le dépistage du cancer du sein) mettent en évidence le lien entre le niveau de connaissances, le degré d’alphabétisation et les attitudes de prévention. Une étude conduite en France dans le département du Bas-Rhin montre que, pour la population féminine, un haut niveau de connaissance à propos du cancer influence positivement le comportement préventif (15). Comme dans les études antérieures, elle souligne que les connaissances, les croyances, les attitudes et les perceptions sont des facteurs qui influencent fortement les comportements préventifs.
Certains de ces facteurs sont accessibles aux changements comme l’a démontré une étude suédoise qui analyse les effets d’un programme éducatif portant sur les symptômes et signes d’alerte d’un cancer (16) . Les résultats démontrent, d’une part, que le taux de participation aux examens de dépistage peut être augmenté sans que le degré d’anxiété soit accru et, d’autre part, que l’intervalle entre l’apparition du symptôme et la consultation peut être réduit. L’information et l’éducation peuvent donc être efficaces.
Néanmoins, il ne faut pas sous-estimer la difficulté d’informer de manière adéquate les populations défavorisées. Dans leur revue de littérature, Aiach et Cebe ( 26 ) montrent, pour tous les types de comportements préventifs, une différence systématique entre les populations favorisées et celles qui le sont moins. Ils évoquent une «culture de la pauvreté» qui inclut l’acceptation d’un niveau de santé peu élevé. Dans l’étude de Fabri, réalisée auprès des affiliées des Mutualités socialistes (qui sont en général d’un milieu moins privilégié que le reste de la population), 30% seulement des femmes de 50 à 69 ans ont réalisé une mammographie au cours des deux dernières années ( 32 ). Une autre étude réalisée dans les populations défavorisées ( 19 ) a mis en évidence la passivité et le fatalisme de ces personnes face au cancer et à sa prévention. Il en est de même dans une étude américaine réalisée auprès des communautés défavorisées afro-américaines ( 20 ).
L’enquête présentée ici, de même que d’autres réalisées précédemment (5,13,14,22,23,30), souligne le rôle important attribué par les répondantes aux professionnels de santé, que ce soit en tant que personne de référence ou en tant qu’incitant à la prévention. Une étude récente a montré que plus de 69% des femmes n’ayant jamais subi de frottis l’accepteraient si elles y étaient explicitement invitées par un médecin (30).

Conclusions et recommandations

Cette étude souligne les difficultés à surmonter pour atteindre toute la population ciblée par un programme de dépistage du cancer. Les résultats suggèrent que des efforts spécifiques doivent être focalisés vers deux sous-groupes particuliers de population: d’une part, les femmes issues de milieux socioculturels et de niveau social peu élevés, et d’autre part les femmes jeunes.
Pour induire la participation de femmes de milieux défavorisés à des programmes de dépistage, il faut veiller à ce que l’information soit adaptée à leur niveau de compréhension, mais également à leurs croyances et attitudes vis-à-vis de la curabilité de la maladie et vis-à-vis de l’efficacité des tests de dépistage. L’utilisation des réseaux de ‘référents profanes’ pourrait permettre de diffuser une information appropriée à ces populations. Les centres de prévention ont également un rôle à jouer en organisant, par exemple, des groupes de discussion réunissant des femmes issues de ces milieux. Ces centres pourraient également rendre la prévention plus accessible en réalisant gratuitement les tests de dépistage.
Le manque d’information à propos de la prévention du cancer du col utérin parmi le groupe des femmes jeunes est important. Il est urgent de leur faire prendre conscience de l’importance de la réalisation de frottis réguliers, à l’heure où la vie sexuelle actuelle implique des relations avec un plus grand nombre de partenaires que dans la génération précédente. Dans une perspective de santé publique, l’étude ici réalisée souligne que la prévention du cancer du col utérin ne doit pas être occultée par les stratégies développées actuellement pour promouvoir le dépistage du cancer du sein.
Une autre conclusion claire a trait au rôle des professionnels de la santé: tant le médecin de famille que le gynécologue devraient être systématiquement impliqués dans l’organisation de toute campagne de dépistage.
Bernadette Escoyez et Philippe Mairiaux, APES-ULg

Références

1. Oeuvre belge du Cancer – Cancers en Belgique 1993-1995. Bruxelles: Registre National du Cancer, 1999, 1-55.
2. O.M.S. – Statistics Table 1. Number of deaths and deaths rates. Belgium, 1994. https://www.who.ch , consulté en 2000.
3. Advisory Committee of Cancer Prevention – Recommendations on cancer screening in the European union. Vienna: Conference on screening and early detection of cancer, 1999, 1-12.
4. Europe Against Cancer – The European code against cancer. European Union, 1995.
5. Moati JP, Beja V, Eisinger F, Alias F, Dressen C – Attitudes de la population française face au dépistage des cancers. La santé de l’Homme, 1993, 308, 22-26.
6. Institut Scientifique de la Santé publique – La santé en Belgique, ses communautés et ses régions, résultats de l’enquête de santé par interview, https://www.iph.fgov.be , consulté en 2000.
7. Arbyn M, Quataert P, Van Hal G, Van Oyen H – Cervical cancer in the Flemish region (Belgium): measurement of the attendance rate by telephone interview. European Journal of Cancer Prevention , 1997, 6, 389-398.
8. Castronovo V, Foidart JM, Boniver J – Cancer du col de l’utérus: analyse du coût-bénéfice et de l’efficacité du dépistage opportuniste versus le dépistage organisé. Revue Médicale de Liège , 1998, 53, 305-307.
9. Bourdon C – Le dépistage du cancer du sein en Communauté française de Belgiquee. Bulletin d’éducation du patient , 2000, 19, 65-66.
10. Ministère des Affaires Sociales, de la Santé Publique et de l’Environnement – Protocole du 25.11.2000 visant une collaboration entre l’Etat fédéral et les Communautés en matière de dépistage de masse du cancer du sein par mammographie. Moniteur belge , 22.12.2000, 12-22.
11. Green LW, Kreuter MW – Health Education planning: a diagnostic approach – Mountain View. Mayfield Publishing Company, 1991, 150-167.
12. Breslow RA, Sorkin JD, Frey CM, Kessler LG – American’s knowledge of cancer risk and survival. Preventive Medicine , 1997, 26, 170-177.
13. Collignon JL, Martin N – Comportement des femmes de 50 à 69 ans face au dépistage du cancer du sein, enquête réalisée en province de Namur. Bulletin d’éducation du patient , 2000, 2, 82-89.
14. Doumont D, Libion F – Analyse des comportements préventifs dans le cadre du dépistage par mammographie – Dossier documentaire 4, Unité RESO, Education pour la santé. Faculté de Médecine UCL, 1999.
15. Blanc D, Sartori V, Hedelin G, Schaffer P – Influence des connaissances relatives au cancer sur les comportements de prévention dans la population du Bas-Rhin. Bulletin du cancer , 1998, 85, 569-577.
16. Manson J, Marklund B, Bengston C, Fridlund B – Evaluation of an educational programme for the early detection of cancer. Patient Education and Counselling , 1999, 37, 231-242.
17. Sung JF, Blumenthal DS, Cates RJ, Alema-Mensah E – Knowledge, beliefs, attitudes and screening among inner city African-American women. Journal of the Medical Association , 1997, 89, 405-411.
18. IPSOS – Les Français face au cancer. Archives-sociétés, https://www.IPSOS.com , consulté en 1998.
19. Filee D, Halbardier V, Riffon A, Andrien M – Prévention du cancer et pauvreté. Liège: CERES, Education et communication pour la santé, 1996, 33-76.
20. Scroggins TG, Bartley TK – Enhancing cancer control: assessing cancer knowledge, attitudes and beliefs in disadvantaged communities. Journal of the Louisiana State Medical Society , 1999, 151, 202-208.
21. Coronaro G, Thompson B – Rural Mexican American men’s attitudes and beliefs about cancer screening. Journal of Cancer Education , 2000, 15, 41-45.
22. Gosselain Y, Laperche J, Prevost M – Echéance et liberté. Prévention: agir ensemble, https://www.Maisonmedicale.org , consulté en 2000.
23. Société Scientifique de Médecine Générale, Institut de Médecine Préventive – Initier un projet pilote de prévention dans quelques dodécagroupes, https://www.SSMG.be , consulté en 2000.
24. Beaulieu MD, Beland F, Roy D, Alardeau M, Hebert G – Factors determining compliance with screening mammography. Canadian Medical Association Journal , 1996, 154, 1335-1343.
25. Marmot M, Wilkinson RG – Social determinants of health. Oxford University Press, 2000.
26. Aiach P, Cebe D – Différenciations sociales en matière de prévention. In: Aiach P, Bon N, Deschamps JP (Eds), Comportements et santé, questions pour la prévention. Presses universitaires de Nancy, 1992, 75-101.
27. Siegler IC, Feaganes JR, Rimer BK – Predictors of adoption of mammography in women under age 50. Health Psychology , 1995; 3: 274-278.
28. I.N.S. (Institut National de Statistique). Recensement de la population et des logements de 1991, Bruxelles, I.N.S., 13-23.
29. Liège Province Santé – Profil de santé de la Province de Liège. Liège, 2000.
30. Godin I, Massot C – Cervix cancer screening in the Frameries community, Belgium – A descriptive study. Archives of Public Health , 2001, 59, 181-192.
31. Lostao L, Joiner TE, Pettit JW, Chorot P, Sandin B – Health beliefs and illness attitudes as predictors of breast cancer screening attendance. European Journal of Public Health , 2001, 11, 274-279.
32. Fabri V – Le dépistage du cancer du sein en questions. Union Nationale des Mutualités Socialistes, Bruxelles, février 2001.

Pesticides? Non merci!’

Le 30 Déc 20

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Certains particuliers utilisent abondamment des pesticides dans leur jardin ou au sein de leur maison. Les pratiques agricoles actuelles en usent parfois excessivement. Or, nous absorbons quotidiennement ces substances chimiques via la nourriture que nous ingérons, l’air que nous respirons, ou encore les objets que nous touchons. Cette situation alarmante impose au citoyen une attitude critique vis-à-vis des produits qu’il consomme ainsi que l’ouverture d’un débat réel sur l’utilisation de telles substances.
On estime aujourd’hui que près de la moitié des échantillons de fruits, légumes et céréales contient un ou plusieurs résidus de pesticides. Selon les résultats du Rapport 2000 de la Commission européenne, 39 % des échantillons contiennent des résidus en deçà des normes légales et 7 % au-delà des normes légales. Dans 18 % des cas, l’échantillon contient différents types de résidus de pesticides simultanément.

Ils sont partout

Les pesticides se retrouvent partout: dans les eaux souterraines, dans les eaux de pluie, dans la neige, dans les sols et l’air, dans les aliments, dans nos réserves en eau potable et dans l’eau du robinet. L’air et les poussières des maisons s’avèrent être de véritables réservoirs de résidus de pesticides. Via les fruits exotiques, les textiles, etc. Ils nous reviennent également du Tiers monde: une réglementation plus laxiste y permet l’exportation de produits interdits chez nous.
Ils pénètrent dans notre organisme par diverses voies: orale, respiratoire, cutanée. L’exposition à long terme et à faible dose à ces produits peut être à l’origine de certains cancers et peut également perturber le système hormonal. En combinaison avec d’autres produits, les pesticides peuvent avoir des effets multiplicatifs ou additifs («effets cocktails») On les retrouve de plus en plus abondants dans nos graisses, notre urine, notre sang ainsi que dans le lait maternel!

Une responsabilité partagée

Cette large contamination est le fait des acteurs de l’agriculture intensive mais aussi des services publics (communes, travaux publics, SNCB…) ou encore des particuliers (utilisation d’herbicides, de produits anti-limaces, d’insecticides, etc. dans les jardin, recours aux diffuseurs anti-moustiques, colliers antiparasites pour les animaux domestiques dans les maisons).
Les dommages causés par l’utilisation de pesticides représentent un coût substantiel pour la société, notamment, en termes de santé publique et de décontamination des eaux de distribution.

La campagne ‘Pesticides? Non merci!’

Cette réalité doit être à l’origine d’un questionnement sur les pratiques agricoles dominantes et particulièrement l’agriculture intensive, responsable pour une large part de la dissémination de ces substances chimiques dans l’environnement. La réduction voire la suppression de leur utilisation constitue un enjeu majeur pour l’avenir de l’homme et de son environnement. C’est dans cette optique que, en juin dernier, la campagne «Pesticides? Non merci!» organisée par les quatre fédérations régionales d’associations de protection de l’environnement (Inter Environnement Wallonie, Inter Environnement Bruxelles, Bond Beter Leefmilieu et Brusselse Raad voor het Leefmilieu) est lancée pour sensibiliser le public des dangers que constituent ces substances chimiques. Effets sur la santé, alternatives à l’utilisation des pesticides, choix des consommateurs, rôle des chaînes de distribution, etc. sont autant de questions abordées sur le site [L]www.pesticide.be[/L]
N’hésitez pas à y jeter un coup d’œil!

Le premier bilan du ‘bilan de santé’

Le 30 Déc 20

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L’an dernier, la Société scientifique de médecine générale et la Fédération belge contre le cancer lançaient le ‘bilan de santé’, en collaboration avec la mutualité libre Partena (1) . Concrètement, il s’agit d’une consultation basée sur la prévention, et dont les sujets ont été établis avec l’aide d’une série d’experts. Les membres de Partena âgés de 25 à 69 ans peuvent bénéficier du remboursement du ticket modérateur de cette consultation préventive une fois tous les deux ans.
A l’occasion du démarrage du projet, on nous avait annoncé que des données seraient recueillies qui fourniraient des informations sur le comportement et les connaissances des consultants et les actions entreprises ou envisagées par les médecins.
Sur quelque 5000 documents distribués par Partena, l’Institut de médecine préventive de la SSMG a pu traiter 799 documents exploitables reçus avant le 31/12/2002.
Voici les résultats résumés par le Dr Pierre Legat :
– le succès de l’initiative est jugé appréciable, étant donné qu’il s’agit d’une démarche tout à fait volontaire du patient;
– les consultants connaissent bien leur statut vaccinal, leur pression artérielle et leur taux de cholestérol;
– le pourcentage de fumeurs est (nettement) plus faible que dans la population générale;
– la couverture de la population féminine (49,6% des réponses pour 50,4% d’hommes) en ce qui concerne le frottis du col de l’utérus et la mammographie/mammotest est intéressante;
– 34% des répondants présentent un excès de poids et 15% peuvent être considérés comme obèses;
– si le patient signale un passé ou un antécédent familial cardiovasculaire, le médecin effectue une démarche ciblée sur cet aspect dans presque tous les cas, la même préoccupation se retrouvant pour le diabète.
Commentant ce bilan d’un an de fonctionnement, le Dr Vander Steichel (Fédération belge contre le cancer) estime que cette approche globale de la prévention au cabinet du généraliste est validée. Il plaide en faveur du développement de cette initiative. Selon lui, les médecins généralistes doivent être encouragés à s’approprier l’outil; il faut obtenir l’adhésion d’un maximum de structures et associations compétentes en prévention; les priorités des Communautés doivent y être intégrées; le secteur associatif doit être partie prenante du projet: ‘Parler d’une seule voix en matière de prévention permettra à la fois une simplification des messages et un gain majeur de crédibilité’ .
Il ajoute que ‘l’intégration systématique du bilan de santé dans le dossier médical global ( DMG ) semble la manière idéale de reconnaître la nécessité d’une prévention de qualité dans la pratique médicale de première ligne’ .
Reste à convaincre le grand public d’adhérer à une démarche qui n’est pas la réponse à une plainte ou la prévention d’une maladie particulière…
(1) Voir l’article de Pascale Jonckheer, Vous avez dit bilan de santé?, dans Education Santé 172, septembre 2002.

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Eduquer l’enfant à la mort en utilisant des livres pédagogiques sur les animaux

Le 30 Déc 20

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En juin 2003, le Comité régional et départemental d’éducation et de promotion de la santé (CREDEPS) de Nantes a fait appel à mes services en tant que formatrice sur la question de la mort. J’ai donné une formation à des professionnels travaillant auprès des enfants âgés de 7 à 12 ans en milieu scolaire sur le sujet ‘La mort, le deuil thème sous-jacent dans la prise de parole des enfants’.
Notre but commun était de renforcer les compétences psychologiques des enfants. La question de la mort est soulevée lors d’animations en éducation pour la santé. Si Education Santé m’a déjà permis de toucher certains professionnels, je ne souhaite pas que l’initiative entre le CREDEPS et moi-même reste une démarche isolée.
Il est essentiel de parler de la mort avec les enfants, c’est pourquoi je me permets de revenir sur cette problématique. Comment parler de la mort avec les enfants? A partir de quel âge?
Je suis convaincue qu’il est préférable de discuter le sujet avec eux avant d’exploiter des livres et autres outils pédagogiques. Nous ne pouvons pas ignorer le fait que les enfants ont envie et besoin de communiquer sur la mort et le deuil, surtout s’ils sont limités dans leur vocabulaire pour exprimer des émotions fortes.
Même si ma démarche correspond à un besoin de notre société de réintégrer le concept de la mort, je dénonce le fait que trop souvent les adultes s’informent sans changer vraiment de mentalité et de comportement vis-à-vis de la mort. Que cette lecture soit une invitation au changement!

La mort est une réalité omniprésente dans le quotidien, et il n’est pas bon d’attendre un événement douloureux pour en parler avec les enfants. Comment la pédagogie scolaire répond-elle aux questions existentielles des enfants?
Il existe de multiples occasions pour un pédagogue d’aborder le thème de la mort avec l’enfant, comme par exemple l’observation des saisons. Jusqu’où l’école peut-elle répondre aux questions des enfants sur la mort? Le sujet est présent dans divers enseignements donnés à l’enfant comme le français, l’histoire, l’hygiène et la biologie, mais il est évité en raison de l’implication affective. La littérature faisant état de la mort des animaux me paraît intéressante sur un plan pédagogique, car les enfants sont sensibles à la vie animale . Cependant, elle est rarement utilisée même lors des cours de biologie. La dissimulation sociale de la mort dans les écoles reflète une réalité de nos sociétés occidentales.

L’union thématique de la mort et des animaux

À partir du XIXe siècle, on participe à une volonté de s’adapter à l’enfant en associant les animaux au thème de la mort dans les livres. «C’est là une façon de lier un lieu de l’enfance, en l’occurrence les animaux, à la mort, un sujet qui de tout temps a préoccupé davantage les grandes personnes » (Demers, 1997, p. 52). Je pense que ce type d’ouvrages adaptés aux enfants de 6 à 12 ans peut amorcer réellement les échanges autour de la mort.
L’animal fait partie de l’existence des enfants. Donald Woods Winnicott , psychanalyste anglais, disait que l’animal faisait la différence, tout en étant le prolongement de la peluche. La place de l’animal est valorisée chez l’enfant. Habituellement, le premier contact physique d’un enfant avec la mort se passe par l’intermédiaire d’un animal, qu’il lui soit familier ou non, car il peut aussi ressentir quelque chose, même s’il ne le connaît pas.
Ainsi, l’enfant découvre que l’animal mort ne bouge plus, ce qui suscite en lui de nombreuses questions. Il s’agit pour les adultes de saisir cette occasion parmi d’autres, d’éduquer l’enfant face à la mort afin qu’il puisse développer des mécanismes d’adaptation existentielle. C’est aussi lors de cours de biologie que l’enfant va pouvoir poser des questions sur la mort et la vie de l’animal.
Les enfants sont sensibles aux animaux. C’est pourquoi les ouvrages qui parlent de la mort des animaux sont intéressants pour éveiller les enfants sur des notions universelles. Les ouvrages représentent l’animal qui meurt de mort naturelle ou l’homme qui le tue volontairement – ils sont très intéressants pour susciter des interrogations. L’homme se sent impuissant face à la mort et l’animal est impuissant devant l’homme. L’enfant se rend compte que l’animal est fragile. La littérature infantile peut aborder la mort chez l’animal et la mort selon des lois naturelles de la vie (voir vieillesse). «Tout dans la vie a un cycle, après la nuit vient le jour, après l’hiver, le printemps» (Kübler-Ross, 1992, p. 11).
Dans l’ensemble des livres pour enfants, l’animal meurt de vieillesse, c’est-à-dire de manière idéale. Bruno Bettelheim dit qu’«au cours de ses premières années, jusqu’à l’âge de 8 ou 10 ans, l’enfant ne peut se former des concepts hautement personnalisés qu’à partir de ce qu’il expérimente» (Bettelheim, 1979, p.81). C’est pourquoi j’ai mis en place des groupes de lecture suivis de discussion avec des enfants âgés de 6 à 12 ans pour qu’ils soient accompagnés dans l’approfondissement de leur questionnement. Ces groupes ont eu lieu en région parisienne. Les enfants avaient besoin de comprendre la mort en faisant appel à leur imaginaire. Ils allaient jusqu’à mimer ou ritualiser des scènes vécues dans les ouvrages pour mieux comprendre et intégrer le concept de la vie et de la mort.
C’est uniquement à partir du vécu que la compréhension de l’avant et de l’après mort est possible par l’expérience des étapes de deuil (exemple: faire référence aux types de relations, aux rituels). Les livres suggèrent des notions à l’enfant, mais c’est à lui d’en faire l’expérience intérieure. Les ouvrages peuvent introduire le thème de la mort. Généralement, les divers livres indiquent que le thème de la mort n’est pas pris en considération d’une manière satisfaisante et qu’il faut l’intégrer dans un projet plus cohérent, suppléant leurs carences essentiellement pédagogiques, comme dans le cadre de groupes de lecture et de discussion.
Un ouvrage qui suscite un réel débat sur la mort serait un album écrit par des enfants en dehors d’expériences douloureuses. Les ouvrages écrits par des adultes en fonction de leur vécu peuvent donner un caractère exclusif à la mort. Lors de groupe de lecture, nous avons introduit la lecture d’albums suivie de discussions afin de rendre à la mort son caractère universel et à la fois personnel en fonction de ses propres expériences. La notion de la mort ne peut être intégrée que lorsqu’il a été vécu. La dynamique des groupes de lecture et de discussion a permis aux enfants de partager leur expérience et d’explorer leur perception sur la mort.

Exemples d’un groupe de lecture et de discussion

Un enfant lit l’histoire de Blaireau , tandis que les autres élèves prêtent une oreille attentive. Blaireau , l’ami de tous, parce qu’il est vieux, un jour s’éteint. Il n’avait pas peur de la mort, il l’attendait même. Son corps ne fonctionnait plus aussi bien qu’auparavant. Seule la tristesse de ses amis l’inquiétait. Mais la présence de celui qui a dû partir habite ceux qui l’aimaient et le dialogue ainsi n’est pas interrompu.
L’auteur de cette histoire raconte l’avant, le pendant et l’après mort. L’avant est présenté sous la forme de préparatifs à un voyage. Cette idée de « voyage » n’est pas neutre d’un point de vue culturel. Le pendant consiste à la traversée d’un tunnel (voir l’Expérience de Mort Imminente / Near Death Experience ). On peut voir malgré le retrait historique des instances religieuses que les mentalités sont encore influencées par l’univers culturel et religieux. L’Expérience de Mort Imminente tout comme le néant n’est pas scientifique. Pour que cette démarche soit réellement pédagogique, il convient d’explorer avec l’enfant les multiples facettes des croyances sur l’après-mort.

L’Organisme de Recherche sur la Mort et l’Enfant (ORME) dispose d’un site internet à l’adresse [L=https://perso.wanadoo.fr/orme.asso/]http://perso.wanadoo.fr/orme.asso/[/L]
A côté d’informations habituelles (présentation de l’association, activités, documentation, liens,), on trouve des questionnaires permettant aux professionnels de l’éducation et aux enfants de témoigner sur le sujet, ainsi que des dessins d’enfants sur la mort et leur interprétation.

Lors de cette séance de lecture et de discussion avec des enfants âgés de 6 ans, certains ne comprenaient pas ce passage dans le tunnel où sont dessinées deux flèches, l’une pour aller vers la vie et l’autre vers la mort. Pour ces enfants, Blaireau se tue puisqu’il choisit de prendre la direction de la mort. Pour l’enfant, la mort provient d’un phénomène extérieur. Cet exemple, peut nous montrer qu’il est important de répondre aux questions des enfants et d’accompagner les jeunes dans leur lecture. En explorant le sujet de la mort, les enfants s’aperçoivent que tout le monde est concerné par la mort, et qu’elle peut survenir à n’importe quel moment. L’après-mort de Blaireau correspond aux souvenirs agréables qui restent. Les enfants par l’intermédiaire de cet animal se sont identifiés à leur propre mort, et se sont représenté la mort sous forme imagée. Un enfant peut être plus sensible à la mort d’un animal qu’à celle d’un adulte en raison de sa familiarité. La perte ne sera pas vécue de la même manière s’il s’agit de la mort d’un humain, d’un animal ou de la destruction d’un objet. Dans cette démarche, les enfants ont pris appui sur des images pour comprendre la mort non-illustrable. Les images ne représentent pas la mort. Vladimir Jankelevitch dit: «On ne peut expliquer que ce qu’il y a autour de la mort, pas la mort elle-même». C’est pourquoi outre les débats nous avons observé la mort d’un animal. Ce livre de Susan Varley permet d’effectuer un travail en amont avec l’enfant, en imaginant l’avant-mort, mais aussi de rassurer celui qui reste.

Les résultats qualitatifs

Dans l’ensemble, les enfants ont apprécié de parler de la mort, car c’était un thème facile à aborder pour eux et différent des sujets d’étude de l’école. Les enfants sont parvenus à parler de leurs propres émotions et se sont impliqués davantage afin de transmettre au groupe une partie de leurs sentiments et perceptions à propos de la mort. Il est apparu que les enfants étaient quotidiennement confrontés à la mort. Le groupe leur a permis de se concentrer et de partager leurs idées. Le simple fait de parler de la mort a été un moyen d’améliorer l’apprentissage scolaire. Parce que la majorité des enfants a établi un lien entre le vécu et ce qu’ils lisaient (album, livret traitant de la mort…), l’intérêt pour la lecture leur a permis d’améliorer la diction, l’attention, la concentration et leur apprentissage. Certains d’entre eux sont arrivés à une meilleure écoute et concentration. Ainsi, une fille de 7 ans a amélioré sa diction et acquis plus de facilité à transmettre ses idées. Un garçon de 7 ans a commencé la lecture pendant cette période. Il s’est mis à lire alors qu’il ne le faisait pas d’habitude. L’attention et l’observation générées par le groupe ont permis aux enfants et aux éducateurs de devenir eux-mêmes attentionnés et observateurs. Les mises en situations, les partages d’expériences donnaient aux enfants un regard différent sur la mort et sur autrui.
Ils s’exprimaient librement, en dévoilant des situations héréditaires, des secrets familiaux et des difficultés existentielles dans le but de les résoudre en famille. Les enfants qui se sont exprimés sur ce tabou se débarrassaient de l’image macabre de la mort. Ils ont parlé de la mort comme un état normal, mettant la société face à la réalité. Le fait de parler de la mort dès le plus jeune âge est une action préventive et très vivante.

Grâce à la démarche de groupe, les enfants ont posé spontanément des questions sur la mort en lisant des ouvrages en lien avec leur enseignant habituel et leur famille, permettant d’approfondir le sens de la vie. Cette démarche a révélé que nombreux étaient les adultes qui cachaient la mort et le(s) mort(s) aux enfants, et que cela avait un retentissement sur la scolarité et la santé des élèves. Le fait que les enfants se soient exprimés sur le sujet de la mort a été un soutien pour leur famille, en révélant parfois des événements jusqu’alors cachés. Les enfants et les adultes dans les groupes de discussion ont apprivoisé la mort en amont des difficultés existentielles afin qu’ils soient plus armés face à la vie. Un enseignant conscient de l’importance éducative de l’attention à la mort et de la nécessité d’accompagner la lecture des enfants sur ce thème saura saisir l’opportunité, dans la classe, pour explorer ce sujet si complexe. Marie-Ange Abras , cofondatrice et présidente de l’Organisme de Recherche sur la Mort et l’Enfant (ORME), chercheuse en sciences de l’éducation, associée au Centre de Recherche sur l’Imaginaire Social et l’Education (CRISE), Université Paris 8. Après cette réflexion et cette analyse, nous avons réalisé un album avec des enfants de 6 ans. Actuellement, nous sommes à la recherche d’une prise en charge pour éditer le livret intitulé: «Adieu grand-père». Si vous êtes intéressés, nous vous remercions de bien vouloir contacter Marie-Ange ABRAS, 22 rue Pierre Demours, 75017 Paris. Courriel: orme.asso@wanadoo.fr

Bibliographie

BETTELHEIM, Bruno (1979), Psychanalyse des contes de fée . Paris, Livre de Poche.
DEMERS, Dominique (1997), Des têtes tranchées à la mort éthérée. In Frontières , Les animaux et la mort, volume 10, numéro 1, 51-53. Québec: Université du Québec à Montréal.
KÜBLER-ROSS, Élisabeth (1992), Une lettre à un enfant devant la mort . Suisse: éditions du Tricorne.
VARLEY, Susan (1996), Au revoir blaireau . Paris: éditions Gallimard.

Aimer et être aimé(e) à tous les temps’

Le 30 Déc 20

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Aimer et être aimé(e) reste et restera toujours magique, mais ce n’est pas toujours aussi simple que dans les contes de fées. Je tiens beaucoup à parler de vie affective et sexuelle plutôt que d’éducation sexuelle, parce que l’amour, s’il n’est pas conte de fée, n’est pas non plus qu’un carnet d’actes techniques.
Il n’y a pas de «diplôme» en relations amoureuses et malgré les apparences et les représentations sexuelles qui envahissent notre quotidien (sexualité dans les films, au ciné, à la TV, dans la publicité, sur le net …), la vie sexuelle reste un tabou et de trop nombreux jeunes se retrouvent encore dans des situations complexes, prennent des risques pour leur santé physique et mentale, parce qu’ils n’ont pas reçu ou compris les informations relatives à la vie affective et sexuelle.
Le nombre d’IVG et de grossesses non désirées est en augmentation chez les jeunes filles de moins de 20 ans, le sida reste toujours bien présent et ses chiffres sont même en légère augmentation. Des MST réoccupent le terrain. Parmi les auteurs de maltraitance – selon les chiffres des équipes SOS Enfants – il y a 3,5% d’auteurs mineurs en 2002 contre 2,2% en 2001. De nouveaux travaux mettent en évidence les dérives, les effets pervers de l’accessibilité à la pornographie via internet, premier accès à la sexualité et donc à une certaine image de la femme. De plus en plus de jeunes (garçons surtout) utilisent ces sites en pensant y trouver des réponses aux questions liées à la vie affective et sexuelle.
Sans vouloir être moralisatrice, ces sites sont le reflet d’une société de consommation, où le corps est un objet. Et un objet ne pense pas et n’a pas de sentiment. «Le corps est un objet», c’est ce que déclarent aussi les consommateurs des sinistres tournantes, dont les Juges de la Jeunesse disent qu’elles sont en augmentation.
Je reçois aussi les témoignages de jeunes garçons, disant être un peu perdus, et j’ai gardé en mémoire cette phrase: «Les filles d’aujourd’hui sont très féministes, on a peur, on ne sait plus comment les aborder. On n’a pas envie d’être traité de macho». Sans compter les souffrances des jeunes qui ne se reconnaissent pas dans les schémas traditionnels proposés, puisqu’il faut le dire, affirmer son homosexualité ou sa bisexualité, d’autant plus à cet âge, reste vraiment compliqué. Les chiffres du suicide chez les jeunes homosexuels sont plus élevés encore que ceux des jeunes hétéros. Mais où et quand parle-t-on de l’identité sexuelle?
Face à ces différents constats plutôt inquiétants, il me semblait plus que jamais important de remettre une fois encore sur le tapis l’idée d’un cours abordant ces questions dans le cadre scolaire. Après avoir pris connaissance de différentes expériences, tant ici qu’au Québec, et en Suisse notamment, j’ai été séduite par le travail réalisé dans le Canton de Genève .
Il faut savoir que ce qui «coince» ici depuis de nombreuses années, c’est l’idée de créer un cours spécifique. J’ai donc trouvé intéressante l’idée d’animations relatives à la vie affective et sexuelle, données par des professionnels (les acteurs de planning, de PSE, PMS, acteurs de promotion de la santé). L’intérêt étant que l’ensemble des enfants puissent bénéficier d’animations « brise-glace » – comme on le dit à Genève -, tant en primaire, qu’en secondaire, sans oublier l’enseignement spécialisé. Les enseignants sont bien entendu en première ligne et une coordination devra s’organiser entre tous les acteurs concernés par ce processus.

Les étapes du processus

Après un an de concertation avec mes collègues concernés aussi par cette question aux niveaux communautaire et régional, une première réunion avec les acteurs de terrain (promotion santé, PSE, PMS…) a eu lieu en novembre 2002 et un comité d’accompagnement du processus a été mis en place.
Avant de vouloir proposer des animations de ce type dans les écoles, il fallait faire l’état des lieux de ce qui se faisait déjà, ou pas. Cet état des lieux, réalisé par ULB Promes sous la direction de Danielle Piette, vient d’être finalisé . Alors que le processus était entamé, il m’a semblé aussi important d’évaluer la question de l’orientation sexuelle: était-elle abordée et de quelle manière? Ce travail n’avait jamais été réalisé non plus en Communauté française.
Enfin, depuis septembre, un travail interuniversitaire (ULB, ULg, FUNDP) est en cours, qui a pour but de définir les grandes lignes des objectifs, contenus et stratégies, en fonction des années choisies pour la réalisation de ces animations soit, les 4e et 6e primaires, les 2e et 4e secondaires, sans oublier l’enseignement spécialisé. Il est évident que les thèmes abordés à 10 ans doivent être différents de ceux abordés à 14 ans.
Au cours de ce long processus, les fédérations de planning ont élaboré, en mai 2003, une «Charte pour une éthique des animations en éducation affective et sexuelle» ainsi qu’une proposition de canevas de base pour ces animations. C’est un outil intéressant qui sera aussi analysé.
Je lancerai aussi un appel à projets auprès des acteurs de terrain et d’établissements scolaires pour que des animations rentrant dans le cadre défini par l’étude interuniversitaire soient proposées. Je pense débloquer un budget prioritairement pour des projets pilotes en 4e et 6e primaire, ordinaire et spécialisé.
Mais ce projet n’est pas de ma seule compétence. Si je suis à son initiative, je ne peux pas en assumer seule la réalisation. Si tous les enfants des classes précitées devaient bénéficier de 2 x 2 heures d’animations dans l’enseignement primaire et 2 x 2 heures dans le secondaire, il faudrait, en gros, 53.224 heures par an, soit plus ou moins le double des heures actuellement consacrées à cette thématique. Mais il faut savoir que ce qui se donne actuellement ne se donne pas nécessairement dans les tranches d’âge retenues. De plus, il est absolument nécessaire de prévoir des heures de coordination, de concertation et de préparation.
Le projet-pilote sera pensé dès le départ dans un cadre de pluriannualité de façon à ce que l’on puisse en tirer des enseignements pertinents. Je tiens à laisser à mon successeur un scénario d’inclusion dans le cursus scolaire qui tienne la route, même s’il devra encore être affiné.
Je compte donc sur toutes celles et ceux que ce projet intéresse pour continuer et repartir des travaux réalisés en les précisant. Je voudrais aussi que mon appel soit entendu: avançons, avançons pour qu’aimer et être aimé(e), pour nos jeunes, soit doux et épanouissant.
Nicole Maréchal, Ministre de la Santé

Quelques données à méditer

Relations sexuelles

Les derniers chiffres collectés par ULB Promes dans le cadre de l’enquête de santé réalisée auprès des jeunes tous les deux ans nous montrent que:
44% des jeunes entre 15 et 18 ans ont des relations sexuelles, un chiffre stable depuis 1988.
Parmi ceux-ci, 16% ont plus d’un partenaire, 57% disent toujours utiliser le préservatif , 88% disent utiliser la pilule comme moyen de contraception, 96% ont déjà vu ou manipulé un préservatif (contre 64% parmi ceux qui n’ont jamais eu de relations sexuelles).
Enfin, 12% ont eu des relations sexuelles avant 14 ans, ce qui représente une augmentation de 5% depuis 1988. 20% des appels (soit 5.962 appels) concernent des questions relatives à la vie sexuelle et affective (items «vie sexuelle», «émotion et sentiments», «image corporelle»). A partir de leur expérience de vie, ces jeunes sont en recherche d’information, mais également d’espace de parole pour évoquer leur vie sentimentale, des questions d’identité et de construction de leur sexualité. Types d’appels: «mon petit copain voudrait faire l’amour, mais je n’ai pas envie», «j’ai 15 ans, je suis enceinte, je n’ose pas le dire à mes parents», «c’est quoi du sperme»,«je suis attiré par les garçons, suis-je normal?».
Un extrait du rapport d’activités 2002 de Ecoute Enfants: «L’entrée dans l’adolescence engendre de nombreuses questions liées aux transformations du corps et à l’éveil de la sexualité. Au travers des divers témoignages qui arrivent au 103, nous pouvons constater combien cette période de la vie suscite des interrogations, des doutes, des peurs et un besoin d’être rassuré. Par ailleurs, nous remarquons également le manque d’information des jeunes en matière d’éducation sexuelle et affective; beaucoup ignorent encore ou méconnaissent la contraception, de même que la prévention des maladies sexuellement transmissibles.» 55 % des élèves dans le primaire ordinaire, 84 % des étudiants dans le secondaire, 65 % des élèves dans le primaire spécial, 88 % des étudiants dans le secondaire spécial ont eu au moins une animation du type « vie affective et sexuelle, bien-être.»
Ces animations sont assurées par « l’interne » (professeurs, équipes PSE-promotion de la santé à l’école et PMS) dans 52 % des cas en primaire ordinaire, 58 % des cas en secondaire ordinaire, 66 % des cas en primaire spécial, et 91 % des cas en secondaire spécial.
Près de 3000 jeunes de 2e , 3e et 4e secondaire ont été interrogés. Il apparaît que 78 % d’entre eux ont bénéficié d’au moins une animation mais moins de la moitié ont eu une seule animation, un tiers en ont eu plusieurs et un cinquième aucune.
Dans plus d’un tiers des animations, les filles et les garçons sont séparés. La moitié des garçons préfèrent cette séparation tandis que les filles estiment qu’elle doit se faire uniquement en fonction du sujet abordé.
La moitié des jeunes interrogés ne veulent pas parler de ces sujets avec leurs parents.

La Ligne 103 (Ecoute – Enfants)

Etat des lieux

Imag’in le corps: retour sur le concours

Le 30 Déc 20

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En septembre 2002, le service Espace Santé (FMSS-FPS) lançait un grand concours auprès des étudiants de 16 à 28 ans de toute la Communauté française, quel que soit leur niveau d’étude, leur réseau d’enseignement ou leur orientation. Il s’agissait pour eux de créer une ‘oeuvre’ de vulgarisation sur le thème du corps humain, son fonctionnement naturel, l’essentiel étant la transmission d’une image positive du « corps en santé » . Ces projets ne concernaient donc pas un programme de promotion de la santé mais initiaient un processus créatif au sujet du corps en santé.
Les productions réalisées devaient s’adresser à trois types de public: des enfants de 5 à 7 ans , de 8 à 10 ans ou des adolescents de 11 à 15 ans.
Tous les moyens de communication étaient souhaités et attendus: bande dessinée, cédérom, chanson, conte, expérience, jeu, montage, scénario…
Le concours s’est déroulé sur l’année scolaire 2002-2003, en plusieurs temps. Les avant-projets devaient parvenir à Espace Santé avant le 15 novembre 2002. Les candidats devaient pour cela rédiger une fiche descriptive de leur projet, avec éventuellement un schéma, une maquette, un prototype de ce qu’ils souhaitaient réaliser, et surtout expliquer leur démarche et leurs motivations.
Pour cette première étape, 309 jeunes se sont mobilisés en équipe et 109 avant-projets ont été introduits dans les délais impartis.

Deux étapes pour dix élus

Espace Santé a alors réuni un jury largement interdisciplinaire, composé d’acteurs du secteur de la santé, de l’éducation, de créateurs, qui ont étudié les dossiers durant plusieurs séances de travail, sur base d’une grille d’analyse réalisée avec l’aide de l’APES ULg. Cette présélection consistait à voir si les avant-projets cadraient avec les objectifs du concours, notamment avec le critère principal d’adéquation au thème (la santé positive), ou encore si les étudiants candidats étaient bien les réels promoteurs du projet (et non par exemple des adultes qui occuperaient ainsi une place plus importante que celle de référents qu’on attendait d’eux). D’autres critères comme la présence d’objectifs clairement définis, ou l’adéquation au public étaient également présents. Pour chaque avant-projet étudié, qu’il soit retenu ou non, un petit avis était rédigé, motivant ainsi la décision du jury. Pour ceux qui étaient retenus, il s’agissait d’un soutien méthodologique, de conseils destinés à les aider à recentrer leur travail, à redéfinir des objectifs, ou encore leur suggérant de consulter l’une ou l’autre ressource existante… 33 dossiers ont ainsi été retenus à l’issue de cette étape.
L’étape suivante consistait en la réalisation de l’outil ou de son prototype, avec une échéance fixée au 15 avril 2003. Le défi pour tous les candidats était d’arriver à concrétiser leur projet en un temps somme toute relativement court. Le service Espace Santé était toujours présent pour répondre à toutes les questions ou inquiétudes des participants, pour les soutenir, sans jamais intervenir dans la concrétisation finale.
21 participants sont en définitive arrivés à bon port, ont présenté un outil fini. Et 10 d’entre eux ont été primés par le jury, toujours sur base d’une grille d’analyse reprenant des critères de forme (qualité, reproductibilité, attractivité, originalité…), de contenu (rigueur des informations, diversité des sources, cohérence…) ou encore de processus (interdisciplinarité, participation du public-cible…). Parmi ceux-ci, on retrouve deux albums illustrés, un dossier pédagogique, une valisette pédagogique, deux jeux de plateau, un jeu géant et un spectacle de clowns.
L’ensemble des participants ont été conviés à la fin du mois de juin à une après-midi festive pendant laquelle la remise des prix aux projets primés a eu lieu (prix remis en espèces, en entrées à des concerts, en bons d’achats…). Ce fut un moment de rencontre entre les étudiants et le jury, où toutes les productions abouties ont été exposées.
Dix élus en ligne pour vous
Un site est en ligne depuis quelques semaines, sur lequel les projets primés sont présentés. Son adresse: [L=https://www.espacesante.be/imagin/]www.espacesante.be/imagin[/L].
Espace Santé a réalisé une évaluation auprès des participants, des membres du jury et auprès des enseignants (seuls deux d’entre eux y ont répondu). Elle montre que ce type de concours, même s’il est difficile à mener à son terme, même s’il demande une fameuse dose d’énergie de la part de tous, est certainement une démarche très enrichissante. La partie remplie par les étudiants met en évidence que dans l’ensemble, ils ont plutôt travaillé individuellement, que ce concours leur a permis d’apprendre beaucoup de choses sur le corps en santé, que les professeurs se sont, à des degrés divers, investis dans le projet, ou encore que plusieurs d’entre eux souhaitent exploiter leur réalisation ou leur expérience, par exemple en améliorant et en publiant leur projet.

Pour tout renseignement sur le concours ‘Imag’in le corps’:
Espace Santé, Jeanne-Marie Delvaux et Chantal Dejardin,
rue de l’Université 1, 4000 Liège.
Tél.: 04-223 01 50.
Courriel: espace.sante@euronet.be
Maryse Van Audenhaege

Les membres du jury

Sophie Bourlet diététicienne au CLPS – Liège
Nathalie Da Costa Maya graphiste à l’ULB
Jacques Damas chargé de cours à l’ULg
Jacqueline Dechange enseignante à l’Ecole Normale Jonfosse – Liège
Chantal Dejardin animatrice au service Espace Santé – Liège
Jeanne-Marie Delvaux responsable du service Espace Santé – Liège
Anne Geraets chargée de projets au CLPS du Brabant Wallon
Sophie Grignard chercheure en promotion de la santé (accompagnement méthodologique) à l’APES – ULg
Jacqueline Molinghen kinésithérapeute à Seraing
Bernadette Pirsoul diététicienne au CRIOC – Bruxelles
Catherine Spièce responsable de projets à PIPSA – UNMS – Bruxelles
Virginie Tomelin bibliothécaire documentaliste au CLPS – Verviers
Maryse Van Audenhaege documentaliste – Infor Santé – ANMC – Bruxelles

Le palmarès ‘La découverte de Michel’
Aurore Guillery et Céline Parmentier, de la Haute Ecole Charleroi Europe – Gosselies
&&2e prix ex æquo 250 euros (SMAP)
‘Ouvre grand’
Grégory Fédoroff, du Centre Scolaire Notre Dame de la Sagesse à Ganshoren (Bruxelles) ‘Dans tous les sens’
Danusia Stelmaszyk, du Centre Scolaire Notre Dame de la Sagesse à Ganshoren (Bruxelles) ‘Le carps maison’
Joanne Hannotte, de l’Institut Sainte-Claire à Verviers ‘Spermi et Ovula’
Sophie Goffard, David Herman, Stéphanie Leclere, Julien Lefèvre, de la Haute Ecole – Elie Troclet – Jemeppe (Liège) – Catégorie sociale – section communication ‘Vivre tes 5 sens’
Caroline Mathias, de l’Institut de l’Enfant Jésus de Nivelles
Prix de l’encouragement
‘Les sens en éveil’
Alicia Dewanckele, Reginald Polmans, Nicolas Fischer, Nathalie Thirion, de la Haute Ecole Elie Troclet de Jemeppe (Liège) ‘Kaleidoscorps’
Larissa Liebertz, Catherine Pikard, Simsek Ugulsum, de la Haute Ecole Elie Troclet de Jemeppe ( Liège) ‘Manger du clown’
Classe de 6e technique Education physique – Animation socioculturelle ULM, la Madeleine – Tournai ‘A fleur de peau’
Céline Alin, Delphine Blaise, Amélie Dekaise, Céline Bertrand, de la Haute Ecole namuroise – Département paramédical – Ecole de Soins infirmiers – Sainte-Elisabeth

1er prix de 1000 euros (cabinet de Madame la Ministre Nicole Maréchal)
2e prix ex æquo 250 euros (SMAP)
2e prix ex æquo 250 euros (SMAP)
2e prix ex æquo 250 euros (SMAP)
Prix de l’encouragement
Prix de l’encouragement
Prix de l’interdisciplinarité
Prix de la méthodologie

L’obésité chez l’enfant

Le 30 Déc 20

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Depuis 1998, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère l’obésité comme une épidémie mondiale qui grève la santé et l’espérance de vie tant des adultes que des enfants et des adolescents. Cette épidémie reconnue est aussi la conséquence d’un ‘mal-vivre’ des jeunes au sein d’une sphère quotidienne qui doit harmoniser l’activité physique (et ludique), la nutrition et le sommeil. Cette notion de ‘mal-vivre’ versus un ‘mieux-vivre’ a incité l’équipe de la Ministre de la Santé à élargir la ‘cible’ de santé pour un projet de prévention globale.
Chez les jeunes en excès de poids, les risques associés à court, moyen et long terme sont les suivants: diminution de la résistance à l’effort, élévation de la tension artérielle, élévation du taux de sucre sanguin, élévation du taux de cholestérol, élévation du taux d’insuline, diabète type II (diabète gras), problèmes ovariens, problèmes respiratoires lors du sommeil (apnée du sommeil), maladies orthopédiques, calcul (lithiase) hépatique, infiltration graisseuse du foie, conséquences psychologiques, persistance de l’obésité à l’âge adulte (un enfant sur trois conservera son obésité à l’âge adulte).

Une pathologie aux causes diverses

Des origines génétiques et/ou métaboliques (au sens large et en dehors de toute pathologie bien reconnue): ‘Génétiquement, nous ne sommes pas égaux devant les calories’. Certains grossissent avec un verre d’eau ou à la vue d’une pâtisserie. « Métaboliquement, le thermostat physiologique ambiant n’est pas réglable ».
Le manque de dépense physique : il ne s’agit pas seulement de pratiquer une activité physique. Il s’agit avant tout de déconnecter la télévision, le PC et la console de jeux. La sédentarité est un facteur de risque majeur et croissant.
Les modes de vie familiaux : rappelons les missions et le rôle essentiel de l’ONE et de la médecine scolaire en matière de dépistage et de conseil. Ces structures devraient être particulièrement attentives aux facteurs de risque comme l’obésité parentale, les situations à haute vulnérabilité socio-économique, à haute vulnérabilité familiale, les familles marginalisées sur le plan ethno-culturel, les parents séparés, l’enfant unique, l’enfant négligé, les « assuétudes » à la télévision, le rebond d’adiposité avant 5 ans et demi, une naissance avec un petit poids pour l’âge, une alimentation par lait artificiel, des apports excessifs en protéines alimentaires au cours de la première année de vie, des habitudes alimentaires inadéquates (enfants et adolescents).
Mention particulière pour la télévision le ‘poison suprême’. Il existe une relation statistique directe aux USA entre l’augmentation de l’excès de poids chez les enfants et les adolescents et l’augmentation du nombre d’heures de TV. Sans compter l’influence des messages publicitaires alimentaires aux heures de ‘pointe’ pour les jeunes.

D’autres considérations

L’enfant obèse nécessite une prise en charge thérapeutique déclinée comme suit:
– consultation chez le médecin traitant (généraliste ou pédiatre);
– consultation chez le/la diététicien(ne);
– consultation à l’hôpital (équipe éventuellement pluridisciplinaire);
– séjour prolongé en institut diététique.
Les ‘bases’ de l’accompagnement thérapeutique, projet au long terme, sont d’essayer de rétablir un équilibre énergétique qui fasse perdre de la masse grasse excédentaire, en augmentant la dépense et en régulant au mieux les apports.
La prévention primaire, qui est l’objet de cette campagne, revêt aussi beaucoup d’importance. L’objectif est bien de sensibiliser et de mettre en garde la population en général, et une population à risque en particulier. Mais aussi de motiver et de soutenir les services de santé primaires comme la médecine scolaire.
L’école est un lieu de vie, elle n’est pas qu’un lieu d’apprentissage. C’est un lieu privilégié où l’on peut suggérer des compléments de gestion ‘familiale’ (budget, choix de marché, choix alimentaires). C’est un lieu où l’on peut promouvoir des activités ludiques, culturelles et physiques.
L’école, la communauté éducative sont à mobiliser: parents, enseignants, agents de la médecine scolaire, autant d’acteurs à engager dans des initiatives autour des cantines scolaires, des cafétérias, de la réduction du prix des fruits, des pique-niques, de la promotion de l’activité physique et du sport.
L’investissement, en terme de santé publique, est de longue haleine. Il rencontre d’autres pathologies chroniques. Toute prise en charge programmée de ce type de pathologie s’est avérée ‘moins chère’ qu’une prise en charge ponctuelle (pensons par exemple au diabète).

Prévalence et évolution

II n’existe pas d’enregistrement national de données concernant le surpoids et l’obésité. Cependant des études plus locales peuvent montrer une tendance à la hausse.
Les résultats ci-dessus proviennent d’une enquête réalisée en collaboration avec un réseau de centres de santé scolaire vigies dans le Hainaut auprès d’environ 4000 jeunes en 1997, 1100 en 2000 et 1200 en 2001.

Prévalence de la surcharge pondérale et de l’obésité franche chez les jeunes de 10 à 16 ans en Hainaut

Groupe d’âge

Année Surcharge pondérale Obésité franche
Groupe 10 ans 1997 23,4 4,7
2000 24,8 6
2001 20,3 4,5
Groupe 13 ans 1997 22,5 6,8
2000 32,9 9,7
2001 28 7
Groupe 16 ans 1997 18,7 5,2
2000 23,1 6,2
2001 23 6,5

Si l’obésité est aux alentours de 6% (selon les nouvelles normes internationales) et semble en augmentation, l’excès de poids, c’est-à-dire le poids à partir duquel on observe un risque accru de problèmes de santé est lui de plus de 20%. Il est particulièrement élevé dans la tranche des 13 ans. Dès cet âge, on remarque par exemple qu’environ 20% des jeunes présentent un excès de lipides dans le sang (enquête 1997).
D’après un texte du Dr Walter Burniat , Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola, ULB et IRIS
D’autres initiatives concernant la même problématique ont été prises récemment, notamment par Euralisa (Plate-forme ‘Alimentation et promotion de la santé’) et par la Société belge de pédiatrie (en collaboration avec la firme Danone): nous y reviendrons prochainement.

Les Motivés, une campagne de prévention de l’obésité chez les enfants de 8-10 ans

Le 30 Déc 20

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Un jeune sur cinq souffre d’une surcharge pondérale. Mais un garçon sur quatre seulement est préoccupé par son poids contre près d’une fille sur deux.

Le contexte

Le problème de surcharge pondérale chez l’enfant et chez l’adolescent croît de manière alarmante. Ces dernières années, tant les études épidémiologiques que cliniques ont montré que l’incidence de l’obésité a doublé, voire triplé pour rejoindre des taux similaires aux taux nord-américains avoisinant 10 à 15% des jeunes.
Ce phénomène inquiétant semble toucher maintenant toutes les catégories sociales sans distinction. Le tiers monde n’est pas épargné non plus. En Communauté française, les données produites par l’ULB-PROMES, l’Observatoire de la santé du Hainaut, l’Observatoire de la santé du Luxembourg et l’Enquête nationale de santé confirment les tendances internationales.
Ces études pointent entre autres les comportements et les modes de vie des jeunes en lien avec l’alimentation:
– 1 jeune sur 3 ne consomme pas de fruits chaque jour;
– 4 jeunes sur 10 ne consomment pas de légumes chaque jour;
– 1 jeune sur 10 consomme des frites tous les jours;
– 6 jeunes sur 10 consomment des chips, des sodas et des friandises tous les jours.
Ce n’est pas mieux au niveau des loisirs, avec près de 3 garçons (2 filles) sur 10 qui passent quotidiennement au moins 4 heures devant la télévision, une console de jeu ou des vidéos chaque jour.
Enfin, près de 2 jeunes sur 10 ne pratiquent aucune activité sportive en dehors de l’école.
Les facteurs de risque ont été bien établis: sédentarité, alimentation trop riche en graisses et en sucres, pauvre en fibres, modification des modes de vie (repas pris à l’extérieur, grignotage, etc.) et rythmes de vie peu en accord avec la promotion de la santé.
C’est l’ensemble de ces indicateurs qui a servi pour déterminer le contenu de la campagne. La nécessité de les rassembler dans un cadre commun est clairement apparue aux experts du comité d’accompagnement. Le concept de rythme de vie a dès lors été choisi comme le plus pertinent pour aborder cette problématique tout en évitant de stigmatiser les enfants obèses.
L’expérience clinique des membres du comité d’accompagnement (nutritionniste de l’enfance, pédopsychiatre responsable d’un internat diététique et pédiatre responsable d’une consultation excès de poids dans un hôpital académique) est venue ponctuer les contenus de communication en pointant d’autres facteurs de l’obésité et de la surcharge pondérale chez les jeunes comme les déterminants familiaux et psychosociaux. Ces éléments ont également servi de guide dans la sélection des messages, des supports et des publics-cibles visés.
Face à un phénomène d’une telle ampleur, il fallait s’atteler à définir les causes tout en se penchant sur les meilleures manières d’intervenir afin d’être le plus efficace possible.

Les recommandations

Issues d’analyses très larges (revue systématique et méta-analyse de programmes scientifiquement évalués) et basées sur l’évidence de la preuve de l’efficacité, les recommandations en matière d’interventions, insistent sur des approches préventives larges, généralistes et précoces visant aussi bien les enfants et les jeunes eux-mêmes que leurs parents et l’école.
Pour l’enfant obèse, par exemple, un des facteurs de réussite identifié indique que si un des parents poursuit un régime avec lui, il a plus de chance de perdre du poids Plus globalement et de manière plus préventive encore, les directives soulignent l’importance de sensibiliser les parents à leur rôle d’éducateurs en la matière. Les interventions et les programmes doivent conseiller les familles sur les modes de vie en faveur de la santé, les inciter à communiquer avec leurs enfants à ce sujet et les aider à installer ou à modifier les comportements de leurs enfants au niveau de l’alimentation et en matière d’activités physiques en préconisant des loisirs actifs.
A l’école , il ne faut pas se limiter aux actions pédagogiques mais aussi veiller à développer des environnements favorables à la santé. L’éducation nutritionnelle est en première ligne évidemment mais sans effet, voire contre-productive, si elle n’est pas accompagnée de mesures visant l’offre de repas, la vente de friandises, les distributeurs de boissons et les cantines scolaires. Cette cohérence est également à établir en matière d’activités physiques. On pense aux cours d’éducation physique bien sûr mais il faut offrir aux enfants la possibilité de bouger et de se détendre régulièrement à l’école.
Très clairement, il faut mettre en œuvre et/ou en cohérence une mosaïque d’actions dirigées tant vers les familles que vers les écoles. Il va de soi que la sensibilisation des parents et des enseignants est indispensable. Il s’agit donc de mettre en place un dispositif large combinant à la fois la sensibilisation des enfants, de leur famille et des enseignants. Les directives recommandent la formation des enseignants et le développement de supports pédagogiques pour les aider dans la mise en place de programmes préventifs à l’école.

La campagne des Motivés

Globalement, l’objectif de cette campagne vise à sensibiliser le public aux facteurs déterminants de l’obésité chez l’enfant. Plus spécifiquement, elle donne l’envie aux jeunes de 8 à 10 ans de s’identifier au clan des ‘motivés’ qui est un groupe de jeunes branchés qui ont adopté des rythmes de vie en faveur de leur santé. De façon complémentaire, la campagne invite les jeunes à surfer sur le site www.motives.be pour rejoindre le clan (et donc adopter aussi ces rythmes de vie pour en faire partie).

Le contenu

La campagne « Promouvoir les rythmes de vie chez les jeunes de 8 à 10 ans » repose sur trois axes:
– le rythme de l’alimentation: prendre 4 repas par jour (dont le goûter);
– le rythme du sommeil: dormir 10 heures par nuit ;
– le rythme du corps: se dérouiller les jambes toutes les 2 heures .

Le public–cible

La tranche d’âge 8 -10 ans n’a pas été sélectionnée au hasard. L’opération cible à la fois l’adhésion, l’engagement des enfants, la sensibilisation et le soutien des parents. Plus jeunes, les enfants ne sont pas encore sensibles à l’appartenance à un groupe, et, plus âgés, l’implication des parents est plus difficile.
Les caractéristiques propres des enfants de 8 à 10 ans en matière de développement psycho-affectif, cognitif, social et leur perception de santé à cet âge en font un public privilégié pour atteindre les objectifs fixés plus haut.

10 – 4 – 2

En 2003, que mettre en exergue pour que nos enfants se sentent bien dans leur peau?
Il nous paraît essentiel de revenir à un rythme d’habitudes de vie dans une société où tout va vite, où l’on déstructure les journées à cause des horaires professionnels des parents, des exigences des trajets, de l’impact de la TV…
Il est souhaitable de faire 4 repas par jour , de bouger tous les jours et toutes les 2 heures au cours de la journée scolaire, de bien dormir 10 heures par nuit mais surtout de créer un rythme régulier du sommeil.

La santé vient en mangeant

Dans un cadre convivial, proposons 4 repas consommés assis à table ceci dans le but de structurer la journée alimentaire.
Le petit-déjeuner, c’est bien connu, est essentiel à l’état d’éveil matinal. De plus, les scientifiques n’ignorent pas que la physiologie de l’enfant n’est pas bien adaptée au jeûne prolongé de la nuit s’il ne mange pas le matin. Autre avantage, le petit-déjeuner met sous contrôle les fringales de 10 heures ou de midi qui surviennent s’il est absent, et de ce fait aide à réguler les consommations et donc le poids.
Choisissons les aliments appréciés par les enfants en nous souvenant qu’il faut donner la préférence aux aliments de densité nutritionnelle élevée et de densité énergétique basse. Quid? Choisir des aliments plus riches en eau, en fibres, en micro-nutriments plutôt que des aliments très gras, très sucrés, pauvres en eau… (caractéristique de bien des aliments manufacturés). Apprendre à bien choisir tout en restant proche des désirs des enfants, c’est possible.
Restons également raisonnable quant aux rations consommées. Il faut acquérir une notion de satiété confortable et non de réplétion totale.
Traitons avec souplesse les goûts et les dégoûts des enfants, acceptons qu’un jour ils mangent moins, évitons les impératifs du genre: ‘tu gaspilles les aliments, finis ton assiette à tout prix’.
L’importance du 4e repas : un goûter complet, varié, consommé en une prise est favorable pour aider à restructurer la journée alimentaire, à assurer la bonne couverture des nutriments, à contrôler le grignotage. Ce dernier est souvent le résultat d’une consommation de ce qui tombe sous la main et n’est pas considéré (à tort) comme une ingestion alimentaire et contribue finalement au développement de la surcharge de poids. Le goûter aide aussi à améliorer l’attente du souper, à préparer au sport ou à un exercice physique.
Le repas principal est soit consommé le midi soit le soir. Nous faisons un plaidoyer pour un repas complet le midi mais il ne faut pas dénigrer le pique-nique à condition qu’il soit bien agencé.
Réservez au repas du soir un moment d’échanges, c’est tellement important pour toute la famille.
Buvons de l’eau, mangeons un féculent à chaque repas, 2 produits laitiers par jour, 5 rations de fruits et légumes par jour.
Bien reposés, avec un stress déchargé par l’exercice physique et un corps en forme, nos enfants seront mieux disposés à bien se nourrir!
Jacqueline Absolonne , diététicienne-nutritionniste

Les enfants de cette tranche d’âge sont sensibles aux arguments santé: d’une part ils ne se situent pas encore dans le déni et dans l’opposition caractéristique des pré-adolescents et d’autre part, ils peuvent s’enthousiasmer pour de grandes causes. Du point de vue de leur développement social, «l’importance du groupe prend le pas sur l’influence d’un seul ami (…) en ce qui concerne leur approche de la santé, l’enfant est capable de prendre certaines décisions raisonnées pour sa santé. Les définitions de la santé qu’il donne sont encore principalement axées sur l’aspect physique. Etre en bonne santé, c’est avoir la forme, c’est être bien dans sa peau. Les thèmes santé qui le préoccupent accordent une priorité à la diététique, la sécurité, la bonne forme physique, la préservation et la conservation de l’environnement ainsi qu’aux soins aux animaux».
(La santé de demain par les enfants d’aujourd’hui. Guide méthodologique pour les enseignants des écoles primaires. ULB/PROMES 1994)

Le principe: l’adhésion

La campagne repose sur l’envie de faire partie d’un clan ou d’une tribu composée de jeunes branchés et sympas qui ont comme signe de ralliement notamment le rap. La campagne va à contre-courant d’un mode de vie ne respectant plus aucun des rythmes de vie. Elle cible les jeunes de 8-10 ans qui ne mangent qu’un ou 2 repas par jour, qui grignotent, qui ne dorment pas suffisamment la nuit et qui privilégient les loisirs passifs (consoles de jeux. TV, vidéo…) plutôt que les loisirs actifs (vélo, planche à roulettes…).

L’objectif

Il est d’inciter à la mise en place de programmes «Rythmes de vie» en synergie avec les programmes existants en Communauté française comme par exemple les opérations «A table les cartables» en matière d’alimentation et «Clés pour la forme» en matière d’activités physiques. Les enseignants constituent un des leviers pour aboutir au développement de tels programmes dans les écoles. Le site (et ses liens vers des sites éducatifs spécifiques) et le dossier pédagogique, offrant des repères méthodologiques et un inventaire des ressources disponibles en Communauté française, devraient contribuer à la mise en place de projets dans les écoles.
La réforme de la médecine scolaire actuellement en cours et dans ce cadre l’organisation de la formation des agents des services de promotion de la santé à l’école et PMS de la Communauté française offre, elle aussi, une bonne opportunité de promotion de cette initiative.

La démarche

Un comité d’accompagnement qui rassemble des experts médicaux en nutrition et en pédopsychiatrie, des experts de la communication en promotion de la santé, des experts en diététique et en alimentation ainsi que des acteurs de terrain directement impliqués avec des jeunes, dans la prévention de l’obésité se réunit depuis le mois de janvier pour piloter la campagne. L’asbl Question Santé a géré, avec mon Cabinet, l’ensemble des opérations. J’ai fait appel à Clepsydre Communication pour son savoir-faire en communication et son expérience avec les enfants.

Les supports

Le dispositif de campagne repose sur la diffusion de spots publicitaires en TV et radio.
Composé d’activités ludiques, de jeux, de ressources…, un site internet https://www.motives.be est accessible aux enfants. Les parents et les enseignants y trouveront également des informations intéressantes.
Un numéro spécial du Journal de l’enfant a aussi été réalisé, avec un tirage de 23.000 exemplaires à destination des jeunes et des écoles.
Pour les enseignants désireux de prolonger la campagne dans leurs classes et dans leurs écoles, un dossier pédagogique sera disponible début janvier. Il est en cours de réalisation. Il sera constitué de fiches méthodologiques et d’un inventaire des ressources disponibles dans les trois domaines de la campagne. Il ne s’agit en aucun cas de réinventer un nouvel outil mais bien de mettre en connexion les nombreuses initiatives prises dans ces secteurs. La Communauté française en a soutenu plus d’une. Le dossier sera diffusé par l’intermédiaire des services de promotion de la santé à l’école. Une brochure, spécialement destinée aux parents, est également prévue.

Nicole Maréchal , Ministre de la Santé

Soutenir les personnes diabétiques. Des actions de terrain

Le 30 Déc 20

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Parmi les différentes actions menées par la Mutualité chrétienne et ses partenaires, voici trois exemples, à la fois pour un public large et pour un public de personnes diabétiques.

Deux initiatives en Brabant wallon

Dès le lancement du Passeport du diabète, le secteur socio-éducatif de la Mutualité chrétienne du Brabant wallon a manifesté son intérêt pour relayer l’information auprès de ses membres et du public mutualiste.
En premier lieu, d’octobre à novembre 2003, Infor Santé, l’ACIH-AAM (Association chrétienne des invalides et handicapés- Aide aux malades) et l’UCP (Union chrétienne des pensionnés) ont lancé un cycle de conférences ouvertes à tous et ayant pour but une information généraliste sur le diabète. Six villes ont été choisies : Nivelles, Tubize, Braine l’Alleud, Wavre, Genval, Jodoigne.
De plus, pour coller à la réalité du terrain, les intervenant(e)s étaient des infirmier(e)s référent(e)s de l’ASD (Aide et Soins à Domicile) de la région sensibilisée. On peut parler de succès puisque chaque conférence a touché entre 30 et 50 personnes.
Le projet a été ensuite, en 2004, de créer un ou deux ateliers diabète sur Tubize et Wavre. Le but, cette fois, était de toucher clairement un public de patients diabétiques et de leur fournir une information sur des aspects spécifiques de la maladie (diététique, podologie…) La première tentative, en juin, a été un relatif échec : la réunion à Tubize n’a pu être organisée faute de participants, pour celle de Wavre, 5 personnes se sont présentées. Cela dit, ces cinq personnes, trouvant le concept intéressant, ont manifesté leur souhait de poursuivre le travail.
Le deuxième atelier, qui a eu lieu début septembre, était consacré aux collations des diabétiques avec dégustation de produits adéquats. Cette fois, le succès était au rendez-vous puisque nous étions une trentaine. En novembre, une troisième réunion a été consacrée, à la demande du public, à l’équilibre alimentaire du diabétique tout au long de la journée.
Eric Jauniaux , Infor Santé, Mutualité chrétienne du Brabant wallon
Renseignements : Infor Santé BW, Eric Jauniaux, 067 89 36 87; ACIH-AAM BW, Fabrice Laurent, 067 89 36 80.

Ateliers diététiques en province de Luxembourg

La surveillance quotidienne de l’alimentation constitue pour tout patient diabétique une nécessité dans la prise en charge de la maladie. Cela demande souvent des adaptations et changements d’habitudes alimentaires qui impliquent aussi la famille.
D’une manière préventive et afin d’éviter des complications, il convient d’insister sur les bienfaits d’une alimentation saine et équilibrée. Comment s’y retrouver, que choisir… autant de questions qui ont motivé notre choix à proposer aux personnes diabétiques ainsi qu’à leur entourage des séances d’information sur l’aspect diététique.
Il s’agit de quatre ateliers de deux heures animés par une diététicienne de la Mutualité. Ces réunions ne sont pas des consultations, elles ont pour objectifs d’apporter un savoir supplémentaire afin de gérer encore mieux la maladie, de recevoir des conseils pratiques, de partager ses expériences et de se sentir moins seul(e) face à la maladie.
Au programme:
Reconnaître les différents sucres au quotidien
Glucose, glucide, glycémie, édulcorant, comment s’y retrouver?
Principes de la pyramide alimentaire, teneur en sucre des différents aliments et savoir les reconnaître. Comprendre l’index glycémique et les facteurs qui l’influencent.
Lecture des étiquettes et emballages
Quand les courses deviennent corvée, comment faire les bons choix?
Reconnaître et comprendre la composition nutritionnelle des produits au travers d’exercices pratiques.
Les produits « lights » et les édulcorants
Aspartame ou « faux sucre », que faut-il comprendre ? Les différentes sortes d’édulcorants.
Cuisine et plaisir, c’est possible
Cuisiner et manger rime avec plaisir et non frustration! Echange de recettes, de trucs et astuces, composition de menus variés et équilibrés.
Une dizaine de personnes ont assisté à ces séances.
Jeunes ou moins jeunes, directement concernées ou venues pour un proche, dans l’ensemble les personnes présentes avaient le sentiment de ne pas maîtriser suffisamment l’alimentation au quotidien. Un constat général: l’information de départ qui leur a été fournie en début de maladie par le diabétologue, l’infirmière ou autre n’est plus d’actualité ou encore a été mal comprise. Avec les années, celle-ci s’est modifiée. Le fait de se rafraîchir la mémoire était une des principales motivations.
Avoir la possibilité de poser des questions au fil des explications de la diététicienne, échanger directement avec d’autres patients et surtout s’exercer pratiquement comme par exemple dans la lecture des emballages, tout cela dans une ambiance conviviale, est profitable pour tous et surtout un excellent moyen de s’approprier ou se réapproprier l’information.
«Gérer son alimentation au quotidien, après tout ce n’est pas si compliqué!» tel pourrait être le sentiment général au terme des ateliers.
Sylvie Reuter , Infor Santé, Mutualité chrétienne de la Province de Luxembourg
Renseignements : Infor Santé Province Luxembourg, Sylvie Reuter, 063 21 18 80.

Et l’hôpital? A-t-il sa place dans l’éducation des patients diabétiques?

A travers les Initiatives de Qualité, Solimut (1) et la Mutualité chrétienne cherchent à soutenir les dynamiques qui existent au sein des hôpitaux en faveur de la qualité des soins. Parmi les projets soutenus, un s’intéressait à l’éducation des patients diabétiques en milieu hospitalier.
A l’occasion d’un séjour à l’hôpital, 800 patients diabétiques de deux hôpitaux ont ainsi bénéficié d’une séance d’éducation sur le diabète, alors qu’ils étaient hospitalisés pour une autre raison.
La responsable d’unité identifiait les patients et informait l’infirmière éducatrice qui passait environ une demi-heure avec chaque patient, pour lui rappeler les principales complications et lui recommander de retourner voir son généraliste, de faire doser régulièrement son hémoglobine glyquée, de passer chez son ophtalmologue et de faire vérifier l’état de ses pieds. Le diabète de ces patients était plutôt bien équilibré.
Nous étions très intéressés de savoir ce que les patients retiendraient de cette séance d’éducation. Le Centre d’appel de la Mutualité chrétienne (0800) a appelé chacun d’entre eux pour leur poser quelques questions. La plupart des patients se souvenaient bien de l’entrevue et de son contenu. Ils déclaraient également avoir parlé de leur diabète à leur généraliste et avoir bénéficié d’un examen du fond de l’œil.
Nous sommes encore occupés à valider ces résultats par une analyse de notre base de données informatique. En effet, bien que ces premiers résultats soient encourageants, la question reste posée de savoir quelle place l’hôpital devrait occuper dans l’ensemble de la prise en charge des patients diabétiques.
A ce stade, on peut en tout cas dire que l’éducation du patient diabétique à l’hôpital peut renforcer le travail réalisé par les autres intervenants. Les activités mises en place à l’hôpital devront donc veiller, comme dans notre projet, à garder au médecin généraliste le rôle central qui lui revient.
Xavier de Béthune , Coordinateur des Initiatives de Qualité, Solimut
Renseignements : 02 246 49 65; xavier.debethune@worldonline.be
(1) Solimut est une société mutuelliste des Mutualités chrétiennes gérant notamment le projet collectif Hospi solidaire , dans le cadre duquel des conventions ont été passées avec une trentaine d’hôpitaux du pays.

Pour une politique cohérente des drogues en Belgique

Le 30 Déc 20

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La Concertation Toxicomanies Bruxelles – Overleg Druggebruik Brussel regroupe les acteurs bruxellois de la prévention, de l’aide, des soins et aussi ceux de la répression et du judiciaire (1) .
La Concertation, forte de son analyse du travail du gouvernement fédéral sortant (2) , qu’elle juge sévèrement (forte implication, mais manque de cohérence et communication défaillante), met en évidence les huit points suivants:

– les usages, les abus et les dépendances étant largement déterminés par des facteurs culturels, économiques et sociaux, éducatifs et environnementaux, une politique des drogues nécessite des efforts significatifs dans ces domaines. L’investissement du gouvernement précédent doit être poursuivi, mais d’une manière différente, en accordant plus d’attention aux personnes et aux déterminants des consommations qu’aux produits;
– un effort considérable doit être entrepris pour finaliser un document qui inclurait les contributions des niveaux fédéraux et des entités fédérées (y compris Bruxelles). Ceci devrait être la tâche prioritaire de la future ‘Cellule globale politique des drogues’;
– le gouvernement fédéral, dans sa note politique, rejoint la position bruxelloise en affirmant que l’abus des drogues est d’abord un problème de santé publique. Cette priorité pour la santé doit se refléter clairement tant dans la structure générale du dispositif que dans les priorités d’action et dans les moyens humains et budgétaires alloués au secteur santé;
– la prise en compte de l’ensemble des produits psychotropes dont la consommation peut entraîner des problèmes de santé, et non plus en raison de leur statut illégal, résulte de l’évidence scientifique. Cela devrait se répercuter dans les mesures politiques concrètes;
– il subsiste dans la ‘note fédérale’ de nombreuses incohérences entre les approches ‘Santé publique’ et ‘Justice-Intérieur’, notamment dans la politique pénitentiaire. La CTB/ODB plaide pour que soient levées ces ambiguïtés, et que l’approche de santé retrouve la place prioritaire qui lui revient;
– la santé est dans notre pays une compétence partagée. A ce jour, la ‘Cellule politique de santé drogues’, mise en place pour permettre la participation des entités fédérées, n’a pas fait la preuve de sa capacité à faire suffisamment entendre et respecter les points de vue de ces dernières;
– le manque de clarification des concepts et des termes, ou de consensus sur ces termes, est un écueil. Il en est ainsi notamment de ‘prévention’, ‘réduction des risques’, ‘usage problématique’, ‘nuisances publiques’, ‘case-manager’, ‘avis thérapeutique’, ‘réseau et circuit de soins’;
– les situations évoluent sans cesse et peuvent se présenter différemment à l’intérieur du territoire. Ceci plaide à la fois en faveur d’un dispositif d’observation et d’analyse des problèmes, respectueux des spécificités locales, et d’un soutien conséquent aux besoins de formation initiale et continuée des professionnels de terrain. D’après un communiqué de presse de CTB-ODB Concertation Toxicomanies Bruxelles – Overleg Druggebruik Brussel,
quai du Commerce 7, 1000 Bruxelles.
Tél.: 02 – 289 09 60.
Fax: 02 – 512 38 18.
Courriel: ctb.odb@beon.be
(1) Certains d’entre eux jouent également un rôle-clé en promotion santé, tels Infor-Drogues, Modus vivendi ou encore Prospective Jeunesse.
(2) Voir DE BOCK C., GEERTS P., Bastin P., ‘Cannabis: fin de l’hypocrisie?’ Education Santé n°160, juin 2001

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La santé et l’éducation, mamelles de la croissance

Le 30 Déc 20

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L’économie des pays se porte mieux quand leurs citoyens ne sont ni malades ni analphabètes, analyse le dernier Rapport mondial sur le développement humain publié par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Une évidence que le credo libéral de la dernière décennie avait fait perdre de vue.
La croissance économique et la mondialisation considérées durant la dernière décennie comme les pivots du développement des pays pauvres ont, semble-t-il, perdu de leurs attraits si l’on en croit les auteurs du Rapport mondial sur le développement humain 2003 , intitulé « Surmonter les obstacles structurels à la croissance pour atteindre les objectifs ». Ils prônent aujourd’hui une nouvelle approche de l’aide et du développement, présentée dans le Pacte du millénaire pour le développement , un plan d’action visant les pays qui ont « les pires difficultés à se développer ». Au cœur de leur réflexion, la priorité absolue à donner à la santé et à l’éducation, fondements de toute croissance.
Ce pacte est parti du constat consternant que 21 pays ont vu leur situation socio-économique se dégrader au cours des années 90, selon l’indicateur de développement humain qui prend en compte l’espérance de vie, le niveau d’instruction et le revenu. Parmi eux, 14 pays africains – Afrique du Sud, Botswana, Cameroun, Congo, République démocratique du Congo, Kenya, Côte d’Ivoire, République centrafricaine, Burundi, Lesotho, Swaziland, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe – et les pays de l’ex-Union soviétique dont certains sont presque au même niveau que l’Afrique.
Pourtant on enregistre aussi de bons résultats sur le continent africain, preuve que tout reste possible: 12 % de la population souffraient de la faim au Ghana en 2000 contre 35 % en 1990, le taux de scolarisation a grimpé de 20 % au Bénin, de 15 % au Mali et au Sénégal. Plus de filles vont à l’école au Mali comme en Mauritanie. Le taux de mortalité infantile a baissé un peu partout. Plus de gens ont aussi accès à l’eau potable. Malgré ces progrès notables, l’Afrique dans son ensemble a stagné durant la dernière décennie et, croissance démographique aidant, de plus en plus de gens vivent dans un dénuement extrême. Le décollage économique que devait engendrer la libéralisation se fait toujours attendre.

Une main-d’œuvre en bonne santé et bien formée

L’enclavement géographique de nombreux pays, la mauvaise gouvernance, une répartition très inégale des revenus, la nouvelle donne des marchés mondiaux et le sida qui pèse lourdement sur certains pays expliquent ces mauvaises performances. Pour renverser la tendance, il faut certes jouer sur plusieurs fronts, mais, insistent à plusieurs reprises les auteurs du rapport, « pour obtenir une hausse sensible du revenu par habitant , il faut d’abord faire des progrès considérables en matière de santé et d’éducation ». L’importance de ces secteurs de base, souvent sacrifiés par les plans d’ajustement structurel durant les dernières décennies, revient en force aujourd’hui. Leur amélioration est celle qui entraîne toutes les autres dans son sillage. Une population en bonne santé, ce sont des enfants qui profitent mieux de l’école, des actifs plus productifs, des femmes qui utilisent des moyens contraceptifs. Et à terme une main-d’œuvre mieux formée qui fait souvent défaut.
D’autres facteurs conditionnent les investissements internationaux et le développement des petites et moyennes entreprises, indispensables au décollage économique. Ainsi l’amélioration des transports, en particulier des routes pour désenclaver les pays sans accès à la mer et aux marchés, s’avère nécessaire dans de nombreux pays. En outre, pour la plupart des pays aux faibles marchés intérieurs, l’intégration régionale qui permet d’élargir les débouchés est vitale.
C’est le cas du Mali, pris comme exemple dans le rapport, qui est enclavé et où les habitants peu nombreux souffrent, entre autres, du paludisme et du sida. Pourtant il « pourrait se révéler performant dans l’exportation de textiles , le tourisme et le conditionnement des produits agricoles tropicaux » à condition que des seuils minimaux soient atteints en matière de santé, d’instruction et de transport.

Sortir du «piège de la pauvreté»

C’est aux Etats d’impulser ces réformes mais le secteur privé a un rôle primordial à jouer. Cependant, et c’est un autre tournant qui se dessine, la privatisation des entreprises publiques qui s’est avérée efficace dans certains pays, n’est plus considérée comme la panacée. Enfin, estime le rapport, une décentralisation bien menée favorise l’efficacité sur le terrain et le contrôle par les populations.
Pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement , adoptés par les dirigeants du monde lors du consensus de Monterrey en mars 2002 (voir encadré), qui servent de cadre à ce plan d’action, les gouvernements des pays les plus pauvres doivent mobiliser leurs ressources intérieures, lutter contre la discrimination et les inégalités. Mais selon le rapport du PNUD, 59 pays dit prioritaires (dont 13 en Afrique) risquent de ne pas les atteindre sans intervention urgente des pays riches. Dans trente et un d’entre eux (dont 25 en Afrique), qualifiés « d’absolument prioritaires », les indicateurs de développement humain, très faibles, stagnent ou régressent. Ainsi au rythme actuel et sans aide supplémentaire, il faudrait plus de 150 ans à l’Afrique, pour réduire de deux tiers la mortalité infantile.
C’est là qu’intervient le Pacte pour le développement proposé par le rapport :si les pays démunis s’engagent dans ces réformes, les pays riches s’engagent eux à leur apporter un important soutien pour les mener à bien: accroissement de l’aide financière, suppression des droits de douane, des quotas à l’importation et des subventions à l’agriculture, réduction ou annulation de la dette. Comment les uns et les autres conjugueront-ils leurs efforts pour sortir les pays démunis du « piège de la pauvreté »? Le rapport ne le dit pas.
Marie Agnès Leplaideur , InfoSud-Syfia

Les Objectifs du millénaire pour le développement

1 Faire disparaître l’extrême pauvreté Eliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements. Réduire des deux tiers la mortalité des enfants de moins de 5 ans. Réduire des trois quarts le taux de mortalité maternelle. Instaurer un système commercial et financier plus ouvert, subvenir aux besoins spécifiques des pays les moins avancés, des pays enclavés et des petits Etats insulaires, engager une démarche globale pour régler le problème de la dette, imaginer et appliquer des stratégies de nature à créer des emplois productifs pour les jeunes, proposer des médicaments essentiels accessibles à tous, mettre à la disposition de tous les bienfaits des nouvelles technologies.
M-A L.

Réduire de moitié le nombre de gens vivant avec moins d’un dollar par jour et la proportion de ceux qui souffrent de la faim.
2 Garantir à tous une éducation primaire
3 Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
4 Réduire la mortalité des enfants
5 Améliorer la santé maternelle
6 Combattre le VIH/sida, le paludisme et autres maladies
7 Assurer la durabilité des ressources environnementales
8 Mettre en place un partenariat mondial pour le développement
L’échéance pour atteindre les sept premiers objectifs est fixée à 2015. Aucun échéance n’est prévue pour l’objectif 8.