Articles de la catégorie : Initiatives

Mon cartable poids plume

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Les trois mots-clés de la campagne

Trier : de quoi-je besoin aujourd’hui? J’emporte uniquement ce qui est nécessaire.
Ranger : j’organise correctement le contenu de mon cartable, je répartis les objets pour l’équilibrer, les objets les plus lourds seront contre mon dos.
Ajuster les sangles : je porte mon cartable ‘tout’ contre mon dos.

Dans le courant de l’année 2003, Jean-Marc Nollet , Ministre de la Petite enfance et de l’Enseignement fondamental, a réuni un groupe d’experts et intervenants, essentiellement du monde de l’éducation, et pour certains du secteur de la santé, afin de réfléchir au problème récurrent du poids du cartable sur les épaules des jeunes écoliers.
L’idée était d’impliquer les enseignants, les parents et les enfants dans la réflexion et la gestion de cette problématique, dans l’optique d’un meilleur bien-être des enfants, avec à l’arrière-plan la prévention des maux de dos. D’après l’Ecole des sports de l’ULB, qui développe depuis quatre ans des animations dans les écoles primaires de Wallonie et de Bruxelles, des enquêtes indiquent que 20 % des enfants du primaire et 60 % des élèves du secondaire se plaignent déjà de maux de dos. Le port inadéquat du cartable est un des facteurs à l’origine de ces plaintes, avec le manque d’exercice et le mauvais maintien.
La campagne a démarré en octobre dernier, par l’envoi dans les écoles primaires d’un courrier du Ministre, de dépliants, d’affichettes et de signets pour les enfants, ainsi que par le lancement d’un site sur lequel les trois publics visés, et particulièrement les enfants, sont appelés à l’action. Son adresse: [[L=https://www.moncartable.be]www.moncartable.be[/L]
La rubrique qui s’adresse plus particulièrement aux enfants s’intitule ‘Cartable à malices’: ils y trouveront une série de jeux, d’informations et de témoignages d’autres enfants.
Une rubrique ‘Cartable pratique’ pourra servir de lien entre les classes et les écoles, afin d’échanger les trucs et astuces utilisés par chacun.
La rubrique ‘La plume des enseignants’ fournit une série de pistes pédagogiques et d’idées d’animations dans différentes matières scolaires: français, mathématique, exercice physique, éveil scientifique, technologie…
Une série de textes de référence et une liste de ressources complémentaires sont aussi disponibles sur le site. Enfin, le dépliant et les signets avec les visuels de la campagne peuvent être téléchargés.
N’hésitez pas à le visiter!
Renseignements complémentaires : Cabinet du Ministre de l’Enfance , tél . 02 213 35 11 .
Maryse Van Audenhaege

Les partenaires L’Union des fédérations des associations des parents de l’enseignement catholique – UFAPEC

L’A.G.E.R.S. – Service général des affaires pédagogiques et du pilotage du réseau d’enseignement organisé par la Communauté française
La Fédération des associations de parents d’élèves de l’enseignement officiel – FAPEO
La Ligue des familles
L’Ecole des sports de l’ULB
Ampli Junior – Mutualités socialistes de Charleroi
Infor Santé – Alliance nationale des mutualités chrétiennes

Un plan offensif du cdH pour une stratégie globale de lutte contre le tabac

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

La lutte contre le tabagisme doit être une priorité politique absolue. Il y va de la vie de près de 20.000 personnes par an. Le cdH et sa députée Catherine Doyen-Fonck proposent un plan global de lutte contre le tabagisme. Celui-ci se décline autour de 5 axes et se concrétise par des propositions législatives (propositions de loi, de résolution, interpellations parlementaires) que la Députée cdH soumettra à la discussion parlementaire durant cette législature.

Limiter l’accès aux produits de tabac

Interdire la vente aux mineurs

Si une politique d’interdiction n’est a priori pas adéquate si l’on veut responsabiliser les citoyens à l’égard de leur santé, elle s’avère néanmoins nécessaire pour freiner un tabagisme ravageur chez les jeunes. La proposition de loi se veut donc un moyen de protection des jeunes contre le tabagisme.
Ce ne sont pas les mineurs d’âge qui seront sanctionnés mais bien ceux qui leur vendront des cigarettes, des produits à base de tabac ou des accessoires pour consommer le tabac.

Interdire les distributeurs automatiques

II y a en Belgique plus de 70.000 points de vente, dont 30.000 distributeurs automatiques. Par comparaison, la France avec une population et une superficie nettement plus grandes, ne dispose que de 35.000 points de vente.
La première mesure de limitation des points de vente proposée par le cdH est d’interdire la vente de tabac par distributeurs automatiques.

Interdire la distribution gratuite de tabac

La proposition de loi complète la loi du 10 décembre 1997 pour interdire toute distribution gratuite, dans le cadre de fêtes, d’actions de promotion, … de tabac, de produits du tabac mais aussi d’accessoires liés à la consommation de tabac (papier à cigarettes, étuis pour pour cacher les paquets, tubes…).

Augmenter le prix du paquet

Les expériences et la littérature internationales montrent clairement que majorer le prix du tabac et des produits dérivés constitue le moyen le plus efficace pour réduire la consommation à condition qu’il s’agisse d’une augmentation importante.
II y a lieu d’accentuer cette politique tarifaire volontariste notamment par une augmentation significative d’au moins 20%, soit pour le paquet de 25 cigarettes, un passage de 4 à 5 €, qui aura un effet dissuasif plus important que les augmentations progressives qui ont été faites au cours des dernières années.
Par ailleurs, en vue d’aboutir à une harmonisation européenne et de régler les problèmes d’achats transfrontaliers, une seconde augmentation visant à s’aligner sur les prix français doit également être programmée à moyen terme.

Dénormaliser le tabac dans la société

Actuellement, la législation relative à l’interdiction de fumer est relativement réduite. II est interdit de fumer dans les lieux fermés et accessibles au public. Des exceptions sont prévues notamment dans le secteur de l’HORECA. On constate que ces dispositions légales sont trop peu respectées et que la plupart des plaintes n’aboutissent pas.
Sur base des données de 2002 de l’Agence Fédérale pour la Sécurité de la Chaîne alimentaire (AFSCA), 40% des lieux de consommation visités n’étaient pas conformes à la réglementation. Selon une étude du CRIOC, 59% des non-fumeurs éprouvent des difficultés à trouver un espace sain dans un restaurant.
Par ailleurs, il y a manifestement trop peu d’inspecteurs pour contrôler toutes les infractions, et les agents de la force publique ne sont pas suffisamment responsabilisés. Ils considèrent que ce n’est pas leur rôle de signaler de telles infractions.
Toutes ces compétences relèvent de l’Exécutif, c’est pourquoi, par une résolution, la Députée Catherine Doyen-Fonck demande au Gouvernement de renforcer les moyens de l’administration chargée de surveiller l’application de la loi relative à l’interdiction de fumer dans les lieux publics.
Aucune loi ne prévoit la possibilité d’interdire de fumer sur le lieu de travail. La consommation de tabac sur le lieu de travail est réglementée par le RGPT. Celui-ci part du principe qu’il est permis de fumer sur les lieux du travail mais prévoit que l’employeur doit prendre les mesures nécessaires en vue d’établir un environnement de travail respectant les attentes tant des fumeurs que des non-fumeurs.
Le cdH estime qu’il faut inverser le principe: sur les lieux de travail, la règle de base doit être l’interdiction de fumer, à laquelle certaines exceptions peuvent être apportées au nom de la tolérance et de la courtoisie mais dans des circonstances de loisirs qui préservent les droits à la santé des non-fumeurs.
Actuellement, selon la réglementation en vigueur, il est interdit de fumer dans les écoles. Cette réglementation n’est pas respectée, et dans certaines écoles, les « grands » élèves sont autorisés à fumer.
Il est nécessaire de délivrer un message clair quant à l’interdiction de fumer à l’école. Le cdH propose une résolution en ce sens.

Aider et encourager à l’arrêt du tabac

La députée proposera aussi une loi organisant la prise en charge des substituts nicotiniques par l’INAMI. Le remboursement de ces médicaments par l’assurance soins de santé est cependant conditionné par un suivi médical du sevrage tabagique. Dans un premier temps, le remboursement sera limité aux mineurs d’âge.
Le cdH propose en outre la création d’un numéro vert ‘Tabac info service’. Cette ligne téléphonique, ouverte 7 jours sur 7 en journée et en soirée est destinée à informer, soutenir et accompagner les fumeurs dans leur démarche d’arrêt.

Mettre en œuvre le principe du

«

pollueur

payeur

»
Par sa nocivité, la consommation de tabac suscite des coûts considérables pour la collectivité. En Belgique, les dépenses de soins médicaux liées à la consommation de tabac, dans le cadre de l’assurance soins de santé, sont estimées à 1.441 millions pour 2002, ce qui représente près de 10% du budget des soins de santé.
Les producteurs dégagent des profits considérables grâce à la vente de ces produits.
Selon le principe du « pollueur-payeur », il y a lieu de faire supporter une partie des coûts de santé engendrés par la consommation de ces produits par ceux qui les suscitent.
La proposition de loi vise à créer un Fonds financé par une contribution, proportionnelle au chiffre d’affaires des sociétés, qui produisent et commercialisent le produit.
Ce Fonds permettrait d’assurer une forme de remboursement des dépenses consenties collectivement par le biais de l’assurance maladie invalidité pour couvrir les coûts liés aux dommages provoqués par la consommation de produits.
Dans le cadre du vote de la loi du 30 juillet 2003 relative à la publicité pour le tabac, autorisant le parrainage du Grand Prix de Francorchamps (1) , le Gouvernement s’est engagé à mettre sur pied un Fonds de lutte contre le tabagisme. Aujourd’hui, ce Fonds n’existe pas mais par contre il existe une Fondation financée et gérée par l’industrie du tabac.
Anne-Marie Corbisier , Chef de groupe à la Communauté française, a interrogé la Ministre de la Santé sur la mise en œuvre du Fonds anti-tabac. La Ministre Maréchal a renvoyé la balle dans le camp du Gouvernement fédéral et du Ministre de la Santé en particulier. La Députée Catherine Doyen-Fonck a déposé sur la table du Parlement une proposition d’interpellation au Ministre Demotte, relative à la mise en œuvre du Fonds de lutte contre le tabagisme et à la confusion que crée l’action de la Fondation Rodin (2) .

Signer et ratifier la Convention OMS de lutte anti

tabac

Le 21 mai 2003, l’OMS a réussi après plusieurs années de négociation, à mettre au point une convention internationale relative à la lutte anti-tabac (3) .
Il s’agit d’un accord entre les représentants scientifiques des différents pays-membres sur les moyens minimums à mettre en œuvre dans tous ces pays pour aboutir à une lutte efficace, coordonnée et à long terme contre le tabagisme. Cet accord est construit sur 4 axes:
– la limitation de la publicité en faveur des produits du tabac et le parrainage;
– le conditionnement et l’étiquetage des produits du tabac;
– la protection contre l’exposition à la fumée de tabac;
– la lutte contre le commerce illicite de tabac.
Cette convention-cadre est une réalisation remarquable qui constitue le premier instrument juridique conçu pour faire diminuer la mortalité due au tabac dans le monde. L’enjeu actuel est que cette convention soit signée et ratifiée aussi vite que possible. Pour que le traité entre en vigueur, 40 pays doivent le signer puis le ratifier. Actuellement, 72 pays ont signé la convention et seulement 3 pays l’ont ratifiée. La Belgique n’a ni signé, ni ratifié la convention OMS.
Par une résolution, la Députée Catherine Doyen-Fonck demande au Gouvernement fédéral et au Ministre de la Santé publique en particulier de signer et de ratifier immédiatement cette convention. Notre pays, qui obtient au niveau mondial les meilleurs résultats quant à l’efficacité de son système de soins de santé, doit dans cette matière montrer l’exemple.
D’après un dossier fourni par Madame Doyen -Fonck
(1) On se rappellera que le cdH a voté, avec d’autres, à la veille des vacances parlementaires, cette loi autorisant à nouveau sur le territoire belge la publicité tabac lors d’événements d’importance mondiale. Evidemment, on sait ce que le courage politique a coûté aux écologistes du Nord et du Sud du pays (qui se sont abstenus lors du vote) dans cette affaire…
(2) D’après le Ministre fédéral de la Santé, le fonds public de lutte contre le tabac sera bien opérationnel en 2004, sur une base de 2.000.000 € par an, un ‘Comité de lutte contre le tabagisme’ étant créé pour assurer la cohérence des actions fédérales, régionales et communautaires. A suivre, donc…
(3) Voir à ce sujet Education Santé n°
180 , 181 et 185
Cliquez pour retourner à l’appel de note

Les filles consomment (presque) autant de tabac que les garçons

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Selon un nouveau rapport publié à l’occasion de la Conférence mondiale sur le tabac ou la santé d’Helsinki, les jeunes filles fument presque autant de cigarettes que les garçons. Les résultats montrent aussi que les filles consomment autant que les garçons les autres produits dérivés du tabac: tabac à chiquer, bidis (1) , narguilé. Souvent, la consommation de ces produits est encore plus fréquente que celle des cigarettes.
Ces constatations proviennent d’une grande enquête internationale, qui a étudié la consommation de tabac chez plus d’un million d’adolescents dans plus de 150 pays.
“Ces informations auront des conséquences majeures pour la lutte antitabac, affirme Charles W . Warren , spécialiste scientifique principal des CDC (Centers for Disease Control and Prevention) pour cette enquête. Il faut premièrement mettre au point des programmes prenant en compte les préoccupations des femmes et soulignant les graves risques qu’entraîne la consommation de tabac pour la santé, notamment au niveau de la santé génésique et des nourrissons qui ont été exposés pendant la grossesse aux toxines du tabac. Deuxièmement, la fréquence de consommation des produits du tabac autres que la cigarette impose d’élargir le plus possible les programmes de lutte.”

L’enquête en pratique

Elle est réalisée auprès des élèves des écoles publiques et privées. Les classes sont choisies au hasard dans les écoles sélectionnées et tous les élèves des classes retenues participent à l’étude. Ils répondent seuls à un questionnaire anonyme et confidentiel, comportant les mêmes questions dans tous les pays.
Chaque pays peut cependant en ajouter d’autres en fonction de sa situation ou de ses intérêts spécifiques. L’enquête a été menée dans 25 sites de la région africaine, 42 site des Amériques, 14 de la Méditerranée orientale, 8 en Europe, 22 en Asie du Sud-Est et 10 dans la Région du Pacifique occidental.
L’OMS et les CDC veulent augmenter le nombre des pays participants, de façon à pouvoir disposer d’un outil standardisé pour contrôler les divers éléments de leurs programmes de lutte antitabac, mesurer les tendances et évaluer l’efficacité des programmes d’intervention conçus pour réduire la consommation de tabac chez les jeunes.

Ces constatations donnent également à penser que les projections de la mortalité due au tabac pour l’avenir sont une sous-estimation de ce qui se produira, car elles se basent sur les tendances actuelles de la consommation chez l’adulte, avec environ seulement une femme qui fume pour quatre hommes. La nouvelle étude n’a trouvé aucune différence entre les sexes chez les jeunes de 13 à 15 ans dans plus de la moitié des régions pour la consommation de cigarettes (61 sur 120) et dans plus de 70 % des régions pour les autres produits du tabac (82 sur 117).
“Ces constatations pourraient amener à réviser sensiblement à la hausse les projections de la mortalité annuelle due au tabac. Elles aideront les gouvernements nationaux à s’attaquer au problème en lançant des campagnes de communication, d’éducation et de sensibilisation qui s’adressent plus particulièrement aux femmes ou aux hommes”, a déclaré le Dr Vera da Costa e Silva , administrateur de projet Pour un monde sans tabac à l’OMS.

Variations régionales

Cette nouvelle enquête a également montré de grandes variations dans la consommation des cigarettes et des produits du tabac chez les jeunes en fonction des différents régions. Par exemple, la consommation de cigarettes chez les garçons varie entre 0,5 % à Delhi et à Goa et 41,8 % à Bamako (Mali). Chez les filles, la consommation des autres produits du tabac varie entre 0,4 % à Macao (Chine) et 62,2 % dans les Iles Mariannes du Nord (Océanie).
Bien qu’il soit difficile de faire des comparaisons entre jeunes et adultes en raison des différences de méthode et d’époque, le tableau ci-dessous montre que les différences entre hommes et femmes sont partout plus faibles dans la nouvelle étude par rapport aux enquêtes antérieures.

Rapport hommes/femmes pour le tabagisme en fonction de la Région OMS

Adultes Jeunes Afrique 7.2 : 1 2.2 : 1 Amérique 1.6 : 1 1.2 : 1 Méditerranée orientale 8.8 : 1 4.3 : 1 Europe 1.8 : 1 1.2 : 1 Asie du Sud-Est 11.0 : 1 4.2 : 1 Pacifique occidental 7.5 : 1 1.7 : 1
Dans cinq des six régions de l’OMS, on n’a observé aucune différence dans la consommation de cigarettes entre les sexes. De plus, il n’y a pas de différence significative pour les autres produits du tabac dans plus de la moitié des sites des mêmes régions. Seule la Méditerranée orientale compte une majorité de sites où les garçons fument et consomment davantage de produits du tabac.
La consommation de tabac est la première cause évitable de mortalité dans le monde. L’OMS lui attribue actuellement 4,9 millions de décès par an et l’on s’attend à ce que ce chiffre double dans les vingt prochaines années. L’OMS et les CDC ont mis au point cette enquête pour établir la consommation de tabac chez les jeunes dans les différents pays à l’aide d’une méthode et d’un questionnaire communs. Ce système de surveillance a pour but de renforcer la capacité des pays à concevoir, mettre en œuvre et évaluer les programmes de lutte antitabac et de prévention.
“Cette enquête constituera l’un des principaux systèmes de surveillance à la disposition des pays lorsqu’ils commenceront à élaborer, mettre en œuvre et évaluer leurs programmes de lutte antitabac pour faire diminuer la consommation. De tels systèmes de surveillance deviendront indispensables aux pays pour contrôler que leurs stratégies et programmes concrétisent les objectifs et les cibles fixés dans la convention-cadre pour la lutte antitabac”, explique le Dr da Costa e Silva.

Pour de plus amples informations sur l’enquête mondiale sur les jeunes et le tabac, consulter le site [L=https://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm]www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm[/L]
(1) Ici le texte de la première note.
(2) Et le texte de la deuxième note

Cliquez pour retourner à l’appel de note

Des organisations de jeunesse en santé

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Echos d’un projet de formation

Le contexte

C’est le 28 mai 1999 que s’est tenu à Mons, à l’initiative de l’Observatoire de la Santé du Hainaut et dans le cadre du programme Interreg II, le forum «La santé au cœur des jeunes», réunissant des jeunes, des acteurs de la promotion de la santé en Communauté française et des partenaires du Réseau santé du cœur en francophonie, venus de France, du Québec, de Tunisie et de Suisse (1) .
Fondé sur les conclusions d’une enquête sur la santé des jeunes (2) d’une part et sur le cadre de référence que constitue le modèle socio-écologique d’autre part, le forum a été orienté vers quatre ateliers, impliquant directement les participants.
Les ateliers invitaient le public à réfléchir aux rapports entre la promotion de la santé et quatre axes:
-la participation des jeunes;
-le rôle des adultes;
-le cadre et les conditions de vie;
-et enfin les médias.
Chaque atelier était chargé de formuler des recommandations stratégiques à l’adresse des responsables politico-administratifs et des propositions de projets et d’outils à développer.
A l’issue du forum, cinq groupes de travail ont été constitués, dont un en particulier traitait de la promotion de la santé en milieu extrascolaire. Avec le soutien d’un groupe de pilotage, leur mission était de donner corps aux recommandations sous forme d’outils et de programmes et d’aboutir à des actions concrètes de promotion de la santé des jeunes.

Le groupe de travail «promotion de la santé en milieu extrascolaire»

La réflexion du groupe de travail s’est amorcée sur deux constats faits lors du forum:
-le manque de formation spécifique en promotion de la santé à différents niveaux d’intervention en milieu extrascolaire;
-la nécessité de prendre en charge la santé globale de l’enfant dans le cadre de leurs activités extrascolaires.
C’est en décembre 1999 que sept partenaires parmi les membres du groupe de travail émettent le projet de s’associer et formulent le projet «Organisation de jeunesse en santé – OJS».
Celui-ci a pour but d’élaborer des programmes de formation en promotion de la santé destinés aux animateurs et aux formateurs d’animateurs de centres de vacances. Le groupe obtient un subside de la Communauté française pour le projet (avril 2001-31 octobre 2002).
La coordination et la gestion scientifique du projet sont assurées par l’Observatoire de la Santé du Hainaut (OSH) (3) .
L’ASBL CEMEA-Hainaut (Centre d’Entrainement aux Méthodes d’Education Active) antenne de Soignies, l’asbl Ampli-Juniors Centre et Soignies et l’asbl Mouvement des jeunes travailleurs – Espace Jeunes Centre et Soignies, l’asbl Mouvement des jeunes travailleurs – Espace Jeunes Mons Borinage sont les partenaires de terrain.
Le CERES et le CLPS Mons – Soignies (4) assurent le soutien méthodologique.

Le projet «Organisations de jeunesse en santé»

L’ensemble du projet s’articule en cinq phases, dont le but est de proposer un contenu et des méthodes de formation en promotion de la santé à destination des animateurs de centres de vacances et de mesurer l’impact de la formation sur la capacité de l’animateur à prendre en compte la dimension «promotion de la santé» dans le cadre de sa pratique d’animation. Le tout préparé, développé, testé, évalué et débouchant sur la formulation de recommandations en matière de formation d’animateurs en promotion de la santé.
Les cinq étapes retenues sont:
-la préparation d’un module de formation de formateurs;
-la formation des formateurs;
-la préparation d’un module de formation d’animateurs;
-la formation des animateurs;
-le suivi du travail des animateurs sur le terrain (centres de vacances).

La préparation d’un module de formation de formateurs

L’objectif était de définir un contenu et une méthodologie pour la formation des formateurs d’animateurs.
La méthode consistait en une enquête auprès des animateurs (CERES et OSH en juin 2001). La technique retenue était celle des groupes focalisés.
Résultats : cette démarche nous a permis de recueillir des informations auprès de chaque organisation de jeunesse partenaire, soit 24 animateurs de 17 à 34 ans.
Parmi les éléments recueillis, on retiendra en particulier les éléments suivants.
Concernant la santé des enfants et des jeunes, les participants relèvent que le mal-être des enfants est le problème majeur à gérer dans le cadre des animations; que l’hygiène pose souvent problème; que l’alimentation est une thématique importante mais aussi souvent traitée; que la consommation de produits (tels que tabac ou alcool) semble plus facile à gérer par les animateurs, même si cela les renvoie de manière plus directe à leur propre comportement; que les relations entre garçons et filles ont un impact sur la gestion des groupes (principalement chez les ados) et demandent une prise en compte et une définition de règles en fonction des situations.
Concernant le rôle des animateurs par rapport à la santé, les participants relèvent que leur rôle d’animation est primordial et dans ce cadre ils doivent «montrer l’exemple» sans devenir des «moralisateurs, des surveillants»; que le lien entre la prise en compte de la santé des enfants et des jeunes et leur rôle d’animateur n’est pas toujours évident; qu’habituellement la préoccupation par rapport à la santé se fait jour lorsqu’une problématique précise apparaît; que les implications et les possibilités d’actions varient selon la nature du centre de vacances; et qu’une des difficultés réside dans le manque de communication entre l’animateur et les parents.
Concernant les besoins en formation, les participants déclarent qu’ils souhaitent acquérir davantage de compétences dans la prise en charge de la santé de l’enfant (en mettant l’accent sur la santé mentale); que l’aspect participatif est à mettre en évidence dans ce cadre; qu’ils souhaitent pouvoir disposer de ressources pour gérer les situations difficiles; que la dimension «outil» doit faire partie du renforcement mais de façon appropriée à la pratique de l’animation.
Après analyse et en concertation, un «profil de l’animateur compétent en promotion de la santé» est défini (liste de compétences établie dans le cadre d’un «remue-méninges»). C’est ce même profil qui nous a permis de définir les objectifs, les contenus et les méthodes de la formation de formateurs.
Ceux-ci sont présentés aux organisations de jeunesse fin décembre 2001.

La formation des formateurs

Les objectifs ont été définis suivant cinq axes:
-un axe individuel relatif aux perceptions, aux opinions et à la prise de conscience personnelle;
-un axe «enfant et adolescent» relatif à la compréhension des besoins de santé les concernant;
-un axe intervention (mise en œuvre et mobilisation des ressources);
-un axe environnement (analyser, comprendre et agir sur les conditions de vie des enfants et des jeunes en centre de vacances);
– un axe formation relatif à la mise en capacité des formateurs à intervenir auprès des animateurs et dans le cadre de la promotion de la santé.
Les méthodes participatives, interactives et inductives ont été privilégiées (travaux en sous-groupes, mises en situation, exposés…).
Résultat : la formation encadrée par trois personnes (OSH et CERES) a réuni 10 formateurs des quatre organisations de jeunesse concernées.

La préparation et l’organisation des modules de formation des animateurs

L’objectif était de mettre sur pied un «module» de formation en promotion de la santé à destination des animateurs, spécifique pour chaque organisation de jeunesse (organisation, modalités, contenus, méthodes, objectifs…).
Comme soutien méthodologique , un suivi spécifique et collectif des organisations de jeunesse était proposé. Cinq séances de travail spécifiques et deux rencontres de «partage» collectives ont été organisées.
Résultat : les trois modules de formation d’animateurs sont élaborés.

La formation des animateurs

Chaque organisation de jeunesse a organisé un module de formation d’animateurs. Cependant, cette phase ayant connu quelques rebondissements, les délais fixés initialement (peut-être trop ambitieux) n’ont pu être tenus par tous.
Nous reprenons ci-après les éléments de présentation des trois projets de formation.
Le projet «Ampli juniors et MJT- Espace Jeunes Centre et Soignies» est intitulé «identification des conditions favorables au bien-être global de chaque enfant».
Objectif : «faire vivre» un séjour «santé» au terme duquel chaque animateur est capable de définir le terme de «santé globale», a pris conscience que la santé doit se vivre dans toute activité, a compris ce que représentent une alimentation saine et un temps de repas agréable, est capable de mettre en place des activités en conformité avec les préceptes précités dans le cadre de sa pratique d’animation.
Méthode : la formule retenue est celle d’un séjour de trois jours en résidentiel, prévu initialement en avril 2002, qui s’est finalement organisé en septembre 2003.
Résultat : 25 animateurs brevetés ont suivi la formation.
Le projet «CEMEA Hainaut» est intitulé «Action pour la santé en collectivité d’enfants et de jeunes».
Objectif : permettre aux participants de développer des capacités permettant d’écouter, d’observer, de dépister et de reconnaître certains problèmes, mettre en place des outils de mobilisation pour la santé des enfants et des jeunes en collectivité, réfléchir aux attitudes à adopter et à l’attention à apporter aux questions liées au rythme de vie, à l’hygiène, à l’aménagement de l’environnement…
Méthode : organisation d’un séjour résidentiel en avril 2002.
Résultat : 15 professionnels du champ socio-éducatif ont participé à la formation.
Le projet «MJT- Espace Jeunes Mons Borinage» est intitulé «formation santé, comprendre la santé, promouvoir la santé, éduquer pour la santé».
Objectif : permettre aux participants de se sensibiliser à la santé au sens large, se sensibiliser à leur rôle en matière de santé, découvrir des outils et des documents pédagogiques.
Méthode : organisation d’un séjour résidentiel en novembre 2002.
Résultat : 25 animateurs brevetés et éducateurs ont participé à la formation.

Le suivi des animateurs sur le terrain

Cette étape, dans le temps imparti par la convention pour le projet, n’a pu se concrétiser réellement qu’auprès des animateurs «CEMEA», qui était la seule institution à ce moment-là à avoir organisé la formation (été 2002).
Le suivi-évaluation des animateurs formés par le CEMEA a été réalisé via un questionnement orienté vers les difficultés et/ou les facilités qu’ils ont rencontrées dans l’application de leurs nouvelles compétences de même qu’en ce qui concerne les changements estimés ou perçus dans le cadre de leur pratique d’animation. Six personnes ont complété le questionnaire.

L’évaluation globale

Cette étape du projet, réalisée en octobre 2002, nous a permis de reprendre l’ensemble du projet point par point, avec chaque institution partenaire. L’idée était de répertorier l’ensemble des éléments qui ont eu un impact sur le déroulement du projet, ce qui facilite les choses, ce qui les rend difficiles…
Les éléments recueillis dans ce cadre et mis en parallèle avec les temps d’évaluation qui ont suivi chacune des phases du projet sont présentés ci-après.

L’analyse des besoins et des attentes (groupes focalisés)

Cette étape n’est pas remise en cause. Elle apparaît cependant comme lourde, mais chacun reconnaît qu’une discussion informelle ne suffit pas. Une méthode s’impose donc et elle seule permet de collecter une information exploitable de qualité. Il paraît important de confier à un intervenant extérieur la conduite et la gestion des débats (qui demandent non seulement de la neutralité mais aussi des compétences spécifiques).
Pour faciliter l’exploitation des résultats, la nécessité est apparue d’être encore plus vigilant par rapport à la représentativité des membres des groupes de discussion au sein de l’organisation de jeunesse et à l’homogénéité des participants (âge, expérience…).

La formation des formateurs

Globalement, la formation a répondu aux attentes des uns et des autres, elle a également permis de mettre l’accent sur quatre éléments.
Le premier concerne l’organisation de la formation. La formule résidentielle apporte une réelle plus-value à la dynamique de groupe (pour autant que les conditions d’hébergement soient en cohérence avec l’esprit de la formation).
Le deuxième a trait à la constitution d’un groupe pluraliste, qui semble également apporter une dynamique particulière favorisant l’ouverture et le partage constructif, permettant aux organisations de jeunesse de dépasser les éventuels clivages institutionnels.
Le troisième concerne le formateur. Celui-ci doit être «spécialisé» en promotion de la santé. C’est le croisement des expertises «promotion de la santé» et «animation jeunes» qui permet de se projeter dans la démarche d’élaboration d’une formation appropriée qui répond aux exigences de qualité des deux secteurs et aux besoins des organisations de jeunesse.
Le quatrième concerne le contenu et les méthodes. L’équilibre est à trouver entre un renforcement de compétences techniques (outils, modèles…) et un renforcement de compétences ayant trait à la «mise en démarche» institutionnelle (réflexion).
L’intégration de la promotion de la santé dans les pratiques d’animation permet de l’aborder de façon créative et interactive (évitant ainsi des attitudes uniquement consommatrices à l’égard d’outils, par exemple).
Enfin, les méthodes participatives et actives permettent de mettre en valeur l’expérience des participants et donnent alors toute la mesure au contenu proposé.

La formation des animateurs

Dans la présentation de la formation aux animateurs, le terme «santé» est très peu accrocheur, certaines organisations de jeunesse ont dû différer l’organisation du module de formation faute de participants (cela ne semble pas être systématiquement le cas pour d’autres modules de formation spécifique).
Parmi les propositions à retenir, on pourrait opter pour une organisation transversale de la formation en promotion de la santé, dans laquelle on intégrerait la thématique «promotion de la santé» dans différents modules de formation (spécifiques ou généraux).
La «gradation» dans l’approche de la santé au sens large et de la promotion de la santé en particulier apparaît comme une évidence et est liée à l’âge et à l’expérience des participants à la formation. C’est donc dans l’ensemble du cycle de formation de l’animateur qu’il faut envisager l’intégration du volet «santé» et «promotion de la santé».
Enfin, là encore, les méthodes seront participatives et créatives, directement basées sur les compétences et la pratique des participants. L’aspect ludique paraît incontournable et particulièrement adapté au public.
Globalement, sur l’ensemble du processus, les avis étaient unanimes sur l’impact positif de la formation qui se situe plus au niveau personnel (formateur, animateur) que collectif (organisation) ou à l’échelle d’une plaine. Il n’y a pas eu en effet de résultat visible ou observable, si ce n’est que la santé est mise à l’ordre du jour dans la plaine et qu’une dynamique de réflexion s’instaure par la présence de l’animateur «spécialisé» en plaine.
Enfin, certains animateurs estiment avoir acquis des compétences supplémentaires et se sentent capables de mettre en place des actions. La plupart désirent poursuivre la démarche et continuer à investir dans le domaine.

Les recommandations générales

Il s’agit d’un projet pilote qui outre son caractère exploratoire a fait l’objet de nombreux rebondissements tant sur le plan de la coordination générale qu’au niveau de l’évolution des projets spécifiques aux organisations de jeunesse. Les conclusions que l’on peut en tirer sont plutôt des orientations que des résultats directement généralisables.
L’ensemble des recommandations formulées sont le fruit de la réflexion qu’ont eue les partenaires de ce projet par rapport à l’ensemble du processus.
Ces recommandations constituent la plus-value apportée par ce projet pour éclairer les choix et les décisions de celui qui désire mettre en place une formation en promotion de la santé pour des animateurs ou des organisateurs de centres de vacances.
Outre les éléments plus spécifiques que l’on retrouve dans la partie « évaluation », nous relevons quatre recommandations générales.
Favoriser le croisement des expertises . L’intervention d’un expert en promotion de la santé dans la phase de formation de formateurs est à privilégier pour crédibiliser et enrichir les échanges avec les experts de l’animation en centres de vacances.
Favoriser la cohérence de la formation . L’organisation de jeunesse a intérêt à structurer et à organiser la formation des formateurs au niveau le plus large possible (régional, provincial voire national). Cela permet certainement de faire des économies d’échelle, mais plus encore d’atteindre un niveau de cohérence important en terme de diffusion des messages.
Favoriser «l’existant» . L’intégration de la promotion de la santé dans le cadre global des moments de formation déjà organisés est à privilégier. Même si l’organisation d’un module spécifique peut être utile dans une phase de lancement, la formule «diluée» semble plus propice à l’appropriation et à la mise en pratique par l’animateur dans le cadre de son travail.
Favoriser la transversalité dans l’approche de la formation . Dans les étapes de réflexion et de conception de formations de formateurs en promotion de la santé, il est pertinent de favoriser l’élargissement du débat en y associant des intervenants d’horizons et de réseaux variés (idéologique, social…).

Des pistes concrètes pour poursuivre

Outre les recommandations, le projet nous permet d’envisager une série de pistes de travail pour poursuivre l’action. Elles nous conduisent à continuer l’action, à l’étendre et à approfondir certains aspects du sujet.

Continuer

Soutien des institutions à l’intégration de la promotion de la santé à différents niveaux (animateurs, formateurs, coordinateurs de centres, directeurs de plaines…).
Mise sur pied d’un processus de suivi des formateurs dans leurs nouvelles fonctions de formateurs d’animateurs en promotion de la santé.

Etendre

Elargissement de la sensibilisation des institutions (centres de vacances) à la promotion de la santé, à l’échelle de la province de Hainaut.
Offre d’une formule «soutien – partage» pluraliste sur la promotion de la santé, visant la mise en démarche des institutions (échanges sur base d’actions, de projets, de réflexions…).
Offre d’une formation spécifique à l’échelle provinciale. Elle serait destinée aux formateurs et/ou animateurs qui souhaitent investir le thème du bien-être et de la santé, et permettrait de développer et de renforcer les compétences internes.

Approfondir

Développer une réflexion sur «l’instrumentation» de l’animateur spécialisé en promotion de la santé.
Etablir des critères de choix d’outils à mettre à disposition pour l’animateur (pertinence…).
Répertorier les outils disponibles, transférables, transformables…
Développer la réflexion sur la création d’outils d’animation en santé.

Le mot de la fin…

Pour terminer, quelques constatations, pas pour tourner la page, mais plutôt pour rédiger un nouveau chapitre.
Le secteur des loisirs en général et celui des centres de vacances en particulier est couvert de façon très irrégulière sur le plan de la promotion de la santé. Malgré les initiatives visant à renforcer la qualité de l’encadrement et à harmoniser les curriculums de formation, les paramètres «santé» et «bien-être» n’y sont pas encore suffisamment mis en avant et ne font pas encore l’objet d’une approche harmonieuse, quelle que soit la filière de formation.
Le secteur des organisations de jeunesse est cependant particulièrement propice et réceptif à la diffusion des valeurs proches de la promotion de la santé tant la participation, la motivation et l’interactivité font partie intégrante de leurs modes de fonctionnement.
Travailler avec des jeunes, miser sur eux, les responsabiliser par rapport à leur santé mais aussi par rapport à celle d’autres jeunes, en faire de véritables relais dans le champ de l’animation et du loisir est un formidable pari sur l’avenir.
Vincent Huyghebaert , Michel Demarteau , Bérengère Lens , Karine Spinette , Observatoire de la santé du Hainaut, Michel Andrien , Véronique Halbardier , CERES
Nous adressons nos remerciements aux responsables des groupes de travail des organisations de jeunesse partenaires du projet:
Sylvia Marozzi pour Ampli Junior et MJT Centre et Soignies, Geoffroy Carly pour CEMEA Hainaut – Antenne de Soignies, Salvatore Nuovo pour MJT Mons Borinage.


(1) La santé au coeur des jeunes en Hainaut, de l’analyse à l’action, Observatoire de la santé du Hainaut, novembre 2000.
(2) Isabelle Godin, Alain Levêque, Luc Berghmans, Tableau de bord de la santé des jeunes, Santé en Hainaut n°2, Observatoire de la santé du Hainaut, 1998.
(3) Dont la direction du Service éducation pour la santé était assurée à l’époque par Geneviève Houioux.
(4) Le CLPS Mons-Soignies était dirigé à l’époque par Véronique Boutin.

Cliquez pour retourner au texte

Les jeunes, l’alcool et le tabac

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Le CRIOC présente les résultats d’une enquête auprès des jeunes, évaluant leurs comportements en matière de consommation de tabac et d’alcool.

Méthodologie

550 interviews quantitatives ont été réalisées en Belgique de mars à mai 2003: interviews en face à face et sans la présence des parents, auprès de 200 jeunes de 11 à 12 ans, 200 jeunes de 15 à 16 ans et 150 jeunes de 17 à 18 ans.
Les résultats ont fait l’objet des traitements statistiques adéquats. La marge d’erreur totale maximale sur l’échantillon est de 3,0 %.
Seuls les résultats significatifs sont présentés. Toutefois, chaque donnée a été analysée – selon les profils – en fonction de la localisation (province), du sexe, de l’âge, du groupe social, du régime linguistique et du type de formation.

Jeunes et boissons alcoolisées

Près de 9 jeunes sur 10 ont déjà consommé de l’alcool. A 11-12 ans, ils ont déjà bu leur premier verre. Avec l’âge, la consommation augmente. Si à 11-12 ans, 2 jeunes sur 3 ont consommé de l’alcool, ils sont presque 9 sur 10 à en avoir consommé à 15-16 ans.
Le type de boisson préférée varie avec l’âge: vers 11-12 ans, le vin et la bière sont les boissons alcoolisées les plus consommées. Viennent ensuite les breezers, apéritifs et cocktails. A partir de 15 ans, la bière mène la danse, suivie des breezers, des apéritifs, des cocktails et ensuite du vin.
En vieillissant, le jeune achète plus souvent ces boissons avec son argent de poche, il diversifie ses goûts et consomme plus de boissons alcoolisées.
L’apprentissage de la dégustation du vin correspond à un rite initiatique d’intégration familiale: au départ, l’enfant, à l’occasion d’une cérémonie familiale est invité à tester le vin (ex. un blanc liquoreux). Progressivement, le jeune s’intègre au banquet familial en dégustant un verre de vin, de mousseux, d’apéritif… La consommation festive de vin devient régulière après 18 ans, notamment lors des sorties familiales au restaurant.

Le tabac

Un jeune sur quatre a déjà essayé de fumer des cigarettes: un sur 10 à 11-12 ans, un sur 4 à 15-16 ans, un sur 3 à 17-18 ans.
La première cigarette provient, pour les 11-12 ans d’un membre de la famille ou des copains, plus rarement des parents ou payée par l’argent de poche. A 15-16 ans, les cigarettes viennent des copains ou de la fratrie. A 17-18 ans, elles viennent de la fratrie, des copains ou sont payées par l’argent de poche. Dans l’enseignement secondaire, 7 jeunes sur 10 déclarent qu’on fume dans leur école.
L’apprentissage de la consommation est un processus complexe qui s ‘organise autour de différentes étapes:
Préparation : information passive dès la naissance.
Initiation : à partir de 8 ans parfois, l’enfant va tester l’interdit.
Consommation occasionnelle : à l’adolescence, le jeune devient fumeur occasionnel et le taux de consommation augmente sensiblement, d’autant plus si les milieux fréquentés (école, copains, famille) l’y autorisent. Les effets sur la santé sont relativisés.
Consommation régulière : dès 16 ans, la dépendance à la nicotine conduit à la consommation régulière de tabac.

A 11 ans

,

un jeune sur dix a déjà consommé de l’alcool ou de tabac

Ce qui au départ, n’est qu’un essai, se transforme au fil du temps en consommation régulière: la quantité consommée augmente, la fréquence aussi. Pour l’alcool, la variété des produits augmente. La consommation précoce d’alcool ou de tabac, souvent encouragée et rarement découragée, conduit rapidement à l ‘instauration de dépendances.
Les politiques de prévention doivent viser autant les enfants et les jeunes que leurs parents. Consommateurs, producteurs et distributeurs doivent être conscientisés à l’importance du ‘contrôle social’ sur la vente et la consommation de ces produits. A terme, l’augmentation de la dépendance aux assuétudes va entraîner des coûts de santé élevés. D’où la nécessité de lutter contre les assuétudes des enfants et des jeunes.

Informations:
CRIOC, rue des Chevaliers 18, 1050 Bruxelles.
Courriel: info@crioc.be

1,8 million de fumeurs en moins en France!

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

La guerre contre le tabac s’inscrit dans la perspective de la priorité présidentielle de mobilisation nationale contre le cancer. Le 27 mai 2003, Jean-François Mattei , Ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, s’est engagé à faire diminuer le tabagisme des jeunes de 30 % et celui des adultes de 20 %, sur cinq ans.
La première enquête barométrique INPES/IPSOS menée depuis l’annonce du plan gouvernemental, confirme la diminution sans précédent de la consommation de tabac en France. Cette enquête a été menée, courant novembre 2003, auprès d’un échantillon national représentatif de plus de 3 000 personnes âgées de 15 à 75 ans.

Forte baisse de la consommation tabagique

Entre 1999 et 2003, on compte 1,8 million de fumeurs déclarés de moins au moment de l’enquête (15,3 millions en 1999 et 13,5 millions en 2003) . La proportion de fumeurs dans la population est passée de 34,5% en 1999 à 30,4% en 2003 soit une chute de 12%.
Cette baisse de la prévalence est parallèle avec la diminution constatée des ventes de cigarettes, particulièrement jusqu’à 2003 (- 13,5%).
Chez les ex-fumeurs, 14,2% déclarent s’être arrêtés dans l’année écoulée. Ils étaient seulement 9,2% en 1999 (+54%).
De surcroît, ceux qui continuent à fumer ont réduit significativement leur consommation: alors qu’ils fumaient 14 cigarettes en moyenne par jour en 1995, ils n’en fument plus que 11,6 en 2003.

Les femmes et les jeunes premiers bénéficiaires

Les femmes et les 15/25 ans constituent les populations les plus résistantes au phénomène de baisse. Or, ces populations sont particulièrement exposées car il existe d’une part des risques spécifiquement féminins et d’autre part une corrélation entre l’âge d’entrée dans le tabagisme et les risques encourus. Aujourd’hui, on constate pour la première fois que ces deux populations prioritaires sont les plus concernées par la baisse de la consommation.
La diminution du tabagisme féminin en France atteint 18%. Elle est deux fois plus élevée que celle des hommes.
De même, la diminution tabagique chez les 15/25 ans s’élève à 18,3%. Elle est deux fois plus forte que celle des 25/75 ans.

Une motivation à l’arrêt extrêmement forte

On observe un nombre croissant de fumeurs déclarant avoir envie d’arrêter de fumer (58% des fumeurs en 1999 pour 66% en 2003). Aujourd’hui, près de deux fois plus de fumeurs déclarent avoir envie d’arrêter de fumer dans le mois à venir (12% en 1999 contre 22% en 2003). C’est encourageant, puisqu’on sait que plus le délai projeté est court, plus la motivation est grande.
Enfin, le prix devient une motivation primordiale pour arrêter de fumer puisque il est la 2e raison invoquée (4e place en 1999), la première restant les conséquences sur la santé. Chez les fumeurs qui veulent arrêter dans le mois, 68,3 % citent le prix comme principale motivation à l’arrêt. De plus, le prix est cité par près de la moitié des fumeurs ayant arrêté depuis moins d’un an contre 11% pour ceux ayant arrêté depuis plus d’un an.
Les résultats de cette enquête confirment que la baisse importante des ventes de cigarettes (-13,5% entre 2002 et 2003) traduit une réelle diminution de la consommation. La très forte augmentation des personnes sous traitement de sevrage tabagique (+44%) et la multiplication par deux du nombre d’appels quotidiens à la ligne Tabac Info Service pour la même période conforte également la très nette hausse des personnes ayant arrêté depuis un an.
D’après un communiqué de presse de l’INPES, 1er février 2004
Vous pouvez télécharger le dossier de 10 pages ‘Enquête sur la prévalence du tabagisme en décembre 2003’ sur le site https://www.inpes.sante.fr .

Légère diminution du nombre de fumeurs

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Début 2004, le CRIOC a effectué son enquête annuelle sur le tabagisme en Belgique.
La population belge compte 27% de fumeurs . Parmi les 1022 personnes interrogées, 27,4% ont en effet déclaré fumer tous les jours. Elles étaient 29% en 2002 et 28% en 2001. Cette faible diminution montre une relative stabilité du nombre de fumeurs quotidiens. Outre ceux-ci, 5,8% ont déclaré fumer de temps en temps, et 66,7% ne jamais fumer. Les différences entre la Flandre et la Wallonie, variables selon les années, se sont à présent estompées (27% de part et d’autre). On constate toujours des écarts importants d’une province à l’autre.
Plus de la moitié des Belges considèrent qu’une interdiction de la vente de tabac aux mineurs serait une très bonne (51,6%) ou assez bonne (20,6%) mesure . Seuls 4,3% sont d’avis contraire; 16,5% n’ont pas d’opinion. Ces résultats ne laissent pas transparaître de différence significative selon l’âge, le sexe ou le groupe linguistique des personnes sondées. Par contre le niveau d’étude induit des différences d’opinion sur l’opportunité d’une telle mesure.
Selon cette même enquête, 12,8% des fumeurs interrogés déclarent qu’ils s’arrêteraient de fumer si des photos alarmantes étaient apposées sur l’emballage . 23,2% disent qu’ils fumeraient moins; 63,7% déclarent qu’ils ne se laisseraient pas influencer par de tels avertissements. Les femmes sont plus nombreuses que les hommes à déclarer que de telles photos les influenceraient pour arrêter de fumer. L’impact est également déterminé par l’âge et le niveau d’étude.
La différence entre les genres se réduit , même si les hommes sont toujours plus nombreux que les femmes à consommer du tabac: en 1980 cette différence était presque du simple au double. Elle s’est progressivement réduite jusqu’à un écart de 5% en 2004: les 27% de fumeurs belges se départagent en effet entre 30% d’hommes et 25% de femmes.
La première cigarette est expérimentée à un âge de plus en plus précoce : selon les jeunes interrogés par le CRIOC en 2003, un jeune sur 10 essaie sa première cigarette à 11 ou 12 ans. A 15-16 ans, un jeune sur 4 effectue son premier essai; c’est le cas d’un jeune sur 3 à 17-18 ans. Cette première expérience est stimulée par de proches amis ou membres de la famille. Le milieu de vie exerce donc une influence importante ; en particulier l’attitude des parents est pointée comme facteur de dissuasion ou au contraire d’acceptation. En outre 7 jeunes sur 10 déclarent qu’on fume dans leur école, ce qui est pourtant interdit.
Quant aux non-fumeurs, ils gagnent du terrain! En effet, petit à petit les lieux où il est interdit de fumer se multiplient. Ainsi depuis le 1er janvier 2004, la SNCB interdit la consommation de tabac dans tout son réseau, trains et gares compris.
Les ventes de cigarettes stagnent, les recettes fiscales augmentent : parallèlement à cette légère diminution du pourcentage de fumeurs dans la population, en 2003 la vente de tabac en Belgique a connu un léger tassement. Et ce aussi bien en nombre total de cigarettes vendues (14,287 milliards d’unités en 2003 – 14,314 milliards d’unités en 2002), que de cigares et de tabac à rouler. Quant aux recettes fiscales, elles ont augmenté de 1.785 millions d’euros en 2002 à 2.164 millions en 2003. Elles devraient être utilisées au moins partiellement pour des mesures préventives…

Quelques précisions

Depuis 20 ans, le CRIOC fait réaliser chaque année une enquête auprès d’un échantillon représentatif de la population belge. En 2004, l’échantillon était de 1.022 personnes. Les résultats de cette enquête sont téléchargeables sur le site du CRIOC ( https://www.oivo-crioc.org/textes/pdf/953.pps )
Ils ont également été insérés dans le dossier documentaire sur le tabac , également téléchargeable sur ce site ( https://www.oivo-crioc.org/textes/pdf/371.pdf ). Actualisé pour l’occasion, ce dossier reprend toute une série d’autres informations sur les risques de la consommation de tabac pour la santé, l’incidence du tabagisme actif et passif sur la mortalité, la législation, l’étiquetage des produits, etc.

Tableau 1 – Pourcentage de fumeurs réguliers/quotidiens en Belgique (de 15 ans et plus)

Hommes

Femmes Total
1990 38% 26% 32%
1991 33% 24% 29%
1992 31% 21% 26%
1993 31% 19% 25%
1994 33% 19% 26%
1995 33% 24% 28%
1996 34% 27% 30%
1997 31% 22% 26%
1998 30% 23% 27%
1999 31% 26% 29%
2000 36% 26% 31%
2001 34% 22% 28%
2002 33% 25% 29%
2004 30% 25% 27%

Source: CRIOC

Tableau 2 – Pourcentage de fumeurs réguliers/quotidiens en Flandre et en Wallonie (15 ans et plus)

(1)
Flandre

Wallonie Ecart
1990 28% 32% 4%
1991 25% 33% 8%
1992 23% 29% 6%
1993 23% 26% 3%
1994 23% 30% 7%
1995 27% 29% 2%
1996 30% 31% 1%
1997 25% 27% 2%
1998 27% 26% -1%
1999 26% 32% 6%
2000 28% 33% 5%
2001 28% 29% 1%
2002 26% 35% 9%
2004 27% 27% 0

Source: CRIOC
(1) Les pourcentages pour Bruxelles peuvent montrer de grandes différences d’année en année. Puisque l’échantillon ne porte que sur 180 à 240 personnes, celles-ci n’ont pas été reprises dans ce tableau.

Tableau 3 – Répartition par province

Province

Non-fumeurs
Anvers 67
Brabant flamand 67%
Brabant wallon 79%
Bruxelles 64%
Flandre occidentale 60%
Flandre orientale 75%
Hainaut 72%
Liège 58%
Limbourg 60%
Luxembourg 52%
Namur 63%

Source: CRIOC

Tableau 4 – Recettes fiscales

Année

Montant (en euros)
1990 916
1991 979
1992 1.040
1993 1.155
1994 1.240
1995 1.318
1996 1.403
1997 1.426
1998 1.557
1999 1.691
2000 1.793
2001 1.712
2002 1.979
2003 2.164

Source: Service public fédéral finances

Le Plan fédéral de lutte contre le tabagisme

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Le Ministre fédéral de la Santé publique, Rudy Demotte , propose un ensemble d’initiatives concertées pour combattre ce ‘véritable fléau’, considérant que ‘seule la combinaison de mesures prises dans le cadre d’un plan global de lutte contre le tabac est en mesure de produire des effets significatifs et d’inverser la tendance’.
Il ajoute qu’ ‘un plan global permet en outre de mieux maîtriser les effets pervers découlant de certaines mesures prises isolément, d’inclure tous les acteurs de la lutte antitabac, de hiérarchiser les mesures dans le temps et de piloter au niveau fédéral un ensemble cohérent de mesures’.
Ce plan prévoit six dispositions.

Ratification de la Convention-cadre de l’OMS

La Belgique a signé le 22/01/2004, mais n’a pas encore ratifié la Convention-cadre. Actuellement, une centaine de pays l’ont signée et 10 l’ont ratifiée , mais il faut que quarante pays signataires la ratifient pour qu’elle entre en vigueur et ait force obligatoire (90 jours après le dépôt du 40e instrument de ratification).
Pour rappel, la Convention comprend des dispositions qui énoncent les normes internationales minimales se ra pportant à la publicité, la promotion et le parrainage, les mesures financières et fiscales, le conditionnement et l’étiquetage, le commerce illicite et la protection face au tabagisme passif. Ces dispositions constituent des lignes directrices, mais n’empêchent pas les Etats parties à la Convention d’édicter des lois plus contraignantes!

Fabrication et mise dans le commerce des produits du tabac

Les messages sanitaires sur les emballages seront complétés par des photos en couleurs dissuasives, auxquelles certains experts attribuent un fort impact émotionnel.
Conséquence logique, les étuis destinés à contenir les paquets de cigarettes et à masquer les mises en garde (‘fun box’) seront interdits.
La vente aux mineurs de moins de 16 ans sera interdite.
L’accès aux distributeurs automatiques (il y en a 20.000 dans notre pays, sur un total de 70.000 points de vente) sera limité de façon à les rendre inutilisables par les jeunes de moins de 16 ans.

Droit à un environnement sans fumée, protection contre le tabagisme passif

La réglementation actuelle limitant l’usage du tabac dans les établissements Horeca est peu suivie. Les contrôles effectués par l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (AFSCA) seront renforcés, et la zone réservée aux non-fumeurs passera à 75% de la superficie totale du lieu et des places disponibles.
Certains pays interdisent totalement de fumer sur les lieux de travail. Ce sera aussi le cas de la Belgique à partir du 1er janvier 2006, à l’exception des fumoirs.

Aide au sevrage

L’objectif est d’améliorer l’accessibilité financière et géographique des méthodes de sevrage tout en ne limitant pas ces dernières aux seuls médicaments.
Les compétences des professionnels de santé en la matière seront renforcées par des stratégies et programmes de formation adaptés.

Création d’un ‘Fonds antitabac’

Ce fonds, dont on parle depuis plusieurs années, devrait être opérationnel au 1er juillet 2004. Le but est de soutenir les actions de lutte contre le tabagisme, qu’elles émanent du niveau fédéral, des Régions ou des Communautés.
Un ‘Comité de lutte contre le tabagisme’ permettant aux différents niveaux de pouvoir d’échanger des informations et de veiller à la cohérence de leurs actions respectives dans le cadre d’une approche globale est également prévu.
A propos de financement de la lutte antitabac, il y a eu récemment une petite poussée de fièvre dans le milieu de la prévention quand on a appris que le Gouvernement fédéral envisageait de reconnaître la Fondation Rodin comme d’utilité publique, alors que cette fondation est largement financée par l’industrie du tabac. La Ministre de la Santé de la Communauté française s’en est également émue.

Augmentation de la fiscalité du tabac

Une augmentation forte et brutale du prix du paquet de cigarette est plus efficace que des augmentations légères et étalées dans le temps. Ceci devra faire l’objet d’un groupe de travail présidé par le Ministre des Finances.Il reste à espérer une rapide concrétisation du plan, et une mobilisation collective digne de ce formidable défi!
Christian De Bock
Vous pouvez consulter l’intégralité du plan fédéral (28 pages) sur le site https://www.rudydemotte.be .
(1) Le 20/04, il y avait 102 signataires, et 10 ratifications. Voir le site https://www.who.int/tobacco/areas/framework/signing_ceremony/countrylist/en/
(2) Voir à ce sujet l’article de Marleen Teugels ‘Rodin: pas de fumée sans feu’ , n° 181, août 2003.
Signalons à ce propos que Philip Morris a rompu en début d’année le contrat qui liait la multinationale à la Fondation Rodin. Cette dernière, pour qui cette décision représente un manque à gagner considérable a saisi le juge des référés, qui a estimé sa requête non fondée. La Fondation va faire appel.

Prévention des traumatismes survenant chez des jeunes enfants

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Evaluation d’un processus d’implantation d’une trousse de sécurité

Situation épidémiologique des traumatismes en Belgique

En Belgique, les accidents sont la première cause de mortalité chez les enfants de moins de 15 ans (1). De ce point de vue la situation est comparable avec celle des autres pays industrialisés.
En 1997, le pourcentage de décès par accidents non liés au transport était de 26% chez les enfants entre 1 et 4 ans, 19% chez les enfants de 5 à 9 ans et 10% chez les 10-14 ans (2).
Les accidents mortels chez les bébés sont surtout dus aux suffocations. Chez les enfants de 1 à 4 ans, un tiers des décès est causé par les noyades et le reste par les incendies, les inhalations d’objet, les intoxications et les chutes.
Au-delà de 5 ans, les noyades comptent pour la moitié des décès, l’autre moitié concerne les chutes et les incendies (3).
Il n’est pas facile d’intervenir pour faire diminuer l’incidence des traumatismes chez les enfants, en particulier l’incidence de ceux qui surviennent à domicile. Le seul fait d’augmenter les connaissances des parents sur la sécurité domestique n’est pas suffisant pour modifier les comportements. Il est nécessaire d’envisager une stratégie multifactorielle mettant en place plusieurs actions complémentaires.
Une intervention de prévention des traumatismes à domicile a été réalisée en Belgique, intervention s’intégrant dans une coopération France – Belgique – Québec. En effet, une action similaire était menée en France et au Québec.

Intervention pilote dans la commune de Fontaine-l’Evêque

Objectif

L’objectif général du projet était de diminuer l’incidence des accidents domestiques chez les enfants de 6 à 18 mois. Plus spécifiquement, le projet visait à amener les parents à modifier leurs comportements et à adapter la maison à des normes d’environnement plus sûr. Le second objectif était de permettre aux travailleurs médico-sociaux d’aborder plus concrètement la prévention des accidents chez les enfants.

Public visé

Familles de faible niveau socio-économique ayant des enfants de moins de 2 ans.

Description de l’intervention

Cinq actions conjointes font partie de l’intervention:
– réalisation de visites à domiciles;
– remise d’une trousse de sécurité aux familles;
– délivrance de conseils sur la sécurité des enfants;
– remise de brochures sur les thèmes de sécurité domestique;
– évaluation quantitative et qualitative.
Deux visites à domicile espacées de 6 à 8 semaines ont été organisées dans 46 familles de la localité de Forchie-la-Marche, une des trois localités qui composent la commune de Fontaine-l’Evêque. Lors de la première visite, ces familles ont reçu une trousse de sécurité contenant du matériel de sécurité et des brochures.
Le matériel, d’une valeur de 30 euros, a été donné gracieusement aux familles par l’administration communale. La trousse comprenait un détecteur de fumée; un bloque porte; des bloque-tiroirs; une bande de fermeture pour le réfrigérateur; un tapis de bain antidérapant; un bloque électroménager; un protège-bec de robinet; un bloque-poignée; des crochets bloque-placards, tiroirs, fenêtres et portes; des coins de protection à poser sur les meubles et 6 brochures sur l’enfant et la sécurité domestique.
La démarche de conseil et de remise des trousses aux familles a été réalisée par les travailleuses médico-sociales de l’Office de la Naissance et de l’Enfance (ONE), par le Service de gardiennes encadrées ‘Le Cerf -volant’, par la Cellule Prévention et le Service santé de l’administration communale.
Lors d’une première visite, le personnel aidait les familles à identifier les situations à risque au domicile à l’aide d’un questionnaire, remettait la trousse de sécurité en fournissant des explications sur l’installation du matériel contenu dans celle-ci et enfin précisait les changements à apporter aux situations à risque relevées.
Au cours de la seconde visite, les situations à risque ont été à nouveau évaluées à l’aide du même questionnaire.
Un travail similaire a été conduit en parallèle dans 25 autres familles durant la même période. Ces familles ont également été visitées mais sans recevoir la trousse de sécurité. Elles ont simplement reçu les brochures sur l’enfant et la sécurité domestique ainsi que des conseils sur la prévention des traumatismes. Une évaluation des situations à risque a aussi été réalisée à l’aide du même questionnaire, lors de la première visite afin d’amener les familles à identifier les situations à risque et lors de la seconde visite afin d’observer les modifications éventuellement apportées. Ce deuxième groupe jouait donc le rôle de ‘groupe témoin’
Au total 71 familles ont donc participé à cette recherche.

Evaluation de l’intervention

L’évaluation comprenait deux volet: une évaluation quantitative visant à objectiver l’effet de la trousse sur les comportements sécuritaires des familles et une évaluation qualitative visant à mettre en évidence la satisfaction des familles et des travailleurs médico-sociaux.

Evaluation quantitative

La comparaison entre les deux groupes montre essentiellement qu’entre les deux visites il y a eu globalement plus d’améliorations des situations considérées à risque dans le groupe qui a reçu la trousse que dans le groupe témoin, sans trousse. Plus particulièrement, pour les situations à risque de chute, de brûlure et de blessure il y a une différence statistiquement significative de changements entre les deux groupes.
Les améliorations apportées concernaient aussi bien les situations à risque pouvant être modifiées par les matériels contenus dans la trousse que les situations qui n’ont rien à voir avec ces matériels (rangement des allumettes et briquets par exemple).
La remise d’une trousse de sécurité domestique permet donc non seulement de renforcer la prévention passive des accidents domestiques mais aussi d’induire un comportement de sécurité significativement plus important que par la seule délivrance de conseils et l’appui pédagogique de brochures remises à l’occasion d’une visite à domicile.
L’évaluation quantitative a donc montré un ‘effet trousse’.

Evaluation qualitative

Auprès des familles
L’initiative a été très appréciée par les familles. Elles ont reçu du matériel efficace et de bonne qualité. Le fait que cette démarche soit communale est très satisfaisant pour les familles. Ces dernières avaient le sentiment que l’administration communale s’intéresse à leur sécurité. De plus les familles se sentaient valorisées par le fait qu’on leur demande leur avis sur le projet et le matériel fourni. Elles ont relevé, entre autres, quelques problèmes techniques: les objets de la trousse ne sont pas tous adaptés, certains sont difficiles à placer (les crochets) et d’autres détériorent le mobilier (le vissage des taquets anti-chute de tiroir).
Auprès des intervenantes à domicile
Deux groupes focalisés ont été réalisés avec les intervenantes à domicile. Il en ressort que cette intervention a des effets à trois niveaux: sur l’institution, sur les pratiques professionnelles et s la mobilisation communautaire.
Concernant l’institution, l’intervention donne une autre image des services. Par exemple le personnel de l’ONE n’est plus perçu comme ‘contrôleur’ mais comme ‘soutenant’. Elle permet aussi un repositionnement des missions de chacun.
Par rapport aux pratiques professionnelles, du temps a été rendu disponible pour approfondir un sujet; une réflexion commune a été élaborée entre professionnelles sur une démarche: son sens, ses objectifs, le rôle et les moyens de chaque service; enfin, on a observé une relation modifiée, plus positive, avec les familles.
Quant à la mobilisation communautaire, les acquis sont un questionnement des autres professionnels, un partenariat durable entre les services, une valorisation des familles par la participation au processus.
L’évaluation qualitative montre que l’ ‘effet trousse’ est dû à l’intérêt que le matériel de sécurité suscite parmi les familles, à l’image positive que l’apport du matériel a suscité vis-à-vis des intervenantes, à la motivation que cet apport concret aux familles a induit parmi elles et au travail de préparation du projet mené en commun.

Conditions de réussite de l’intervention

Un certain nombre de facteurs facilitants ont été identifiés:
– l’information de la communauté et la participation des familles;
– l’aide au placement des matériels dans la maison;
– la rétro-information de l’analyse des résultats des évaluations.
Les conditions de réussite de la mise en œuvre permettant d’atteindre les objectifs concernant l’organisation elle-même, le matériel mis à disposition des familles et l’action des intervenantes.
L’ organisation doit disposer d’un service ayant un programme de visites à domicile, d’un coordonnateur de projet, d’un budget pour financer les trousses, avoir une capacité de gestion des matériels contenus dans la trousse et mener l’intervention de manière ciblée, préférentiellement lorsque les enfants ont entre 6 mois et 1 an, c’est-à-dire une période durant laquelle les parents sont interpellés par la problématique des accidents.
Le matériel doit être gratuit, facile à installer et solide, sûr et adapté aux meubles et aux éléments de constructions des habitations.
Les intervenants doivent avoir une bonne connaissance de la promotion de la sécurité et de la prévention des traumatismes, une bonne connaissance du matériel proposé et des conditions de son utilisation, une attitude de dialogue, une motivation personnelle pour l’intervention.

Perspectives d’avenir

Cette recherche a montré l’intérêt de fournir gratuitement du matériel de sécurité aux familles ayant des jeunes enfants. Un ‘effet trousse’ a en effet pu être mis en évidence: les parents ayant reçu la trousse ont adopté davantage de comportements de sécurité. Ces résultats plaident en faveur de l’extension de l’implantation de la trousse de sécurité. Les conditions de faisabilité d’une telle entreprise devraient être alors explorées.
Martine Bantuelle , Educa-Santé, Marc Sznajder , Hôpital Ambroise Paré, Marie Christine Van Bastelaer , Educa-Santé
Adresses des auteurs:
Educa-Santé, avenue Général Michel 1b, 6000 Charleroi
Hôpital Ambroise Paré, Service de santé publique et information médicale, 9 av. Charles de Gaulle, 92100 Boulogne (France)
(1) PROMES – Université libre de Bruxelles – Educa-Santé, ‘Accidents domestiques, la situation épidémiologqie en Belgique’, Santé Pluriel, 1992, 7&8.
(2) Institut de Santé Publique, Standardized Procedures for Mortality Analysis, [L]htpp://www.iph.fgov.be/sasweb/spma/spma.htm[/L]
(3) Prévention et petite enfance, ONE; 1997, p 266-267
D’après les données du système EHLASS 1998

Usages de psychotropes et prévention en ‘Prospective’

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

L’asbl Prospective Jeunesse en quelques mots…

Subsidiée conjointement par la Communauté française et la Commission communautaire francophone (Région de Bruxelles-Capitale, l’asbl Prospective Jeunesse est active depuis 1978 dans le champ de la prévention des assuétudes et des risques liés aux usages de psychotropes, qu’elle inscrit aujourd’hui dans une perspective de promotion de la santé. Contrairement à ce que son nom indique, Prospective Jeunesse ne travaille pas directement auprès des jeunes mais privilégie l’information, la sensibilisation, la formation et l’accompagnement des adultes ayant des responsabilités vis-à-vis des jeunes. En toute cohérence avec les critères de qualité et d’efficacité de la prévention, Prospective invite les relais à développer une réflexion dans les moyen et long termes et attire leur attention sur la nécessité d’intégrer les différents facteurs déterminant les consommations et notamment ceux liés au contexte (social, culturel, philosophique, économique, institutionnel…) tout en ne perdant pas de vue les interrogations immédiates des acteurs (entre autres, et c’est un grand classique, sur les produits et leur «dangerosité»).

Des repères philosophiques et conceptuels

L’équipe pluridisciplinaire de Prospective Jeunesse (anthropologue, sociologue, psychologue, spécialiste en promotion de la santé) pose un regard systémique et anthropologique sur la question des consommations, s’articulant autour des trois axes de réflexion que sont «le produit», «la personne» et «le contexte». Sont considérées autant la nature et les spécificités de chaque axe que les interactions entre les trois pôles. Dès lors, si l’on peut pointer quelques stratégies d’intervention liées au contexte, à la personne ou au produit, on se devra de ne jamais perdre de vue que la consommation coïncide avec «la rencontre d’un individu particulier avec un produit particulier dans un contexte particulier » (1).
Néanmoins, on peut, à titre d’exemples citer quelques points d’ancrage de notre travail de prévention:
– l’analyse de l’institution (école, association, lieu de travail…), c’est-à-dire du cadre d’où émerge la demande et dans lequel va se développer la réflexion (voire l’action): quelles sont les représentations de la problématique? Quelles sont les attentes en matière de prévention et par rapport à Prospective Jeunesse? Quelles sont les habitudes de fonctionnement? Quels sont les partenariats existants ou les partenaires habituels? Qu’est-ce que l’institution est prête à investir? Jusqu’où est-elle prête à induire/porter des changements?…;
– l’identification de l’estime de soi, des compétences sociales, de l’accès à une information objective (notamment sur les risques et les usages) comme des éléments à développer/renforcer pour permettre à la personne (vis-à-vis de laquelle intervient le relais) de faire des choix et d’avoir des attitudes responsables dans sa consommation comme en matière de bien-être en général;
– un discours le plus objectif possible sur les produits, leurs effets, leur toxicité… Un refus de la diabolisation, et la réinscription des produits dans une approche géo-politique, de même que des usages dans une perspective historique et sociale;
– enfin, la sensibilisation des acteurs aux différents types et niveaux de discours tenus sur les produits et leur consommation : du politique à la santé (et à la promotion de la santé), en passant par le juridique il y a des incohérences qu’il est judicieux de relever afin que le relais (éducateur, parent, enseignant, assistant social…) puisse se positionner en tant que partenaire de prévention. De manière synthétique, nous pouvons dire que nous cherchons véritablement à ré-introduire (ou ré-éclairer) la complexité dans le regard porté sur les usages de psychotropes, tout en invitant les relais à rester «modestes» dans la définition de leur rôle d’acteurs de prévention.
Prospective Jeunesse, comme d’autres partenaires abordant les consommations (et la santé), privilégie une approche positive et non culpabilisante tout en désignant une série d’attitudes et de savoir-faire favorables à la prévention, notamment la nécessité de poser des repères et des balises clairs dans les interventions des relais auprès des jeunes.

Une volonté d’interface entre terrain et recherche, projets concrets et espaces de réflexion

En partenariat avec Modus Vivendi et Infor-Drogues, Prospective Jeunesse est active, dans le cadre d’Eurotox, au sein de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies. Un tel investissement nous permet d’être au fait des «tendances» européennes en matière de consommations, principalement des types de produits et des modes de consommation.
En croisant les données d’Eurotox avec d’autres recherches plus globales, comme les enquêtes sur les comportements de santé des jeunes (HBSC) menées par l’Ecole de santé publique de l’ULB (PROMES), nous pouvons relier des notions telles que types, fréquences de consommation et confiance en soi, motivation scolaire… Ce matériel de recherche favorise une certaine objectivation des représentations et croyances lors de séances de sensibilisation ou de formation auprès des relais.

Les activités de Prospective Jeunesse

La formation

L’objectif global de nos activités de formation (mais aussi d’accompagnement et de communication) est la sensibilisation des relais et le développement de savoir-être et de savoir-faire appropriés en matière de prévention des assuétudes. Il est vrai que nous consacrons beaucoup de temps à la phase de sensibilisation tant il nous apparaît, aujourd’hui encore, que la question des consommations reste taboue et induit bon nombre de préjugés (moraux, sociaux). Comme nous l’évoquions précédemment, cette question est débattue dans plusieurs sphères (sociale, éducative, judiciaire, sanitaire…) et se voit par conséquent «brouillée» par des discours quelquefois antagonistes.
Un module interdisciplinaire
Prospective Jeunesse propose un module de trois journées aux relais issus de différents secteurs et rassemblés autour d’un intérêt commun pour la question des consommations et/ou qui côtoient des usagers. Le contenu s’articule véritablement autour des axes «produit-personne-contexte» que nous développons ci-dessus.
Les participants sont invités à débattre de leurs représentations des termes tels que «santé», «prévention», «toxicomanies», «assuétudes» pour en proposer leurs propres définitions. Dès l’entame du processus de formation, nous confrontons, à travers les paroles des participants, les différentes dimensions que peut recouvrir la santé, de même que les stratégies (parfois contradictoires et même contre-productives) de prévention et les regards portés sur usages et toxicomanies.
A titre d’illustrations, nous citons ici quelques croyances ou opinions qui s’expriment régulièrement en formation: l’équivalence entre consommation de psychotropes et assuétude ou toxicomanie, la vision d’une «bonne» santé s’opposant à la «mauvaise» santé induisant l’existence de «bons» et de «mauvais» comportements, la survivance d’une véritable «théorie de l’escalade» (celui qui consomme un joint en viendra irrémédiablement à d’autres produits), la certitude que la peur peut jouer un rôle en prévention, une certaine confusion entre prévention et répression, la difficulté de cerner distinctement le rôle de différents acteurs tels que l’enseignant, le policier, l’assistant social…
Dans un deuxième temps, nous recadrons les concepts de santé et de prévention en retraçant leur évolution progressive vers les paradigmes de bien-être global, de promotion de la santé et de réduction des risques. Aidés des éclairages de l’histoire, de la sociologie et de la systémique, nous amenons les notions d’«espaces d’usages», de motivations à consommer, de même que la distinction entre «usage», «abus» et «dépendance».
Enfin, lors du troisième jour, nous invitons les participants qui le souhaitent à replacer les consommations dans le cadre de leurs pratiques professionnelles et, le cas échéant, nous amenons le groupe à travailler sur différents projets institutionnels en présence.
Des formations «à la carte»
Ces formations ont les mêmes objectifs de départ que ceux du module interdisciplinaire: acquérir de nouvelles connaissances et porter un regard critique sur les drogues en général, leur consommation, les contextes sociologique, juridique, historique, anthropologique, géopolitique et institutionnel, l’adolescence, la jeunesse, les addictions. La différence est qu’elles abordent une thématique spécifique définie ensemble avec l’institution demandeuse. A travers les questions posées, les sujets abordés et les activités réalisées en sous-groupes, les formations permettent de construire un discours commun entre des acteurs qui se côtoient mais qui n’ont pas forcément l’habitude de travailler ensemble sur un projet commun.
Prospective Jeunesse collabore par exemple avec un CPAS bruxellois. Il s’agit d’après-midi de formation-information qui s’intègrent dans un cycle plus général destiné aux demandeurs d’emploi remplissant les conditions de l’Article 60 (2). Le public a un niveau socio-économique très varié. Ces séances de formation tentent de questionner les différentes conceptions se cachant derrière les mots «prévention», «santé», «drogues», «toxicomanie».
Nous clarifions (si cela est encore possible actuellement!) les aspects législatifs liés aux drogues. De nombreuses questions émergent lors de ces séances: quels comportements adopter face à «un drogué»? Quelles sont les raisons qui poussent à consommer? Peut-on fumer un joint en rue? Le cannabis est-il dangereux pour la santé? Pourquoi laisse–t-on les jeunes «s’enivrer» dans les cafés? Comment «protéger» les mineurs? Doit-on tout interdire à nos enfants? Le but de la formation ici est de rassembler un groupe de personnes différentes autour de réflexions communes, de créer un espace de parole où chacun peut témoigner (ou non!) de son expérience ou de son point de vue. A chaque groupe, le contenu de la formation se teinte des centres d’intérêts et des origines culturelles propres aux participants. Ces formations sont aussi pour nous un moyen de nous enrichir des différentes pratiques de consommation et des mécanismes variés mis spontanément en œuvre dans des sociétés diverses.

L’accompagnement

Les accompagnements individuels
En ce qui concerne les accompagnements individuels et familiaux, nos objectifs visent une autonomie des personnes dans la gestion de leur questionnement par rapport à leurs consommations ou celles de quelqu’un de leur entourage (privé ou professionnel). Les objectifs particuliers sont moins structurés dans la mesure où chaque «demandeur individuel» ou chaque famille se présente avec une demande éminemment personnelle à laquelle nous devons nous adapter et non l’inverse.
Le cadre de référence théorique privilégié pour mener ces entretiens est inspiré de l’approche systémique, et, entre autres du modèle de thérapie brève de Palo Alto. Dans la plupart des cas, il ne s’agit pas de ce que l’on pourrait qualifier comme une approche «thérapeutique» mais bien d’une démarche d’éclaircissement, de dédramatisation, d’accompagnement…
Il s’agit, tenant compte des croyances et des valeurs des personnes qui «consultent», de faire émerger les «solutions» qu’ils privilégient. Ces entretiens ne visent pas un retour à l’abstinence mais bien de pouvoir «vivre le mieux possible» dans le contexte de vie qu’ils traversent.
Le public se compose pour moitié de parents et pour moitié d’usagers/ex-usagers.
Les demandes se répartissent comme suit:
Usages problématiques 79 %
Usages récréatifs 12 %
Usages réguliers 9 %
Et concernent principalement le cannabis (94%), l’ecstasy (3%) et la cocaïne (3%).
Des demandes plus importantes nous sont adressées, mais nous n’avons pas pu y répondre systématiquement par manque de personnel. Nous les réorientons vers d’autres services, dont principalement la permanence téléphonique d’Infor-Drogues.
Les accompagnements collectifs
Nos accompagnements collectifs répondent au questionnement qu’une institution nous adresse par rapport à un sujet qui suscite fréquemment peur et incompréhension. Ces accompagnements débutent par une analyse de la situation qui met l’accent sur les objectifs à long terme: la gestion d’une situation «problématique» et/ou le développement d’un projet mettant davantage l’accent sur des compétences et des ressources plutôt que sur les aspects négatifs. Il s’agit bien souvent de démarrer un projet propre à une institution.
Nous concevons notre rôle dans ce travail comme celui d’un ‘tiers’, révélateur et catalyseur en gardant en vue la question de l’autonomie et de la responsabilisation du public. L’originalité est ici de rassembler des personnes faisant partie d’une même organisation mais n’y occupant pas forcément la même place et/ou fonction. Par exemple, s’il s’agit d’une école, les membres du groupe peuvent être professeurs, parents, directeurs, membres du pouvoir organisateur, éducateurs, membres du personnel de cuisine… Bien souvent, le programme débute par une formation «à la carte» qui permet à chacun de se situer face à ses propres représentations mais qui donne aussi l’occasion au groupe de se construire un langage commun.
A la suite de cette formation, nous constatons souvent le désir de construire un groupe d’adultes relais, une «cellule assuétudes» et la mise en œuvre d’actions de prévention adaptées au contexte et situations particuliers de l’institution. Prospective Jeunesse accompagne l’institution lors des différentes étapes de son projet. Ce suivi dans le temps assure une cohérence dans les actions déterminée par les objectifs à long terme et permet de construire l’évaluation.
Comme c’est le cas dans tous nos axes de travail, les institutions demandeuses sont inscrites dans des secteurs tels que l’enseignement, l’insertion socioprofessionnelle, le travail de rue, l’aide à la jeunesse…
En guise d’illustration, l’équipe de Prospective Jeunesse a réalisé un projet d’accompagnement dans une école secondaire du Brabant wallon. Ce projet a débuté par une intervention lors d’une journée pédagogique en 2001, suivie d’une série de formations «à la carte» adressées aux enseignants, aux éducateurs et à la direction.
Par la suite et à la demande de l’école, deux séances de supervision en collaboration avec une AMO du quartier ont été utilisées pour consolider concrètement la ‘cellule assuétudes’ au sein de l’école. Il faut souligner que celle-ci est intervenue entre temps pour informer les élèves et recueillir leurs questions de manière anonyme.
Ce matériel très intéressant a été analysé avec notre aide. La mise en place de la ‘cellule assuétudes’ a également soulevé des questions pertinentes au sein du groupe mais aussi dans toute l’école: ne faut-il pas laisser plus de place à ‘l’informel’ en identifiant auprès des élèves une liste de professeurs-ressources, en faisant confiance au ‘travail de couloir’ plutôt qu’en créant un bureau avec des permanences éventuellement inaccessibles et stigmatisantes pour les élèves? N’est-il pas également utile de rédiger une charte éthique permettant au groupe «assuétudes» de communiquer sa philosophie? Cette charte clarifierait également la position de l’école sur les thèmes délicats de la confidentialité et des limites de l’intervention. Notons que chaque décision prise au sein de la cellule a été négociée avec la direction dont un représentant était présent lors de nos réunions.
En 2002, des supervisions ont été effectuées afin de clarifier les questions sensibles autour du rôle et des limites de la cellule. Comme dans chaque institution, des personnes quittent leur lieu de travail et de nouvelles l’investissent. L’année 2002 à donc été pour nous l’occasion de rencontrer d’autres personnes de cet établissement qui désiraient participer à une formation.
En 2003, le groupe «assuétudes» a identifié les professeurs-ressources auprès des élèves, des parents et de leurs collègues. Une charte concernant leurs positions et leur type d’intervention (ou non-intervention) a été distribuée et expliquée aux différents acteurs de l’école.

La communication

Les différentes missions de Prospective Jeunesse sont complémentaires et s’enrichissent mutuellement. Dès lors, elles permettent de se situer dans une approche complexe du phénomène et d’éviter par là même une approche linéaire et réductrice de type sécuritaire ou stigmatisant le consommateur comme malade et/ou délinquant.
Pour mener à bien ces actions et réflexions, il faut les situer dans une rencontre continue reliant les savoirs pratiques des différents acteurs et des repères théoriques. C’est pourquoi, dans le cadre de nos missions de prévention des assuétudes et des toxicomanies et d’étude des politiques et pratiques sociales en matière de jeunesse, nous mettons en avant une politique de diffusion, de communication et de publication .
Ce projet est une continuité des actions de Prospective Jeunesse qui, depuis ses débuts, favorise une politique d’édition et de diffusion d’outils à l’intention de son public.
Parallèlement, les publications par le biais d’articles, d’exposés lors de journées d’études, séminaires, colloques, ou via notre site internet, nous semblent constituer le complément et la suite logique à nos réflexions et axes de travail multiples.
«Les Cahiers de Prospective Jeunesse»
La conception de la prévention développée à Prospective Jeunesse se situe du côté de la promotion de la santé, de la citoyenneté responsable, aussi essayons-nous, dans les sujets abordés au sein de la revue, de dépasser le cadre strict de la toxicomanie.
Dans ce but, nous souhaitons ‘mettre ensemble’, au sein des dossiers, des pratiques, des réflexions, des approches de différents acteurs, services, institutions, tous ‘observatoires’ privilégiés et partenaires potentiels dans le cadre des approches de prévention et de promotion de la santé. Nous tentons de mettre en évidence la richesse et la diversité de ces réseaux et de montrer que les différents ‘lieux’ peuvent s’ouvrir, augmenter les interactions en prenant conscience des différents acteurs présents autour de leur public.
Après avoir abordé entre autres des thèmes tels que les pratiques judiciaires en matière de consommation de produits illicites, l’école et la prévention, l’exclusion, les drogues de synthèse, la dépénalisation du cannabis et autres psychotropes, la famille, le secret professionnel, le monde du travail et les psychotropes… la dernière édition des Cahiers consacre non pas un mais bien deux tomes à cette approche relativement récente, relativement controversée et relativement novatrice qu’est la réduction des risques (RdR). Ce dossier interroge la RdR et les valeurs qui la sous-tendent en donnant la parole à divers intervenants pour que chacun, de sa place et de là où il parle, s’exprime par rapport aux notions de «risques» (une société sans risque est-elle possible/souhaitable?), de «bien-être» (existe-t-il sous une seule forme vers laquelle les individus devraient tendre?) et de «prévention» (quand commence et quand s’arrête le rôle de l’acteur de prévention?).

Trois Cahiers récents sur les drogues

Cahier n° 27 – Drogues et réduction des risques – Tome 1 – 2e trimestre 2003

Drogues et prévention: pour une réduction des risques… de confusion, H.P. Ceusters
Y a-t-il une issue entre le risque zéro et la catastrophe?, M. Bantuelle
Limites et enjeux de la prévention participative, C. Van Huyck
Maximiser les risques?, J.P. Jacques
La récupération politique des stratégies de réduction des méfaits en contexte prohibitionniste, L. Beauchesne
Des Assises de la réduction des risques?, Maryse Degraen

Cahier n°28 – Drogues et réduction des risques – Tome 2 – 3e trimestre 2003

La réduction des risques: une forme de prévention comme les autres?, D. Kamiski
La réduction des risques, approche hygiéniste ou humaniste?, G. Van der Straten
L’échange de seringues à Charleroi: une expérience pratique de réduction des risques, L. Przylucki
Vers la diversification de l’offre d’aide et de soins, Alex Neybuch

Cahier n°30 – Contextes et consommations – 1er trimestre 2004

Consommer pour exister ? Comment, quels produits et au nom de quelles valeurs ? Image de soi, reconnaissance sociale, appartenance au groupe, inscription culturelle,… Faut-il avoir pour être ?
Que signifie pour les jeunes « bien » consommer ? Jeunes, consommation et initiation
Le rôle des médias, un produit pour chaque problème : hyper dépendance ou toute puissance/existence?
Peut-on encore parler de société de consommation ?
La sécurité, un nouvel objet de consommation ?
Consommation et espaces d’usages : entre abstinence et abus
Consommer, à quels risques ?
La position de l’éducateur, quel apprentissage des consommations ?
Consommation de psychotropes et contexte prohibitionniste : enlisement ou pragmatisme ?
Pour commander l’un ou l’autre Cahier paru, contactez Claire Haesaerts, Secrétaire de Rédaction à Prospective Jeunesse, tél: 02 512 17 66, fax: 02 513 24 02, courriel: claire.haesaerts@prospective-jeunesse.be). Le somaire de tous les Cahiers parus peut être consulté sur le site https://www.prospective-jeunesse.be

Autres publications
Outre «Les Cahiers…», nous étendons sans cesse les lieux, espaces de communication et de transfert de nos réflexions et pratiques vers l’extérieur. Il s’agit toujours d’informer et de sensibiliser un public sans cesse plus large et de partager des modèles d’action mais également de susciter débats et controverses.
A titre d’exemples, quelques ouvrages publiés ou auxquels nous avons collaboré:
L’ouvrage de Michel Rozensweig «Les drogues dans l’histoire entre remède et poison, archéologie d’un savoir oublié», qui retranscrit en l’approfondissant le contenu des modules de formation;
La brochure «assuétudes» réalisée par les élèves et professeurs de l’Institut Saint-Dominique de Schaerbeek (3e degré de l’enseignement général secondaire): ce document illustre l’intégration de la problématique des assuétudes dans une démarche éducative interdisciplinaire;
Le livre de Gilles Hacourt, «Ecstasy, pilules sans ordonnances, usage et usagers de nouvelles drogues de synthèse », réalisé dans le cadre d’une recherche financée par l’asbl Eurotox, qui décrit le monde peu ou mal connu des usagers des nouvelles drogues de synthèse (3).
Enfin, nous travaillons actuellement à la réalisation d’autres outils destinés aux relais, tels qu’une brochure concernant l’accueil des parents en milieu scolaire (niveau fondamental) issue du projet Relations Ecole-Famille mené dans le cadre d’une subvention du Fonds Houtman (prévention de la violence à l’école); ou encore les brochures de «réduction des risques» réalisées en collaboration avec Infor-Drogues, Modus Vivendi, Citadelle, Liaison Anti-prohibitionniste, Alfa…).
Internet
Internet est devenu un canal médiatique qu’on ne peut plus négliger. Grâce à notre site www.prospective-jeunesse.be, nous disposons aujourd’hui d’un espace destiné à présenter et à promouvoir nos services et publications, à mettre des informations à disposition d’un public toujours plus important.

Le centre de documentation

Dans un souci permanent d’actualisation et d’information, notre asbl dispose d’une bibliothèque spécialisée ouverte au public (généralement des étudiants, professionnels de l’éducation ou du social). Le centre de documentation est accessible trois jours par semaine, le lundi et mercredi de 14 à 16 heures et le vendredi de 10 à 12 heures ou sur rendez-vous avec notre documentaliste, Danielle Dombret . Les ouvrages rassemblés et «empruntables» concernent bien évidemment le domaine des toxicomanies vues tant sous l’angle «produit» que «personne» ou «contexte». D’autre part, le centre propose une documentation sur les thèmes connexes à la réflexion sur les consommations, tels l’adolescence, la prévention, la santé, l’école…
Enfin, des revues de presse sont réalisées tous les quinze jours sur base de la consultation de journaux et revues généralistes, elles réunissent des articles sur des questions comme la dépénalisation du cannabis, la toxicomanie et le sida…

En conclusion

Dans un souci d’efficacité et pour éviter tant que faire se peut les effets contre-productifs, nous nous adressons généralement à un public relais « volontaire ». Cela nous semble pertinent dans la mesure où la problématique des consommations et des assuétudes reste un sujet tabou suscitant pas mal de controverses et d’a priori. Si les méthodes d’approche et certaines questions sont transférables à l’ensemble des secteurs de la prévention et de la promotion de la santé, la pratique et notre expertise (de même que celles de nos partenaires) renforcent notre conviction que nous n’abordons pas un sujet anodin.
D’autre part ce «volontariat» nous apparaît comme un préalable nécessaire à la mise en place d’une démarche de prévention dans une optique de promotion de la santé.
Néanmoins, à l’instar d’autres acteurs du secteur, nous questionnons sans cesse la qualité de nos interventions et notamment l’appropriation des concepts et des méthodes par les relais de terrain. Actuellement, les interrogations qui retiennent notre attention et qui articuleront l’évaluation de notre programme sont entre autres les suivantes: nos interventions en milieu scolaire n’ont-elles pas parfois pour effet pervers de stigmatiser certains public jeunes? Comment augmenter notre visibilité auprès des relais potentiels sans pour autant susciter des demandes, qui, faute de temps et de moyens, ne pourraient être rencontrées? Afin d’être cohérent, comment augmenter notre action sur les «contextes» institutionnel, décisionnel, juridique, notamment à travers la sensibilisation des décideurs ou des politiques? Comment favoriser la diffusion des idées et méthodes à travers la «formation de formateurs»? Comment contribuer efficacement à l’«empowerment» des relais, mais aussi du public cible final par rapport aux consommations?
Autant de questions qui ne laisseront certainement pas indifférents les lecteurs d’ Education Santé et à propos desquelles nous serions heureux d’échanger…
Isabelle Boquet , Emmanuelle Caspers et Henri Patrick Ceusters pour Prospective Jeunesse
Adresse des auteurs: Prospective Jeunesse, rue Mercelis 27, 1050 Bruxelles. Tél.: 02 512 17 66. Fax: 02 513 24 02. Site: https://www.prospective-jeunesse.be . Courriel: info@prospective-jeunesse.be
(1) C. OLIEVENSTEIN, médecin psychiatre connu pour ses travaux sur la toxicomanie, qui créa le Centre médical Marmottan à Paris en 1971. Ce centre, dont le travail est basé sur l’accueil, l’orientation et les soins aux toxicomanes a fait longtemps figure de référence en France.
(2) L’aide par la mise au travail constitue un type d’aide sociale permettant à terme aux personnes de réintégrer le circuit de la sécurité sociale. En effet, selon l’article 60, §7, de la loi organique du 8/7/1976 relative aux CPAS, ‘lorsqu’une personne doit justifier d’une période de travail pour obtenir le bénéfice complet de certaines allocations sociales, le centre public d’aide sociale prend toutes dispositions de nature à lui procurer un emploi. Le cas échéant, il fournit cette forme d’aide sociale en agissant lui-même comme employeur’.
(3) Voir l’article ‘Ecstasy, pilules sans ordonnance’ , n°175, décembre 2002.

L’obésité de l’enfant vue par un service PSE

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Toutes les personnes qui ont été des enfants ronds ou gros se souviennent certainement avec amertume des douloureux passages à la visite médicale où l’infirmière semblait vociférer votre poids sous les regards indignés et railleurs des copains.
Le cliché des visites médicales impersonnelles et parfois indélicates a heureusement évolué: le personnel plus spécialisé, mieux formé, les années d’expériences et de remises en question nous ont appris à être plus discrets qu’il y a 30 ans et respectueux du vécu des enfants.

Rôle du service PSE

Notre premier rôle est avant tout le dépistage .
Nous sommes, avec l’ONE les premiers à pouvoir repérer une évolution pondérale anormale et évaluer les risques possibles surtout si d’autres anomalies de santé sont présentes en plus de l’excès de poids.
Nous sommes particulièrement attentifs à deux périodes critiques: dans la petite enfance lorsque l’enfant rentre à l’école gardienne, il maigrit normalement après avoir passé le stade du bébé dodu (voir grille d’indice de Quételet) et à la puberté (âge où les réserves de masse grasse emmagasinées pendant la croissance doivent être terminées).
Notre travail de dépistage et d’analyse ne peut être vraiment efficace qu’en collaboration avec l’ONE, l’école, le médecin traitant et la famille pour comprendre dans quel environnement l’enfant évolue.
Nous avons ensuite un rôle d’ éducation . Notre mission est d’informer et dans ce cas précis d’éduquer ou de rééduquer à la bonne alimentation, de promouvoir l’exercice physique et d’essayer entre autres de combattre les pièges de la publicité manipulatrice.

Dépistage de l’obésité à la visite médicale

Voici quelques constatations de nos services PSE.
Lors du bilan de santé, un enfant sur deux présente un petit problème de santé que nous signalons aux parents, un enfant sur 10 présente un problème plus important qui nécessite une visite chez le médecin ou le spécialiste.
Nous disposons de très peu de données épidémiologiques en Belgique. A notre modeste niveau de PSE libres du Brabant wallon, nous avons toujours tenu des statistiques relevant les anomalies de notre population scolaire dépistées à la visite médicale et nous avons créé en 1994 avec l’aide d’un informaticien un programme «maison» adapté à nos besoins.
Ce programme prévoit entre autres de relever toutes les anomalies de santé dépistées lors des bilans de santé.
Bien que personne en dehors de nos équipes ne se soit jamais intéressé à ces chiffres, nous persistons à vouloir faire ce relevé, car c’est un peu pour nous l’aboutissement et le reflet de l’utilité de notre travail et cela nous a toujours aidé à orienter notre action de promotion de la santé.
Ainsi, l’année scolaire dernière, sur 12.507 bilans de santé de nos services de Wavre et Nivelles, nous avons dépisté 7% d’enfants souffrant d’obésité importante.

Dépistage de l’obésité au cours de l’année scolaire 2002 – 2003

Section

Nombre visites médicales Nombre de cas d’obésité %
Maternelles 2691 45 1,7%
Primaires 4984 298 6%
Rénové 3179 238 8%
Technique 244 35 15%
Professionnel 644 124 20%
Sup. non univ. 484 72 15%
Spécial primaire 281 40 15%
Total 12507 852 7%

Source: PSE libres Nivelles et Wavre

Nous disposons de plusieurs moyens en médecine préventive pour déterminer un excès de poids:
– le type morphologique déterminé par le coup d’œil du médecin scolaire qui donne la première indication;
– les abaques qui calculent pour tous de façon très rapide les courbes de la taille selon l’âge et du poids selon la taille;
– la courbe d’indice de Quételet qui évalue l’évolution de la masse grasse.
Nous employons cette courbe pour les enfants souffrant d’excès de poids de façon à pouvoir comparer les grilles de visites en visites.
Notre attention est accrue lorsqu’en plus de l’excès de poids, l’enfant présente un autre problème de santé: hypertension, diabète…
Pour rappel, nous pesons et mesurons les enfants des écoles environ tous les deux ans depuis l’âge de 3 ans et les dossiers des services PSE suivent l’enfant durant toute sa scolarité même s’il change plusieurs fois d’école, quel qu’en soit le réseau et la région et même le pays, c’est une exigence de notre ministère. Malheureusement, il n’est pas encore prévu que le dossier ONE soit transmis au PSE.

Suivi des conseils

Les conseils que nous donnons aux enfants, le suivi que nous demandons aux parents via la fiche de liaison que nous leur remettons pour transmettre au médecin traitant sont rarement suivis.
La plupart des médecins ou spécialistes sont conscients du problème de leur patient, mais il semble que personne n’ait vraiment envie de s’y investir à long terme.
Voici un exemple de réponse du médecin à notre fiche de liaison: «Enfant pris en charge».
Lorsque nous interrogeons l’enfant sur la manière dont il est pris en charge, on nous répond invariablement: «Le docteur m’a dit de faire attention à ce que je mange!».
Ce genre de prise en charge est en effet souvent considéré comme peu gratifiant.
Le problème est souvent chronique, le traitement de l’obésité nécessite une prise en charge longue, pluridisciplinaire, qui représente une lourde charge financière et un aménagement compliqué de la gestion quotidienne du temps.
Même pour les personnes motivées, il y a peu d’endroits où cette prise en charge est possible, par exemple pour les personnes habitant à la campagne, où dans des villes qui ne prévoient rien pour ce genre de problème: au PSE de Wavre, nous pouvons renseigner «Les Clairs Vallons» à Louvain-La-Neuve, au PSE de Nivelles, nous pouvons renseigner le service «Les Petits Pois» de la clinique de Nivelles, mais pour les régions de Jodoigne, Perwez, Tubize, Braine L’Alleud et Waterloo, il n’existe rien à notre connaissance.
Sans oublier aussi l’agressivité des parents de l’enfant qui se sentent souvent culpabilisés et jugés parce que nous mettons le doigt sur un problème délicat qu’on préférerait souvent ne pas soulever.
Je citerai quelques exemples de remarques que les parents nous font parvenir avant le passage au PSE: «Veuillez ne pas peser mon enfant», «Veuillez ne pas prononcer son poids», «Veuillez ne pas faire de remarques à mon enfant sur son excès de poids », «Obésité familiale, il n’y a rien à faire», «Mon enfant est devenu anorexique après une remarque à la visite médicale», «Mon enfant est bien suivi, il ne se présentera pas à la visite médicale»…

Que pensent les enseignants de ce problème à l’école?

L’avis est presque général: les parents ont peu de temps à consacrer à leurs enfants.
Les deux parents travaillent souvent, beaucoup de familles sont monoparentales, ce qui entraîne souvent faute de temps et d’aide une manière de s’alimenter très rapide: plats achetés préparés, hamburgers, pizzas, frites le soir et, pour le midi, il est plus simple de donner quelques euros pour acheter un sandwich à la mayonnaise que de préparer un pique-nique équilibré.
Les mauvaises habitudes alimentaires sont aussi invoquées: beaucoup d’élèves ne prennent pas de petit déjeuner, et préfèrent sodas et sucreries aux fruits et légumes.
Les enfants se sont habitués à avoir tout tout de suite, ils ne supportent plus les frustrations, ils manquent souvent de maturité, sont aussi surprotégés et les parents leur donnent souvent tous les droits.
La publicité, les médias sont également cités par les enseignants.
Les jeunes sont les cibles rêvées de stratégies de marketing qui ont pour but d’orienter la consommation. On en vient tout naturellement à incriminer la télévision et les jeux vidéo qui rendent les enfants de moins en moins actifs physiquement, de plus en plus passifs intellectuellement et remplacent souvent le dialogue.
C’est en plus le domaine privilégié du grignotage (voir schéma de la pyramide). Les médias ont cet autre travers du culte de la minceur qui renvoie une image inconfortable au jeune souffrant d’excès de poids.
Il ne faut pas non plus passer sous silence le vécu inconfortable de l’enfant gros parmi ses condisciples: victime de moqueries, il est taxé de paresseux, laid, idiot, maladroit et est souvent mis à l’écart.

Comment pouvons-nous intervenir?

L’excès de poids est toujours abordé en médecine préventive par la fiche de liaison avec le médecin traitant.
Lorsqu’une obésité est détectée à l’examen, nous avertissons les parents et joignons au résultat de l’examen une lettre avec talon-réponse adressée au médecin de famille ou à l’endocrinologue si le problème nous semble plus grave.
Pour les parents, nous joignons également des conseils alimentaires et une fiche explicative de la maladie «obésité» ceci afin d’éviter un effet opposé à celui recherché.
En cas d’obésité sévère ou aggravée, nous prenons contact avec les parents. Notre intervention vis-à-vis du jeune lui-même, de ses parents, de l’école s’articule selon 4 axes:

Education à de bonnes habitudes alimentaires

Lors de l’entretien individuel avec l’élève, nous insistons surtout sur l’effet néfaste d’abus de boissons gazeuses et sucrées, des fast-foods, des chips, frites, barres chocolatées, etc. et sur l’importance de boire beaucoup d’eau, de manger plusieurs fruits et légumes chaque jour, de prendre 3 repas complets par jour et un goûter.

Promotion de l’exercice physique

Nous insistons aussi sur l’importance de l’exercice physique: marcher, aller à pied à l’école, faire du vélo, du roller, aller promener le chien, jouer simplement, ne pas être trop «scotché» à la télévision.
Nous avons édité un dossier et des fiches sur le sport, organisé différents concours dans les écoles et participons à des projets d’école qui mettent en valeur l’exercice physique.

Restauration de l’estime de soi

Les enfants sont pris seuls dans le local de l’infirmière dès la 4e primaire.
Les avantages, outre le fait que seul l’enfant prend connaissance de son poids et de sa taille, c’est le contact individuel qui permet un échange éducatif en matière d’alimentation.
Nous essayons de donner une vision positive de la santé, plus qu’obéir aux conseils des adultes, nous essayons que le jeune trouve lui-même son autonomie, qu’il donne lui-même un sens à ses choix, qu’il arrive à se respecter lui-même.
Il n’est nullement question de culpabiliser l’enfant ou de lui donner une image négative de lui-même.
Ce contact est malheureusement bref, l’infirmière a en effet peu de temps pour réaliser cet échange (le ministère prévoit 8 bilans de santé à l’heure) et ne peut se continuer qu’en signalant à l’élève qu’il peut, s’il le souhaite, reprendre contact avec nous ou en envoyant l’élève au PMS.
Mais le malaise de ces enfants se remarque toujours. En effet, les enfants plus gros retardent le moment de la pesée et s’arrangent toujours pour se présenter les derniers à l’examen.
Ce moment du bilan de santé où l’infirmière ou le médecin scolaire aborde le problème de l’excès de poids est souvent vécu par l’élève comme une agression: nous essayons de l’aborder en disant par exemple: «Ton poids te pose-t-il problème?».
Si la réponse est oui, le dialogue est ouvert, si la réponse est non, on peut alors aborder les dangers d’un surpoids sur la santé.
Ce que nous faisions également et que nous avons abandonné, ce sont les examens sélectifs pour cause d’excès de poids.
L’intérêt de cet examen était de vérifier la courbe de poids chaque année pour définir l’aggravation ou l’amélioration, mais nous nous sommes aperçus que cela ne faisait qu’accentuer la souffrance et la marginalisation de ces enfants; nous prenons à présent plus volontiers contact avec les parents.
Il y a aussi les nombreux jeunes qui spontanément en rentrant dans le local demandent de ne pas dire ou de ne pas connaître leur poids, il y a ceux qui racontent la multitude de régimes auxquels ils se sont déjà soumis, ceux qui disent que tout le monde est gros dans la famille, ceux qui demandent des adresses de cliniques ou centres traitant l’obésité.

Promotion de la santé à l’école

Pour essayer d’enrayer cette maladie devenue presque épidémique, diverses actions, grandes ou petites, ont été menées par nos services PSE.
Des exemples: tenue de stands «apéro santé» lors de fancy-fairs, semaines de la santé dans beaucoup d’écoles avec une place importante pour le «dix heures», différents concours avec remises de diplômes des «bonnes collations», des concours sur la réorientation des boutiques scolaires avec l’aide du journal «Vers l’Avenir», des actions «petits déjeuners sains» avec les élèves en plusieurs modules théoriques et pratiques.
Pour les actions auprès des élèves plus jeunes nous invitons les parents et même les grands-parents à participer, nous avons des échanges avec le gérant de la boutique scolaire ou avec le responsable de la cuisine. Il y a aussi des essais de vente de yaourts et fruits frais lors des récréations, des tentatives auprès des pouvoirs organisateurs d’écoles pour multiplier les points d’eau ou aménager des fontaines, le développement du sens critique face aux médias publicitaires dans le domaine de l’alimentation…
Nous avons aussi édité différents dossiers sur l’importance de l’exercice physique et sur la bonne alimentation. Nous avons créé pour le journal scolaire toute une série de tracts santé.
Nous nous formons également à différents outils destinés à améliorer l’estime de soi: le DECE (dispositif d’expression collective des enfants), SANCORRES (santé, corps, respect), Clefs pour l’adolescence… Nous espérons dans l’avenir pouvoir disposer de moyens suffisants pour mettre ces programmes en pratique.

En conclusion

La médecine scolaire n’est résolument pas prête à passer sous silence les constatations d’excès de poids lors du bilan de santé même si nous savons que cette déclaration aux parents ne nous rend pas toujours très populaires.
Elle estime être son devoir de le signaler aux enfants et à leurs parents en s’interrogeant sans cesse sur la manière la plus adéquate de faire passer le message.
Passés le moment de gêne, de mécontentement ou de vexation, une prise de conscience apparaît souvent et porte parfois ses fruits. Nous sommes régulièrement l’élément déclencheur de cette prise de conscience. Notre rôle à ce moment peut être une assistance à la famille pour aménager la mise en route de la prise en charge.
Jacqueline Valange , Assistante sociale, Directrice des PSE libres du Brabant Wallon.
Adresse de l’auteur: PSE libre de Wavre, Montagne d’Aisemont 119, 1300 Wavre.

Ouvrages de référence

«L’enfant et l’obésité», W. Burniat – A. Callens – C. Van Aelst – A. Verstraete, Traces de doigts – Rue des Chartreux, 19 bte35, 1000 Bruxelles
«L’excès de poids ne pèse pas que sur votre esthétique», Fondation Hodie Vivere pour l’étude et la prévention des maladies de civilisation
«A l’école d’une alimentation saine», Coordination Education/Santé, rue de la Rhétorique 19, 1060 Bruxelles
«L’école Ensantée», André Lufin, Croix-Rouge de Belgique
«L’alimentation – document de travail destiné à l’enseignant», CRIOC
«Si manger m’était animé», Service Social Maison Médicale Norman Bethune, rue Piers 68, 1080 Bruxelles
«La santé et le bien-être des jeunes d’âge scolaire – Quoi de neuf depuis 1994? » ULB – PROMES, 2003

Un instinct de survie?

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

S’il est un domaine où les mentalités évoluent, c’est bien celui de l’obésité. Récemment reconnue comme une maladie, sa dimension psychologique est peu à peu prise en compte.
Le discours tenu encore aujourd’hui, jusque dans le corps médical, consiste à fustiger les obèses, à les culpabiliser de manger trop et à les accuser de ne pas être capables de corriger leurs mauvaises habitudes alimentaires.
Heureusement, une dimension essentielle de l’obésité commence à être reconnue: la dimension psychologique, très pesante, sans mauvais jeu de mots, sur les obèses. Elle est présente tant dans le processus de prise de poids que dans le vécu de l’obésité au quotidien et même après la perte de poids.
Comme l’explique Elda Guzmàn , psychologue à la Clinique des Clairs Vallons, un centre médical pédiatrique brabançon qui prend en charge les enfants obèses, la nourriture revêt un caractère symbolique fort de plaisir: « Beaucoup de gens considèrent qu’un enfant qui mange beaucoup est un enfant heureux , comblé . Ces personnes ne veulent donc pas revoir cette valeur et manger moins . De plus , elles refusent tout changement qui pourrait diminuer ce plaisir , comme une alimentation plus équilibrée
Chacun sait que les enfants veulent d’abord satisfaire leur plaisir, notamment par la nourriture: les sucreries donnent plus de plaisir que les légumes, hélas… « Donc les parents doivent mettre des barrières , frustrer . Or , si les parents trouvent triste de dire non , l’enfant va vivre mal toute frustration . Il n’aura pas de limites et croira qu’il peut avoir tout ce dont il a envie , sans se poser de questions . Aussi , notre travail consiste à lui faire comprendre qu’il doit aussi penser à l’avenir et aux conséquences . De même , nous prouvons aux parents que c’est positif pour l’enfant de ne pas recevoir tout ce qu’il veut
Autre élément qui revient, la démission de certains parents face aux caprices de leurs enfants: « Les parents craquent de plus en plus . Nous sommes dans une période de grands chamboulements : travail des deux parents , stress , tiraillements , fatigue Souvent nous voyons des parents dépassés parce qu’ils ont mal commencé l’éducation de leur enfant , sont trop fatigués pour affronter ses cris et ses pleurs face à un refus , finissent par céder et laissent l’enfant devenir un enfant roi qui n’accepte pas que la vie soit aussi faite de frustrations . Ensuite , ces enfants ne veulent pas grandir et deviennent des adolescents qui restent dans ce schéma plus « enfant » de la satisfaction du plaisir immédiat , notamment par la nourriture

Gaver l’enfant pour combler le manque des parents

Le rôle des parents peut aussi être beaucoup plus insidieux. « Je vois parfois des parents qui donnent à leur enfant des sucreries , des gaufres à longueur de journée . Il faut dès lors se poser la question de savoir pourquoi ils sont contents de voir leur enfant manger en permanence . Donc s’interroger sur leur propre fragilité en tant qu’adultes . Beaucoup de parents d’enfants obèses ou en surpoids , et surtout des mamans , vivent avec une grande anxiété , voire dépression face à une réalité difficile ou des traumatismes très importants . Il s’agit de parents qui n’ont pas affronté leur fragilité , la cachent mais s’écroulent parfois devant leurs enfants ; ceux là attendent inconsciemment beaucoup de l’enfant , qu’il porte avec eux leur tristesse . Dans des cas de grande obésité , je constate souvent que les parents traînent derrière eux un passé très lourd , avec des deuils qui n’ont pas été faits , des chagrins très importants auxquels ils ne font pas face , contre lesquels ils luttent , et l’enfant prend trop de place comme consolateur
C’est le cas aussi des parents qui ne voient de raison de vivre que dans leurs enfants. « Certains vont laisser passer , implicitement , vers l’enfant des messages contradictoires , comme tu dois maigrir , mais tu ne peux pas me blesser en refusant de manger ce que je te prépare avec amour’ , ou tu dois grandir , mais surtout ne me quitte pas , je pourrais déprimer’ . Les parents vont donc donner à leur enfant un rôle qui n’est pas le sien , il peut même devenir leur confident . C’est l’enfant pris en otage ou l’enfant bouclier

S’autonomiser, pour se détacher

Les enfants sont des êtres à part entière et progressivement, ils doivent acquérir leur autonomie par l’éducation. Or, de telles attitudes des parents compromettent ce processus et l’enfant joue un rôle trop lourd dans la famille et se demande souvent ce qui arriverait s’il n’était pas là…
Ce refus des parents de voir les enfants leur échapper peut prendre deux formes opposées: « soit c’est l’hyperprotection , avec un enfant qui ne peut rien expérimenter , se sent bon à rien ; soit c’est la négligence , l’enfant s’occupant seul , se nourrissant seul , regardant la TV de longues heures , et qui va perdre confiance en lui , croyant qu’il ne mérite pas l’intérêt de ses parents . Dans les deux cas , ces enfants ne sont pas aidés à vivre des expériences , à être curieux et prendre confiance
Face à ce manque de confiance, l’enfant aura donc tendance à rester dans un schéma qu’il connaît, parce qu’il s’y sent sécurisé. Il va éviter les activités à l’extérieur et les parents ne vont pas l’y encourager, le laissant dans un monde d’enfant avec ses avantages. « L’enfant va régresser , ne va pas trop se tracasser , va éviter les conflits de relations puisqu’il n’a pas de relations sociales , ne va pas risquer d’être mauvais en musique ou en sport puisqu’il ne pratique pas . Bref , il ne va plus rien investir , et les parents non plus . Il va trouver un réconfort dans le fait de rester un éternel enfant avec moins de tensions liées au monde de l’adulte ou de l’adolescent , avec la sexualisation , les chagrins d’amour . Il postpose , évite , s’amuse avec des plaisirs très immédiats , en masquant au fond de lui même une grande insécurité , une grande souffrance
L’enfant obèse trouve les plaisirs immédiats dans la nourriture. Certains, nous confie Elda Guzmàn, avouent que le fait de manger beaucoup, à un moment donné, les coupe de tout: ils ne pensent plus à la souffrance de leur mère, se sentent apaisés. Leurs kilos en trop sont comme un rempart qui les protège de tout.

Altruisme et auto

violence

Dans des familles où l’autonomie est refusée aux enfants ou dans lesquelles ils sont impliqués dans un rôle qui n’est pas le leur, des frères et sœurs peuvent réagir différemment. Certains vont rejeter cette famille, d’autres se prouver leur valeur par exemple en brillant en classe. Et puis il y a ceux qui vont se consoler par la nourriture. Alors peut-on prévoir l’attitude d’un enfant? Probablement pas, mais les spécialistes ont constaté des traits de caractère récurrents chez les enfants obèses: « Je constate qu’ils pensent beaucoup à l’autre , sont très généreux . Même en famille , ils subissent , s’occupent des autres , les font rire . Ce qui est frappant aussi , c’est qu’ils ne cherchent pas à identifier leurs affects , leurs idées , leurs émotions , leurs opinions . C’est donc difficile pour eux de s’occuper d’eux mêmes . De plus , ils ont souvent une estime très basse d’eux mêmes .
Je me souviens d’un enfant qui me disait que lorsqu’il mangeait, il se remplissait comme un sac poubelle. Dans sa logique, pourquoi s’occuper de son corps? Son corps ne vaut pas grand chose, donc il ne vaut pas grand chose… Ce sont aussi des enfants très peu agressifs vers l’extérieur. Pourtant, nous avons tous une agressivité, parfois, à exprimer… Toute la tension, la colère qu’ils ressentent et ne sortent pas, ils vont les calmer en mangeant. Donc, inconsciemment, ils la retournent contre eux. Et puis ils se dénigrent, pensent qu’ils ne valent rien. C’est le cercle vicieux: ils se remplissent encore plus parce qu’ils craquent.»

Choisir le moment pour maigrir

L’aspect psychologique va aussi jouer au moment de chercher une solution pour perdre ce poids qui peut faire si mal. Et l’enfant a besoin de beaucoup d’aide… « C’est difficile de se faire du mal : un régime , même s’il ne prône pas les restrictions drastiques , est une grande frustration . Il faut être dans un état psychologique optimal pour être courageux . Pour peu qu’il soit fatigué physiquement ou émotionnellement , l’enfant éprouvera beaucoup de difficulté . Aussi , avant de se lancer dans un régime alimentaire , il doit d’abord trouver d’autres sources de plaisir , s’y investir pour augmenter sa confiance en lui , établir des relations avec les autres , se donner des chances de se sentir mieux dans sa peau , être plus en paix au niveau de ses émotions , s’apprécier un peu plus lui même et se dire maintenant je suis plus fort et j’y vais doucement’ . Les parents doivent l’y aider en le poussant à se socialiser , à pratiquer des activités pour lesquelles il a des aptitudes , à lui laisser un espace individuel où il arrive à avoir une relation positive avec les autres . Quand il aura plus confiance en lui , il sera capable d’entamer un régime pour perdre du poids
Parallèlement, les parents doivent accepter de changer le mode de fonctionnement de la famille. Malheureusement, bon nombre d’entre eux considèrent encore que l’obésité de leur enfant est son problème personnel et qu’il doit s’en sortir seul. « Je suis régulièrement confrontée à un rejet des parents qui n’ont pas envie de remettre en question leur façon de manger à la maison ou leur manière de considérer l’enfant . Or , s’ils ne veulent pas revoir leur attitude , l’enfant qui a perdu du poids ici risque d’en reprendre dès son retour à la maison

Perdre une carapace protectrice

Si l’enfant parvient à maigrir, curieusement, il n’en sera pas nécessairement plus heureux… Car les kilos en trop peuvent constituer un rempart contre les sentiments de frustration, de tristesse, d’angoisse. Et perdre ce rempart, c’est être plus fragile. « Les enfants qui commencent à perdre du poids me parlent de l’instabilité que cela provoque , parce qu’ils perdent leurs défenses », confirme Elda Guzmàn. « Ensuite , quand le corps perd de nombreux kilos , il n’est pas nécessairement plus beau . Ces enfants doivent donc gérer la frustration de ne pas atteindre le corps idéal qu’ils imaginaient . Enfin , ils peuvent devenir différents en famille , manger moins , ce qui provoquera des changements dans la relation parents enfant , voire provoquer des conflits .
Certains parents avouent en effet avoir du mal à accepter que leur enfant refuse d’être resservi. L’enfant qui perd du poids va aussi commencer à attirer les regards. Du coup, il va prendre plus d’autonomie, va commencer à sortir plus, et les parents vont peut-être ne pas aimer. Ils vont voir que leur enfant, en étant plus autonome, non seulement leur échappe, mais qu’il apporte un peu plus de problèmes, avec les flirts, les sorties, etc. Voyant toutes les tensions que ces changements peuvent induire, l’enfant peut être bloqué dans son évolution.»
Curieusement, les enfants obèses ont une relation très paradoxale avec la nourriture: ils l’aiment parce qu’elle leur fait du bien, leur donne un sentiment de protection, et en même temps ils la détestent car elle induit un sentiment de culpabilité très fort. Faut-il dès lors réconcilier les jeunes avec la nourriture?
«Il est vrai que je vois des enfants qui ne goûtent pas ce qu’ils mangent: ils mâchent à peine et avalent sans apprécier le goût. Je crois effectivement qu’il faut les réconcilier avec la nourriture et le plaisir qu’elle peut leur procurer. Mais d’abord, il faut les déculpabiliser, les aider à comprendre pourquoi ils mangent autant. Les enfants sont accusés d’être incapables de se contrôler, ils subissent une pression énorme de l’entourage, ils se méprisent. Il s’agit donc de leur donner une lecture plus simple sur ce qui les pousse à manger autant, de leur faire comprendre qu’ils ne sont pas responsables de quelque chose qui s’est construit autour d’eux.»
Pour conclure, Elda Guzmàn explique: « L’obésité n’est pas une réalité dépourvue de sens , elle représente une tentative d’adaptation du jeune à une situation relationnelle complexe . Elle va donc l’aider à maintenir l’équilibre familial ( en rassurant la mère sur le fait qu’elle est une bonne mère , en rassemblant le couple , en détournant l’attention des sources de tension …) et individuel par l’acte de manger
L’obésité peut dès lors être considérée comme un moyen de survie de l’enfant, face à une situation qu’il ne peut changer seul. Qui dira encore que les gros sont gros parce qu’ils le veulent?
Carine Maillard

L’obésité chez les jeunes: il y a urgence

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Le 9 mars dernier, au Waux Hall de Nivelles, avait lieu une conférence intermutualiste (Mutualité chrétienne – Mutualité socialiste) consacrée à l’obésité chez jeunes. Et il est vrai que les synergies sont à présent indispensables tant le problème est à prendre à bras le corps. C’est ce qui a poussé les deux mutualités a prendre cette initiative suivie par près de 300 personnes.
Après le mot d’accueil de M. Cheniaux , Secrétaire général des Mutualités socialistes du Brabant wallon, le Dr Myriam Vandeweyer , pédiatre, et Mme Bolterys , diététicienne, ont précisé l’ampleur du problème: la prévalence de l’obésité est en constante augmentation, elle a été multipliée par 4 ou 5 depuis les années 60. Chez nous, le chiffre de 16% d’enfants obèses est maintenant avancé. Ce constat est alarmant d’autant que les traitements actuels n’ont que peu de résultats et que l’obésité chez l’enfant peut entraîner de graves complications à l’âge adulte. Il convient donc de privilégier la prévention par le recours à une alimentation équilibrée. A cet égard, un outil de sensibilisation est maintenant largement répandu: la fameuse pyramide alimentaire.

La prévention à l’école…

Un des lieux de prévention de l’obésité est le milieu scolaire. C’est ce qu’a expliqué Mme Houioux , du Cabinet de la Ministre Maréchal en présentant le projet des “Motivés” développé au niveau de la Communauté francaise. Cette campagne de sensibilisation tourne autour de trois axes: l’alimentation (prendre 4 repas par jour), l’activité physique (se dérouiller les jambes toutes les deux heures) et le sommeil (dormir 10h par nuit).
Comme l’a précisé également Mme Valange directrice des PSE libres du Brabant wallon, la prévention, qui est une des missions fondamentales des Services de Promotion de la santé à l’Ecole, est primordiale. Ainsi, avec l’ONE, ce sont les PSE qui, grâce à leur dépistage lors des visites médicales, peuvent repérer une évolution pondérale anormale et informer les parents et le médecin traitant. Au delà du dépistage, les PSE ont aussi une mission éducative au sein des écoles (voir le texte de son intervention).

… et au sein de la famille

Si l’école est un lieu important pour prévenir l’obésité, le cercle familial n’est pas à négliger. C’est ce que prônait Mme Chauvaux . En effet, il ne faudrait pas oublier le rôle important des parents en matière d’éducation et d’habitudes nutritionnelles. Un petit déjeuner correct évite la fringale à 10h, si l’enfant mange à la cantine de l’école il est inutile de lui donner à nouveau un repas complet le soir, etc.
Enfin, l’exposé de Mme Guzman , abordant plus spécifiquement l’aspect psychologique de l’obésité, fut particulièrement remarqué (voir l’article de Carine Maillard dans ce numéro).
Comme l’a souligné M. Detienne , directeur régional de la Mutualité chrétienne du Brabant wallon, s’il est important de sensibiliser les parents et les enseignants à leur rôle d’éducateur, il est aussi primordial de développer les initiatives convergentes, comme cette soirée, qui peuvent réellement mobiliser autour d’une thématique aussi vitale. Les deux mutualités n’en resteront évidemment pas là: d’autres initiatives seront prises prochainement.
Eric Jauniaux , Infor Santé Mutualité chrétienne du Brabant wallon

La place du médecin généraliste dans la prévention des accidents domestiques chez les jeunes enfants

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Quelques points de repère

En Belgique, les accidents sont la première cause de mortalité chez les enfants de moins de 15 ans (1) . De ce point de vue, la situation est comparable avec celle des autres pays industrialisés. En 1997, pour l’ensemble de nos Régions et Communautés, le pourcentage de décès par accidents non liés au transport était de 26% chez les enfants entre 1 et 4 ans, 19% chez les enfants de 5 à 9 ans et de 10% chez les enfants de 10 à 14 ans (2) .
Les accidents mortels chez les bébés sont surtout dus aux suffocations (entre des barreaux, par une cordelette, par inhalation d’objet ou par enfouissement sous les couvertures). Chez les enfants de 1 à 4 ans, 1/3 des décès est dû aux noyades et le reste aux incendies, à l’inhalation d’objets, aux intoxications et aux chutes. Au-delà de 5 ans, les noyades comptent pour la moitié des décès, l’autre moitié concerne les chutes et les incendies (3) .
Selon l’enquête nationale de santé 2001, 10% des enfants de moins de 14 ans ont été victimes d’un accident dans les 12 mois qui précèdent l’interview (4) .
En 1996, les 136 médecins vigies ont enregistré 3 039 cas d’accidents domestiques pour une population estimée à 141 086 habitants (5) . Selon ces données, l’incidence annuelle des accidents domestiques nécessitant l’intervention du médecin généraliste a été estimée à 2,2 par an (2.194/100.000 habitants), c’est-à-dire 220.000 personnes pour l’ensemble de la Belgique, par an, dont 45.353 enfants de moins de 14 ans.
Chez les enfants, la nature des accidents était:
autres intoxications, étouffement,
noyade, électrocution)

Chute 42
Coup, frappement, collision 21
Glissement et trébuchage 16
Pénétration corps étranger 12
Brûlure 3
Autres (intoxication au CO,
6

Qu’en pensent les médecins généralistes

?
Une enquête menée en 2001 auprès des médecins généralistes et des pédiatres en Communauté française (6) a montré combien les praticiens de première ligne sont fortement impliqués dans la prise en charge des traumatismes. C’est surtout à cette occasion qu’ils donnent les conseils préventifs, question d’opportunité. En dehors de ces occasions, les médecins généralistes et les pédiatres n’ont pas l’habitude de faire des démarches proactives systématiques vis-à-vis des parents pour la prévention des accidents domestiques. Ils estiment manquer de temps, manquer de connaissance des techniques de prévention efficaces dans ce domaine et manquer d’outils qui leur permettent d’appuyer leurs conseils aux parents. Ceci dit, les médecins estiment quasi tous qu’ils ont un rôle à jouer dans la prévention des traumatismes. Ils font des propositions très concrètes de formation et d’information qui leur seraient destinées aussi bien qu’à leurs patients.

Comprendre la prévention des traumatismes

(7)

Cadre

Au terme d’accident, on préfère celui de traumatisme ou de blessure. Ces termes mettent l’accent sur les atteintes corporelles ou psychologiques et ils englobent l’événement et ses conséquences. Au contraire du terme accident, le terme traumatisme permet une recherche non fataliste de solutions.
Pour mieux comprendre les possibilités de prévention d’un type de traumatisme, on utilise en général la matrice de Haddon. une application aux traumatismes du modèle épidémiologique des maladies transmissibles. Elle conçoit la relation agent – hôte en trois temps (pré-événement, événement et post-événement) et trois groupes de facteurs (l’hôte, le vecteur et/ou le véhicule et l’environnement physique et/ou socio-économique).

Matrice de Haddon: exemples de facteurs

Phases Hôte (homme) Vecteur (véhicule) Envir. physique Envir. socio-écon.
Pré-évènement alcool Phares défectueux météo Installation bricolée
Evènement Maladie chronique Surface anguleuse Matériaux inflammables Coût protections
Post-évènement Type de lésion Rapidité SAMU Accessibilité soins

Evidence scientifique

La prévention des traumatismes fait l’objet de recherches, de publications et de recommandations basées sur des principes d’évidence scientifique. Ainsi, selon les recommandations du Guide canadien de médecine clinique préventive (8) , les actions qui ont un niveau de preuve suffisant (recommandation A) pour pouvoir être menées de façon systématique en pratique quotidienne sont:
-la connaissance du numéro de téléphone du centre antipoison;
-l’identification des sources de danger à la maison afin de prévenir les chutes et les brûlures;
-le «counselling» au sujet des chutes et des brûlures à la maison;
-la promotion de l’installation de matériel de protection à la maison: garde-corps aux fenêtres et barrières aux escaliers;
-la suppression des trotteurs;
-la promotion du détecteur de fumée, des vêtements de nuit ininflammables et des couvertures anti-feu (pour friteuses);
– les conseils aux parents de ne jamais laisser un enfant seul dans sa baignoire;
– l’abaissement de la température de l’eau chaude sanitaire en dessous de 50°;
-et quand l’enfant est plus grand, le conseil du port du casque à vélo.

Quelles préventions

?
La prévention des traumatismes peut se développer de manière passive et de manière active.
En prévention passive, on parlera de promotion des mesures de protection et renforcement de la législation et de protections. Par exemple, limitation de la température des chauffe-eau, port du casque obligatoire, pistes cyclables, barrières aux escaliers et aux fenêtres.
En prévention active, on parlera d’éducation individuelle et collective: changement de comportement, amélioration de la vigilance des parents, prise de conscience des risques.
Les stratégies actives et passives peuvent être combinées dans une approche qui ne se fonde pas uniquement sur les relations linéaires de cause à effet, mais qui repose sur une approche systémique, impliquant différents niveaux de prévention et différents professionnels de santé ou du secteur social.
La prévention passive prend une place de plus en plus importante dans les programmes. En effet, les stratégies de prévention passive qui utilisent des mesures universelles de réduction des traumatismes se sont révélées plus efficaces pour réduire l’écart entre les groupes sociaux que les stratégies visant spécifiquement les groupes à risque (9) .
Dans les programmes «Communauté sûre» en France, en Belgique et au Québec, des trousses contenant du matériel de sécurité domestique – de prévention passive – ont été déposées dans les familles. Là où ces trousses ont été déposées, il a été prouvé que le comportement sécuritaire des parents était renforcé de manière plus importante que là où on n’avait délivré que des conseils (prévention active).

Qu’en pensent les parents

?
Lors d’une enquête menée dans 14 pays européens, en 2001 (10) , 95% des parents européens signalent qu’ils prennent personnellement des mesures pour éviter les traumatismes accidentels chez leurs enfants. En matière de sécurité, la crainte majeure des parents est que leur enfant soit renversé par une voiture. Les parents signalent aussi leurs difficultés de surveiller les enfants en permanence.
Les parents ont une demande très forte pour que les produits destinés aux enfants soient conçus en tenant compte de la sécurité et que les produits qui peuvent prévenir les traumatismes chez les enfants soient bon marché pour que tout le monde puisse les acheter. Les trois quarts des parents sont d’accord pour dire que la plupart des accidents d’enfants peuvent être évités.

L’action du médecin généraliste

Une collaboration avec la SSMG a été mise en place en ce début 2003 pour mettre au point une démarche faisable par le généraliste lors de ses consultations et de ses visites à domicile. Le médecin généraliste bénéficie d’un crédit tout à fait particulier auprès de la majorité de la population et ses démarches proactives systématiques de prévention sont appréciées par les patients (11,12) . Des démarches préventives ont été mises au point par la SSMG sur d’autres thèmes prioritaires et une pédagogie qui prend en compte les difficultés de la prévention est utilisée régulièrement en formation continue.

Objectifs

En attendant l’aboutissement de ce travail de concertation, certains éléments de la démarche peuvent être précisés. Concernant les objectifs de la prévention des accidents domestiques, par exemple, l’ONE les définit pour les consultations médicales comme suit (13) :
-améliorer la connaissance des parents par rapport au développement psychomoteur de leur(s) enfant(s) et aux risques liés à chaque âge et à chaque stade de développement;
-améliorer les connaissances des parents par rapport aux mesures préventives efficaces;
-rendre accessibles aux parents les moyens utiles au renforcement de la sécurité de l’environnement de l’enfant;
-favoriser chez les parents et les enfants l’acquisition des capacités nécessaires à la gestion des situations à risque.

Stratégie

Lors de ses consultations et surtout de ses visites, le médecin généraliste qui désire prévenir efficacement les accidents domestiques des jeunes enfants peut intervenir auprès des parents:
– en donnant des conseils ciblés en fonction de l’âge de (des) l’enfant(s);
– en faisant la promotion du matériel de prévention passive;
– en identifiant les risques spécifiques dans la famille.
Le fait de cibler les messages en fonction de l’âge, du matériel essentiel de prévention passive et d’une liste de risques spécifiques à la famille permet d’agir rapidement et de manière progressivement intégrée à l’ensemble des visites et des consultations.
Donner des conseils systématiques, ciblés
Le médecin généraliste peut donner des conseils généraux, mais ciblés en fonction de l’âge de l’enfant, c’est-à-dire en fonction de son développement psychomoteur. Ces conseils (14) en fonction de l’âge sont repris dans certaines brochures, comme celles de l’ONE (‘Grandir en toute sécurité’, quatre documents en fonction de l’âge de l’enfant disponible au 02 – 542 15 71). Les trois conseils essentiels sont:
(1) ne jamais laisser un enfant seul , dans son bain, sur la table à langer, dans la cuisine, au jardin ne fût-ce que quelques minutes;
(2) mettre hors de portée les produits dangereux, les médicaments et les objets brûlants (attention aux manches de casserole au bord de la cuisinière!);
(3) pour les plus grands le port du casque de vélo .
Promouvoir le matériel de prévention passive
Une gamme assez étendue de produits existe sur le marché. Certains équipements sont plus essentiels que d’autres, sachant que les chutes, les intoxications, les noyades et les brûlures sont les accidents les plus fréquents. Les équipements prioritaires sont:
(1) le détecteur de fumée ;
(2) les barrières de protection (escalier, fenêtre, piscine);
(3) les systèmes de blocage (armoires à produits d’entretien ou à médicaments, fenêtres, portes dangereuses).
(4) Dans les maisons pourvues d’installations électriques anciennes, on conseillera en outre les caches pour prises électriques .
Ces matériels sont disponibles dans les magasins d’équipement pour enfant ( Natalys, Prémaman, Baby-Hall, Baby-Rose, Tout pour l’enfant), dans certaines grandes surfaces (Cora, Central-Park) et dans les magasins Ikea. Une étude comparative de la qualité et de la facilité d’utilisation de ces matériels est prévue. Les détecteurs de fumée First Alert ® se trouvent dans les grandes surfaces telles que Brico, Gamma, Hubo et Makro. D’autres détecteurs de fumée de marque BRK et EI sont disponibles chez des grossistes de matériel électrique et d’électro-ménager.
Identifier les risques spécifiques dans la famille et en partager l’analyse avec les parents
Les risques spécifiques concernent trois domaines distincts:
(1) le contexte éducatif: attitude autoritaire ou laxiste des parents;
(2) les défauts d’aménagement du domicile et de ses alentours: installation électrique, température de l’eau chaude sanitaire, rangement des produits dangereux, des objets coupants, accès aux objets brûlants, accès aux escaliers;
(3) les situations psychoaffectives difficiles: deuil, séparation, déménagement, maladie.

Epilogue

Une démarche de ce type répond en plusieurs points aux préoccupations et aux difficultés exprimées par les généralistes et les pédiatres lors des enquêtes menées sur les thématiques de prévention systématique, entre autres l’enquête de 2001 sur les accidents domestiques.
La démarche est brève et elle s’appuie sur des évidences scientifiques. Comme c’est le cas pour d’autres thématiques préventives, la démarche proactive peut étonner la famille, surtout si le motif de la consultation ne s’y prête a priori pas, mais elle sera appréciée dans la plupart des cas.

Martine Bantuelle , Educa-Santé,
Dr Alain Levêque , Ecole de Santé Publique ULB,
d’après un exposé donné au Centre Hospitalier de l’Ardenne le 17 mai 2003

Bibliographie

(1) PROMES – Université Libre de Bruxelles – Educa-santé, Accidents domestiques, la situation épidémiologique en Belgique, Santé Pluriel, 7 & 8, 1992. retour
(2) Institut de Santé Publique, Standardized Procédures for Mortality Analysis, [L=https://www.iph.fgov.be/sasweb/spma/spma.htm]www.iph.fgov.be/sasweb/spma/spma.htm[/L] retour
(3) Prévention et petite enfance, ONE, 1997, p. 266 – 267. retour
(4) Institut de Santé Publique, Enquête de Santé par interview 2001, [L=https://www.iph.fgov.be/epidemio/epifr/index4.htm]www.iph.fgov.be/epidemio/epifr/index4.htm[/L] retour
(5) Dirk Devroey, Viviane Van Casteren, Denise Walckiers, Institut de Santé Publique, Section Epidémiologie, Accidents domestiques nécessitant l’intervention du médecin généraliste, enregistrement du réseau des médecins vigies en 1995 et 1996, avril 2001.[L=https://www.iph.fgov.be/epidemio/epifr/index0000.htm]www.iph.fgov.be/epidemio/epifr/index0000.htm[/L] retour
(6) Dr Alain Levêque, Dr Michel Moreau, Prof Danielle Piette, Résultats de l’enquête menée auprès des médecins généralistes et des pédiatres de la Communauté française de Belgique, ULB-PROMES, octobre 2001. retour
(7) Dr Alain Levêque, Traumatismes et Epidémiologie Thèse de Doctorat en Santé Publique, Université Libre de Bruxelles, 2001. retour
(8) Groupe d’étude canadien sur l’examen médical périodique, Guide canadien de médecine préventive, Editions du Gouvernement du Canada, 1994. retour
(9) Diane Sergerie, Céline Farley, Un biais positif en faveur de stratégies populationnelles versus de groupe à risque pour diminuer les inégalités sociales liées aux traumatismes non intentionnels illustré à l’aide de trois mesures: le casque de vélo, le détecteur de fumée et les aires de jeu, European Consumer Safety Association, Colloque International, Inégalités socio-économiques et prévention des risques, Paris, septembre 2001 retour
(10) Alliance européenne pour la sécurité des enfants, La perception par les parents de la sécurité des enfants, Enquête dans 14 pays européens, 2001. retour
(11) Levêque A., Berghmans L., Lagasse R., Laperche J., Piette D., Style de pratique en médecine générale et activités préventives en Communauté française de Belgique, Archives of Public Health, volume 55, number 5-6, p145-158, 1997. retour
(12) Berghmans L., Boutsen M., Swennen B., Wanlin M., La prévention en médecine générale, rapport de recherche inédit, Ecole de Santé publique, ULB, Bruxelles, 1990. retour
(13) Prévention et petite enfance, ONE, 1997, p. 263.
retour

(13) Vous trouverez un ‘Aide-mémoire de prévention des accidents domestiques de l’enfant entre 0 et 5 ans’ à l’adresse [L=https://www.pipades.ch/pdf/aide-memoire.pdf]www.pipades.ch/pdf/aide-mémoire.pdf[/L]
retour

Charte de la réduction des risques

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Préambule

Cette charte a pour objectif de constituer le socle conceptuel de toute démarche pouvant se réclamer de la réduction des risques liés à l’usage de drogues en Communauté française de Belgique. A ce titre, les signataires de la présente s’engagent à en respecter l’esprit et les termes dans leurs interventions relatives à l’usage de drogues. Cette charte a été élaborée sur l’initiative de Modus Vivendi asbl, dont l’objet social est la prévention du sida et la réduction des autres risques liés à l’usage de drogues en Communauté française. Elle a fait l’objet d’une concertation avec l’ensemble des acteurs du secteur socio-sanitaire concernés par la problématique.

Définition

La réduction des risques est une stratégie de santé publique qui vise à prévenir les dommages liés à l’utilisation de « drogues ». La réduction des risques concerne tous les usages, qu’ils soient expérimentaux, récréatifs, ponctuels, abusifs ou inscrits dans une dépendance. La réduction des risques peut également s’adresser aux personnes qui s’apprêtent à consommer une drogue pour la première fois. Les risques principalement associés aux drogues sont les risques de dépendance, de lésions somatiques et les risques psychosociaux. Ils peuvent avoir pour conséquences une morbidité, une mortalité et une exclusion sociale que les stratégies de réduction des risques se proposent de réduire.
Cette approche s’inscrit dans une démarche de promotion de la santé physique, mentale et sociale. La réduction des risques se distingue de la prévention de l’usage et des traitements, dont elle se veut complémentaire. En effet si les traitements ont pour objectif un changement d’ordre sanitaire et / ou psychosocial, si la prévention a pour objectif de diminuer l’incidence de l’usage de drogues dans la population, la réduction des risques, quant à elle, a pour objet de réduire les risques et de prévenir les dommages que l’usage de drogues peut occasionner chez les personnes qui ne peuvent ou ne veulent pas s’abstenir d’en consommer.

Enjeux de la réduction des risques

Les épidémies du sida et des hépatites ont démontré qu’il était urgent d’aborder l’usage de drogues en termes de santé. En conséquence, la réduction des risques se propose de promouvoir la santé, le bien-être, la dignité et la citoyenneté des usagers de drogues. Cette approche socio-sanitaire de l’usage de drogues est parfois en tension avec d’autres enjeux, notamment sécuritaires.

Les constats

Une société sans drogues n’existe pas

On ne connaît pas d’exemple d’une seule société humaine qui n’ait pas eu recours à une drogue ou à un psychotrope quelconque. Il y a et il y aura toujours des personnes qui expérimentent, usent, voire abusent de drogues. Néanmoins l’usage abusif de masse semble être typique du monde contemporain, ce qui soulève des questions légitimes de santé publique. Ce constat, sans écarter le débat sur la causalité de l’usage et de l’abus de drogues, doit inspirer des stratégies de réduction de risques conçues dans une logique de santé publique.

Le risque zéro n’existe pas

Toutes les activités humaines comportent des risques qu’il est possible de réduire mais non de supprimer. La prise de risque fait partie intégrante de l’existence. Une vie sans risques est impossible. Personne ne peut s’y soustraire, ni l’usager de drogues, ni les intervenants.

La notion de risque est relative

Même s’ils adoptent certains comportements à risque (consommer une drogue, se l’injecter au risque de contracter une infection virale, s’exposer à une overdose,…), les usagers de drogues ne sont pas prêts à tout risquer. La plupart des usagers de drogues témoignent d’un intérêt pour les modes de consommation à moindre risque.

La prohibition des drogues maximalise les risques

La prohibition contraint l’usager de drogues à la clandestinité, créant ainsi les conditions d’une consommation risquée. Il faut donc prendre acte du fait que la prohibition maximalise les risques liés à l’usage de drogues. Un accès légalisé et contrôlé aux drogues contribuerait à réduire les risques.

Une information objective n’est pas incitatrice

Une information claire, crédible, objective et accessible sur les risques associés à l’usage de drogues n’a pas pour effet une incitation à l’usage de drogues, quand elle s’adresse à des personnes en situation de consommation. Il en va de même pour la mise à disposition de moyens de consommer des drogues à moindres risques.

Les valeurs

Reconnaître l’usager de drogues comme une personne à part entière

La réduction des risques reconnaît l’usager de drogues avant tout comme une personne, avec sa dignité, son humanité. L’usage de drogues et la prise de risques associée peuvent avoir un sens pour la personne, même si ce sens lui échappe.

Ne pas juger la consommation de drogues

En tant que professionnels de l’aide sociale et de la santé, nous respectons l’usager de drogues dans ses choix et décisions en ce qui concerne la consommation de drogues. Il ne nous appartient pas de poser un jugement moral sur la consommation des personnes.

Reconnaître des finalités propres à la réduction des risques

Les objectifs de la réduction des risques liés à l’usage des drogues, et en particulier la prévention du sida et des hépatites, ne doivent être confondus avec la prévention de l’usage de drogues. La prévention, le traitement et la réduction des risques concourent ensemble à la promotion de la santé de la population en général et des usagers de drogues en particulier. Pragmatique, la réduction des risques intervient auprès des usagers de drogues, à tous les stades de leur consommation, de ses pratiques et de son insertion sociale. Les objectifs de la réduction des risques ne sont pas subordonnés à ceux de l’abstinence, du traitement ou de la répression de la criminalité.

Affirmer le droit de l’usager de drogues à la participation sociale

En dépit du statut illégal de certains de ses comportements, comme tout individu, l’usager de drogues a droit à la participation sociale, à la santé, à l’éducation, au travail, au respect. Pour autant que les moyens leur en soient donnés, la plupart des usagers de drogues sont capables d’agir de manière responsable vis-à-vis d’eux-mêmes et d’autrui, peuvent être acteurs de la société et de la réduction des risques liés à l’usage de drogues. Il n’y aurait, par exemple, pas d’échange de seringues sans la participation responsable des usagers de drogues.

Principes d’intervention

Ne pas banaliser l’usage de drogues

Les interventions de réduction des risques ne visent ni à encourager ni à décourager l’usage de drogues. La réduction des risques se préoccupe de ne pas banaliser le recours aux drogues.

Donner aux usagers de drogues les moyens de réduire les risques

La réduction des risques s’attache à rendre accessible l’information sur les risques et les manières de les réduire et, au-delà, à procurer des outils pratiques tels que matériel stérile d’injection, préservatifs, analyse scientifique de substances, traitements de substitution etc.

Encourager les prises de responsabilité des usagers de drogues

Les interventions de réduction des risques visent à permettre aux usagers de drogues de s’approprier les moyens et outils de réduire les risques pour eux-mêmes, leur entourage et la société. Elles soutiennent la création et le développement d’associations d’auto-support.

Aller à la rencontre de l’usager de drogues dans son milieu de vie

La rencontre des usagers de drogues est activement recherchée par les intervenants de réduction des risques. Ils privilégient l’approche « de proximité » c’est à dire l’intervention dans les lieux de vie mêmes des usagers de drogues, en rue, en prison, au travail, en milieu festif, etc.

Faire participer les usagers de drogues

Les interventions de réduction des risques se développent sur base de l’articulation entre le savoir scientifique, les connaissances tirées de l’expérience des usagers de drogues et leurs préoccupations. Ainsi, nous considérons comme essentiel le partenariat avec des usagers de drogues à tous les stades des interventions, depuis leur élaboration jusqu’à leur évaluation.

Faire évoluer les représentations sociales sur les usagers de drogues

L’usager de drogues véhicule généralement une image négative, relayée, entretenue, amplifiée voire générée par certains médias et discours politiques: asocial, dangereux, hors-la-loi, malade, etc. Ces représentations sociales négatives entretiennent la stigmatisation et l’exclusion des usagers de drogues. Renforçant ainsi les pratiques clandestines de ces derniers, elles restreignent l’accessibilité aux dispositifs socio-sanitaires et donc contribuent à augmenter les risques. Au défi de ces représentations sociales dominantes, la réduction des risques fait valoir la dignité des usagers de drogues tant auprès de publics spécifiques, tels que le monde politique, le monde associatif, les pharmaciens, les médecins, etc. qu’auprès du grand public.

Sensibiliser les professionnels de différents horizons aux interventions

Les interventions de réduction des risques visent à associer dans nos interventions toutes les personnes en contact ou susceptibles d’être en contact avec des usagers de drogues (pharmaciens, employés communaux, agents pénitentiaires, agents de protection de l’environnement, agents de police,…).

Développer une réflexion et une évaluation constantes

La dimension expérimentale du champ de la réduction des risques et les questions éthiques qu’elle soulève, imposent une évaluation constante des interventions, des pratiques et des besoins ainsi qu’une recherche sur les objectifs et les méthodes.

Modus Vivendi, avenue de Béco 67, 1050 Bruxelles.
Tél.: 02 644 22 00.
Fax: 02 644 21 81.
Internet: [L=https://www.modusvivendi-be.org]www.modusvivendi-be.org[/L].
Courriel: info@modusvendi-be.org.

L’usage des drogues en Communauté française. Résumé épidémiologique 1999-2000

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Les données présentées ici constituent une sorte de puzzle. Chaque pièce contribue à donner une image de la situation en matière de drogues en Communauté française et certaines pièces du puzzle sont manquantes. L’image constituée n’est donc pas exacte. Nous pensons néanmoins, à la lecture de ces données, pouvoir dégager certaines tendances, sans trop nous tromper.
De manière globale, les trois produits les plus consommés actuellement sont le cannabis, l’ecstasy et la cocaïne. Nous analysons ci-dessous les tendances qui semblent se dessiner de manière plus particulière.

Les produits

Le cannabis

La consommation de cannabis a progressé au niveau de la population générale et au sein de la population scolarisée, pour atteindre un niveau de banalisation en fin des années 1990. Cette consommation a doublé entre 1996 et 2000 parmi les personnes participant à l’enquête C.A.T.I. Plus d’un tiers (38% – 42%) des personnes âgées de 18 ans ont déjà au moins expérimenté le cannabis. Cette consommation n’est pas limitée à un public marginal. Il n’existe pas à l’heure actuelle de données concernant les populations plus marginales. Dans la population générale adulte on constate en effet que plus le niveau d’éducation est élevé plus les personnes sont susceptibles d’avoir consommé du cannabis. Enfin, dans la population adulte, ce sont les plus jeunes (20-29 ans) qui ont le plus souvent consommé du cannabis.
En prison , le cannabis est la substance illégale la plus consommée, et rapportée dans les mêmes proportions (38%) pour les personnes détenues.
En parallèle à cette tendance d’augmentation de la consommation de cannabis, on a pu voir apparaître dans les centres de traitement une augmentation relative des demandes d’aide spécifiques , qui sont passées de 3% en 1993 à 13% des demandes en 2000. Ces demandes émanent principalement de personnes jeunes, âgées entre 15 et 25 ans.
Le cannabis est le premier produit par ordre de fréquence, dans les demandes reçues à la ligne téléphonique d’Infor-Drogues.

Les amphétamines et l’ecstasy

La consommation de produits stimulants , de type amphétamines et ecstasy, constitue le deuxième usage, en termes de prévalence, rapporté par les 17-18 ans en milieu scolaire. Environ un dixième de ces derniers ont déjà expérimenté au moins une fois ces produits. On a pu voir également qu’il s’agit de produits consommés par un grand nombre (25% – 30%) des jeunes rencontrés en milieu festif. Cette consommation est également sortie du cadre festif.
L’ecstasy est le deuxième produit par ordre de fréquence, dans les demandes reçues à la ligne téléphonique d’Infor-Drogues.
Cette consommation relativement importante ne s’est pas traduite par une augmentation des demandes de traitement enregistrées dans notre système. Ceci est peut-être lié aux caractéristiques des centres qui participent au système. En effet, les jeunes usagers de stimulants ne se reconnaissant pas sous l’étiquette de “ toxicomane ” n’ont pas tendance à adresser leurs demandes vers le secteur spécialisé, au contraire. Par ailleurs, pour une grande majorité, cette consommation ne pose pas de problème, ou n’est pas perçue comme pouvant en poser.
Dans les populations d’usagers de drogues rencontrés via les opérations boule-de-neige, environ un cinquième des consommateurs d’amphétamines déclare les consommer en injection.

Les champignons hallucinogènes et le LSD

Parmi les substances hallucinogènes, y compris l’ecstasy, on a pu voir que les champignons hallucinogènes sont relativement populaires parmi les jeunes. Que ce soit en milieu scolaire (9% des 17-18 ans) ou en milieu festif (env. 30%), cette consommation est relativement importante. Le LSD est moins populaire.
Si cette consommation n’a pas ou peu d’incidence sur les demandes de traitement, elle peut expliquer nombre de “ bad trips ” observés en milieu festif.

La cocaïne

La cocaïne est un produit assez fréquemment utilisé. Dans une enquête de population générale elle constituait le deuxième produit utilisé ou essayé (8%) après le cannabis. En milieu scolaire 3% des élèves de 17-18 ans ont déjà essayé la cocaïne.
La cocaïne est le troisième produit par ordre de fréquence, dans les demandes reçues à la ligne téléphonique d’Infor-Drogues.
Il semble y avoir une augmentation de consommation de cocaïne dans la fin des années 1990. Cette consommation a toujours un caractère festif (en témoignent les fortes prévalences parmi les personnes rencontrées en milieu festif : 15-30%), mais est également fréquente dans d’autres cadres principalement parmi les usagers de drogues des opérations boule-de-neige et consommateurs en injection. La chute importante de prix (et de qualité) peut expliquer ce phénomène.
Parmi les usagers de drogues rencontrés à travers les opérations boule-de-neige, on observe, entre 1996 et 1999 une augmentation de 54% à 69% de la consommation de cocaïne. Cette augmentation va de pair avec une consommation plus fréquente par voie intraveineuse.
Cette consommation a des répercussions sur les demandes de traitement: on observe que les demandes liées à des problèmes de consommation de cocaïne sont passées de 2 à 5% entre 1993 et 2000. Cette augmentation est surtout visible dans le secteur résidentiel. Cette augmentation est la plus importante en province de Liège.

Les benzodiazépines et médicaments psychotropes

La consommation de médicaments calmants et hypnotiques est rapportée de manière relativement importante dans la population scolaire, où en 1998, 5% des élèves de 17-18 ans rapportaient en avoir consommé.
Dans la population en milieu festif, des taux de consommation de benzodiazépines qui varient entre 5 et 9% sont rapportés.
Environ la moitié des consommateurs de drogues plus marginalisés, dont les consommateurs en injection, rencontrés à travers les opérations boule-de-neige rapportent consommer des benzodiazépines.
En prison , l’usage de benzodiazépines est rapporté par 13% des personnes détenues. Il s’agit du deuxième produit par ordre de fréquence , juste après le cannabis.
L’usage de tranquillisants, plus particulièrement de benzodiazépines, est bien ancré parmi les différents sous-groupes de population. La forte consommation de ces molécules dans la population générale et de manière légale, alliée aux manques de connaissances et de sensibilisation sur les risques spécifiques concourent probablement à cet usage.

L’héroïne

En milieu scolaire, ce sont 1-2% des élèves les plus âgés qui ont déjà consommé de l’héroïne.
En milieu festif, 8 à 10% des personnes rencontrées sont consommatrices d’héroïne.
Parmi les personnes détenues, 12% consomment de l’héroïne en prison. Il s’agit du troisième produit par ordre d’importance.
Parmi les usagers de drogues rencontrés à travers les opérations boule-de-neige, environ 70% déclarent consommer de l’héroïne.
Le poids relatif des demandes de traitement pour consommation d’héroïne est en diminution dans les enregistrements des demandes de traitement. Il reste cependant le produit invoqué le plus souvent. En 2001, elle était responsable d’environ la moitié de l’ensemble des demandes.

L’alcool

L’alcool est le produit rapporté par le plus grand nombre de personnes rencontrées en milieu festif, mais à des niveaux souvent comparables à ceux rapportés pour le cannabis.
La consommation d’alcool est responsable d’environ un quart des demandes de traitement enregistrées dans le système.

Les modes d’usage et les risques

La consommation d’héroïne par voie intraveineuse est en diminution. Ce mode d’usage est passé entre 1993 et 2000 de 96% à 19% des premières demandes de traitement pour consommation d’opiacés.
L’augmentation de la consommation de cocaïne observée s’accompagne d’une augmentation de cette consommation en injection d’une part et fumée (crack) d’autre part. D’après certaines données, le mode en injection est passé entre 1993 et 2000 de 24% à 51%. L’injection de cocaïne , et son augmentation , mérite une attention toute particulière . En effet, la consommation en injection est généralement de type compulsif et implique 10 à 20 injections par jour pendant plusieurs jours consécutifs. En outre, comme on l’a vu plus haut, la chute des prix s’est certainement accompagnée d’une chute de qualité et donc de la présence de produits de coupe peut-être toxiques.
L’emprunt de seringues lors des injections est en légère diminution et se situe aux environ de 35%. Le partage des autres composants du matériel d’injection, probablement vecteur des hépatites, lui aussi en légère diminution, est rapporté par plus de la moitié des personnes rencontrées (53%) à travers les opérations boule-de-neige.
La poly -consommation et les mélanges de produits sont des pratiques courantes et en expansion dans différents groupes d’usagers de drogues, principalement parmi les usagers de drogues dites récréatives et parmi les usagers de drogues dites dures.

Les infections au VIH et hépatites B et C

D’après les données recueillies à travers les opérations boule-de-neige, le taux de dépistage du sida est passé de 64% à 80% entre 1996 et 2000.
Les injecteurs récents (2 ans ou moins) rapportent une plus faible sensibilisation aux dépistages du sida et des hépatites, avec des taux de dépistage de 50% pour le VIH et de 30% pour les hépatites.
Concernant les données sur les taux de dépistage du VIH et hépatites, il existe une forte discordance entre celles en provenance du TDI (Treatment Demand Indicator) et celles recueillies dans les opérations boule-de-neige. Le taux de réponse manquante dans le TDI est très élevé et reflète la difficulté qu’ont certains thérapeutes à aborder ces questions lors de leurs entretiens même avec un consommateur par voie intraveineuse.
La prévalence de l’infection au VIH parmi les UDI (usagers de drogues par voie intraveineuse) est en diminution (6% en 1993 – 3% en 2000), d’après les données TDI. Elle est deux fois plus élevée (7%) parmi les UDI consommateurs de produits autre qu’opiacés, donc cocaïne essentiellement. Les données boule-de-neige, donnent une prévalence de 5%.
La prévalence de l’infection au virus de l’hépatite B est elle aussi en diminution et passée de 24% à 16% entre 1993 et 2000.
La prévalence des hépatites C est en croissance , et a augmenté de 46% en 1993 à 54% en 2000. Parmi les consommateurs de cocaïne en injection, cette prévalence est de 63%. La plus forte prévalence et augmentation de prévalence sont observées dans la province du Hainaut où elles atteignent 80% des UDI en traitement et enregistrés dans le système.
La co-infection aux virus des hépatites B et C, concerne 12% des UDI.

Les consommations au sein de groupes spécifiques de personnes

Parmi les consommateurs rencontrés en milieu festif

Les produits de prédilection sont le cannabis, les champignons hallucinogènes, l’ecstasy, les amphétamines et la cocaïne. Cependant il s’agit d’une population de poly-consommateurs et cette tendance augmente. En 1996, la moitié des personnes rencontrées ne mentionnaient qu’un seul produit, le cannabis pour la plupart; en 2000, ils ne sont plus que 30%.

Parmi les usagers de drogues rencontrés en rue

Chez les usagers de drogues rencontrés à travers les opérations boule-de-neige, la poly-consommation est également de règle. Environ la moitié des contacts sont des consommateurs par voie intraveineuse. La consommation de méthadone “ illégale ” est relativement importante (25-30%) et sa consommation en injection semble augmenter.
L’injection de méthadone de rue se fait avec une forme non-injectable. Cette pratique est donc responsable de nombreuses lésions de la peau et des tissus sous-cutanés.

Parmi les personnes détenues

Environ 40% des personnes en traitement enregistrées dans le système ont une affaire judiciaire en cours.
L’usage de drogues en prison est répandu. Au moins 40% des personnes détenues y consomment une drogue illégale. Pour la moitié d’entre elles, cette consommation comprend d’autres produits que le cannabis.
Cet usage augmente avec le nombre d’incarcérations.
Et la prison constitue un lieu d’initiation aux drogues “ illicites ” pour un quart des personnes détenues. Dans de très rares cas, c’est en prison que se fera la première injection.
Les produits les plus consommés sont le cannabis, les benzodiazépines, l’héroïne, la cocaïne, la méthadone. Ces consommations sont particulièrement à hauts risques étant donné que pour un certain nombre il s’agit du premier contact notamment avec les opiacés.
La mortalité par suicides et overdoses en prison est 20 fois plus élevée que dans la Communauté.
L’injection en prison est moins fréquente qu’en dehors. Environ 2% des personnes détenues déclarent s’être injecté des drogues en prison, alors qu’elles étaient 10 à 20% à s’injecter des drogues le mois précédant l’incarcération.

Au niveau répressif

Le cannabis reste la substance le plus souvent en cause lors des arrestations liées à la drogue.
Les interpellations de mineurs pour usage de cannabis sont en augmentation depuis 1999. Ce constat est peut-être le reflet de la mauvaise compréhension de la circulaire Declerck par les jeunes (“ le cannabis n’est plus illégal ”) et avec pour conséquences soit une plus grande visibilité de cette consommation soit une augmentation de la consommation. Il peut également être le reflet d’une intensification des activités de répression visant les mineurs.
La majorité des infractions liées à la drogue concerne les faits de détention et de consommation.

La mortalité liée à l’usage des drogues

La majorité des décès liés à l’usage des drogues sont dus à une consommation en injection.

L’offre de services destinés au public des usagers de drogues

La répartition géographique de l’offre, que ce soit en termes de prévention, de traitement et de réduction des risques est très inégale en Communauté française. De manière plus particulière, la province du Luxembourg se caractérise par la pauvreté de l’offre de services.
En terme de prévention, la majorité des projets développés actuellement s’inscrivent dans un objectif de promotion de la santé.
Les services accueillant de manière spécifique mères et enfants sont peu nombreux.
L’accessibilité au matériel d’injection est inégalement répartie. Les régions de Mons, Tournai, et les provinces de Namur et du Luxembourg ne disposent d’aucun projet visant cette pratique.
Les actions de réduction des risques dans des milieux particulièrement à risques, tels que prisons ou milieu festif sont en développement.

Source: Eurotox asbl – Unité permanente d’Observatoire Alcool-Drogues Communauté française de Belgique.
Adresse: Eurotox, av. E. De Béco 67, 1050 Bruxelles.
Tél.: 02-639 47 08.
Fax: 02-644 21 81.
Courriel: eurotox@skynet.be.

Santé, usages de drogues et réduction des risques

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Les premières Assises de la Réduction des Risques liés à l’usage de drogues se sont tenues à Bruxelles les 4 et 5 décembre 2003. Depuis 15 ans, la réduction des risques a fait des avancées et ouvert des chemins pour une approche novatrice, différente, humaniste, des problèmes de santé en général et des problèmes liés à l’usage de drogues en particulier. Dans ce numéro, vous trouverez deux interventions générales des Dr Hariga et Trefois, ainsi que le texte de la Charte de la réduction des risques liés à l’usage de drogues, qui a été présenté lors des assises.
C’est pour faire face aux ravages du sida parmi les usagers de drogues que les premiers programmes de réduction des risques virent le jour il y a plus de 10 ans (programmes d’échange de seringues, opérations Boule-de-Neige, etc.). Au milieu des années ’90, les stratégies de réduction des risques se sont peu à peu élargies à d’autres champs d’action (travail en milieu festif…), à d’autres risques (hépatites, overdose, ‘bad trip’, risques sexuels, etc.) et à d’autres types d’interventions (testing, gestion de ‘bad trip’…).
Si la réduction des risques est à l’heure actuelle considérée comme un des pans majeurs de la politique de santé en matière d’usage de drogues, elle n’en reste pas moins à la merci des incertitudes, notamment politiques: aujourd’hui elle est encore trop peu présente en prison, absente dans le champ sportif, et manque de moyens face à des maladies aussi graves que les hépatites. De plus, le concept, revendiqué par tous, de ‘réduction des risques’ ne fait pas l’unanimité dans sa définition. Le foisonnement des pratiques professionnelles a fait passer le concept de la sphère strictement sanitaire à des domaines aujourd’hui beaucoup plus larges incluant notamment le champ social, au risque d’être récupéré par le sécuritaire.
Ces Assises, organisées par l’asbl Modus Vivendi en collaboration avec l’asbl Question Santé, ont rassemblé près de 200 professionnels de terrain, des usagers de drogues, des acteurs non-spécialisés, des hommes et des femmes engagés dans un combat de santé publique, et ont mis en perspective les actions et les avancées en matière de réduction des risques liés à l’usage de drogues dans notre pays.

Réduction des risques

,

une pratique quotidienne des professionnels de santé

Les professionnels de santé sont familiarisés avec le concept de «réduction des risques» (RDR). Quand un médecin soigne un patient diabétique, non encore insulinodépendant, il s’efforce d’équilibrer sa glycémie. Il sait qu’à long terme, le patient risque des complications (comme une cécité, une artériopathie, etc). Le champ de la prévention primaire, celle qui veut empêcher l’apparition de la maladie, est dépassé. Le diabète est là, ne mettant pas encore en danger la vie de la personne; le médecin souhaite en limiter les conséquences dommageables, en tentant d’agir sur les comportements du patient pour réduire les risques que celui-ci court. Il met en place des stratégies de «réduction des risques».
Quand nos enfants font du roller, nous savons que cette pratique entraîne inévitablement des chutes, parfois graves. Bien sûr, une option de prévention extrême serait d’interdire le roller à nos enfants. Mais nous devons tenir compte de l’intérêt de l’enfant, et savoir qu’une interdiction le priverait d’une activité développant ses capacités psychomotrices, sa confiance en lui et en son corps. Nous le priverions aussi d’un plaisir et d’une activité favorable à sa socialisation et à son intégration parmi ses pairs.
Nous procédons donc à une évaluation des avantages et inconvénients; dans le cas considéré, nous pouvons conclure que le risque d’accident est compensé par le rôle éducatif et social de l’activité. En outre, nous pouvons minimiser le risque (RDR) en imposant à l’enfant d’utiliser des protections adéquates (casque, genouillères, etc). Par cet exemple, nous identifions des dimensions importantes: notre analyse ne doit pas s’arrêter à l’activité présentant un risque; une évaluation du rôle de cette activité dans l’équilibre global de l’individu est nécessaire; une prise de mesures visant à réduire les risques est souvent possible pour atténuer le danger.
Prenons un dernier exemple: nous savons que les accidents de la route font annuellement plus de 2000 morts en Belgique. Si nous voulions faire de la prévention primaire, la mesure la plus efficace serait d’interdire les déplacements sur route. Nous pourrions envisager de manière plus ciblée d’interdire l’usage de la voiture. Ces mesures ne sont pas près d’être acceptées par notre société du fait de leur coût culturel (la voiture étant un objet dont les représentations sont prégnantes) et économique. Nous ne sommes apparemment pas non plus prêts pour des mesures de limitation de la puissance des voitures.
Que nous propose donc la société? Une politique de réduction des risques basée sur la sécurité passive des voitures, sur l’obtention d’un permis de conduire, sur le port de la ceinture de sécurité, etc. On teste aussi le produit «voiture» au cours de «crash tests» pour savoir s’il n’est pas trop dangereux, puis on informe les consommateurs des résultats.
Nous constatons qu’en matière de sécurité routière, on ne tente pas d’éradiquer le risque, on accepte le fait que l’accident puisse survenir et on tente d’en limiter les dommages. On pourrait encore prendre bien des exemples, comme notamment la prévention des accidents de travail. Il ne vient à personne l’idée d’éradiquer les accidents de travail en supprimant le travail; on renforce plutôt, de diverses manières, la sécurité sur le lieu de travail.
En conclusion, on peut affirmer que les stratégies de réduction des risques sont très répandues dans notre environnement.
Les professionnels de santé ont évidemment toujours le souci de faire de la prévention primaire, c’est-à-dire d’empêcher la survenue de la maladie, du comportement dommageable. Mais quand la maladie est là, quand le comportement à risque est acquis, ils ne veulent pas pour autant baisser les bras. Ils se fixent un but complémentaire: limiter les dommages liés à la maladie ou au comportement à risque.
Les stratégies de réduction des risques partent du constat évident que l’éradication de la plupart des maladies et des comportements à risque est illusoire. Elles admettent la réalité que chaque individu est mû aussi par des motivations déraisonnables et par la recherche du plaisir.
L’objectif de santé de la réduction des risques est de rendre le plus improbable possible la survenue d’accidents. La réduction des risques est également basée sur la solidarité: entre malades et non malades, entre conducteurs et non conducteurs de voitures, entre consommateurs et non consommateurs de drogues.
Elle peut aussi se revendiquer de valeurs comme l’autonomie des individus, le respect de leur liberté, la responsabilisation. Bien sûr, chacun véhicule ses idées: des avis dissemblables sont légitimes lorsqu’on parle des valeurs. Mais la réduction des risques ne doit pas s’encombrer de préjugés moraux: le professionnel de santé ne peut se laisser envahir par ses jugements sur les comportements des personnes vis-à-vis desquelles il doit intervenir. Le professionnel de santé doit toujours avoir pour référence sa mission première, sa responsabilité professionnelle et collective; veiller à la santé des personnes dont il a à s’occuper.

Dr Patrick Trefois , Question Santé

Une pratique de santé publique et de promotion de la santé

La réduction des risques, comme le montre le Dr Patrick Trefois , n’est pas une pratique inhabituelle en promotion de la santé ni en santé publique.
La réduction des risques liés à l’usage de drogues, est une pratique qui s’adresse spécifiquement aux consommateurs de drogues. Elle vise à éviter que des personnes, parce qu’elles consomment des produits qu’elles connaissent mal ou qu’elles consomment de manière inappropriée, ne détériorent leur santé. La réduction des risques va à la rencontre de l’usager de drogues, là où il se trouve dans son parcours de consommation, sans jugement sur son comportement de consommation. Elle vise aussi à dé-stigmatiser l’usager de drogues, à changer le regard porté sur lui.

La réduction des risques

:

une stratégie de santé

II s’agit d’une démarche de promotion de la santé individuelle, basée sur la responsabilisation de la personne. Elle vise à donner au consommateur de drogues, licite ou illicite, l’information nécessaire et les moyens nécessaires pour réduire les risques.
Il s’agit d’une démarche de santé publique, dans la mesure où elle vise à éviter la propagation de maladies telles le sida ou les hépatites, ou encore qu’un problème de santé ne frappe un groupe important de la population: par exemple les overdoses.
La réduction des risques ne se limite pas à la prévention du sida. La consommation de drogues comporte d’autres risques réductibles: overdoses, risques liés aux relations sexuelles non désirées ou non protégées, «bad trip», sécurité routière, déshydratation par exemple. Et la réduction des risques, c’est aussi la prescription de traitements de substitution, voire d’héroïne dans certains cas.
La réduction des risques s’adresse à tous les consommateurs de drogues. Que sa consommation soit occasionnelle, festive, ou qu’il soit dépendant, tout consommateur est concerné par la réduction des risques.

La réduction des risques

:

une démarche participative et de proximité

Elle considère l’usager de drogues comme un partenaire, acteur de sa santé et de celle des autres. Par exemple, à travers les opérations de prévention par les pairs, les opérations boule-de-neige, ce sont les usagers de drogues eux-mêmes qui informent leurs pairs.
Intervenants et usagers de drogues formés, les «jobistes » se rendent sur les lieux-mêmes de vie des consommateurs: en milieu festif, en prison, en rue.

Deux exemples pratiques

Dans l’échange de seringues on va donner une information aux usagers sur les risques infectieux liés aux injections: sida, hépatites, abcès, endocardites, etc. On va aussi distribuer des seringues stériles, et l’ensemble du matériel d’injection (cupules, tampons désinfectants, filtres, eau pour injection), dans des comptoirs d’échange, en rue, ou auprès de pharmaciens. On va enfin organiser le relais des usagers qui le demandent vers des centres de dépistage ou de soins, ou vers des centres spécialisés en toxicomanie.
Second exemple: quand l’équipe mobile de Modus Vivendi intervient en milieu festif, elle donne une information sur les produits, sur les mélanges, sur les risques sexuels, etc. en distribuant des brochures, en tenant un stand d’information où les consommateurs peuvent trouver des réponses à leurs questions. Elle fournit également du matériel de réduction des risques: préservatifs, kits de sniff, voire des seringues. Elle accompagne les personnes en «bad trip».

La réduction des risques

,

tolérée plutôt qu’acceptée

Cependant, en dépit de sa pertinence en terme de santé et en dépit d’une certaine reconnaissance, la place de la réduction des risques n’est guère confortée, que ce soit sur le plan légal ou sur le plan des moyens.
En janvier 2001, dans sa «Note politique fédérale relative à la problématique de la drogue», le Gouvernement reconnaît pour la première fois la réduction des risques comme une stratégie, au même titre que la prévention, le traitement et la réhabilitation.
Cependant seules certaines de ses actions, celles visant spécifiquement la prévention du sida, ont été réglementées, et ce, de nombreuses années après leur mise en place. C’est ainsi qu’un arrêté royal donnant un cadre légal à l’échange de seringues ne paraît que 6 ans après l’ouverture du premier comptoir d’échange!
Mais, réglementées ou non, les actions de réduction des risques subissent fréquemment les ingérences du monde judiciaire. Les initiatives de réduction des risques se développent dans un environnement très inconfortable, qui les fragilisent, et ce, au détriment de la santé de la population visée par ces actions.
Ainsi depuis 2002, on a assisté à la remise en question de la pertinence d’une brochure de réduction des risques sur l’usage de la cocaïne, à l’interdiction de tenir un stand d’information avec brochures dans une soirée à Ciney, à l’impossibilité de réaliser des interventions de réduction des risques avec testing de pilules, et dans la plupart des villes où l’échange de seringues se pratiquait parfois de longue date, à une remise en question des principes fondamentaux qui soutiennent ces actions.
D’autre part, les besoins en termes de réduction des risques sont élevés, et les ressources actuelles ne permettent certainement pas de tous les couvrir. Timidement, elle fait ses premiers pas en prison, elle est absente en milieu sportif, elle ne permet pas l’accès au vaccin contre l’hépatite B, elle manque de moyens pour prévenir efficacement les hépatites C, ou pour toucher le plus largement possible les consommateurs de drogues dites «festives».
Et pour terminer puisque la question du caractère potentiellement incitatif brûle les lèvres de toutes les personnes qui doutent de la réduction des risques liés à l’usage de drogues, en réponse je ferai moi aussi une analogie avec les problèmes de sécurité routière. Posez-vous simplement la question suivante: circulez-vous plus rapidement en voiture parce qu’on vous oblige à porter une ceinture de sécurité?
Dr Fabienne Hariga , directrice de l’asbl Modus Vivendi

Ethique et concertation, raisons d’être d’un réseau

Le 30 Déc 20

Publié dans la catégorie :

Chacun à leur manière mais dans une perspective commune, pas moins de neuf services et associations interviennent en province de Namur en matière d’usages de drogues et d’assuétudes.
Sur l’initiative de la Coordination provinciale sida assuétudes (CSA) de Namur, une plate-forme rassemblant ces intervenants était créée en 1997. Depuis lors, la CSA coordonne le fonctionnement du réseau. Synonyme d’une plus grande proximité avec le public, cette initiative permet également une étroite concertation. Elle a trait non seulement à l’éthique des interventions mais aussi aux choix des stratégies de prévention et d’accompagnement.
« Il convient de souligner que ce réseau s’est mis tout naturellement en place, dans le cadre d’échanges avec les partenaires. C’est après qu’il a été décidé de le formaliser. En aucun cas, il ne s’agit d’une création artificielle », déclare le Dr Monique Vassart , Médecin Directeur de la CSA.
Le 25 octobre 2002, la Coordination et ses partenaires ont convié le public concerné par les assuétudes à un colloque précisément centré sur ce travail en réseau. Organisée avec le SEDS (Service d’études et de documentation sociales), cette journée de réflexion a vu de nombreux interlocuteurs prendre la parole à propos de l’apport du réseau dans la prévention, mais aussi du concept de réduction des risques liés à l’usage de drogues (RDR).
L’intervention d’Alexis Kestermans, du Centre pour la formation et l’intervention socio-psychologiques (CFIP) a permis d’éclairer l’auditoire quant à la nouvelle approche du travail en réseau. Selon ce psychosociologue, les réseaux constitueraient des réponses à des besoins d’efficacité, de professionnalisation ou de soutien. En guise de «ciment», on retrouve bien souvent des pratiques communes ou des valeurs partagées.

1997

,

naissance du réseau

En l’espèce, le réseau namurois a jeté les bases du travail grâce à trois ateliers, constitués à la suite d’une étude d’évaluation des besoins des partenaires. Un atelier «prévention» abordait la question, essentiellement à l’attention de 14 – 20 ans. Le groupe «réduction des risques» s’interrogeait quant à lui au sujet des moyens qui pourraient être mis en œuvre pour limiter les risques liés à la consommation des produits. Enfin, une troisième assemblée «accueil de crise» se penchait sur la question de l’accueil de l’usager de drogues dans les services d’urgence des hôpitaux.
Quatre ans plus tard, en 2001, ces étroites concertations ont permis de formaliser et officialiser un réseau d’intervenants en matière d’assuétudes. Côté prévention, la coordination des projets et autres animations de terrain sont assurées par les services spécialisés. La CSA fut quant à elle chargée d’assumer la coordination à travers plusieurs missions: diffusion d’information, réception et dispatching des demandes d’animations, recherche de nouveaux outils à vocation informative et formation des partenaires.
En mars de la même année, le réseau éditait une plaquette d’information reprenant les coordonnées des partenaires, de même que la composition des équipes et les services offerts. Depuis, chaque service assure la diffusion du document dans sa région, afin de le dynamiser à l’échelle locale.

Un décret wallon en gestation

Présent lors du colloque organisé au Campus provincial, le Ministre wallon des affaires sociales et de la santé Thierry Detienne a profité de l’occasion pour présenter les grands axes d’un avant-projet de décret. Cette nouvelle disposition traitera de «l’agrément et du subventionnement des réseaux d’aide et de soins, et des services spécialisés en assuétudes».
Pour l’heure, il se dégage plusieurs pistes. Tout d’abord, l’ensemble des assuétudes serait pris en compte. Il s’agirait non seulement de traiter la dépendance aux drogues illicites, mais également à l’alcool, au tabac et aux jeux.
Le ministre semble également convaincu du bien-fondé de la mise en réseau. Vu le grand nombre d’initiatives existantes, il s’agira essentiellement de les identifier, mais surtout de s’appuyer sur elles. Ainsi, le réseau, constitué en asbl, définira un projet pour trois ans à partir des ressources et en fonction des besoins. Le but premier de ce futur décret est d’inciter les différents acteurs à se constituer en réseau.

Le concept de réduction des risques

La seconde partie du colloque fut consacrée à la réduction des risques.
Il y a vingt ans, l’abstinence était une condition à l’accès à la prise en charge. D’autres approches se développèrent ensuite, afin de limiter au maximum les risques sanitaires et sociaux liés à l’usage de drogues. Conjointement, c’est le virus du sida qui va notamment forcer pouvoirs publics et intervenants à modifier leurs pratiques, et toucher un public jusque là peu concerné par les structures d’aide. Par la suite, la réduction des risques s’est élargie, pour prendre en compte les dangers sociaux, voire psychologiques.
En outre, avec la politique de réduction de risques, l’usager de drogues a de nouveau la possibilité d’être acteur de sa santé et de celle des autres, mais aussi d’éclairer les intervenants, auxquels il apporte son savoir.
D’autres représentants des services partenaires du réseau ont également pris la parole et ont présenté le projet pilote de réduction des risques, mis en place en partenariat avec plusieurs autres services du réseau. Le projet vise à promouvoir la RDR par des usagers de drogues auprès de professionnels de la santé.
Le public ciblé est composé de médecins généralistes, auprès desquels l’usager apporte ses connaissances, tout en bénéficiant d’une réinsertion professionnelle. Pour l’heure, seule l’étude de faisabilité a été accomplie. Elle a pris la forme de travail en «focus group», à savoir l’interview en groupe de publics concernés. Une réalité s’en dégage: la difficulté d’élaborer une définition commune de la réduction des risques qui soit opérationnelle sur le terrain…
En cours d’après-midi, les saynètes jouées par la Compagnie Maritime ont détendu l’auditoire. Avec humour et réalisme, elles ont mis au jour certaines situations vécues par les partenaires du réseau.

Le réseau s’agrandit

Tout prochainement, le réseau namurois devrait bénéficier de la présence de nouveaux partenaires: les «Plans drogue», en fonction depuis fin 2002. Une convention de partenariat leur sera proposée. Elle définira clairement certaines conditions essentiellement d’ordre éthique auxquelles il faudra adhérer au minimum.
Posé sur des bases solides, le réseau des services de prévention des assuétudes et de réduction des risques se situe seulement à l’aube de son développement, et ne demande qu’à bénéficier de l’apport de tous les partenaires compétents de la province.
Les actes du colloque sont disponibles au prix de 8 € à la Coordination Sida Assuétudes, rue Château des Balances 3/13, 5000 Namur. Tél.: 081-721 621. Fax: 081-721 620. Si vous faites votre demande par courriel à sida.toxicomanie@province.namur.be, ils vous seront envoyés gratuitement comme pièce jointe.