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Le Jury d’éthique publicitaire tente de censurer la Fédération Wallonie-Bruxelles

Le 30 Déc 20

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Une campagne générique de sensibilisation sur le thème de la vaccination a été mise en place récemment par la Communauté française dans le cadre du dispositif permettant la diffusion gratuite de messages de promotion de la santé sur les chaînes francophones belges.
Initiative citoyenne , une association très active opposée à la vaccination a porté plainte contre cette campagne auprès du Jury d’éthique publicitaire (JEP), organe d’autorégulation du secteur de la communication commerciale. Le JEP a suivi en partie la plaignante, et exigé une modification significative du message.
Il n’a pas retenu l’argument selon lequel les vaccins étant soumis à prescription, toute publicité en leur faveur destinée au grand public est prohibée comme c’est le cas des autres médicaments qui ne sont pas en vente libre.
Par contre, il a suivi la plaignante sur le contenu du spot (nous citons le JEP) :
Le Jury a constaté que les spots radio et TV mentionnent entre autres ce qui suit : ‘La vaccination est une protection utile et efficace. Elle nous permet d’éviter les maladies et leurs complications’.
Le Jury est d’avis que ces affirmations, qui ne sont nullement atténuées par des mises en garde, suggèrent que l’effet de la vaccination est assuré à 100% et omettent de mentionner les risques éventuels.
Étant donné les enjeux en matière de santé et le manque de certitude quant à une efficacité totale et quant à l’absence de tous risques, le Jury a estimé que les affirmations susmentionnées sont trop absolues et de nature à induire le consommateur en erreur au sens des articles 3 et 5 du code de la Chambre de commerce internationale.
Eu égard à ce qui précède, le Jury a pris une décision de modification et a dès lors demandé à l’annonceur d’atténuer les affirmations en question de manière à ce que les spots ne soient plus en infraction avec les dispositions évoquées.
Le Jury a également recommandé à l’annonceur, nonobstant la non applicabilité en l’espèce des dispositions légales relatives aux avertissements habituels en matière de médicaments, de mentionner qu’il est conseillé d’en parler à son médecin.
Enfin, le Jury a estimé devoir ne pas formuler de remarques par rapport aux autres aspects évoqués dans les plaintes (à savoir notamment le caractère discriminatoire de la publicité ou son manque de responsabilité et le non-respect du droit du patient à un consentement libre et éclairé), à défaut d’infractions à des dispositions éthiques ou légales.

Réaction ministérielle

Comme on s’en doute, cette décision n’a guère plu à Fadila Laanan , Ministre de la Santé de la Fédération Wallonie-Bruxelles, à l’origine de la campagne.
Voici sa réaction :
À la suite des avis juridiques qui lui ont été communiqués, la Ministre de la Santé en Fédération Wallonie-Bruxelles, Fadila Laanan, estime que le Jury d’éthique publicitaire (JEP) n’est pas compétent pour examiner une plainte relative à une campagne de promotion de la santé approuvée par le Gouvernement relative à la vaccination.
Cette campagne de sensibilisation à la vaccination a été mise sur pied dans le respect et sur le fondement de l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 18 janvier 1995 relatif à la diffusion de campagnes d’éducation pour la santé par les organismes de radiodiffusion.
Conformément au prescrit de cet arrêté, la campagne diffusée est un message d’intérêt général et non une publicité avec une transaction commerciale. Il ne s’agit donc pas à proprement parler d’une campagne «publicitaire».
Les objectifs de la campagne de radiodiffusion des spots consacrés à «la vaccination à tous les âges de la vie» sont extrêmement clairs. Ils visent à rappeler à l’ensemble des citoyens l’intérêt que présente la vaccination tant en termes de protection individuelle que collective. Le but de cette campagne est de faire en sorte que les citoyens pensent à la vaccination, qu’ils en parlent, qu’ils s’interrogent et qu’ils posent les questions aux professionnels de la santé qui peuvent les aider à trouver les réponses.
L’ambition d’une campagne de communication générale n’est jamais d’aborder chaque cas singulier mais bien de diffuser un message d’intérêt général.
La campagne de sensibilisation à la vaccination a reçu l’avis favorable de la Commission d’avis sur les campagnes radiodiffusées de promotion de la santé constituée par le Conseil supérieur de promotion de la santé.
Les propos du JEP relatifs au manque de rigueur scientifique dans l’élaboration de cette campagne sont dès lors dépourvus de fondement. La Commission précitée a procédé à un examen minutieux tant du fond que de la forme de la communication télévisuelle. Elle a vérifié l’éthique du projet, sa rigueur scientifique et sa cohérence au regard du Programme quinquennal de promotion de la santé applicable au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Les membres du JEP auraient, à cet égard, pu prendre la précaution de se renseigner quant aux procédures préalables qui entourent la réalisation des campagnes de promotion de la santé soutenues par la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Les informations recueillies auraient dû suffire au JEP pour s’abstenir d’émettre la moindre remarque à la suite des plaintes.
Qui plus est, le Jury, émanation d’une association sans but lucratif de droit privé, ne s’est pas assigné la mission de donner des avis juridiques et n’a au demeurant nullement la compétence de trancher un différend entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et les détracteurs de la vaccination, alors que telle semble être la portée des plaintes dont il a été saisi.
Dans ces conditions, la Ministre de la Santé, Fadila Laanan, déclare le JEP incompétent pour connaître des griefs des personnes qui ont entendu dénoncer cette campagne auprès de lui.
Le message véhiculé par la campagne et faisant l’objet de la plainte consiste à rappeler que la vaccination permet d’«éviter les maladies». Ce message est strictement vrai et ne signifie pas qu’elle donne une garantie absolue de ne jamais contracter les maladies concernées.
Par ailleurs, mentionner les «risques éventuels» des vaccins dans un message visant à encourager le public à se faire vacciner n’est pas envisageable dans un spot de trente secondes. C’est évidemment le rôle et la responsabilité du médecin d’évaluer au cas par cas le rapport bénéfices/risques et les éventuelles raisons de ne pas vacciner.
Évoquer ces risques est inadéquat. Les risques sont en effet soit assez fréquents mais parfaitement bénins (il s’agit d’inconforts passagers), soit plus sérieux mais extrêmement rares (moins d’un cas sur 10.000), soit même encore non démontrés scientifiquement.
Enfin, recommander d’en parler à son médecin est inutile dans la mesure où il n’est possible ni de se procurer ni de se faire administrer les vaccins autrement qu’en consultant un médecin.
Notre commentaire

Les adversaires de la vaccination ont depuis quelques années repris du poil de la bête, et les excès de l’alerte à la pandémie mondiale de grippe AH1N1 en 2009, avec des commandes massives par les pouvoirs publics de vaccins jamais utilisés, y ont sans doute peu ou prou contribué, jetant une ombre sur l’ensemble de la vaccination.
Dans ce contexte, on peut comprendre la volonté des pouvoirs publics francophones de rappeler le bien-fondé de bonnes couvertures vaccinales pour éviter nombre de maladies infectieuses. On ne s’étonnera pas non plus de la réaction d’Initiative citoyenne, un collectif ‘virulent’ et bien organisé.
Le rôle du Jury d’éthique publicitaire dans cette affaire est plus contestable. En effet, décider qu’il aurait fallu mettre en garde contre les risques de la vaccination sans mettre en avant la balance (objectivement favorable) entre les avantages et les inconvénients n’est pas très sérieux. Imagine-t-on une seconde telle marque de voiture être forcée de rappeler dans ses pubs que l’automobile fait beaucoup plus de victimes que les effets secondaires des vaccins, ou le leader du marché des chocos à tartiner matinaux contraint de souligner qu’ils contribuent à creuser la tombe de leurs consommateurs petits ou grands avec leurs dents ?
Plus fort, c’est le même JEP qui, en mars 2009, ‘déboutait’ un plaignant à propos de la première diffusion de la campagne de sensibilisation sur la dysfonction érectile (voir mon éditorial de novembre), qui n’est en fait qu’une publicité à peine masquée pour un médicament sur prescription, donc interdit de médias destinés au grand public.
Tout cela n’est guère sérieux, et apporte de l’eau au moulin de ceux qui, comme nous, plaident en faveur d’un contrôle réel des dérives publicitaires par un organe public, et non par l’émanation des parties prenantes du business renforcées de quelques représentants de la ‘société civile’ pour faire joli…
Christian De Bock

Dépistage néonatal de la surdité : bilan après 5 ans

Le 30 Déc 20

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Depuis un peu plus de 5 ans, un programme de dépistage néonatal de la surdité a été mis en place dans les maternités de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Ce programme a permis de tester 170.000 nouveau-nés dans les maternités participant au programme, qui proposent systématiquement le dépistage à tous les parents.

Pourquoi dépister la surdité chez les nouveau-nés?

La surdité est un des handicaps sensoriels les plus fréquents chez les nouveau-nés: si l’on considère les surdités dont les conséquences pour le développement de l’enfant sont particulièrement importantes (surdités bilatérales sévères ou profondes), elles touchent 1 à 3 nouveau-nés sur 1000. La surdité est encore plus fréquente parmi les enfants qui présentent un facteur de risque spécifique: elle concerne 2 à 4 % de ces nouveau-nés. Les facteurs de risque sont, par exemple, une surdité héréditaire dans la famille, la prématurité, l’infection prénatale par le cytomégalovirus…
L’âge auquel l’enfant sourd est pris en charge est un facteur déterminant pour son avenir: idéalement, le diagnostic de surdité devrait être posé avant les 3 mois de l’enfant et la prise en charge devrait débuter avant qu’il n’ait 6 mois car une prise en charge précoce permet à l’enfant de développer de façon optimale ses compétences communicationnelles, socio-émotionnelles et cognitives.
Sans test de dépistage, il est très difficile, voire impossible, de détecter la surdité d’un nouveau-né, ce qui risque de retarder l’âge de la prise en charge de l’enfant sourd. En effet, des études ont montré que lorsqu’aucun test de la surdité n’était effectué, les enfants avaient en moyenne 30 mois au moment du diagnostic de la surdité.
Le programme de dépistage de la surdité dans la Fédération Wallonie-Bruxelles

Ce programme est coordonné par un Centre de référence qui a entre autres missions l’accompagnement des professionnels dans les hôpitaux et le suivi scientifique du programme.
Actuellement, presque toutes les maternités de la Fédération (1) participent au programme et proposent le dépistage de la surdité aux nouveau-nés tel que recommandé dans le protocole de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Cette mobilisation se marque également au sein des services hospitaliers où la motivation des professionnels est très grande.
Toutefois, certains éléments pourraient encore être améliorés:
-la collaboration entre les différents professionnels et/ou entre les différents services hospitaliers (maternité, néonatalogie, service ORL…) est parfois limitée;
-la charge administrative est lourde, notamment les courriers de rappel aux parents: en effet, lorsque le test n’a pas été effectué à la maternité ou que le résultat est insatisfaisant, les parents reçoivent un courrier les invitant à réaliser ou à contrôler le test pour leur enfant. C’est pourquoi un système informatique pour la collecte des données est actuellement mis en place;
-après le dépistage proprement dit, la collaboration entre les centres spécialisés prenant en charge les enfants sourds et le Centre de référence du programme devrait être renforcée: actuellement, il n’y a pas d’échange d’informations quant au suivi et à la prise en charge des enfants sourds entre les centres de prise en charge et le Centre de référence.
Comment se déroule le test?

Le test est réalisé pendant le séjour à la maternité, quand l’enfant a 2 ou 3 jours. Il ne prend que quelques minutes, est indolore et le résultat est disponible immédiatement; idéalement, le test est réalisé quand l’enfant dort ou quand il est calme.
Un embout est inséré dans le conduit auditif du nouveau-né et des sons sont envoyés vers l’oreille interne. Celle-ci émet alors des vibrations qui sont captées par l’appareil de dépistage; c’est le signe d’un bon fonctionnement de l’audition. Aucune autre réaction n’est attendue de la part du nouveau-né.
Et si le résultat du test n’est pas satisfaisant?

Si le résultat du test n’est pas satisfaisant, il sera à nouveau réalisé le lendemain. Si lors du 2e test, le résultat reste insatisfaisant, les parents recevront un rendez-vous pour un test plus approfondi à la consultation ORL. Un résultat insatisfaisant peut s’expliquer par différentes raisons: liquide derrière le tympan, conduit auditif obstrué, enfant agité ou qui pleure…
Et si un nouveau-né n’a pas été testé ?

Il est possible que le test ne puisse pas être proposé aux parents, lorsque le séjour à la maternité est particulièrement court. Dans ce cas, les parents reçoivent un courrier les invitant à revenir à l’hôpital pour le faire.
Les travailleurs médico-sociaux de l’ONE encouragent également les parents à retourner à l’hôpital pour effectuer le test de l’audition si celui-ci n’a pas été fait ou dans le cas où le test doit être contrôlé.
Coûts

Les maternités de la Fédération Wallonie-Bruxelles participantes s’engagent à ne pas demander plus de 10 euros (indexés) aux parents: certaines maternités ne demandent pas de participation financière aux parents, d’autres demandent le montant maximal autorisé. Cette participation financière des parents est remboursée par la majorité des mutuelles. En outre, la Fédération Wallonie-Bruxelles octroie à l’hôpital 5 euros (indexés) par enfant dépisté.
Outils de promotion

Différents outils ont été créés pour promouvoir le dépistage néonatal de la surdité et pour informer au mieux les parents et futurs parents ainsi que les professionnels: des dépliants sur le dépistage néonatal (dépistage de la surdité et dépistage des maladies métaboliques et endocriniennes), des affiches, des spots TV et radio (diffusés en novembre 2011 ainsi qu’en février et mai 2012), le site Internet https://www.depistagesurdite.be .
Les dépliants, affiches et spots sont consultables sur le site https://www.depistagesurdite.be , onglet Familles/Campagne.
Quels résultats?

Entre 2007 et 2010, près de 183.000 nouveau-nés ont été concernés par ce programme dans les hôpitaux participants (2) et près de 170.000 ont été testés, (soit 92,9 % des enfants nés dans les maternités participantes).
Lors du test réalisé à la naissance ou du contrôle effectué dans les premières semaines de vie, l’audition était normale pour plus de 162.000 nouveau-nés, soit 95,8 % des enfants testés. Le programme a permis de mettre en évidence un trouble de l’audition (surdité uni- ou bilatérale) pour 358 nouveau-nés, soit 0,22 % des enfants testés.
En 2007, 10 % des enfants nés dans une maternité participante et concernés par le programme n’avaient bénéficié d’aucun test; en 2010, ils n’étaient plus que 5,8 % dans ce cas. C’est une évolution encourageante.
La participation des maternités au programme de dépistage de la surdité proposé par la Fédération Wallonie-Bruxelles était élevée dès le début: en effet, dès 2007, 42 des 50 hôpitaux de la Fédération disposant d’un service de maternité y ont adhéré, et ils sont 43 sur 46 aujourd’hui (3).
Contacts

Centre de référence pour le programme de dépistage néonatal de la surdité, Centre d’épidémiologie périnatale CEpiP asbl, Bénédicte Vos, 02 555 40 98 (40 62), benedictevos@cepip.be. Internet : https://www.cepip.be
Direction générale de la Santé de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Direction de la promotion de la santé, Dr Marie-Claire Minne, 02 413 28 79, marie-claire.minne@cfwb.be. Internet : https://www.sante.cfwb.be
Bénédicte Vos , Coordinatrice du programme de dépistage néonatal de la surdité et Dr Serge Carabin , Directeur général de la Santé, Fédération Wallonie-Bruxelles
(1) Cela représente 43 maternités sur 46. Les 3 maternités ne participant pas au programme effectuent aussi un test de dépistage néonatal de la surdité, mais à des conditions financières différentes.
(2) Les nouveau-nés considérés comme concernés par le programme sont ceux pour lesquels les parents n’ont pas refusé le test d’audition ou n’ont pas souhaité l’effectuer dans une autre institution.
(3) La diminution du nombre d’hôpitaux disposant d’un service de maternité s’explique par des fermetures ou des fusions de services de maternité ou d’hôpitaux entre 2007 et 2010.

Santé et habitat : initiatives à tous les étages

Le 30 Déc 20

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Le colloque ‘Villes, habitat et santé’ qui s’est tenu à Nantes (France) le 6 octobre dernier à l’initiative du Réseau français des Villes-Santé de l’OMS dessine les contours d’un vaste champ d’actions éducatives possibles et souhaitables autour de la santé environnementale.
Lancer “La santé n’est pas une compétence des villes” en ouverture du colloque ‘Ville, habitat et santé’ organisé par le Réseau français des Villes-Santé de l’OMS (RFVS) (1), était osé. Celle qui s’y est essayée à Nantes le 6 octobre dernier, en l’occurrence l’adjointe à la santé de la Ville, a vite précisé que son propos visait l’organisation des soins, effectivement exclue du champ d’action des villes françaises, et non la santé des habitants. Ouf! Un peu plus et le rendez-vous tournait court avant même d’avoir débuté. Compte tenu de la richesse des interventions qui ont suivi, c’eût été dommage pour la centaine de participants venus de toute la France afin de faire le point sur l’art et la manière de promouvoir un habitat sain.
Le RFVS a profité de l’occasion pour présenter le dernier-né de ses guides méthodologiques intitulé ‘Pour un habitat favorable à la santé, les contributions des villes’ (2). La douzaine d’interventions programmées et les échanges avec la salle ont dressé du sujet un portrait bigarré où les nuisances sonores côtoient les risques liés aux ondes électromagnétiques, où l’isolation thermique fait le lit du confinement et où l’excès de lumière naturelle peut désorganiser la production hormonale des habitants… Les débats se sont déroulés dans le vaste amphithéâtre de l’École supérieure d’architecture de Nantes dans lequel résonnait par intermittence le bruit du chantier de construction voisin et quelques sonneries de téléphones portables.

Risques tous azimuts

«Chercher le meilleur compromis entre énergie, économie et santé représente un changement de culture» , selon Delphine Saint-Quentin , consultante chez Wigwam Conseil (Nantes) dont le métier consiste à accompagner les acteurs impliqués dans toutes les phases de vie des bâtis, depuis la conception jusqu’à l’installation des occupants.
La thématique santé dans le bâtiment, composante de la santé environnementale, ne date pas d’hier. Les intoxications au plomb ou au monoxyde de carbone comme la nécessité de poursuivre la lutte contre l’habitat insalubre reviennent sur le devant de la scène avec une régularité exemplaire, désespérante. Pour autant il faut désormais composer avec des problématiques récemment apparues. Pour le Prof. Suzanne Déoux , ORL et expert en politique de l’habitat sain, la nouveauté consiste bien en “la nécessité de faire des économies d’énergie sans faire l’économie de la santé.” Les paramètres sanitaires à prendre en considération sont nombreux: température, hygrométrie, lumière naturelle et éclairage artificiel, acoustique, qualité de l’air intérieur, de l’eau, des espaces. «La lumière ne sert pas qu’à voir», insiste l’experte. «Elle permet la sécrétion d’hormones, tout comme l’obscurité dans laquelle nous en produisons d’autres tout aussi indispensables.» À bon entendeur: rester dans la lumière trop longtemps pourrait avoir des effets néfastes sur notre santé…
La prévention plutôt que la répression

L’histoire de la problématique de l’habitat insalubre, retracée par Philippe Ritter , directeur du service d’écologie urbaine de la Ville de Lyon, illustre bien l’évolution des risques santé liés à l’habitat. «Les permis de construire ont d’abord été un instrument sanitaire, instaurés en France pour garantir la salubrité des logements» , rappelle-t-il. «L’insalubrité était en voie de résolution à la fin du XXe siècle mais elle réémerge au XXIe siècle avec le saturnisme infantile, l’augmentation de la prévalence de la maladie asthmatique ou encore l’inadaptation du logement à la canicule.» Et de citer les rénovations sauvages de caves, garages et combles ou certains aménagements de pas de porte à des fins locatives comme exemples de logements insalubres modernes. Le constat fait, reste à décider de la meilleure façon de réagir. Plutôt que d’avoir recours à la répression via le Code de la santé publique, celui de l’urbanisme ou le règlement sanitaire départemental, Philippe Ritter, qui rêve de «logements durables sur le marché et pour leurs habitants» , préfère miser sur la prévention. Avec d’autres, il prône l’usage de la pédagogie auprès des propriétaires, des bailleurs mais aussi des architectes pour «freiner l’apparition sur le marché de néo-taudis» .
Non aux bâtiments thermos!

La performance énergétique des bâtiments, recherchée conjointement par les architectes et par les foyers, est fréquemment montrée du doigt par les défenseurs de la santé des occupants. Sans remettre en cause la vocation à la fois écologique et économique d’une telle quête, il faut avouer qu’elle suit une logique difficile à concilier avec la promotion de la santé.
Le choix peut s’avérer cornélien: calfeutrer toutes les ouvertures pour limiter les déperditions de chaleur ou ventiler régulièrement les habitats pour y maintenir une qualité de l’air satisfaisante? Pour résoudre l’équation, le plus sage serait de limiter les sources de pollution telles qu’un chauffage défectueux producteur de monoxyde de carbone, un taux d’humidité élevé qui favorise le développement des moisissures ou encore l’usage de multiples produits d’entretien. Puis de renouveler l’air… au risque de faire chuter temporairement la température intérieure. «Des systèmes de ventilation existent pour éviter que les bâtiments ne deviennent des bouteilles thermos» , renchérit Bettina Horsch , architecte spécialisée en biologie de la construction. «Encore faut-il apprendre aux usagers à les utiliser et à les entretenir correctement.»
Nos vies intérieures

L’air intérieur et les fluctuations de sa qualité préoccupent sérieusement les acteurs de la promotion de la santé environnementale, conscients que nous vivons près de 80 à 90% de notre temps dans des lieux clos. L’Association pour la prévention de la pollution atmosphérique (APPA) (3) fait partie de ceux qui s’inquiètent. Depuis 2007, son antenne régionale du Nord-Pas-de-Calais accompagne les collectivités dans leurs projets de prévention des problèmes liés à la qualité de l’air intérieur au domicile des publics précaires. Elle incite à la constitution de comités d’acteurs composés à tout le moins par les bailleurs, les services d’hygiène de la commune, la mairie, les intervenants à domicile… «Plus un technicien très motivé pour porter la démarche localement» , ajoute Caroline Chambon , chargée de mission de l’association. L’originalité de la démarche réside dans la combinaison d’une formation de ces personnes ressources et d’une visite au domicile, assurée par des étudiantes infirmières, pour déterminer avec les occupants les problèmes d’air intérieur qui sont les leurs (produits ménagers, monoxyde de carbone, humidité, tabac, etc.) et dispenser un premier niveau de conseils. «L’aération et les produits ménagers s’avèrent être les portes d’entrée les plus efficaces» , rapporte Caroline Chambon. «Le premier geste, qui dans plus de la moitié des cas suffit, consiste à aérer. Si d’autres actions sont nécessaires, le relais peut être pris par les acteurs locaux.» D’où l’importance de l’étape préalable de formation des professionnels. En quatre ans, près de 50 acteurs ont ainsi été formés par l’APPA qui a visité plus de 550 foyers dans quatre communes.
Quand les nuisances sonores créent du lien social

Autre loup dans nos bergeries: le bruit. Si les villes sont bien moins bruyantes qu’elles n’étaient du temps des pavés et des charrettes, les actuelles nuisances sonores ont des conséquences extra-auditives bien connues: effets cardiovasculaires, troubles du sommeil, de la concentration, des apprentissages. Là aussi le problème revêt parfois de nouveaux visages avec notamment l’amélioration des techniques du BTP: lorsqu’une meilleure isolation réduit le bruit extérieur, elle amplifie du même coup le bruit intérieur dû aux équipements et aux activités des occupants.
Selon un sondage réalisé en 2010, 2 Français sur 3 se disent gênés par le bruit à domicile. Au Centre d’information et de documentation sur le bruit (CIDB) (4) où travaille la psychologue de l’environnement Valérie Rozec , des plaignants appellent tous les jours. «À niveau sonore égal, il existe de grosses différences de perception interindividuelles du bruit» , explique-t-elle. «Être envahi chez soi, dans son refuge, par le bruit d’un voisin, du trafic, d’une activité professionnelle ou de loisir peut être vécu comme une perte de contrôle et tourner à l’obsession.» À en croire un rapport de l’OMS publié en 2011 (5), le phénomène a des conséquences en termes de santé publique et se traduit en nombre d’années de vie en bonne santé perdues. Pour agir, le CIDB endosse l’habit du médiateur entre plaignants et fauteurs de troubles par le biais de son service d’accueil téléphonique gratuit. «Nous incitons à la résolution des conflits à l’amiable et au développement du lien social entre les personnes» , résume la psychologue.
On n’y capte toujours rien!

Une journée au croisement des thématiques ville, habitat et santé ne pouvait faire l’économie d’une communication sur les ondes électromagnétiques. Cette question de santé environnementale, polémique s’il en est avec son lot de luttes acharnées à coup de données chiffrées, d’incertitude et de paranoïa de part et d’autre, présente un caractère singulier et embarrassant dans le paysage des risques sanitaires: son tout jeune âge.
«Au risque de vous décevoir, j’ai peu de réponses à vous apporter quant aux effets sur la santé des ondes électromagnétiques» , a d’emblée admis Olivier Merckel , de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) (6). Force est d’admettre que la communauté scientifique sèche. Hélas! On aimerait tant pouvoir s’en remettre à elle, qu’elle nous fournisse des résultats éclairants quant à l’impact sur l’organisme humain des signaux émis et reçus dans nos intérieurs par les appareils électroménagers, cablâges électriques, ampoules fluocompactes, connexions WIFI et autres téléphones. Le diagnostic actuel, imprécis, mène à des mises en garde du type ‘radiofréquences possiblement cancérigènes en cas d’usage à long terme et intensif’. Pour obtenir des réponses sur les effets à long terme des ondes et des nouveaux signaux comme le 4G, les impacts sur les enfants ou les personnes électrohypersensibles, repassez plus tard. Idem pour la prévention, qui a bien du mal à se faire une place dans ce brouillard. Sur le terrain, les collectivités font plus ou moins face à la controverse publique. La Ville de Rennes a engagé en 2002 la rédaction d’une charte des antennes relais qui contribue à ouvrir le dialogue entre riverains et opérateurs. Aujourd’hui, la commune orchestre une campagne de mesures de l’ensemble des couvertures de son territoire. «Les mesures permettent d’objectiver» , salue Olivier Merckel.
La transversalité de la santé

En matière de logement et d’habitat, la santé se niche donc dans tous les coins: de la construction à l’entretien des locaux, des collectivités publiques qui ont bel et bien des compétences en matière de salubrité, prévention des risques et santé publique aux individus qui par leurs gestes et leurs activités influent directement sur leur environnement. Il y a fort à parier que le caractère transversal de l’approche sanitaire dans le logement ne fait plus doute dans l’esprit des personnes qui ont assisté à ce colloque. Bien sûr elle ne va pas de soi et n’est pas toujours la priorité immédiate. Bien sûr agir en santé requiert de la méthode pour faire émerger les demandes et les préoccupations de tous les acteurs d’un projet. Pour autant, si comme Jean-Luc Potelon , professeur à l’École des hautes études en santé publique (EHESP) l’a appelé de ses voeux, une vraie prise de conscience des effets sanitaires de l’habitat s’opère, suivie d’une réduction des pratiques en tuyaux d’orgues au profit de la construction d’une réponse globale et coordonnées des acteurs, nous aurons fait un grand pas.
Anne Le Pennec , correspondante Éducation Santé en France
(1) https://www.villes-sante.com
(2) Pour un habitat favorable à la santé. Les contributions des villes. Réseau français des Villes-Santé de l’OMS, Presses de l’EHESP, 2011
(3) https://www.appa.asso.fr
(4) https://www.bruit.fr
(5)La charge de morbidité imputable au bruit ambiant. Quantification du nombre d’années de vie en bonne santé perdues en Europe. Rapport de l’OMS, 2011.
(6) https://www.anses.fr

10 ans de dépistage opportuniste du cancer du col de l’utérus

Le 30 Déc 20

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L’Institut Scientifique de Santé Publique (WIV-ISP) et l’Agence intermutualiste (AIM), qui analyse les données de santé de toutes les mutualités, viennent de publier un deuxième rapport d’évaluation de la couverture du dépistage du cancer du col de l’utérus par frottis. En chiffres absolus, pour la période 2004-2006, 3,2 millions de frottis ont été remboursés, qui ont été prélevés chez 1,7 million de femmes de 25-64 ans, ce qui correspond à une couverture de 61%. Parallèlement, 1,1 million de femmes (39%) de cet âge n’ont pas réalisé de frottis.
Selon une recommandation du Conseil européen de 2003, tous les États membres de l’Union européenne sont invités à organiser un programme de dépistage du cancer du col de l’utérus. Le frottis du col de l’utérus est recommandé pour toutes les femmes âgées de 25 à 64 ans une fois tous les 3 ans. Une couverture optimale est le principal facteur de succès. Dans l’attente d’un programme de dépistage organisé , ce rapport évalue la couverture du dépistage opportuniste en Belgique et dresse une série de constats intéressants.

Un taux de couverture sans évolution

En 2006, la couverture du dépistage du cancer du col de l’utérus était de 61%, soit une très faible augmentation de 2,2% par rapport à 2000. Comme observé lors du rapport précédent, en 1996-2000, les différences régionales sont minimes, les couvertures respectives observées étant de 60% en Région flamande, 61% à Bruxelles et 63% en Région wallonne. Par contre, les différences observées au niveau provincial sont plus importantes: la proportion de femmes effectuant un frottis varie de 51% (Luxembourg) à 70% (Brabant wallon).

Une plus faible participation des femmes plus âgées, et des femmes issues de milieux défavorisés

Au niveau national, pour les femmes de 25 à 34 ans, la couverture est de 70%. À partir de l’âge de 35 ans jusqu’à 49 ans, la couverture diminue progressivement de 67% à 62%. À partir de 50 ans, la couverture chute pour atteindre 44% pour la tranche d’âge 60-64 ans.
Le statut social de la femme détermine son attitude face au dépistage. En effet, on observe une importante différence de couverture entre les femmes qui bénéficient ou non d’un remboursement majoré de soins (BIM). Au niveau national, la couverture du dépistage du cancer du col de l’utérus s’élève à 40% pour les femmes BIM et 64% pour les non-BIM. Les différences entre les niveaux socio-économiques se retrouvent également à tous les âges et à tous les niveaux géographiques.

Surconsommation, surcoût et pourtant participation trop faible

En Belgique, pour la période 2004-2006, 2,8 millions de femmes âgées de 25 à 64 ans auraient dû effectuer un dépistage par frottis. En chiffres absolus, 1,7 million de femmes l’ont réalisé, alors que 1,1 million de femmes n’en ont pas bénéficié. Pourtant, 3,2 millions de frottis ont été réalisés durant la période 2004-2006. Ce qui signifie que chaque femme examinée a réalisé en moyenne près de 2 (1,9) frottis sur une période de 3 ans. Cet excès de consommation de frottis a été observé dans les trois régions.
Si l’on considère que jusqu’à 20% des femmes dépistées doivent bénéficier d’un frottis supplémentaire pour assurer leur suivi médical, on peut estimer qu’environ 384.000 frottis par an sont prélevés sans contribuer à la couverture de dépistage ou au suivi. Cela correspond à un montant estimé de 7.9 millions d’euros que l’INAMI rembourse annuellement pour les prélèvements et l’interprétation de frottis avec une utilité limitée. À ce coût, il faut encore ajouter 4,7 millions pour le dépistage en dehors du groupe cible (moins de 25 ans ou plus de 64 ans). Par ailleurs, la colposcopie – non recommandée comme examen de dépistage mais seulement en cas d’anomalie – est réalisée pour un tiers des frottis.
La non-évolution du taux de couverture du dépistage du cancer du col de l’utérus dans les trois régions suggère la nécessité d’un programme organisé. Ce programme devrait s’appuyer sur la collaboration de tous les prestataires concernés pour faire face aux défis majeurs du contexte actuel de dépistage opportuniste:
-comment convaincre les 39% de femmes non dépistées de réaliser un frottis tous les trois ans ?
-comment amener les femmes plus âgées et les femmes défavorisées à se faire dépister ?
-comment réduire l’excès de consommation de frottis chez certaines femmes?
Premier rapport: https://www.wiv-isp.be/epidemio/epien/cervixen/intermut.pdf
Deuxième rapport: https://www.wiv-isp.be/pdf/report_uterine_cervix.pdf

ICAPROS, un programme transfrontalier de prévention et promotion de la santé cardiovasculaire

Le 30 Déc 20

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Le projet de promotion de la santé ICAPROS (acronyme signifiant I nstance de C oordination des A ctions pour la Pro motion en S anté Franco-belge) a pour objectif d’améliorer la santé cardiovasculaire des populations vivant dans l’espace frontalier des Ardennes françaises et des provinces de Namur et du Luxembourg. Il s’inscrit dans le programme transfrontalier Interreg IV de coopération territoriale européenne et plus particulièrement France-Wallonie-Vlaanderen.

Le territoire

Le territoire couvert par ce projet s’étend sur le département des Ardennes françaises et pour la Belgique, les arrondissements de Dinant et Philippeville en province de Namur et ceux de Neufchâteau et Virton en province de Luxembourg (voir carte).
Il mobilise 7 opérateurs directement investis dans le projet et 7 autres opérateurs associés, depuis le printemps 2009 et jusqu’en 2013 (voir encadré).

Partenaires et associés

Opérateurs partenaires

Caisse régionale d’assurance maladie du Nord-Est
Caisse primaire d’assurance maladie des Ardennes
Mutualité chrétienne de la province de Luxembourg
Hôpital de Sedan
Hôpital de Charleville – Unité transversale d’éducation du patient
Cliniques Universitaires de Mont-Godinne
Centre d’éducation du patient asbl

Opérateurs associés

Observatoire franco-belge de la santé
Caisse primaire d’assurance maladie de la Marne
Centre marnais de promotion de la santé
GEIE LUXLORSAN
Unions régionales des Caisses d’assurance maladie de Champagne-Ardenne
Mutualité chrétienne de la province de Namur
Département Prévention Santé de la Province de Luxembourg

Une initiative transfrontalière

Au-delà de liens historiques forts et de l’appartenance à un espace culturel homogène, le département des Ardennes françaises et les provinces belges de Namur et du Luxembourg constituent des bassins de vie communs pour les populations qui y résident.
Quelques constats l’illustrent :
-l’espace frontalier se caractérise principalement par un tissu économique frappé par la désindustrialisation et le déploiement de politiques de reconversion;
-la mobilité professionnelle entre les deux versants est importante;
-les territoires sont enclavés;
-le développement d’initiatives de coopération économique, culturelle, etc. est de plus en plus fréquent.
La coopération franco-belge en matière sanitaire s’est considérablement développée au cours de la dernière décennie. De nombreuses actions ont été développées pour améliorer l’accès à des soins de proximité de qualité pour les assurés sociaux résidant dans les zones transfrontalières : convention sur l’aide médicale d’urgence permettant la collaboration des équipes SMUR françaises et belges tout le long de la frontière; conventions de complémentarités entre des services hospitaliers et/ou des plateaux techniques créant un bassin de soins transfrontaliers permettant aux patients dans la «zone organisée d’accès aux soins transfrontaliers» (ZOAST) Ardenne de se faire soigner de part et d’autre de la frontière sans autorisation médicale préalable et sans tracasserie administrative.
Des projets ont également été initiés par les observatoires de la santé français et belges dans le cadre du programme Interreg III. Ils ont permis de réaliser un tableau de bord transfrontalier riche en données épidémiologiques transfrontalières sur les territoires des Ardennes, du Namurois et du Luxembourg. Ces premières études ont mis en évidence des déficits de santé dans l’espace frontalier considéré par rapport aux moyennes nationales, particulièrement en ce qui concerne les maladies cardiovasculaires.
Sur base des travaux antérieurs, on peut constater une insuffisance et une inégalité des actions en faveur de la prévention du risque vasculaire et des facteurs associés sur la zone géographique. De plus, les démarches de prévention transfrontalière sont rares, et pourtant elles pourraient contribuer à cultiver la proximité des services sanitaires frontaliers, améliorer l’accès aux actions de prévention et de promotion de la santé des personnes vivant dans l’espace frontalier franco-belge et, de manière générale, estomper l’effet frontière pour les acteurs concernés par ces domaines d’intervention auprès des populations.
Les maladies cardiovasculaires et leurs facteurs de risque (cholestérol, diabète, hypertension, alimentation, tabac, sédentarité, stress…) ainsi que la promotion de la santé, la prévention, le dépistage et la prise en charge qui y sont liés, sont considérées côté français et belge comme prioritaires. Les acteurs concernés ont souhaité développer une initiative de partenariat transfrontalier au bénéfice des populations du territoire.

Des actions vers l’entreprise et le milieu scolaire

Le projet a pour objectif d’améliorer la santé cardiovasculaire et les facteurs de risque associés dans l’espace frontalier des Ardennes françaises et des provinces de Namur et du Luxembourg.
Il vise à promouvoir une démarche structurée pour le moins originale, alliant des activités de promotion de la santé, de prévention et d’éducation du patient qui accordent une place prépondérante à l’individu en tant qu’acteur de sa santé.
Le public-cible est constitué principalement d’une part des adultes en activité professionnelle et en recherche d’emploi ainsi que leurs familles; et d’autre part des adolescents de 13 à 18 ans qui sont, généralement, peu réceptifs aux programmes de promotion de la santé.
Le projet se compose de plusieurs axes dont nous développons les plus importants ci-dessous.

Un tableau de bord de la santé cardiovasculaire

Les études épidémiologiques relèvent le plus souvent d’initiatives internationales, nationales ou régionales. Rares sont celles qui considèrent comme une unité un territoire découpé par une frontière. Dans ce sens, le travail déjà évoqué plus haut réalisé par les observatoires de la santé français et belges est exemplaire.
Pour l’élaboration de ce projet, il était indispensable, dans une première phase, de mener une recherche sur la prévalence des pathologies cardiovasculaires, de leurs facteurs de risque et déterminants afin d’actualiser le travail précédemment mené par les observatoires de santé et de l’adapter au territoire et à la thématique de la santé cardiovasculaire.
Il s’agit donc de réaliser un tableau de bord de la santé cardiovasculaire sur le territoire transfrontalier. Ces données de départ nous donneront la possibilité, à la fin du projet, de tirer des enseignements sur les actions entreprises. Elles serviront de base pour estimer l’incidence des interventions.
En plus d’une version papier et d’une plaquette reprenant les éléments principaux, ce tableau de bord sera directement consultable en ligne sur le Web par les acteurs intéressés.

Un cadastre des initiatives et acteurs de la santé cardiovasculaire

Il était également nécessaire de disposer d’un état des lieux sur les travaux de promotion de la santé et de prévention de la santé cardiovasculaire qui ont été instruits, leurs objectifs et publics, les domaines d’action, les milieux de vie touchés, les acteurs impliqués, les résultats observés… sur le territoire considéré.
Il s’agit donc aussi de dresser un cadastre des acteurs et actions dans ce domaine.
Cette analyse complétant le tableau de bord de la santé cardiovasculaire doit nous guider dans la mise en place de notre projet, mais également aider d’autres acteurs ou opérateurs désireux de développer une initiative similaire.
Ce cadastre prendra la forme d’une base de données en ligne sur le Web, que les acteurs concernés pourront compléter et interroger.

Les actions de prévention dans le monde de l’entreprise

L’action vers les adultes en recherche d’emploi ou en activité professionnelle et vers leur famille prend racine dans les entreprises. Elle se déroule en deux temps avec la participation du public.
Un premier temps d’information, de sensibilisation, de prévention
Cette première phase consiste à améliorer la connaissance et la compréhension du public des liens existant entre les modes de vie et l’état de santé. Cette démarche préventive se concrétise grâce à la création et la présentation d’une exposition interactive, éducative et abordant les principaux facteurs de risque sur lesquels on peut agir.
La présence de professionnels de la santé dans le cadre de cette exposition est prévue et permettra de réaliser des mesures des paramètres biologiques comme la tension artérielle, la glycémie, le poids… Elle favorisera l’intérêt des personnes ciblées aux actions de prévention, complétera les supports d’information et orientera dans certains cas les personnes vers une démarche d’éducation du patient.
Dans la même logique, pour permettre d’accompagner de manière compétente cet outil, un module de formation sera également proposé. Ce module sera destiné aux utilisateurs de l’exposition: les animateurs en prévention santé, et tous les professionnels relais (infirmières d’entreprise, diététiciens, éducateurs médico-sociaux…).
Les animations seront menées dans des entreprises situées de part et d’autre de la frontière en mobilisant les services de médecine du travail français et belges et les instances représentatives au sein de l’entreprise.
Une information spécifique sera faite en direction des médecins libéraux généralistes et spécialistes français et belges de la zone éligible.
La communication de la démarche sera assurée par une conférence de presse de lancement de l’action en entreprise et la diffusion des produits dérivés de l’exposition (feuillets, plaquettes pour les professionnels et élus).
Un second temps éducatif
Après la démarche de sensibilisation des personnes ciblées par l’action par le biais de l’exposition, une proposition d’accompagnement sera offerte sur les deux versants frontaliers avec la réalisation d’une véritable démarche d’éducation du patient en relation avec les médecins traitants des personnes concernées.

Les actions de promotion de la santé en milieu scolaire

L’action vers les adolescents vise à les sensibiliser sur deux grandes thématiques : l’alimentation saine articulée avec l’activité physique et le tabagisme.
Les outils
Les outils sont réalisés avec la participation des adolescents. Ils prennent la forme de livrets pour les jeunes. Ils s’appuient sur les outils déjà existants en la matière, et en ce qui concerne l’alimentation, il s’agit de l’outil «Et toi, tu manges quoi ?», réalisé par le service Infor Santé de la Mutualité chrétienne (1), qui va être adapté à la réalité de la zone transfrontalière. Ces livrets sont accompagnés d’un dossier pédagogique pour l’animateur. Des animations ayant déjà fait leurs preuves auprès des jeunes seront proposées dans la partie pratique du dossier. La pédagogie mise en avant se fonde sur une approche positive et interactive renforçant l’estime de soi chez le jeune.
Le volet «animation»
Des animations avec ces outils seront proposées au sein des écoles secondaires, collèges et lycées. Les élèves participeront plusieurs fois à des animations pendant 3 années scolaires. Cette méthodologie devrait déboucher sur un travail en profondeur avec les jeunes, et, de la sorte, permettre des adaptations de modes de vie.
La formation
L’axe central de la démarche d’animation repose sur la formation de personnes relais dans la sphère scolaire des deux versants frontaliers de la zone du projet (infirmières chargées de la promotion santé, infirmières de l’Éducation nationale, enseignants, professeurs, éducateurs…). Cette formation à l’utilisation des outils, à la maîtrise des connaissances théoriques et surtout à la méthodologie (qui consiste à proposer des animations participatives suscitant l’estime de soi chez le jeune par une démarche de promotion de la santé) permettra une utilisation optimale des outils.
Le réseau de personnes relais permettra de développer des actions de sensibilisation transfrontalières et de les réitérer afin de les ancrer dans le milieu scolaire et de créer sur une longue période une dynamique de promotion de la santé au sein des établissements scolaires.
L’évaluation
Les animations seront évaluées avec les jeunes. En outre, une évaluation complémentaire sur 4 ans est prévue avec un groupe qui sera suivi sur le long terme.
Orientation des jeunes
Au cours des contacts répétés entre animateurs et adolescents, lors des animations, une orientation vers un service spécialisé dans une des problématiques concernées par l’action (diabète, anorexie, obésité, tabagisme…) sera proposée aux jeunes si le besoin émerge. Cette initiative permettra de développer une articulation entre le milieu scolaire, la prévention et les services de diagnostic ou thérapeutiques.
Un site Web
Un site Internet interactif accessible aux personnes relais formées dans le cadre du projet sera développé. Il proposera les supports didactiques (dossiers pédagogiques des deux thématiques), des conseils, des adresses utiles et diverses informations en matière d’animations. Un forum de discussion pour les personnes relais sera lancé.

Perspectives

Cette initiative a donc démarré début 2009 et nous vous en avons décrit les éléments principaux tels que prévus lors de l’élaboration du projet. Les actions se mettent en place comme espéré: le Tableau de bord est pratiquement terminé, le Cadastre des actions et acteurs est en cours de réalisation, les outils pour les adolescents et l’exposition sont bien avancés, les contacts avec les écoles et entreprises sont positifs… Bref, «tout roule»! Et des communications sur l’avancement de certains pans du projet ont déjà pu être réalisées comme la présentation des éléments principaux du Tableau de bord de la santé cardiovasculaire lors de la conférence de presse du projet à Sedan en décembre 2010. Rendez-vous dans quelques mois pour un écho des futurs développements du projet.
Jean-Luc Collignon et Marie-Madeleine Leurquin , Centre d’éducation du patient
Adresse des auteurs : Centre d’éducation du patient asbl, rue Fond de la Biche 4, 5530 Godinne. Tél. : 082 61 46 11. Courriels : jeanluc.collignon@educationdupatient.be et mariemadeleine.leurquin@educationdupatient.be. Internet : https://www.educationdupatient.be .
(1) Voir ‘Et toi, tu manges quoi ? , l’alimentation en débats entre ados’, Éducation Santé n° 249, octobre 2009

L’entretien motivationnel est-il cohérent avec la promotion de la santé ?

Le 30 Déc 20

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La promotion de la santé établit un cadre de référence, dont l’application nécessite la mise en œuvre de méthodes précises, par exemple des dispositifs de travail social pour développer l’axe communautaire, ou des méthodes pédagogiques pour développer l’axe éducatif.
Également, pour intégrer la prévention du tabagisme dans ce cadre, il est nécessaire d’utiliser une approche qui soit à la fois cohérente avec la philosophie de la promotion de la santé et efficace dans le domaine des assuétudes. L’équipe du Service Prévention Tabac du FARES asbl explore depuis cinq ans les possibilités d’adapter, dans cette perspective, les principes et les stratégies de l’entretien motivationnel .
Même s’il s’agit d’un modèle d’intervention utilisé davantage en consultation thérapeutique individuelle, ce qui le caractérise est une méthode de communication, basée sur des principes du courant humaniste en psychologie, spécialement l’approche «centrée sur la personne», de Carl Rogers (1), qui a été largement appliquée, non seulement dans la psychothérapie individuelle et de groupe, mais également dans d’autres domaines tels que l’éducation et le développement communautaire.
En partant de cette approche, un des apports principaux de William Miller et Steve Rollnick , créateurs de l’entretien motivationnel, a été la systématisation de stratégies de communication permettant d’aborder la question de la motivation par rapport à des comportements précis, spécialement les assuétudes (2). Le but est d’aider la personne à éclairer ses choix, à fixer et à atteindre ses objectifs propres, à l’égard de ces comportements, tout en restant dans le respect de son autonomie et le renforcement de ses ressources.
Le modèle se base sur une philosophie, dont les éléments principaux sont les suivants:
« Collaboration – L’intervention implique un partenariat qui met en valeur l’expertise du client et ses points de vue.
Évocation – La motivation intrinsèque est augmentée par la mise au jour des perceptions propres du client, de ses buts, de ses valeurs.
Autonomie – L’intervenant affirme les droits et la capacité du client à diriger son sort et facilite un choix éclairé.» (3)
Il s’agit au fond d’une éthique de la relation, d’une «manière d’être avec l’autre», qui a fait la preuve de son efficacité dans la prévention secondaire et le traitement. Dans ces domaines, la formation à l’entretien motivationnel est offerte, dans le cadre d’autres programmes du Fares, aux différents professionnels de santé, tels que médecins généralistes, pneumologues, gynécologues, infirmiers, sages-femmes. L’objectif est d’enrichir les interventions en matière de tabagisme, avec une approche qui prend en compte la globalité de la personne.
Ce sont ces principes philosophiques qui constituent également la base d’une adaptation de l’approche motivationnelle à la prévention au sens large.

Un style de communication adapté à la prévention auprès des adolescents

Le Fares offre cette formation aux professionnels relais, tels que les responsables de la santé à l’école, les éducateurs, les travailleurs sociaux, les animateurs de maisons de jeunes, les professionnels de l’aide à la jeunesse, etc. Concernant le tabagisme, évidemment l’objectif de la formation n’est pas que les professionnels puissent accompagner un processus d’arrêt tabagique, mais qu’ils soient davantage compétents pour susciter et renforcer la réflexion des adolescents sur la consommation et les facteurs sociaux et culturels associés.
Au-delà du thème tabac, la formation vise à renforcer les compétences des participants pour aider les jeunes à augmenter leur motivation, se fixer des objectifs et développer leurs ressources face aux éventuelles situations difficiles. Plusieurs exemples peuvent l’illustrer, notamment le décrochage scolaire, l’engagement dans un stage de formation professionnelle, ou les consommations à risque.
La formation constitue un espace d’échanges où les expériences de travail des participants sont discutées, en identifiant ce qui fonctionne, ce qui fonctionne moins bien et les manières dont les principes, les stratégies et les techniques de l’entretien motivationnel pourraient venir enrichir leurs compétences communicationnelles en prévention.
Voici quelques exemples. Il ne s’agit pas d’un résumé de l’entretien motivationnel, mais d’illustrations de l’application de certains éléments de cette approche à la prévention, de manière cohérente avec la philosophie de la promotion de la santé.

Faire la prévention avec les jeunes et partir toujours de leurs représentations

Concernant le principe de collaboration , la discussion se centre sur la nécessité d’assurer une participation effective des adolescents à la planification, la mise en place et l’évaluation des actions de prévention.
Le principe d’évocation rejoint la stratégie de partir des représentations des jeunes. En effet, ce n’est plus l’expert qui arrive, par exemple, avec des informations sur les méfaits du tabac et des conseils pour arrêter ou ne pas commencer, mais un adulte relais qui propose d’entamer des échanges, en partant des inquiétudes et des intérêts des adolescents.
Un indicateur de l’application de ce principe est le temps accordé à la parole des jeunes. Celui-ci sera nettement supérieur au temps de parole des intervenants. La technique des questions ouvertes est utilisée afin d’amener les jeunes à partager leurs points de vue et leurs perceptions. C’est au travers de ces échanges qu’ils vont approfondir et enrichir leur réflexion sur le sens des consommations et sur les ressources internes et externes qu’ils peuvent mobiliser.
Un thème de discussion qui émerge souvent concerne la place de l’information ou des conseils, traditionnellement associée à la prévention et aux missions des professionnels de santé. Des repères précis sont présentés, qui permettent d’accomplir ce qui est considéré comme un devoir professionnel, tout en suscitant l’expression des jeunes sur ce qu’ils connaissent déjà ou sur leurs réactions à l’information ou au conseil fourni.
Le principe d’autonomie met l’accent sur la reconnaissance de l’adolescent comme une personne responsable de ses décisions et de son comportement, même si ceux-ci ne correspondent pas à ce que le professionnel relais souhaiterait (4). Cette perspective permet d’éclairer certains thèmes controversés, tels que les difficultés éthiques impliquées dans les actions de prévention par la peur, ou le travail nécessaire sur le sens de la loi, lors de la mise en place des interdictions.
En lien avec chaque principe, la formation identifie des pièges qui empêchent leur application, tel que le jugement moralisateur de l’intervenant vis-à-vis de certains comportements, ou l’imposition de l’avis de l’expert, en discutant, par exemple, sur les assuétudes.

Écouter les jeunes et valoriser leurs ressources

Les principes philosophiques deviennent opérationnels au moyen de stratégies et de techniques qui peuvent constituer également des outils applicables à la prévention.
Concernant l’empathie (5), et la technique de l’écoute réflective associée, leur importance dans toute relation visant à promouvoir le bien-être des personnes est largement reconnue. Un exemple dans le domaine de la prévention du tabagisme est la place accordée à l’expression des aspects positifs que peut procurer la consommation, ce qui constitue un point de départ incontournable pour pouvoir aborder le thème avec les jeunes qui fument déjà. L’écoute empathique constitue également le principe de base permettant la mise en place d’espaces d’expression et de dialogue pour les adolescents, dans l’école ou dans d’autres contextes comme les maisons des jeunes.
Le principe stratégique « renforcer le sentiment d’efficacité personnelle »(6) rejoint la conception positive de l’éducation en termes de développement personnel, ainsi que la valorisation comme technique associée. Un exemple d’application collective de cette stratégie est la discussion des facteurs de l’école qui peuvent promouvoir, ou empêcher, le développement de l’auto-efficacité des élèves, par exemple, la structuration des activités de manière coopérative, non-compétitive. Ainsi, la formation aborde à nouveau le travail sur l’environnement des adolescents.
Comme dernière illustration, mentionnons la possibilité d’utiliser en groupe la stratégie « développer les divergences »(7), au moyen de l’outil « la balance décisionnelle ». Lors d’un débat avec une classe autour du tabagisme, l’intervenant peut les inviter à exprimer leurs avis sur les aspects positifs et négatifs de la consommation, ainsi que les aspects négatifs et positifs de la non-consommation. Il peut animer la discussion en utilisant des techniques telles que les questions ouvertes, les reflets et les résumés .

Les résultats

Des évaluations des acquis et de la satisfaction des participants sont réalisées à la fin de chaque module. Une évaluation d’impact à moyen terme a également été réalisée par rapport aux formations réalisées entre 2007 et 2009.
Il en ressort que pour la majorité des participants, l’acquis d’outils et de repères théoriques leur ont permis de mieux gérer leurs entretiens avec les jeunes et de disposer de plus de ressources pour construire une relation de confiance avec eux.
Pour certains participants, la formation a permis d’intégrer davantage l’esprit de l’entretien motivationnel que les stratégies et les techniques proprement dites, principalement par manque de temps lors des entretiens.
Pour ceux qui ont la possibilité de rencontrer les jeunes sur des périodes plus longues (plusieurs entretiens ou des échanges réguliers), il leur est davantage possible de travailler sur les divergences au moyen de la balance décisionnelle et de les accompagner dans d’éventuels changements.
La formation est appliquée principalement pour aborder les thématiques suivantes: la gestion du poids, les problèmes d’assuétudes dont le tabac, le cannabis et l’alcool et les situations de décrochage scolaire et d’orientation.
Les résultats obtenus jusqu’à présent permettent d’affirmer que l’adaptation à la prévention, dans un cadre de promotion de la santé, des principes et des stratégies de communication de l’entretien motivationnel, constitue une piste prometteuse qu’il faudrait continuer d’explorer, tant sous une forme individuelle que collective .
Françoise Cousin et Hernando Rebolledo , Service Prévention Tabac, Promotion de la santé, FARES asbl.
Adresse des auteurs: FARES, rue de la Concorde 56, 1050 Bruxelles. Courriel : francoise.cousin@fares.be, hernando.rebolledo@fares.be.
(1) Pour plus d’information sur cette approche, voir https://carl-rogers.fr/
(2) «Les interventions brèves utilisant l’entretien motivationnel avec les adolescents et les jeunes adultes permettent de réduire les conduites à risque, augmentent la rétention au traitement et améliorent les résultats de traitement dans le domaine des abus de substances. Par ailleurs, d’autres études, qualitatives, sont encourageantes et prometteuses dans le domaine de la maladie chronique et de la compliance médicamenteuse. L’entretien motivationnel ouvre de nouvelles perspectives dans d’autres conduites à risque (pratiques sexuelles à risque, prise de risque physique) mais aussi dans des domaines apparentés à la dépendance, comme les troubles de la conduite alimentaire.» Revue Médicale Suisse N° 496. https://titan.medhyg.ch/mh/formation/article.php3?sid=24175
(3) Miller W., Rollnick S. L’entretien motivationnel. Aider la personne à engager le changement. InterÉditions Dunod. Paris, 2006, p. 41.
(4) C’est la personne et non l’intervenant qui fixe ses objectifs, qui ne sont pas nécessairement l’arrêt ou l’abstinence. Il s’agit d’une caractéristique qui permet d’appliquer également l’entretien motivationnel dans une perspective de réduction des risques , ce qui n’est pas l’objet de cet article.
(5) « Être empathique consiste à percevoir avec justesse le cadre de référence interne de son interlocuteur ainsi que les raisonnements et émotions qui en résultent. » Rogers, Carl. Le développement de la personne. Dunod. Collection Organisation et Sciences Humaines. p. 39-45, «Comment créer une relation d’aide».
(6) «Le concept d’ efficacité personnelle … fait référence au crédit qu’une personne accorde à sa capacité à mener et à réussir une tâche donnée, à produire des résultats désirés». Miller W., Rollnick S. op.cit. p.45-48,
Bandura, A. Auto-efficacité – le sentiment d’efficacité personnelle. Bruxelles: de Boeck. 2003
(7) Développer les divergences : «… amplifier une divergence entre son comportement actuel et ses valeurs de référence ou ses objectifs plus généraux». Miller W., Rollnick S. op.cit. p.29-30, 45-48, 58.

Question Santé, trente ans déjà

Le 30 Déc 20

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Des questions sans réponse? Encore heureux!

«C’est entre trente et trente et un an que les femmes vivent les dix meilleures années de leur vie» (Sacha Guitry)
Cela fait donc 30 ans qu’est née l’asbl Question Santé. Trente années jalonnées d’interrogations multiples sur les thèmes les plus divers de santé publique, trente années de questionnements éthiques, trente années à éviter les pièges de la communication choc pour injecter un peu d’incertitude dans les messages sanitaires, bref trente années de nuances et de délicatesse.
N’est-il pas temps que cela change, que Question Santé nous donne enfin les réponses que les plus anciens d’entre nous attendent avec angoisse depuis si longtemps au lieu de continuer à nous poser des questions? N’est-il pas temps que l’asbl cesse de jouer les donneuses de leçon déformées par l’esprit délétère de mai 68? N’est-il pas temps que les campagnes médiatiques dont les autorités la chargent soient enfin spectaculaires et efficaces?
Vous ne me croyez pas? Vous voulez des preuves des errements de Question Santé? J’en ai!
En 1983 déjà, ces dangereux activistes affirmaient:
‘Depuis notre création, à Question Santé, nous nous interrogeons sur l’aspect moralisateur et dogmatique de l’éducation sanitaire.
Une nouvelle religion faite de Bien et de Mal: les bons comportements qui vous feront atteindre le paradis de la santé harmonieuse, et les mauvais qui vous précipiteront dans l’enfer de la maladie et de la mort. Point de salut pour ceux qui boivent, fument et ne font pas de gym tonic
(rappel, nous sommes en 1984, ndlr l’époque bénie du disco et de Véronique et Davina). Rarement l’éducation à la santé cherche simplement à faire réfléchir, à permettre le choix .’ (1)
Et leurs productions récentes ne montrent aucun progrès, au contraire, ils persévèrent dans l’erreur! Quelques titres: ‘Être bien dans sa tête, une obligation sociale?’, ‘Être chômeur, la belle vie?’, ‘Puisqu’on est jeunes et cons, les prises de risque à l’adolescence’, ‘Maigrir à tout prix, une obsession intemporelle’, ‘Prévention et santé: un peu, beaucoup, pas du tout’. La liste est accablante et se passe de tout commentaire.
Nous en avons assez de ces gens qui tablent sur l’intelligence du public plutôt que sur son ‘temps de cerveau disponible’. De ces promoteurs de santé qui donnent la priorité à l’autonomie individuelle, et à la mobilisation collective. De ces formateurs qui croient aux vertus de l’éducation permanente pour amener les publics à réfléchir en adultes à leurs choix de vie plutôt qu’à manipuler leurs comportements.
Mais que fait donc la police sanitaire? Le moment n’est-il pas enfin venu d’empêcher Question Santé de nuire?
Reprenons nos esprits.
Au fil du temps, Question Santé a su se rendre indispensable au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles en développant une expertise précieuse en matière de communication santé. Cette expertise lui a permis non seulement de déployer ses propres campagnes, mais aussi d’apporter son soutien à nombre d’initiatives du secteur associatif, et d’appuyer les autorités lorsqu’il fallait donner au public une information nuancée sur un sujet d’actualité, en échappant au piège du sensationnel à tout prix.
Comme vous le savez, notre Communauté dispose d’un outil législatif intéressant pour permettre à des messages de promotion de la santé d’atteindre une large audience, en exploitant des moyens de communication de masse, radio et télé, normalement réservés aux annonceurs riches et privés vu leur coût prohibitif.
Je n’ai pas peur d’affirmer que grâce à son expertise construite patiemment, Question Santé a contribué de manière significative à ce que les campagnes ‘santé’ n’aient pas à rougir de la comparaison avec les spots des grands annonceurs commerciaux, tout en faisant entendre et voir une autre manière de concevoir la communication.
Mieux même, l’asbl, en jouant régulièrement le rôle d’interface entre les décideurs politiques et les agences ‘traditionnelles’ de communication, nous a souvent fait éviter le pire en matière de communication institutionnelle.
En choisissant délibérément la voie de la discrétion, Question Santé a sans doute parfois manqué un peu de ‘punch’ dans ses messages, mais elle a témoigné ainsi d’un véritable respect du public, qui mérite qu’on lui ‘vende’ la santé avec d’autres armes que celles qui servent à promouvoir des margarines améliorées ou le traitement de la dysfonction érectile!

À côté de ces travaux mass médiatiques par définition très visibles, impossible de résumer ici 30 ans de réalisations diverses et nombreuses.
Pas question toutefois de passer sous silence l’industrie beaucoup plus discrète de l’asbl en matière d’éducation permanente. Il y a un monde de différence entre un spot télé vu par des centaines de milliers de personnes et un atelier ‘mon attitude face à la vaccination’ suivi par une dizaine de participants dont certains viennent d’abord pour le café et le morceau de tarte. Et bien, dans ce cas-là aussi, Question Santé est fidèle au poste, avec des animateurs compétents, respectueux et enthousiastes, des dossiers solides, des échanges qui permettent aux gens de construire et partager un savoir plutôt que d’acquérir des gestes normés.
Ce travail de terrain, très intense aussi en région bruxelloise (Question Santé bénéficie de longue date d’une reconnaissance de la Commission communautaire française de Bruxelles – Capitale), est il est vrai une excellente école de modestie pour l’équipe. Rien de tel en effet que de confronter les beaux principes théoriques qui nous guident à la réalité des vrais gens dans la vraie vie… Cela nous vaut des atterrissages pas toujours en douceur, mais salutaires.
Souhaitons pour terminer à son directeur Patrick Trefois ainsi qu’à son équipe que les trente prochaines années soient trente nouvelles glorieuses pour Question Santé.
Christian De Bock
Discours prononcé lors de la venue de Patrick Peretti-Watel à Bruxelles à l’occasion du 30e anniversaire de l’asbl Question Santé
(1) Texte de présentation de l’exposition ‘Regards sur l’éducation sanitaire 1856 – 1984’, à l’occasion de l’installation de Question Santé dans ses locaux de la rue du Viaduc à Bruxelles. L’exposition proposait de remarquables photos de Christian Carez au départ de la célèbre collection de cires du Musée Spitzner.

Polémique à propos de la vaccination HPV 6

Le 30 Déc 20

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La Fédération Wallonie-Bruxelles, sur base des recommandations du Conseil Supérieur de la Santé, a décidé de mettre la vaccination contre le HPV (Papillomavirus humain) gratuitement à disposition des jeunes filles de 13 ans qui le souhaitent à partir de la rentrée scolaire 2011-2012. Cette décision, attendue depuis que la Flandre a intégré cette vaccination à son programme au début de l’année scolaire précédente, a suscité une réaction de l’Initiative citoyenne.
Cette association a adressé aux ministres Fadila Laanan (Santé) et Marie-Dominique Simonet (Enseignement obligatoire) un courrier leur demandant si les parents recevraient les éléments nécessaires à poser un choix éclairé pour ou contre la vaccination de leurs filles, estimant qu’il faut s’assurer « de fournir une information suffisamment contradictoire, particulièrement lorsqu’il s’agit de produits aussi récents et aussi controversés ».
Initiative citoyenne n’en est pas restée là, et a également adressé aux directions d’écoles secondaires en Communauté française ainsi qu’aux associations de parents de l’enseignement libre et de l’enseignement officiel des courriers alarmistes sur cette question.

Réaction ministérielle

Fadila Laanan a réagi et tenu à rappeler l’utilité de la vaccination contre le HPV.
La lutte contre le cancer du col de l’utérus reste en Europe un enjeu de santé publique considérable. En Belgique, 700 cas de cancer du col de l’utérus surviennent chaque année. Plus d’un tiers des femmes touchées en décèdent. Ce cancer est le cinquième en fréquence chez la femme (après le cancer du sein, du côlon, des ovaires et du rectum). Il s’agit d’une des causes principales de décès par cancer chez les femmes entre 15 et 44 ans.
Le cancer du col de l’utérus est causé par un virus, le papillomavirus humain (HPV). Dans notre pays, environ 70 % des cancers du col utérin peuvent être mis en rapport avec le HPV de types 16 et 18. En Belgique, deux vaccins contre le papillomavirus humain de types 16 et 18 sont enregistrés et disponibles. Il s’agit du Gardarsil ® et du Cervarix ®.
Dix-huit pays européens ont déjà intégré la vaccination contre le HPV dans leur calendrier vaccinal.
L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a effectué un premier bilan de la commercialisation de ce vaccin. Sur les 107.000 doses délivrées à l’issue d’environ deux ans de commercialisation, une vingtaine de notifications ont été recueillies et analysées. La majorité d’entre elles concerne des effets indésirables connus bénins et transitoires (par exemple, une douleur au site d’injection). L’analyse des cinq cas d’effets indésirables graves ayant nécessité une hospitalisation n’a pas permis d’établir un lien de causalité entre la vaccination et les complications observées. L’Afssaps conclut que « compte tenu de l’ensemble des données disponibles à ce jour, le rapport risques/bénéfices du vaccin Cervarix® reste favorable et proche du profil de sécurité d’emploi tel qu’il a été défini au moment de son autorisation de mise sur le marché ».
En Australie, pays pionnier en matière de campagne de vaccination, une étude réalisée par les autorités sanitaires a été publiée dans le «Lancet». Elle indique qu’en trois ans seulement, les lésions à haute intensité, précisément celles qui peuvent parfois provoquer des cancers du col de l’utérus, ont diminué de moitié.
En Belgique, un système national de la pharmacovigilance a été mis en place par l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS). L’AFMPS enregistre les effets indésirables des produits mis sur le marché et prend les mesures nécessaires comme la suspension de l’autorisation de mise sur le marché, voire le retrait d’un produit du marché si cela s’avère nécessaire. Les patients, également, peuvent faire part d’effets indésirables liés à leur consommation de médicaments, soit auprès de leur médecin traitant, soit auprès de Test-Achats qui a conclu, depuis 2007 déjà, un accord de collaboration avec l’AFMPS, en matière d’échange d’informations.
Le Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE), dont le rôle est de produire des analyses et des études scientifiques pour documenter les pouvoirs publics lorsque des décisions doivent être prises dans le domaine des soins de santé et de l’assurance maladie, a examiné l’efficacité et le rapport coût-efficacité de ces vaccins. Selon ses estimations, jusqu’à 50% des cancers du col de l’utérus pourraient être évités. Il recommande l’introduction combinée de la vaccination et du dépistage.
Le Conseil Supérieur de la Santé a recommandé dès 2007 l’introduction de la vaccination contre le HPV dans les programmes de vaccination.
De son côté, la Communauté flamande propose la vaccination contre le virus du papillome humain via la médecine scolaire depuis le 1er septembre 2010.
La Fédération Wallonie-Bruxelles, sur base des recommandations du Conseil Supérieur de la Santé, a décidé de mettre la vaccination contre le HPV gratuitement à disposition des jeunes filles de 13 ans qui le souhaitent. Il s’agit du vaccin Cervarix ®.
Il est important de rappeler que les vaccinateurs sont toujours des médecins. Ils s’assurent d’abord de l’état de santé du patient avant toute intervention. La vaccination contre le HPV est effectuée dans ce cadre. La Fédération Wallonie-Bruxelles soumet cette vaccination à l’accord préalable des parents.
Pour rappel, si la Fédération Wallonie-Bruxelles recommande la vaccination contre le HPV, celle-ci n’est en aucun cas obligatoire et elle ne sera évidemment pas imposée. Si, pour des raisons idéologiques ou philosophiques, les jeunes filles ou leurs parents ne souhaitent pas bénéficier de cette vaccination, ce choix sera entièrement respecté.
C’est donc aux jeunes filles et/ou à leurs parents qu’appartiendra la décision de vaccination. L’autorisation préalable écrite des parents sera le seul critère pris en considération.
Afin d’informer au mieux les parents et les patients eux-mêmes, l’association interuniversitaire Provac leur a adressé un dépliant d’information via la médecine scolaire en septembre. Ces dépliants intègrent les éléments nécessaires à la bonne compréhension des enjeux tant sur le plan de la maladie que du vaccin et du dépistage.
Par ailleurs, l’ensemble des vaccinateurs ont été informés des nouvelles dispositions applicables depuis le mois de septembre. En outre, comme chaque année, une circulaire spécifique a été adressée aux services de promotion de la santé à l’école et aux centres psycho-médico-sociaux.
Enfin, si des éléments nouveaux devaient amener à reconsidérer le rapport risques/bénéfices du vaccin, il est évident qu’il en serait tenu compte.
D’après un communiqué de la Ministre de la Santé de la Communauté française, Fadila Laanan

Cancer et Psychologie : un accompagnement dans la maladie et le deuil

Le 30 Déc 20

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Apprendre que l’on souffre d’une maladie grave ou perdre un être cher est un événement difficilement supportable parce qu’il entraîne une rupture importante dans la vie d’une personne et un bouleversement affectif d’où surgissent angoisses, questionnements, souffrances, pertes et deuils. Nous vous proposons aujourd’hui de faire mieux connaissance avec l’asbl Cancer et Psychologie (1).
Cancer et Psychologie propose un accompagnement psychologique aux personnes malades et à leur entourage. Celles-ci sont accueillies, entendues et soutenues dans les moments éprouvants survenant lors d’une maladie grave. Cette démarche est complémentaire aux soins médicaux habituels et permet à la personne et à ses proches d’être pris en compte dans la globalité de leur histoire. L’asbl propose également un accompagnement au deuil, y compris pour les enfants et les adolescents.
Concrètement, son équipe de psychologues et de psychothérapeutes propose cinq modalités d’aide .

Écoute et entretiens

Accompagnement de la personne malade et de ses proches ou de la personne en deuil, par une écoute téléphonique et par des entretiens de soutien ou de psychothérapie.
La confrontation au diagnostic d’une maladie grave est un choc tant pour le patient que pour son entourage. Elle peut mettre à mal un équilibre fragile, susciter l’émergence de l’angoisse et déstabiliser la vie familiale. La lourdeur des traitements et l’incertitude pèsent.
Un travail psychique considérable attend ceux et celles que la maladie grave bouleverse. Non seulement un travail de restauration intérieure, malgré la réalité des soins parfois violents et intrusifs et la menace de ne pas en échapper, mais aussi un travail qui invite à une nouvelle confrontation aux blessures anciennes.
Cancer et Psychologie a fait le choix, à travers l’écoute téléphonique notamment, de soutenir la parole dont un sujet dispose pour se dire et de ne pas rester sourd à ce qu’il importe d’entendre. Entendre le patient lui-même, mais aussi ses proches et les soignants.
L’entretien téléphonique n’entraîne aucun paiement d’honoraires pour le malade, ses proches ou les soignants. Pour autant que l’appelant désire un suivi psychologique, il peut demander rendez-vous à un thérapeute; si une personne ne peut se rendre au cabinet du thérapeute, plusieurs membres de l’équipe acceptent de se déplacer au domicile ou à l’hôpital. Le coût des consultations est modulable pour être accessible aux possibilités de chacun.
Outre la permanence téléphonique, les psychothérapeutes de l’association peuvent proposer des entretiens de soutien ou de psychothérapie , à quelque moment que ce soit de la maladie (annonce, traitement, rémission, fin de vie), que la demande émane de la personne malade, d’un proche ou d’un soignant, que ce soit dans le contexte de la maladie grave ou du deuil. Les enfants et les ados peuvent aussi être soutenus individuellement pendant la maladie grave d’un proche jusqu’aux soins palliatifs ou après la mort du parent.
Permanence téléphonique du lundi au vendredi de 10 à 12h au 02 735 16 97.

Formation

Formation à l’accompagnement de personnes gravement malades et de leurs proches, s’adressant aux soignants et à toute personne concernée par la problématique de la maladie grave ou du deuil.
Épreuve existentielle, la maladie grave ébranle les fondements identitaires de la personne et se répercute dans tous les aspects de sa vie: le corps, le rapport à soi-même, les relations avec les proches, l’environnement social, les émotions, les attitudes, la souffrance morale, les questionnements sur le sens de cet événement. Les soignants sont confrontés aux angoisses des patients et à leurs demandes d’attention et de compréhension. Les relations deviennent complexes et suscitent des interrogations qu’il est parfois difficile de partager et d’élaborer. Que faire? Que dire? Comment aider de la meilleure façon? Parce qu’ils sont en première ligne et face à toutes ces expériences de vie et de mort, les accompagnants sont interpellés et bouleversés personnellement.
Accompagner relève tout autant de l’être que du faire. Rencontrer la maladie grave, la souffrance, la fin de vie, la mort entraîne la prise en considération de la dimension psychologique, sociale et philosophique dans la qualité des soins donnés et envisagés. Ainsi, l’esprit des formations de Cancer et Psychologie est de permettre aux accompagnants d’être à l’écoute d’eux-mêmes, de développer leurs ressources personnelles et relationnelles, de découvrir leurs propres limites et freins face à des relations difficiles et interpellantes. Corps, psychisme, relation… toute formation veille à intégrer ces dimensions de l’humain au coeur des moments les plus douloureux de la vie.
Lors de ces formations, les accompagnants développent leur qualité de présence au malade et à ses proches, apprennent à se tenir aux côtés de l’autre sans avoir de projet pour lui, à lui permettre de réaliser son propre chemin à partir de sa souffrance, ses doutes, ses espoirs et ses angoisses. Ils vont à la découverte d’eux-mêmes et de leur manière d’être dans la relation d’accompagnement; ils élargissent leurs interrogations, partagent avec d’autres, sont aidés et soutenus dans leurs difficultés et émotions et développent leurs qualités d’accompagnant.
Cancer et Psychologie permet aux accompagnants, au travers de ses formations, une démarche de ‘mise en forme’ personnelle et relationnelle afin qu’ils se situent mieux et déploient leurs capacités relationnelles. L’expression des situations vécues et l’échange d’expériences sont associés à des repères théoriques et des perspectives de développement personnel pour leurs propres accompagnements. Les formations s’appuient donc tant sur l’implication personnelle de chaque participant que sur la dynamique de groupe.
Pour en savoir plus sur le contenu des formations de Cancer et Psychologie: https://www.canceretpsy.be/spip/spip.php?article63 .

Espace-Enfants/Adolescents

À l’hôpital, des lieux d’accueil pour les enfants et adolescents dont les parents sont hospitalisés
Les «Espaces Enfants/Adolescents» sont des lieux d’accueil à l’hôpital, créés en collaboration avec les équipes soignantes, destinés aux enfants, aux adolescents et à leur famille venus rendre visite à un parent ou à un proche hospitalisé pour une maladie grave.
Concrètement, l’Espace-Enfants/Adolescents est animé par au moins deux psychologues. L’accès au lieu d’accueil est libre et gratuit. L’enfant, l’adolescent, l’adulte qui l’accompagne ou le parent malade choisissent d’y rester le temps qui leur convient. Si le parent hospitalisé ne peut se déplacer, l’intervenant accompagne l’enfant ou l’adolescent dans la chambre pour une rencontre. Les allées et venues entre l’Espace-Enfants/Adolescents et la chambre d’hospitalisation sont favorisées.
L’Espace Enfants/ Adolescents est un lieu d’expression: jeux de société et activités de dessin ou de bricolage sont proposés pour soutenir la parole ou… un certain silence. Du matériel de projection est également disponible pour permettre le jeu symbolique.
Les objectifs de ces ateliers est de maintenir le lien entre la personne hospitalisée et ses enfants, de favoriser l’échange au sein de la famille et de faire en sorte que chacun puisse trouver les mots qui sont les siens pour rendre compte de la réalité traumatisante. Ces ateliers doivent aussi permettre l’expression des émotions et donner aux familles l’occasion de rencontrer d’autres familles ou personnes qui sont dans une situation semblable à la leur. Un lieu de vie au coeur de l’hôpital en somme.
Les ateliers Espaces-Enfants/Ados:
Bruxelles: Hôpital Érasme, route de Lennik 808, 1070 Bruxelles – 02 735 16, du lundi au vendredi entre 10 et 12 h – 0487 858 077 – canceretpsy@skynet.be
Charleroi: Hôpital André Vésale, rue de Gozée 706, 6110 Montigny-le-Tilleul – 0484 063 648 – canceretpsycharleroi@hotmail.com
Liège:
Centre Hospitalier du Bois de l’Abbaye, rue Laplace 40, 4100 Seraing – 04 221 10 99 – canceretpsylg@skynet.be.
Centre Hospitalier Chrétien Clinique Notre-Dame – rue Basse Hermalle 4, 4681 Hermalle-sous-Argenteau – 04 221 10 99.
Centre Hospitalier Chrétien Clinique Saint-Joseph – rue de Hesbaye 75, 4000 Liège – 0486 248 948.
Centre Hospitalier Régional de la Citadelle – Boulevard du 12ème de Ligne 1, 4000 Liège – 04 230 79 57.

Namur: Clinique et Maternité Sainte-Élisabeth, place Louis Godin 15, 5000 Namur – 081 720 487.

Espace-Famille(s)

Des lieux d’accompagnement pendant la maladie.
Dès l’annonce de la maladie grave, durant les traitements, pendant les périodes de rémission ou de rechute, les parents qui le souhaitent ont la possibilité de prendre rendez-vous au siège de l’asbl, afin d’en parler, «pour le vivre autrement». Comment en parler aux enfants? De quoi ceux-ci se rendent-ils compte? Comment ne pas les affoler tout en ne déniant pas l’inquiétude? Comment se mettre à l’écoute de leurs représentations, de leurs idées? Autant d’interrogations à déployer ensemble.
Pour les familles qui le souhaitent, des rencontres avec d’autres familles peuvent être envisagées, en fonction de la demande.
Contact: 02 735 16 97, du lundi au vendredi de 10 à 12 h – canceretpsy@skynet.be

Espaces-Papillon

Ateliers pour les enfants et les adolescents endeuillés
Ce sont des ateliers destinés aux enfants de 5 à 12 ans et aux adolescents de 12 à 18 ans, touchés par un deuil, quelles que soient les circonstances du décès. Leurs objectifs sont de:
– favoriser la relance du lien: pour un enfant ou un adolescent en deuil, participer à un atelier constitue une possibilité parmi d’autres de tenter de bricoler intérieurement de quoi surmonter le vide créé par cette perte radicale qu’est la mort d’un parent ou d’une personne proche. Retrouver tous les mois d’autres enfants ou adolescents également confrontés à un deuil, témoigner de son histoire et s’appuyer sur d’autres expériences, sont autant d’occasions de renouer avec ses forces vives;
– se décaler de sa souffrance: être entendu et respecté dans son chagrin, sans être assigné à cette place d’endeuillé, est essentiel. Un des enjeux du travail d’accompagnement est de déloger l’enfant ou l’adolescent d’une position d’exception, pour inscrire ce qui lui arrive dans son histoire de vie;
– soutenir la parentalité/accompagner la famille: ces ateliers constituent un soutien à la parentalité, dans la mesure où les adultes qui y inscrivent leurs enfants souhaitent être accompagnés dans leur traversée du deuil et être rassurés dans leurs compétences parentales. Le chemin effectué par les enfants s’appuie sur celui des adultes de leur entourage et réciproquement;
– faire en sorte que la parole puisse davantage circuler et les émotions se vivre en famille, chacun prenant sa part du chagrin;
– sensibiliser l’entourage de l’enfant à son vécu face à la perte et soutenir la famille face aux réactions parfois complexes de l’enfant.
Concrètement, un entretien préliminaire avec l’enfant et sa famille est proposé avant d’intégrer un atelier, car le travail de groupe ne convient pas forcément à tous les enfants.
Dans certains cas, ils sont orientés vers un suivi individuel ou des entretiens familiaux. Ceux qui intègrent l’Espace Papillon in fine sont encadrés par des psychologues et des bénévoles spécialisés dans l’accompagnement du deuil.

Des ateliers pour enfants

Ces ateliers se déroulent une fois par mois pendant 3 heures et sont étalés sur 5 mois. Ils sont balisés par des thèmes touchant au travail de deuil et sont «médiatisés» par des activités: dessins, peintures, modelages, découpages/collages, création d’histoires, constructions soutiennent la prise de parole et le processus d’intégration de la perte. Ces activités favorisent la mise en forme des émotions et leur symbolisation et le fait de se retrouver en groupe permet à l’enfant de légitimer son vécu, de se dire qu’il n’est pas seul avec cette douleur.
Après l’atelier des enfants, un moment de rencontre parents-enfants est proposé autour d’un goûter ou d’un apéritif.

Des ateliers pour adolescents

Suivant un cycle de six séances, les ateliers pour adolescents s’organisent autour de réalisations créatives communes au moyen de la photographie, de la peinture, de l’écriture, du théâtre, de la chanson…
En fin de cycle, un entretien d’évaluation peut être proposé et donner lieu à un travail individuel avec l’enfant ou à la possibilité de participer à un nouvel atelier.
Pour en savoir plus, https://www.espace-papillon.org .
Les Espaces-Papillon ont lieu:
– à Bruxelles: Cancer et Psychologie, avenue de Tervuren 215/14, 1150 Bruxelles – 02/ 735 16 97, du lundi au vendredi de 10 à 12 h – canceretpsy@skynet.be.
– à Charleroi: Centre de Consultations Conjugales et de Planning Familial, Boulevard Joseph II, 14, 6000 Charleroi – 0484/ 063 648 – canceretpsycharleroi@hotmail.com.
– à Liège: Antenne wallonne de Cancer et Psychologie, rue des Augustins 48, 4000 Liège – 0499 332 679 ou 04 221 10 99 – canceretpsylg@skynet.be.
– à Namur: rue Louis Loiseau 39, 5000 Namur – 0495/ 788 386.
Une information plus large est également possible sur la dimension psychologique de la maladie grave via des conférences , des colloques et séminaires et un journal trimestriel qui se veut être le porte-parole des options, questions, propositions et réalisations de l’équipe de Cancer et Psychologie.
L’asbl met aussi à la disposition du public les tirés à part des articles parus dans son journal (cancer et sexualité, chimiothérapie et qualité de vie, la douleur en oncologie…). À découvrir sur: https://www.canceretpsy.be/spip/spip.php?article19 .
Pour recevoir le trimestriel (10€ pour 4 numéros) ou commander un tiré à part: 02 735 16 97 (de 10 à 12h) – canceretpsy@skynet.be.
Pour toute autre information: Cancer et Psychologie, avenue de Tervueren 215 à 1150 Bruxelles, tél./ fax: 02 735 16 97, courriel: canceretpsy@skynet.be, site: https://www.canceretpsy.be . L’asbl possède également des antennes à Charleroi, Liège et Namur, voir: https://www.canceretpsy.be/spip/spip.php?rubrique11 .

(1) Voir notre article précédent ‘Aborder les souffrances et les peurs du tout-petit’ , par Carole Feulien, Education Santé n° 269.

La ligne Tabacstop

Le 30 Déc 20

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Évaluation d’un outil du sevrage tabagique

Depuis le 1er janvier 2011, un numéro de téléphone 0800 111 00 est inscrit sur tous les paquets de cigarettes. Il s’agit du numéro de Tabacstop, un projet mis en place par la Fondation contre le Cancer depuis 2004.
Son but est d’offrir une oreille attentive aux fumeurs désireux de stopper le tabac, de leur donner des conseils, de les orienter vers les centres d’aide aux fumeurs, médecins et tabacologues.
Elle veille également à informer toute personne ayant des questions liées au tabac, fumeurs, entourage des fumeurs, non-fumeurs, professionnels de santé…
Tous les services proposés par Tabacstop sont gratuits et la ligne téléphonique est anonyme.

L’équipe Tabacstop

Les répondants téléphoniques de Tabacstop sont des professionnels rémunérés, médecins, infirmières et psychologues formés en tabacologie. Cette formation est proposée aux professionnels de la santé et aux psychologues par le Fares ( https://www.fares.be ).
Les permanences téléphoniques de Tabacstop ont lieu de 15 h à 19 h en semaine. Quand la ligne est occupée ou en dehors des heures de permanence, les numéros des correspondants sont enregistrés et les appelants sont recontactés dans les jours qui suivent.

Un accompagnement personnalisé

Tout fumeur a son histoire. Il est donc nécessaire de proposer à chacun des conseils qui lui conviennent, et de suivre individuellement l’évolution de chaque tentative d’arrêt. Un tel accompagnement permet de renforcer les chances de réussite.
Tabacstop propose donc également des accompagnements téléphoniques personnalisés sur une période d’environ 3 mois avec en moyenne 8 entretiens par individu. Les personnes qui s’inscrivent à cet accompagnement sont toujours suivies par le même tabacologue qui les appelle lors de rendez-vous convenus à l’avance.

Une aide financière aux plus démunis

L’argent ne doit pas être un frein à l’arrêt tabagique. Malheureusement, il l’est souvent, notamment en ce qui concerne l’achat de produits d’aide à l’arrêt, tels que les substituts nicotiniques. Tabacstop a donc mis en place une aide financière destinée aux personnes à faibles revenus. Si le demandeur répond aux critères Omnio/BIM, il peut bénéficier du remboursement intégral de ses substituts nicotiniques durant six semaines de traitement. Un coup de pouce qui peut faire toute la différence.

Un contact par courrier électronique

Via l’adresse conseil@tabacstop.be, des tabacologues prennent le temps de répondre aux questions qui leur parviennent par courriel et fournissent conseils et soutien adaptés à chaque situation.

Un programme d’aide au sevrage tabagique sur Internet

Accessible 24 heures sur 24 via le site https://www.tabacstop.be , le Coach Tabacstop s’adresse à des fumeurs qui désirent gérer leur arrêt tabagique à leur rythme, ne souhaitent pas un entretien face à face ou préfèrent communiquer via Internet. Une fois inscrit au service, le fumeur reçoit quotidiennement des conseils personnalisés par courriel. Il a également la possibilité de compléter un journal en ligne, de réaliser des tests ou encore d’échanger son expérience sur un forum.

Faire connaître le numéro et l’adresse du site

Grâce au soutien de la Communauté française, le spot télévisé «Arrêter de fumer, c’est possible!» a été diffusé gratuitement en mars et en juin 2010 sur AB3, La Une, La Deux, et Be TV.
Le but de ce spot était d’inciter les fumeurs, et plus particulièrement les fumeurs en situation financière précaire, à prendre contact avec Tabacstop afin d’entamer une démarche de sevrage tabagique.
Ces campagnes ont eu un joli succès puisque le nombre d’appels total reçus a quasiment doublé.
Les appelants étaient issus principalement des Provinces du Hainaut, Liège et Bruxelles.
Le public cible de ces campagnes semble avoir été atteint. En effet, le spot visait plus particulièrement le public défavorisé. Le niveau d’étude et le statut professionnel des appelants montrent que le spot a eu un impact plus élevé sur les fumeurs en situation plus précaire.
Le spot semble également avoir touché davantage les hommes que les femmes.
Les 16 – 25 ans ont été nombreux à appeler. Le spot a donc eu un impact sur les adolescents et les jeunes alors qu’on pourrait penser que dans ce public les fumeurs se seraient sentis moins concernés par la problématique et auraient moins éprouvé l’envie de prendre contact avec Tabacstop.
Lorsqu’on interroge les personnes sur l’origine de leur connaissance du numéro, ils mentionnent le spot de Tabacstop à 42% et 33% selon la campagne. Ils mentionnent aussi assez souvent la présence du numéro sur les paquets de cigarettes (respectivement 20% et 19% selon la campagne).
Quant au motif principal de l’appel, c’est bien sûr avant tout le souhait d’arrêter de fumer (respectivement 75% et 71%).
84% et 61% des appelants disent que le spot Tabacstop fournit une motivation pour se lancer dans un processus d’arrêt tabagique.
En plus de l’impact sur le nombre d’appels téléphoniques reçus par Tabacstop, le spot paraît avoir eu aussi un impact sur la fréquentation du site internet https://www.tabacstop.be . On constate en effet une augmentation des visites de l’ordre de 50% pour les périodes concernées.
Concrètement, les appels ont abouti très souvent à un projet d’arrêt. La grande majorité des appelants ont été orientés vers un tabacologue extérieur. Des inscriptions pour l’accompagnement personnalisé de Tabacstop ont également été proposées.
Compte tenu de ce succès, la campagne a été reprise en juin 2011 et le sera encore en octobre.
Régine Colot , psychologue tabacologue à Tabacstop – Fondation contre le Cancer
Adresse de l’auteure : Fondation contre le Cancer, chée de Louvain 479, 1030 Bruxelles. Courriel : rcolot@cancer.be. Internet: https://www.tabacstop.be et https://www.cancer.be .

Le sommeil

Le 30 Déc 20

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Un Belge sur quatre souffre de troubles du sommeil et c’est généralement à partir de 45 ans que cela se complique, car plus on avance en âge plus les plaintes deviennent nombreuses.
Alors que le sommeil des hommes se détériore plus tôt, ce sont les femmes qui s’en plaignent d’abord. Cela s’explique en partie parce qu’elles consultent davantage leur médecin et peut-être aussi à cause de la condition des femmes dans la société. Au–delà de 60 ans, une personne sur deux n’est pas satisfaite de son sommeil.

Méconnaissance

Comme l’a montré une enquête de la Belgian Association of Sleep Research (BASS), les Belges n’ont pas une idée très réaliste de leur sommeil. Parmi les idées reçues, on note la méconnaissance de la durée d’une nuit de sommeil qui reste invariablement estimée à huit heures pour 61% des personnes interrogées. Plus fondamentalement, les gens ignorent surtout que le sommeil se modifie au cours de l’existence, autrement dit que des changements apparaissent au fil du temps dans la qualité du sommeil. L’ignorance de ces changements physiologiquement normaux attribuables au vieillissement conduit à des malentendus qui ont des répercussions inquiétantes en matière de santé publique et plus particulièrement dans la population âgée.
Par exemple, beaucoup de gens sont persuadés qu’à l’âge adulte une bonne nuit est une nuit ininterrompue faite d’un sommeil de plomb. Or, les réveils intra-sommeil conscients peuvent apparaître vers la quarantaine. Ainsi, des phénomènes strictement normaux sont pris pour de l’insomnie. Simultanément, l’attente irréaliste insatisfaite produit des comportements contreproductifs vis-à-vis du sommeil, ce qui renforce encore les difficultés. En consultation, il est frappant de constater combien des personnes pourtant sensées peuvent se montrer bien peu ‘malignes’ en matière d’hygiène de sommeil! C’est ainsi que les Belges sont, avec leurs voisins Français, les champions de la consommation d’anxiolytiques et de somnifères. On pourrait s’interroger sur cette étonnante caractéristique probablement due à des éléments culturels et à la formation du corps médical.
Le vieil adage “Les heures avant minuit comptent double” est-il vrai ou faux?
Une nuit de sommeil comporte deux types de sommeil distincts: du sommeil lent et du sommeil paradoxal. La majeure partie du sommeil lent qui est considéré comme le plus réparateur physiquement a lieu en début de nuit. Avant l’invention de l’électricité, les gens se couchaient beaucoup plus tôt qu’aujourd’hui. Ils avaient alors l’impression d’avoir déjà très bien dormi s’ils se réveillaient après minuit.

Question de quantité…

La quantité de sommeil nécessaire pour éprouver l’impression subjective d’avoir bien dormi est variable d’un individu à un autre mais dépend aussi du besoin de sommeil. Ce dernier varie en fonction de l’âge: il est maximum chez le nourrisson, reste élevé chez l’enfant, est important chez l’adolescent puis commence à décroître avec l’âge adulte. Ce besoin est sans doute lié au développement.
La durée du sommeil dépend aussi de l’importance ou non des activités mentales et physiques diurnes, de la présence de maladie physique ou mentale, de l’état de grossesse chez la femme. Le maintien d’activités physiques et mentales tout au long de la vie y compris à un âge avancé est un gage de bon sommeil. Une retraite mal préparée ou mal assumée peut entraîner des changements radicaux de ces activités avec des effets pernicieux sur le sommeil.
L’état physiologique est un autre facteur qui affecte la durée du sommeil. Une maladie physique ou mentale peut augmenter la durée du sommeil. Les maladies aiguës augmentent généralement la durée du sommeil alors que dans certaines maladies mentales on assiste à des hypersomnies ou à des insomnies. C’est le cas, par exemple, dans la dépression.
L’état de grossesse est bien connu comme situation modifiant la quantité et la qualité du sommeil. Les modifications hormonales bouleversent la manière habituelle de dormir. En début de grossesse, un besoin impérieux de dormir se fait sentir alors qu’au troisième trimestre l’insomnie prend le dessus.
Les enquêtes révèlent que la majorité des gens (62%) dorment, en moyenne, entre 7 et 8 heures. Ils sont 13% à dormir entre 9 et 10 heures et 2% plus de 10 heures. À l’inverse, on observe un peu plus de courts dormeurs que de long dormeurs puisque 15% de la population dort entre 5 et 6 heures et 8% moins de 5 heures. Dans chacune de ces catégories, la quantité de sommeil lent profond reste identique (environ 100 minutes) parce que c’est le «cœur» du sommeil indispensable à la survie. La différence se marque par davantage de sommeil léger et paradoxal chez les longs dormeurs. Parfois, les personnes qui disent bien se porter et dormir peu font de courtes siestes dont elles ne sont pas conscientes à certains moments de la journée.
Il semble bien que la quantité de sommeil nécessaire pour un individu donné dépende davantage de caractéristiques innées que de l’apprentissage. Au cours du vieillissement la durée du sommeil est modifiée principalement à cause des éveils conscients intra-sommeil qui deviennent plus longs et plus nombreux.
Ces éveils physiologiques sont plus mal vécus par les femmes d’âge moyen ou plus âgées.
De fait, le sommeil vieillissant se caractérise par un allègement. Avec l’avancée en âge, le sommeil léger (NREM, stades 1 et 2) domine alors que le sommeil profond et très profond à ondes lentes (stades 3 et 4) diminue. Mais comme c’est, probablement, ce dernier type de sommeil qui procure la récupération physique, l’impression d’avoir bien dormi se déprécie.
Mais concrètement, le temps consacré au sommeil n’est pas véritablement modifié car, par habitude, le temps passé au lit reste identique. On peut faire l’hypothèse que la durée du sommeil est fonction d’éléments innés et acquis comme on peut le constater dans certaines familles où on peut observer une agrégation familiale du phénomène ‘mal dormir’.
Comme tant d’autres comportements, c’est au sein même de la famille que des apprentissages défectueux se transmettent, a fortiori en ce qui concerne la manière de dormir qui relève de l’intime. D’un autre côté, accepter cette hypothèse est encourageant dans la mesure où il est toujours possible d’inculquer des comportements plus favorables au sommeil par des stratégies appropriées.
Il existe une relation entre la durée du sommeil et la longévité. Un taux plus élevé de mortalité quel que soit l’âge est observé chez les très courts dormeurs (4 heures ou moins) et chez les longs dormeurs (10 heures ou plus).
Dans une étude récente en France, on a constaté que le passage à la retraite chez des personnes bénéficiant de 80% de leur ancien salaire s’accompagnait d’une diminution des troubles du sommeil, surtout chez les hommes avec une augmentation de la quantité de sommeil. La garantie de ressources suffisantes pour l’avenir lève probablement ainsi une source potentielle de tracas.
En ce qui concerne les maladies du sommeil liées à la durée, l’insomnie se caractérise, entre autres symptômes, par une plainte relative à une durée insuffisante de sommeil. Les insomniaques ont une très mauvaise perception de la durée de leur sommeil et il est courant de les entendre dire qu’ils ne dorment pas et même, pour certains depuis des années! Pourtant, l’observation objective en laboratoire de leur sommeil indique bien la présence de sommeil, mais d’un sommeil de mauvaise qualité. À l’inverse, les insomniaques ont tendance à valoriser davantage leurs périodes d’éveil. Cette perception erronée de la durée du sommeil pourrait être due à un trouble mnésique.
Par opposition, l’hypersomnie beaucoup moins présente que l‘insomnie se distingue par une durée excessive de sommeil. Elle est rare ou présente dans un tableau psychiatrique comme la dépression. Le syndrome de Kleine-Levin est une hypersomnie récurrente rare.
Si on compare la durée actuelle du temps moyen consacré au sommeil avec le passé, on constate une diminution de 1h30. Ceci correspond à un cycle de sommeil en moins chez nos contemporains. Cela serait-il en rapport avec l’apparition de l’éclairage électrique et, plus récemment, de la télévision?

… Et de qualité

La qualité du sommeil est appréciée par l’individu de manière subjective. Un être humain considère que son sommeil est de bonne qualité s’il a l’impression d’avoir bien dormi et est, selon la formule consacrée, frais et dispos au réveil. Cette bonne forme acquise grâce au repos procuré par le sommeil permet de vaquer à ses occupations pendant la journée sans trop de fatigue.
Comme on le sait, à partir de la quarantaine, des réveils conscients intra-sommeil se produisent. Selon leur nombre et leur durée, le dormeur peut penser avoir mal dormi. Il est normal de se réveiller une ou plusieurs fois par nuit. Cela ne fait que traduire l’effet du vieillissement sur le sommeil. Par contre, il est particulièrement pénible et anormal de ne pas pouvoir se rendormir assez rapidement après un éveil. Dans ce cas, la qualité du sommeil est diminuée et si cela se produit souvent la qualité de la vie est touchée.
La polysomnographie ou enregistrement polygraphique du sommeil permet d’obtenir des données objectives sur la qualité du sommeil: temps mis pour s’endormir, temps de sommeil total, efficience de sommeil, architecture du sommeil (nombres de cycles, caractéristiques des cycles), électrocardiogramme, analyse de la respiration et des apnées éventuelles, oxymétrie, débit cardiaque, électromyogramme de divers muscles. Il faut remarquer qu’il peut exister des discordances entre les éléments objectifs relevés par l’enregistrement au cours de la nuit et le discours subjectif du dormeur qui apprécie la qualité de sa nuit le matin.
L’indice d’efficience du sommeil (IES) est calculé par le rapport entre le temps de sommeil total divisé par le temps passé au lit et multiplié par cent. On parle d’insomnie à partir d’un IES inférieur à 85%, mais à partir de 70 ans, l’IES est de 79% sans être pathologique.
La mauvaise qualité du sommeil dépend de facteurs extrinsèques et intrinsèques à l’individu.
Parmi les éléments extrinsèques, l’environnement du sommeil comme la nutrition jouent un rôle. Une chambre qui n’est pas seulement réservée au sommeil n’est pas un lieu propice pour obtenir un sommeil de bonne qualité car l’environnement lui-même conditionne l’individu à son insu. Si des activités d’éveil y sont présentes, la chambre sera associée inconsciemment à l’éveil. C’est le cas si on y regarde la télévision, on y mange, on lit ou on pratique n’importe quelle autre activité qui requiert la vigilance. La seule exception concerne les rapports sexuels. Idéalement la chambre devrait être sobre et par là inviter au sommeil.
La literie joue un rôle, mais probablement pas aussi important que le prétendent les marchands. Cependant, il est évident qu’une bonne literie apporte un confort supplémentaire au dormeur. Une chambre doit aussi être régulièrement aérée et si le temps et l’environnement le permettent, il est préférable de dormir avec la fenêtre ouverte.
Chez l’être humain la température a un rythme nycthéméral (variation de + ou – 1 degré) et se trouve à son minimum vers 3 à 4 h le matin. La température trop élevée ou trop basse de la chambre influence la qualité du sommeil. La qualité du sommeil est meilleure si l’on est bien couvert, à l’exception de la tête.
Le bruit perturbe le sommeil dans tous les cas. Ceci dépend à la fois du niveau sonore et du caractère soudain et inhabituel du bruit. Mais il arrive que l’on parvienne à s’habituer à des bruits habituels en fonction du sens qu’on y accorde. À partir du moment où l’individu donne au bruit un sens négatif, le bruit devient souffrance. Les vagissements d’un bébé réveillent sa mère mais n’ont parfois pas d’influence sur le sommeil du père!
Comme le sommeil des personnes âgées est de plus en plus léger et fragile, le bruit est un facteur de réveil très présent. L’isolation phonique des bâtiments et des chambres en particulier est un impératif: le sommeil n’a t-il pas un prix?
La lumière est un stimulant et l’obscurité est l’amie du sommeil. Il est d’ailleurs plus facile de dormir dans le noir ou la pénombre que d’éviter le bruit.
Les excitants sont évidemment préjudiciables au sommeil. La caféine a une demi-vie de 5 à 7 heures en fonction de la tolérance individuelle. La théine/caféine présente dans le thé est moins excitante parce que le thé en contient moins et qu’il est préparé par infusion. Les boissons au cola riches en caféine, les boissons dites énergisantes, la nicotine du tabac et la théobromine du chocolat sont également des excitants qui peuvent nuire au sommeil en fonction de l’heure de consommation. Par précaution et d’autant que l’on a un sommeil de piètre qualité, Il est préférable de les éviter trois à quatre heures au moins avant de se coucher.
Le dernier repas de la journée peut gêner l’endormissement s’il est copieux et composé principalement d’aliments riches en protéines et en graisses. Un repas léger le soir devrait s’imposer. Idéalement, il devrait surtout être composé de glucides à index glycémique bas. Si l’alcool est bien une substance anxiolytique qui favorise l’endormissement, il altère le sommeil qui est fragmenté et agité. À la suite de la consommation d’alcool, une réduction du sommeil profond, des éveils et des cauchemars apparaissent.
Une activité physique intense peu avant d’aller dormir allonge l’endormissement et nuit à la qualité du sommeil. Il est préférable d’arrêter toute activité physique intense après 17h.
Certains médicaments contiennent également des substances excitantes qui déstabilisent le sommeil, autant bien lire les notices ou en parler avec son médecin.
L’état émotionnel dans les moments qui précèdent le coucher joue un grand rôle. C’est Shakespeare qui disait «là où loge le souci, le sommeil ne s’abat jamais». En effet, des soucis obsédants, des ruminations anxieuses créent un climat mental délétère. Les signes physiques de l’angoisse sont divers selon les individus mais la tension musculaire est très souvent présente.
Le sommeil et la tension musculaire sont incompatibles. Dormir s’est s’abandonner au relâchement. Pour tomber dans les bras de Morphée et jouir d’un sommeil réparateur il ne faut pas résister avec une cuirasse musculaire.
Curieusement, la qualité du sommeil dépend aussi de variables sociales. Dans l’ordre, les célibataires, séparés, divorcés et veufs disent avoir un sommeil de moins bonne qualité que les personnes qui vivent en couple mais ce constat vaut aussi pour l’estimation de la santé en général.
Enfin, deux maladies fréquentes altèrent la qualité du sommeil par leurs manifestations pathologiques. Il s’agit du syndrome des jambes sans repos et du syndrome des apnées du sommeil.
La sieste – qui est un pur bonheur – ne nuit pas au sommeil de nuit si on respecte les consignes suivantes: 1. elle doit impérativement se faire entre 12 h. et 15h. car cela correspond à une propension à dormir en fonction des rythmes biologiques; 2. elle ne doit pas être supérieure à 30 minutes.
Il existe aussi la sieste-flash, plus courte. Le peintre catalan Salvador Dali était un adepte de cette sieste. Son truc? il recommandait de s’installer confortablement dans un fauteuil (espagnol de préférence!) avec une clé dans la main et une assiette au sol, sous la clé. Dès que le sommeil s’approfondit le relâchement musculaire fait tomber la clé dans l’assiette et le bruit réveille.

Bien se connaître pour bien dormir

Pour conclure, s’il n’est pas possible de changer de catégorie de dormeur (moyen, court, long) à laquelle on appartient probablement parce que cela dépend de conditions innées, il est possible d’en faire varier la durée et d’en améliorer la qualité.
Si on n’est pas satisfait de son sommeil, il est raisonnable d’examiner jour après jour ses comportements individuels en termes d’activités physiques et mentales, de repas, de prises d’excitants et d’alcool, d’environnement de sommeil et d’état émotionnel avant le coucher.
Ne pas perdre de vue que des facteurs d’environnement interviennent également. Il est bon de faire de sa chambre un lieu paisible exclusivement réservé au sommeil.
À cela s’ajoute la préparation au sommeil. Celle-ci débute une heure avant l’heure du coucher. Elle consiste à produire des comportements favorables au sommeil et à supprimer le plus possible ce qui lui est néfaste. Par exemple, réduire très progressivement tout type d’excitation ou de contrariété, boire une petite tasse (pour ne pas devoir se lever la nuit et se rendre aux toilettes) de tisane aux plantes soporifiques, se détendre physiquement et mentalement, lâcher prise progressivement pour se coucher dès les premiers signes du sommeil. En cas de réveil, s’il s’avère que l’on est incapable de s’endormir, il convient de ne pas faire trop d’efforts pour dormir à tout prix car tout effort génère une tension physique et psychique qui va empêcher le retour du sommeil. C’est plutôt le moment de pratiquer la relaxation ou la visualisation et de se laisser surprendre par le sommeil. Il vient toujours à l’improviste.
Contrairement aux idées reçues, aucun médicament ne procure un sommeil naturel de qualité. Les anxiolytiques et les somnifères, mêmes les plus récents, sont des médicaments utiles dans des situations aiguës comme l’insomnie transitoire mais ne conviennent pas à un usage chronique. Le vrai problème est que ces substances puissantes sont anti-éveils et confortent l’idée mythique que chacun se fait encore de son sommeil.
Bien vieillir n’est-ce pas s’adapter à des conditions nouvelles? Accepter de dormir autrement en est une. Si ces conseils ne suffisent pas il faut savoir qu’il existe un traitement sans médicament de l’insomnie chronique étayé par de nombreuses études. Ce traitement est encore peu répandu principalement faute de praticiens compétents. Mais une formation spécialisée est maintenant proposée aux médecins généralistes, psychologues, kinésithérapeutes, bacheliers en soins infirmiers et en ergothérapie.
Guy Adant , licencié en éducation pour la santé post-gradué en santé mentale, formateur

Comportements quotidiens et habitudes qui peuvent interférer avec le sommeil

Pratiques qui réduisent le besoin homéostatique au moment du coucher
•activité insuffisante durant la journée
•être resté couché à se reposer durant la journée

Habitudes liées au sommeil
•faire des siestes, somnoler durant la journée ou la soirée
•être semi-éveillé durant la soirée
•dormir beaucoup les week-ends Pratiques qui perturbent la régularité du rythme circadien
•exposition insuffisante à la lumière le matin entraînant un retard de phase
•exposition trop précoce à la lumière le matin avec avance de phase Habitudes liées au sommeil
•horaires de sommeil irréguliers
•sommeil matinal les week-ends Pratiques qui augmentent le niveau d’éveil
•fumer durant la soirée
•consommation excessive de caféine ou trop tard pendant la journée
•consommer de l’alcool le soir
•faire de l’exercice tard le soir
•dernier repas trop tard ou trop de liquide ingéré (peut causer un reflux-gastro-oesophagien ou des mictions fréquentes)
•rentrer tard le soir, traînasser avant de se mettre au lit Habitudes liées au sommeil
•appréhension quant au sommeil durant la soirée
•s’éveiller en se préparant à aller au lit
•pas de routines avant le sommeil
•parler au lit de choses stressantes
•regarder la TV, lire, s’engager dans des comportements incompatibles avec le sommeil avant d’éteindre les lumières, tomber endormi avec la radio ou la TV
•faire des efforts pour s’endormir
•regarder l’heure durant la nuit
•rester au lit durant les éveils nocturnes prolongés ou rester longtemps éveillé au lit le matin
•dormir dans un environnement de sommeil inadéquat: partenaire qui ronfle, bruits, lumière vive le matin ou animaux dans la chambre. Adapté de Yang CM, Spielman AJ, Glovinsky PB. Nonpharmacologic strategies in the management of insomnia. Psychiatr Clin North Am 2006;29(4):900; with permission, in Glovinsky A. et al. Nonpharmacologic strategies in the management of insomnia, rationale implementation.Sleep Medicine Clinics, 2008, Vol. 3. N°2. (traduit par Guy Adant)

Si l’insomnie transitoire peut bénéficier d’un traitement pharmacologique, on ne peut, en principe, soigner une insomnie chronique avec des médicaments (somnifères et/ou anxiolytiques). Le traitement de référence est un traitement psychologique fondé sur une approche cognitivo-comportementale. Il consiste d’abord à analyser l’insomnie en fonction d’antécédents immédiats (les événements diurnes qui précèdent le problème), d’en répertorier les conséquences pour l’insomniaque et son entourage et de prendre en compte les antécédents historiques (histoire de l’insomnie, caractéristiques personnelles). Cette analyse est généralement complétée par la tenue d’un agenda de sommeil et par des réponses recueillies grâce à des questionnaires validés.
Le traitement proprement dit consiste à fournir à l’insomniaque d’une part des moyens de lâcher-prise et d’autre part rectifier les croyances erronées à propos du sommeil pour dissiper toutes les fausses interprétations. Ce traitement est basé sur des niveaux de preuves (evidence based medicine (1)) depuis 1994.
G.A.

(1) Le concept d’Evidence-based medicine (EBM) ou médecine basée sur le niveau de preuve est issu des travaux de Cochrane, un épidémiologiste écossais (1972), puis formulé tel qu’il existe aujourd’hui au Canada en 1980.
Il est frappant de constater qu’encore aujourd’hui, certaines pratiques médicales ne sont pas fondées sur des preuves scientifiques mais font partie de l’art médical où l’intuition du praticien, son expertise et/ou la tradition, sont des éléments dominants.
Le principe de l’EBM est de fournir au patient le traitement le plus efficace en fonction des risques et avantages. Ce traitement est basé sur des niveaux de preuves scientifiques hiérarchisés. Du niveau le plus haut au niveau le plus bas, on trouve les conclusions de méta-analyses, les essais contrôlés randomisés, les études de cohorte, les études de cas témoins, et les avis d’experts.
La médecine fondée sur le niveau de preuve ne remplace pas la médecine basée sur le jugement ou l’expérience du médecin (art médical) mais la complète adéquatement (G.A.).

Vaccination contre le papillomavirus et politique de santé publique

Le 30 Déc 20

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Le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a décidé d’entamer cette année, dans les écoles de Wallonie et de Bruxelles, la vaccination des jeunes filles contre le cancer du col de l’utérus. Pour Ecolo, cette politique de vaccination pose question et risque de poser problème.
Cette décision induit un coût de 600.000€ à charge du budget communautaire pour un bénéfice-santé escompté évalué à 70 % de réduction des lésions de cancer du col.
Rien n’est cependant moins sûr. Aucune démonstration n’a été faite de l’efficacité, au-delà de 7 années, de ce vaccin qui doit être administré avant les premiers rapports sexuels. Ainsi, au mieux, la jeune fille vaccinée sera partiellement protégée jusqu’à l’âge de 20 ans et ce, avec un niveau de protection imprécis.
Le monde scientifique s’accorde pour dire que les données manquent au sujet de la vaccination contre le papillomavirus et que le recul est insuffisant pour évaluer et préciser des effets positifs ou indésirables à terme.
Ces éléments avaient jusqu’ici conduit légitimement la Communauté française à une posture réservée vis-à-vis de ce vaccin, privilégiant l’information et la promotion du dépistage qui sont, à l’évidence, les meilleurs moyens de prévention du cancer du col.
La position du gouvernement a basculé au lendemain de la décision de la Flandre de se lancer dans cette aventure, en offrant le vaccin gratuitement aux écolières, et la ministre francophone justifie la décision récente par de nouvelles marges budgétaires et une diminution du prix des vaccins, aucun autre paramètre n’ayant évolué.
Si le Conseil supérieur de la santé propose d’inclure le vaccin contre le papillomavirus dans son programme de vaccination, le KCE (Centre fédéral d’expertise des soins de santé) est, lui, plus mitigé (avis de 2007).
Le Répertoire commenté des médicaments de la Santé publique termine même ses commentaires à ce sujet d’une manière assez claire : « l’effet éventuel de la vaccination sur l’apparition d’un cancer du col de l’utérus avec les vaccins actuels est plus faible que celui d’un dépistage cervical bien planifié ».
D’évidence la posture initiale privilégiant l’information et le dépistage dans un programme structuré offrait un cadre plus rationnel à la prévention du cancer du col de l’utérus que l’utilisation du vaccin contre le papillomavirus, aux effets potentiellement positifs à court terme, mais clairement limités. L’illusion de son efficacité, le sentiment de sécurité induit par le vaccin risquent en outre de freiner le recours au dépistage.
Fondamentalement, en cette période de forte contrainte budgétaire, il nous semble que l’appréciation des choix d’investissements en matière de prévention doit nécessairement s’appuyer sur une évaluation solide de leur impact sur la santé.
En l’occurrence, pour ce qui concerne la prévention du cancer du col de l’utérus, il importe de hiérarchiser les stratégies d’action : information contradictoire et claire, accès favorisé au dépistage et puis, option vaccinale. Ces stratégies ont des coûts et des bénéfices à évaluer dans la transparence et avec une indépendance optimale.
Plus largement, Ecolo s’interroge sur les moyens d’aide à la décision que se donnent les pouvoirs publics dans le champ de la santé publique en général et dans le domaine des vaccins en particulier : quels sont les déterminants de la décision ? L’opportunité budgétaire, les lobbies commerciaux, l’expertise, la pression médiatique… ? Autant de paramètres qui pèsent dans les choix et pas toujours au bénéfice unique de la santé publique…
Ecolo plaide donc pour que les acteurs du monde politique et de la société civile initient une réflexion sur l’amélioration de la gouvernance dans ce domaine et sur la mise en place d’outils et de procédures qui en accroissent la qualité au bénéfice de la collectivité.
Jacques Morel et Patrick Dupriez , députés Ecolo

Comment aborder la prévention en médecine générale? Rencontres entre médecins généralistes et patients

Le 30 Déc 20

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Comment aborder la prévention en médecine générale? Voilà la question que l’asbl Promo Santé et Médecine Générale (PSMG) avait envie de poser à la fois à des médecins généralistes et à des patients.

Une opportunité, la sortie du DMG+

La sortie récente du DMG+, le volet prévention du Dossier Médical Global, en faisait effectivement un sujet d’actualité. Quels messages seraient diffusés aux médecins généralistes pour leur donner envie et leur faciliter l’abord de la prévention avec les patients?
Parallèlement à une recherche de littérature, PSMG a décidé de réunir un groupe de médecins et de patients pour réfléchir à la question. La Ligue des Usagers des Services de Santé (LUSS), fédération indépendante des associations de patients en Communauté française, a été contactée pour, ensemble, réfléchir et construire ces rencontres.
La LUSS est évidemment très preneuse de ce type de rencontre d’une part pour développer avec les usagers des aspects de promotion de la santé et de prévention et d’autres part pour initier le débat entre deux acteurs qui se retrouvent rarement dans des conditions comme celles-là.

La rencontre entre deux mondes

La décision a été prise de réunir 6 médecins et 6 patients deux samedis matins. Pas trop de monde pour faciliter les échanges, pas trop de rencontres pour ne pas annihiler nos chances de recruter des volontaires… Une des conditions pour l’invitation des patients était la nécessité d’avoir un médecin généraliste. Du coté des médecins, ce sont des praticiens travaillant en solo plutôt qu’en maison médicale qui ont été invités afin que les messages soient adaptés à la réalité du plus grand nombre.
Au final, 7 médecins généralistes et 5 patients se sont retrouvés lors des rencontres co-animées par la LUSS et PSMG en octobre et novembre 2010.
Premier constat: les uns et les autres sont contents de pouvoir se rencontrer dans ce contexte, en dehors de la consultation. Le dialogue se libère et permet d’entrevoir l’autre dans un cadre différent.

Des pistes à diffuser

Les jeux de rôle et débats utilisés pour atteindre l’objectif de départ ont permis à la fois à PSMG et à la LUSS de dégager d’intéressantes pistes de travail pour l’avenir.
Outre la mise en perspective des réalités de chacun, des recommandations d’attitudes à adopter sont ressorties. Celles-ci, classiquement connues, sont essentiellement adressées aux médecins généralistes et vont dans le même sens que ce que PSMG a pu récolter dans sa recherche de littérature.
Loin d’être spécifiques à la seule prévention, beaucoup de recommandations concernent la relation médecin-patient en général:
-la nécessité d’ être à l’écoute du patient, de ses attentes et de ses préoccupations;
-la nécessité de rendre acteur le patient, de l’impliquer et de reconnaître son expertise;
-la nécessité de l’ informer de manière personnalisée, avec un langage approprié et en fonction de ce qu’il sait déjà, s’assurer que le patient a bien compris;
-la nécessité de respecter le rythme du patient; accepter, par exemple, le choix pour le patient de ne pas envisager d’arrêter de fumer pour le moment;
-la nécessité de valoriser le patient et d’être non culpabilisant;
-la nécessité de prendre en compte l’ entourage du patient.
Concrètement, les participants ont dégagé des pistes simples mais utiles à rappeler qui pourront aider les médecins généralistes à aborder la prévention:
être pro-actif : tirer profit du motif de consultation ou de la saison mais également parler de prévention lors de contacts pour un autre motif (renouvellement d’ordonnance par exemple), proposer des consultations de prévention;
s’organiser : prévoir des plages horaires pour la prévention, tirer parti des logiciels, utiliser des échéanciers;
-rassembler les outils existants.
Des slogans ont même été imaginés.
Pour les médecins: «Je prends du temps pour mon patient, j’en gagne pour nos avenirs».
Pour les patients: «Dans le cadre de la prévention, je dégage du temps, je m’organise avec mon médecin traitant, je gagne en qualité de vie».
Ces préceptes rejoignent également les principes de base de la promotion de la santé tels que les prévoit la Charte d’Ottawa.
La difficulté est pour les uns comme pour les autres de les mettre en œuvre concrètement mais la volonté est là, indéniablement! Et ceci est certainement un des enseignements principaux que nous pouvons retirer, LUSS et PSMG, de ce projet: la volonté de travailler ensemble et de s’améliorer même si bien sûr sur certains points bien précis, des questionnements, voire des divergences sont encore présents, entre autre en ce qui concerne l’information des patients. Quelles sont les limites de l’information? En fait, doit-on y mettre des limites? Quelles sont les informations que le patient veut recevoir? Jusqu’où le médecin doit-il/veut-il aller? Doit-on informer au-delà de la consultation proprement dite?
Une question à ce propos: jusqu’où informer les patients des conséquences des dépistages qu’on leur propose? À ce stade, il n’y a pas de consensus sur la question. Cela reste un débat important entre professionnels et patients.
Ces questionnements vont permettre à la collaboration de continuer, avec pour objectif de proposer aux médecins généralistes des pistes qui pourront à la fois les soutenir dans leur travail au quotidien et correspondre à ce dont les patients ont besoin.

Ne pas oublier les associations de patients

Un message fort des patients aux médecins est celui de faire le lien entre le patient et les associations de patients. Rappelons ici que nos patients, recrutés par la LUSS, étaient tous membres d’associations de patients. Les associations de patients peuvent collaborer utilement avec les médecins généralistes dans le sens où elles réalisent des missions d’information, de soutien et d’entraide.

Valérie Hubens , Promo Santé & Médecine Générale et Carine Serano , LUSS asbl
Adresses des auteures
Promo Santé & Médecine Générale, c/o SSMG, rue de Suisse 8, 1060 Bruxelles. Courriel: coordination@promosante-mg.be. Internet: https://www.promosante-mg.be
Ligue des usagers des services de santé, av. sergent Vrithoff 123, 5000 Namur. Courriel: luss@luss.be. Internet: https://www.luss.be

La prévention sanitaire et ses excès

Le 30 Déc 20

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« L’œil de l’enfant retire de la contemplation du monde des émotions et des pressentiments qui feraient honte à bien des découvertes conquises de haute lutte par l’esprit de l’homme mûr. » (Hölderlin)
La prévention des grands ‘maux’ contemporains, tabac, alcool, drogues, excès alimentaires, s’efforce d’atteindre l’idéal de sécurité absolue pensé par une société obsédée par le risque zéro. Mais l’être humain ‘résiste’, et le culte de la prévention n’atteint pas ses objectifs et ne va pas non plus sans dysfonctionnements éthiques.
Le vendredi 23 septembre 2011, le sociologue Patrick Peretti-Watel , auteur récemment avec Jean-Paul Moatti du remarquable livre «Le principe de prévention, le culte de la santé et ses dérives» (1) était présent à Bruxelles pour échanger sur ces questions, à l’invitation du FARES, d’ Éducation Santé et de l’asbl Question Santé. Il les aborda le matin pendant un séminaire et l’après-midi au cours d’une conférence.

À la croisée de la promotion de la santé et de l’éducation permanente

Comment ‘réinventer’ la prévention, qui semble se trouver aujourd’hui dans une impasse biomédicale peu féconde, à la fois normative et sans véritable prise sur les principaux déterminants de la ‘bonne’ ou ‘mauvaise’ santé?
Le séminaire du matin apporta un début de réponse à cette question cruciale, en nourrissant les réflexions de la vingtaine de participants de l’éclairage apporté tant par la promotion de la santé que par l’éducation permanente.
Animée par Bernadette Taeymans (Question Santé), la matinée permit notamment la relation par Taous Hassaini , assistante sociale au CPAS de Morlanwelz, d’une expérience de remise dans le mouvement du marché de l’emploi de bénéficiaires d’un revenu d’insertion au départ d’animations… sur la santé. À première vue, rien de plus éloigné des préoccupations quotidiennes de personnes en situation précaire que cela. Et pourtant, grâce à un patient travail sur l’estime de soi nourri aux valeurs émancipatrices de l’éducation permanente, cela marche, jusqu’à l’obtention de résultats positifs en termes d’insertion et, fait plus remarquable encore, de pérennisation des emplois (re)trouvés.
Cette stratégie indirecte semble d’autant plus intéressante dans un climat de méfiance générale des populations et des travailleurs en particulier à l’égard des initiatives préventives des pouvoirs publics, soupçonnés d’être plus motivés par l’entretien des ‘outils de travail humains’ que par une protection désintéressée de la santé publique, comme le soulignait Patrick Peretti-Watel dans un de ses judicieux commentaires.
Cela dit, si tout le monde pouvait s’accorder sur la haute valeur à accorder à l’éducation permanente en santé, cela n’empêche nullement de rester lucide quant à ses limites, par exemple quant au petit nombre de bénéficiaires de ses interventions pour guider leurs choix de vie de façon éclairée, ou encore le risque de tomber d’un excès de manipulation à une ‘liberté de décider’ exagérée, qui peut s’avérer nocive elle aussi.

Pour une prévention plus éthique

Dans sa conférence de l’après-midi, donnée devant une bonne cinquantaine de personnes, le sociologue rappela la pertinence des méthodes d’observation pour la santé publique, ironisant sur le fait que l’option constructiviste de la recherche en sciences humaines est souvent perçue comme peu… constructive par les autorités politiques.
Son exposé porta essentiellement sur quelques idées fortes défendues dans son livre, pas nécessairement d’une originalité bouleversante, mais exposées de manière limpide, par exemple la confusion entre le bon et le beau, le malsain et le laid, ou encore la stigmatisation des conduites dénoncées comme dangereuses. Le tout illustré de nombreux visuels souvent spectaculaires, comme cette image d’un homme obèse étranglé par un chapelet de saucisses (‘Obesity is suicide’) pour mettre en garde le gros (à moins que ce soit grand!) public contre les risques associés au surpoids…
Il eut aussi cette jolie formule: ‘La prévention montre les gens du doigt plutôt que de leur tendre la main’. Propos sans doute un peu injuste, mais néanmoins toujours d’actualité de nos jours, les exemples foisonnent.
Il rappela aussi cette évidence que la prévention est souvent le cheval de Troie pour des valeurs conservatrices, notamment en termes d’éducation sexuelle, et que la prévention s’adresse le plus souvent à un personnage de fiction, l’ homo medicus , rationnel, calculateur, autonome, capable de se projeter dans l’avenir et préoccupé fortement par sa santé.
Le propos du conférencier n’était pas pour autant de prôner la liberté sans entrave et sans nuance et de rejeter toute forme de prévention. Ce serait tomber dans le piège dénoncé par un participant, qui rappelait que la valorisation de la liberté de choix et du droit au plaisir sont aussi une stratégie très ancienne, et d’une redoutable efficacité, de l’industrie du tabac, dont la capacité de manipulation perverse est sans égale.
Mais Patrick Peretti-Watel revendique que cette prévention moderne soit plus éthique, plus légitime, plus efficace, et moins médicale… Ce dont il aura convaincu aisément la plupart de ses auditeurs (2).
Pris par son sujet, le conférencier n’eut malheureusement pas le temps de s’attarder sur le domaine spécifique de la lutte antitabac, ce qui eût été bienvenu au FARES… Ce sera peut-être pour une prochaine fois!
Cette journée particulièrement stimulante se termina par le verre de l’amitié à l’occasion des 30 ans d’existence de Question Santé, à laquelle l’auteur de ces lignes rendit un hommage bien mérité! (3)
Christian De Bock
(1) Paru en novembre 2009 au Seuil dans la collection La République des Idées. En vente dans toutes les bonnes librairies!
(2) Nous espérons pouvoir vous proposer son texte dans un de nos prochains numéros.
(3) Voir dans ce même numéro le texte ‘Des questions sans réponse? Encore heureux!’

Vers une représentation professionnelle en promotion de la santé

Le 30 Déc 20

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Au Perron de l’Ilon(1)à Namur, le jeudi 7 juillet 2011 de 10h30 à 12h.

Les premiers résultats diffusés de l’évaluation du dispositif de santé de la Communauté française confirment un constat de longue date: la difficulté pour les professionnels de promotion de la santé de se donner une visibilité suffisante, de faire entendre et de faire comprendre par les représentants politiques au plus haut niveau, mais aussi parfois par des collègues ou des responsables au sein de leurs propres institutions, le sens de leurs actions de même que les conditions nécessaires pour les mener avec qualité et efficacité.
Et pourtant quand l’occasion leur est donnée d’échanger, des personnes de toutes professions, de différents niveaux territoriaux, de différentes thématiques et surtout de secteurs diversifiés partagent des projets de société en synergie avec les finalités et les stratégies de la promotion de la santé.
Si, parmi ces professionnels, les clivages entre le monde médical, le monde social, le monde éducatif et culturel s’effacent, les regards extérieurs sur la promotion de la santé restent largement dominés par une vision curative et biomédicale. Les volontés d’actions communes se heurtent à de nombreux obstacles administratifs ainsi qu’à une difficulté d’appropriation par la plupart des mandataires politiques.
Actuellement le secteur spécifique de la promotion de la santé se voit fondamentalement remis en cause et risque d’être ramené vers des modèles qui ont montré leurs limites, centrés sur l’éducation sanitaire et la prévention médicalisée. Les processus de participation, de concertation, de construction ascendante (‘bottom up’), intrinsèquement liés à la promotion de la santé, pourraient être fortement entravés par un cadre de gestion trop programmatique.
Certains acquis construits au fil de l’histoire ont contribué à développer la qualité des pratiques en promotion de la santé dans un cadre souple; ainsi en est-il par exemple de la mise à disposition d’un soutien méthodologique diversifié, gratuit et indépendant de l’autorité qui contrôle et subsidie… Il importerait de pouvoir capitaliser sur ces éléments qui ont fait de la Communauté française, maintenant appelée Fédération Wallonie–Bruxelles, un exemple souvent cité à l’étranger. Réciproquement, la Fédération Wallonie-Bruxelles pourrait s’inspirer d’expériences récentes, développées dans d’autres pays ou régions, pour améliorer encore son organisation.
Dans ce contexte, disposer d’une association professionnelle en promotion de la santé offrirait un lieu d’échanges aux nombreux professionnels de tous horizons qui prennent pour référence la promotion de la santé. Elle représenterait aussi un outil (actuellement inexistant) pour porter la voix de ces professionnels vers l’extérieur, indépendamment de leurs institutions d’appartenance ou de leur secteur de référence. Cette association s’adresserait en effet à tout professionnel qui développe des actions de promotion de la santé (au sens de la Charte d’Ottawa), qu’il soit ou non subsidié dans ce cadre par la Communauté française. On pourrait par exemple y retrouver des personnes travaillant à l’intersection de la promotion de la santé, de la prévention et des soins, de la cohésion sociale, de l’égalité des chances, du développement durable, de la jeunesse ou de la politique des aînés, etc.
Dans ce contexte, les signataires de la présente vous proposent de participer le 7 juillet prochain à une séance de travail où seront explorées diverses pistes menant à la constitution d’une association professionnelle en promotion de la santé dans les meilleurs délais possibles. À cette occasion, il n’y aura donc pas encore de proposition formelle d’adhésion ou de statuts. En effet, malgré l’urgence, nous sommes soucieux de rester dans une démarche de construction commune, terreau de la promotion de la santé. Nous proposerons à la discussion une série de scénarios ouverts concernant la définition du statut juridique de l’association, de son objet, de ses membres, de son nom, d’une éventuelle charte d’adhésion, etc.
Si vous êtes intéressé à participer à cette rencontre exploratoire, pourriez-vous le signaler par mail auprès de Christian de Bock, revue Éducation Santé , afin que nous prévoyions des modes d’animation de la réunion adaptés au nombre de personnes attendues et que nous vous envoyions des documents préparatoires.
Gaëtan Absil (Apes-Ulg), Benoît Dadoumont (CLPS de Namur), Christian De Bock (rédacteur en chef d’Éducation Santé), Martin De Duve (Univers Santé), Michel Demarteau PhD (Observatoire de la Santé du Hainaut), Yves Gosselain (Fédération des maisons médicales et des collectifs de santé francophones), Dr . Jean Laperche (asbl Promo Santé et médecine générale), Dr . Lise Maskens (APMS), Marie Christine Miermans (PROVAC), Chantal Vandoorne (Apes-Ulg), Catherine Vanesse et Nicolas Menschaert (Fédération laïque de centres de planning familial), Catherine Végairginski (CLPS de Bruxelles)
Pour manifester votre intérêt, envoyez dès que possible un mail à christian.debock@mc.be avec les informations suivantes : nom et prénom, adresse, téléphone, adresse de courriel, fonction actuelle en promotion de la santé.
Veuillez préciser dans votre message si vous participerez à la réunion du 7 juillet 2011 à Namur, ou, dans le cas contraire, si vous êtes intéressé(e) par une telle association et souhaitez être informé(e) du suivi de cette rencontre exploratoire.

(1) Le Perron de l’Ilon est situé place l’Ilon 17, à deux pas de la place du théâtre et de la place d’armes, dans le centre de Namur.

Aborder les souffrances et les peurs du tout-petit

Le 30 Déc 20

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Certaines histoires de vie, ainsi que certains livres ne se terminent pas toujours par «Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants». Pour de nombreux enfants malheureusement, cette phrase semble appartenir au passé. Quand la maladie ou la mort frappe une famille, une nouvelle page de vie s’ouvre, et ce qui s’écrira sur cette page ne sera plus jamais comme avant. Martine Hennuy, Nathalie Slosse et Sophie Buyse ont choisi d’en parler aux jeunes enfants, au travers de livres illustrés.

Quand l’enfant rencontre… la maladie

Les enfants veulent savoir, comprendre et connaître la vérité. Quand on leur cache des choses, pensant les préserver, ils pressentent un climat de danger au travers de phrases chuchotées, de conversations étouffées, de visages angoissés; cela contribue à alimenter leurs peurs, leurs fantasmes et la création de réponses imaginaires plus terrifiantes encore que les secrets eux-mêmes.
Si l’enfant doit savoir, il a besoin de réponses adaptées à son âge, à sa sensibilité, à sa maturité. Le mettre en position d’adulte en lui donnant des explications trop médicales serait lui faire violence et le figer du côté du réel, alors que bien souvent il puise ses ressources dans l’imaginaire, où un monde fantastique peuplé de héros, de princes et de princesses, cohabite à côté de la réalité, en parfaite symbiose avec celle-ci.
L’enfant ne reproduit jamais à l’identique, il réinvente, il crée, il écrit une autre histoire. S’il multiplie les scénarios, c’est pour se confronter émotionnellement à toutes sortes de dénouements, des histoires qui finissent bien et d’autres qui finissent mal. L’enfant n’est pas dupe de son récit, il sait bien qu’il fait semblant, qu’il joue, que «c’est pour du faux». Il a plaisir à entrer et sortir de ses histoires, il n’est ni victime, ni prisonnier de ce qu’il raconte car face à ce qu’il ne peut décider et contrôler dans la réalité, à savoir la maladie du parent, il a l’illusion de maîtriser l’histoire qu’il vient d’inventer. Il devient maître de la destinée de ses personnages et ce pouvoir sur eux le soulage quand il n’a plus prise sur les événements douloureux de sa vie.
Là où certains enfants vont fuir dans le monde imaginaire, d’autres au contraire se réfugieront dans le connu. Quand la maladie et l’hospitalisation entraînent un surcroît de réel dans la vie de l’enfant, tout son quotidien est bouleversé, il perd ses repères, mais aussi un peu de sa capacité de rêverie. Il peut avoir l’impression que les monstres des histoires sont sortis des livres ou de la télévision pour passer dans le monde réel et attaquer son parent. Découvrir que les fées, Saint-Nicolas et le monde enchanté n’existent pas est très décevant. C’est comme si on lui enlevait ses rêves, ses illusions et son insouciance. S’il n’y a pas de baguette magique pour sauver papa ou maman, que va-t-il devenir?
L’enfant peut, en réaction, développer des conduites névrotiques; il va s’accrocher de façon obsessionnelle à la réalité, contrôler la place des objets, nettoyer, ranger, se figer dans des rituels répétitifs, craindre les imprévus, la nouveauté, etc. Un enfant «adultifié» par la maladie de son parent peut se fixer du côté du réel: il ne joue plus, il prend tout en charge dans la maison, s’occupe des petits frères, prépare le repas, comme si l’enfance avait brutalement disparu de sa vie. Voir un enfant devenu si sage, si obéissant, si studieux à l’école, ce qui du point de vue des parents peut sembler rassurant, peut en réalité être le comportement d’un enfant qui a évacué ses désirs, ses frustrations, par un comportement hyper adapté à la réalité. Toutes les émotions négatives sont refoulées, et risquent de réapparaître de façon beaucoup plus violente plus tard. C’est pourquoi il est essentiel pour l’enfant de pouvoir extérioriser ses sentiments par des actes libératoires.

…la mort

En matière de mort, nous n’avons aucune certitude, juste des croyances qui vont elles-mêmes évoluer en fonction de nos expériences de vie et de nos propres confrontations à la mort. C’est sans doute pourquoi il est si difficile de l’aborder avec les enfants.
Pourtant, très tôt, l’enfant va s’interroger sur la mort. Tant qu’il n’y a pas été confronté, elle reste pour lui un mystère, une réalité lointaine. Avant 6 ans, il acquiert d’abord la notion de «séparation», il va plutôt considérer la mort comme un «sommeil prolongé». Il va jouer la mort et mettre en scène sa conception, comme un phénomène passager et provisoire. Il va ensuite acquérir les notions de perte des fonctions vitales, d’irréversibilité, vers l’âge de 8 ans: « La mort , c’est quand on ne respire plus », « On a mis papa dans une boîte et on l’a brûlé ».
Les attitudes des parents vont influencer l’élaboration du concept pour l’enfant, qui posera des questions uniquement s’il sent qu’il peut obtenir des réponses sans blesser ses proches.
La manière dont l’enfant va vivre ses premières expériences de confrontation à la mort va également en influencer sa perception et sa compréhension. L’enfant confronté très tôt à la perte d’un proche comprendra d’autant plus vite la notion de «plus jamais» et ses questionnements seront plus précoces. Ainsi, ce que pense l’enfant de la mort, ce qu’elle suscite en lui, va sans cesse évoluer au fil de son vécu.
Ce que l’enfant imagine de la mort dépend enfin de ses croyances et des conceptions philosophiques du groupe auquel il appartient. Suivant sa culture, la société dans laquelle il vit et ses besoins, il faudra réinventer des rituels (pas forcément religieux) qui constituent un geste ou un ensemble de gestes permettant d’apaiser l’intensité des sentiments qu’il ressent. Ainsi, il est important de poser des actes concrets pour apaiser son chagrin, de fixer un cadre sécurisant (créer une boîte à chagrin, lâcher un ballon…).
Puisque très vite, l’enfant perçoit que la mort inquiète les adultes, quel que soit son âge, il est important de le laisser «dire» sa vérité, son ressenti, sans lui apporter de réponse toute faite.

Le livre, support d’expression entre réalité et imaginaire

Dans les deux livres «Alice au pays du cancer» et «On va où quand on est mort?», les auteurs ont souhaité tenir compte du vécu de l’enfant dans la réalité mais aussi dans son univers imaginaire et symbolique. La lecture des livres avec l’enfant l’emmène en voyage dans son monde intime, il parcourt, à la suite d’Alice ou de Diego, les trois registres du réel, de l’imaginaire et du symbolique.
L’arbre de la connaissance dans Alice, qui répond aux questions, apporte une dimension à la fois symbolique et sacrée. L’enfant s’adresse à l’inconnu, au mystère, à ce qui le dépasse. Cet arbre de la connaissance entretien le lien de l’enfant avec son monde irrationnel. Quand les éléments de la réalité deviennent trop effrayants, il peut être bénéfique pour l’enfant de se créer sa propre fiction.
Diego, dans «On va où quand on est mort?» trouve aussi un réconfort grâce à son animal totem, le lièvre, apparu dans ses rêves et qui lui suggère de construire son temple du souvenir. L’animal de pouvoir, comme l’appellent les chamanes ou les scouts, est l’animal auquel l’enfant peut à la fois s’identifier, se projeter, poser ses questions et confier ses craintes. Les plus petits s’entretiennent avec leur peluche. Pendant ce dialogue intime, ils n’hésitent pas à soigner l’ours malade, le consoler, le punir ou se fâcher contre lui.
Pour les enfants plus petits, le livre «Grand arbre est malade» déplace la maladie sur un arbre attaqué par les vers ou dans un jardin envahi de mauvaises graines. Les tout-petits comprennent et acceptent plus facilement un récit qui transforme la réalité, par exemple une histoire qui parle d’un arbre, d’un jardin, ou d’un animal, plutôt que la confrontation directe avec un personnage humain. Ce déplacement permet d’atténuer la peur, d’amener progressivement des éléments du vécu émotionnel de l’enfant sans qu’il ne se sente menacé par des propos trop directs, trop proches de son monde intérieur.
Le livre est un support (parmi d’autres) qui propose aux enfants un espace d’expression. Il permet de les aider à élaborer leurs propres réponses à leurs questions et observations, par la discussion et le partage. Il permet d’accompagner l’enfant. Il lui propose d’extérioriser ses émotions de colère, de tristesse, de peurs, par identification à Alice qui jette son ours contre le mur ou qui tape sur la pierre qui parle quand elle lui dit de sortir toute sa rage, ou au petit Diego qui a perdu son papa et qui souffle tout son désespoir dans de gros ballons rouges qui s’envolent avec un peu de son chagrin.
Ces images, véhiculées par les livres, en font un véritable outil thérapeutique car ces passages d’expression des émotions et d’évacuation de la détresse sont ceux que les enfants préfèrent. Ils comprennent le sens et la charge symbolique de ces actions.
Le livre est une «passerelle sur les épreuves de la vie». Il permet une vision à distance, un recul sur le problème. Il aide l’enfant à ne pas être absorbé par la maladie ou la mort de son parent, il l’aide à franchir l’obstacle en sachant qu’il n’est pas seul, qu’il a ses propres ressources. Le livre est un outil de création parmi d’autres pour lutter contre la destruction, la dépression. Il met des couleurs sur les images tristes, des mots sur les douleurs, de la poésie et des métaphores, là où les termes médicaux sont très réducteurs. Il facilite l’échange avec le parent sur les thèmes effrayants et inquiétants comme les mots «cancer», «chimio», «tumeur», «mort». C’est d’ailleurs volontairement, que les auteurs ont inséré les mots «cancer» et «mort» dans les titres des ouvrages, pour ne pas se cacher du sujet qui va désormais occuper la première place dans le psychisme du parent souffrant et de son enfant.
Les enfants sont immédiatement attirés par ces livres car ils perçoivent qu’ils abordent des sujets de «grands» et ils sont très intéressés par ces sujets, même ceux qui n’ont jamais été confrontés au cancer ou à la mort d’un proche.
Par le détour des livres, sans l’étalage brutal du réel qui lui ferait violence, l’enfant intègre, avec douceur et chaleur, le parcours éprouvant de la traversée du cancer ou du deuil. Le livre illustré ne minimise pas les épreuves, il permet même d’aborder la culpabilité de l’enfant, mais en tenant compte de ses rythmes, de son univers psychique. Il vit au fur et à mesure de ses lectures, à partir des commentaires que l’enfant amène, de ses ajouts, ses oublis et ses inventions. Il demande souvent plusieurs lectures, pour intérioriser, retrouver, mémoriser les phrases, les images et se préparer aux pages les plus douloureuses. La lecture accompagnée avec le parent amène une ouverture, elle permet un dialogue sur ce qui préoccupe, inquiète. Elle laisse libre cours à l’imagination de l’enfant et lui propose des pistes, sans l’enfermer dans des convictions figées. (1)
Ces trois beaux livres semblent avoir de véritables vertus thérapeutiques tant pour l’enfant que pour ses parents. Ce sont de précieux outils pour les professionnels de l’enfance, les enseignants et le personnel soignant. À découvrir absolument…

« Alice au pays du cancer », rencontre avec Sophie Buyse

Lorsqu’Alice quitte brutalement le pays des merveilles et découvre le pays du cancer, elle se trouve face à un monde menaçant qui lui est complètement étranger. Elle entend parler les infirmières et les médecins et ces mots incompréhensibles et inconnus lui paraissent une langue étrangère. La maladie et les traitements ont également transformé sa maman, elle qui était si forte, si protectrice, paraît soudain si faible, si fragile.
Sophie Buyse est psychothérapeute d’orientation psychanalytique et licenciée en sexologie de l’UCL. Elle consulte en privé et reçoit des enfants, des adultes et des couples.
Depuis 20 ans, elle travaille en collaboration avec l’asbl Cancer et Psychologie, à l’accompagnement des malades cancéreux et de leurs proches. Depuis à peu près 10 ans, elle a créé avec ses collègues des «Espaces Enfants» à l’hôpital dans les services de cancérologie qui accueillent des enfants confrontés à la maladie d’un parent, et des «Espaces Papillons», destinés aux enfants confrontés au décès d’un proche.
Sophie Buyse est par ailleurs présidente et fondatrice de l’asbl «Relais Enfants parents» (2), chargée du maintien des liens entre l’enfant et son parent incarcéré. Elle est aussi auteur de romans et de nouvelles.
Éducation Santé: Qu’est-ce qui vous a poussée à réaliser Alice au pays du cancer ?
Sophie Buyse : Ce sont des patients cancéreux qui se demandaient comment parler de la maladie à leur enfant qui m’ont incitée à mettre quelque chose sur pied, de même que mon expérience avec les enfants des Espaces Enfants à l’hôpital.
ES: Quels sont les objectifs de ce beau livre?
SB : Il s’agit de mettre des mots sur les émotions, d’expliquer la maladie grâce à un récit imagé et expressif qui permet à l’enfant de s’identifier.
ES: Mais pourquoi le cancer?
SB : Il y avait beaucoup de livres sur le divorce des parents, la mort, la séparation, mais peu de livres qui osaient parler du cancer sans voies détournées. Or, pendant la maladie, les enfants connaissent des phases de tristesse, de peur, de révolte, de colère, de culpabilité. Certains traversent cette épreuve en étant trop sages, trop bons élèves, ils veulent préserver leur parent, mais il ne faut pas oublier qu’ils restent des enfants et doivent encore avoir des moments d’insouciance, de bêtise et de vulnérabilité!
ES: Est-ce que le livre peut être utilisé dans d’autres cas que le cancer d’après vous?
SB : Je crois que le livre est aussi lu par des enfants qui ne sont pas confrontés au cancer d’un proche mais qui ont souvent entendu parler de la maladie et désirent être informés. Nous animons d’ailleurs des ateliers dans des classes confrontées à la maladie d’un enfant/parent/professeur, et nous constatons que le livre est un bon outil de communication et d’échange dans un groupe, quelle que soit la maladie.
ES: Comment avez-vous conçu le livre? Avez-vous rencontré des familles confrontées au cancer lors de la conception?
SB : Martine Hennuy et moi-même sommes deux psychothérapeutes de l’asbl Cancer et Psychologie. En fait, nous sommes sans cesse confrontées à cette problématique. Même dans nos proches il y a des personnes malades. Le cancer est malheureusement trop présent dans notre vie et dans notre entourage. Il ne se limite pas au contexte professionnel. Ainsi, nous avons mis en commun notre expérience avec les enfants et les malades. La rédaction du texte s’inspire aussi de témoignages ou de réactions d’enfants. L’illustratrice a été très touchée par ce thème et ses dessins répondaient bien à ce que nous cherchions…
ES: Pourquoi un livre?
SB : Il faut prendre du temps pour lire, et donc pour penser, pour ressentir. Le livre doit être lu de préférence avec un adulte pour permettre un dialogue, un questionnement, donner à l’enfant l’occasion de dire ce qu’il pense, ce qu’il vit. Le livre permet par ailleurs de se projeter tout en restant à distance de ce qui est représenté. Il est à la fois proche et lointain.
ES: Ici, l’histoire se termine bien mais malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. N’est-ce pas une vision trop positive de la maladie? Qu’en est-il pour les enfants pour qui ça ne se termine pas comme ça ?
SB : Il existe maintenant un deuxième livre «On va où quand on est mort?» (voir plus loin dans cet article) qui permet d’aborder avec les enfants la mort, la perte, le chagrin… Ceci dit, Alice se termine avec l’espoir de «ne plus jamais retourner au pays du cancer» mais on ne parle pas de guérison non plus.
ES: Existe-t-il un livret pédagogique pour savoir comment aborder ce livre avec les enfants ?
SB : Non, les personnes qui le souhaitent peuvent s’informer auprès de l’asbl et des auteurs du livre.
ES: Quel usage préconisez-vous?
SB : La lecture peut s’effectuer dans le cadre familial, scolaire, hospitalier… avec ou sans conteur/ lecteur, avec animation dans les écoles, à la maison avec les parents mais de préférence dans la journée pour ne pas ouvrir de questions trop douloureuses et émotionnelles au moment du coucher.
ES: Selon votre expérience, le livre est-il bien reçu par les enfants? Qu’en disent-ils? Et les parents et les animateurs ?
SB : Depuis la parution du livre, nous avons eu des commentaires à propos de son titre, volontairement très explicite qui pouvait heurter. Mais nous voulions appeler un chat un chat, et oser nommer le cancer. Les enfants, justement, sont curieux d’un livre qui porte un tel titre car il s’adresse à eux comme à des «grands».
Le personnel des hôpitaux est très demandeur, depuis les médecins jusqu’aux infirmières. Grâce au Plan Cancer, nous avons pu diffuser un certain nombre d’exemplaires dans les services où nous travaillons. Plusieurs écoles et des professeurs possèdent aussi le livre, après notre intervention dans plus d’une petite dizaine d’établissements scolaires de Bruxelles. Nous espérons que cet outil permettra aux professeurs, à l’avenir, d’intervenir dans leurs classes lorsqu’un élève est confronté à la maladie.
ES: Comment et où le livre est-il diffusé?
SB : Les éditions Alice ont une diffusion dans tous les pays francophones, nous sommes traduits en allemand, en coréen et bientôt en portugais.
ES: D’autres ouvrages pour compléter cette histoire ?
SB : À l’asbl Cancer et Psychologie, il existe également un livre qui aborde le suicide d’un parent, «Comment papa est mort?». Puis, il y a «On va où quand on est mort?». De son côté, la Fondation contre le cancer a édité «Le jardin d’Aurélien» qui traite du cancer d’un parent. Intéressant.
ES: D’autres projets du même type en cours?
SB : Oui, un projet de livre pour enfants qui parle de la réincarnation…
Pour vous procurer «Alice au pays du cancer» de Martine Hennuy et Sophie Buyse, rendez-vous en librairie, sur Internet, ou encore à l’asbl Cancer et Psychologie, avenue de Tervueren 215 à 1150 Bruxelles. Tél./fax: 02 735 16 97, courriel: canceretpsy@skynet.be, site: https://www.canceretpsy.be . Prix: 12,90 euros .

«On va où quand on est mort?», rencontre avec Martine Hennuy

Diego vient de perdre son papa… Au travers de son chagrin, il y a aussi beaucoup d’interrogations et d’incompréhension. Où vont les gens quand ils sont morts? Est-ce qu’ils changent de forme? Que de questions sans réponse! Et lorsque sa maîtresse aborde en classe le sujet de la mort, Diego est surpris par le nombre d’interprétations qui existent de ce sujet dont on parle si peu. Il découvre aussi que chacun vit son deuil à sa façon et que parler de la mort aide à en avoir moins peur…
Le parcours professionnel de Martine Hennuy est très diversifié. D’abord, sa formation de base en logopédie l’a amenée à travailler avec des adolescents en enseignement spécialisé. Elle a ensuite repris une licence en psychologie clinique tout en travaillant en tant qu’éducatrice dans des maisons d’hébergement pour enfants. Au terme de ses études, elle a poursuivi ce travail en tant que psychologue. Martine Hennuy a aussi travaillé pendant 7 ans dans l’enseignement en tant que psychopédagogue en école normale, pour former des institutrices préscolaires.
Depuis 10 ans maintenant, elle a choisi de revenir à un travail plus clinique puisqu’elle propose des consultations psychologiques en maison médicale et en planning familial. Voilà également 10 ans qu’elle travaille pour l’association Cancer et Psychologie. Elle a animé pour l’asbl un Espace enfants parents (Institut Bordet), y a assuré une permanence téléphonique et y est maintenant formatrice dans le domaine de l’accompagnement du deuil.
Au milieu de ces problématiques lourdes, Martine ressent le besoin de se ressourcer. Ainsi, elle organise des voyages en collaboration avec une agence d’écotourisme et est accompagnatrice dans le désert du Sinaï en Égypte!
Éducation Santé : Qu’est ce qui vous a poussée à réaliser « On va où quand on est mort
Martine Hennuy : Le succès d’ « Alice au Pays du Cancer » nous a donné envie de poursuivre l’aventure en nous basant sur des problématiques que nous connaissons bien, dans lesquelles nous évoluons au quotidien. L’idée d’aborder le thème de l’après-vie nous est apparue comme une évidence. Nous sommes donc parties des interventions spontanées d’enfants endeuillés lors d’un Espace Papillon (3) car celles-ci étaient très riches. Nous avons dès lors élaboré le scénario de l’histoire autour de ces interventions.
ES : Pourquoi parler de la mort ? Cela vient il d’une demande ?
MH : La mort reste encore trop souvent un sujet tabou qu’il est important de dédramatiser. Après avoir évoqué le thème de la maladie grave, il semblait important de proposer un support permettant de soutenir et d’accompagner l’enfant sur le thème de la mort et surtout de l’après-vie, peu abordé par la littérature enfantine. Le livre semble répondre à une demande puisqu’il vient déjà d’être réédité…
ES : Quels objectifs poursuiviez vous ?
MH : L’objectif principal est de proposer aux enfants et aux familles des outils pour parler de la mort, pour élaborer ensemble les questions autour de ce thème encore trop souvent tabou. Il est également de légitimer le vécu de l’enfant en faisant passer le message qu’il est normal d’être triste, en colère lorsqu’on a perdu une personne proche, que ces émotions doivent être traversées.
ES : On va où quand on est mort ? N’est il pas ambitieux de vouloir répondre à cette question ?
MH : Effectivement, c’est pourquoi nous n’avons pas l’ambition d’y répondre!
Nous avons simplement souhaité aborder la question, sans y apporter de réponses toutes faites, en proposant à l’enfant des balises, des pistes pour y trouver ses propres réponses, car en matière de mort et d’après-vie, nous n’avons aucune certitude.
ES : Comment avez vous conçu le livre ?
MH : Tout simplement en partant de notre pratique professionnelle, ce qui nous a fourni un matériel très riche. Nous nous sommes également basées sur nos propres recherches et conceptions philosophiques autour de la mort, sans toutefois les imposer à l’enfant, mais en proposant différents points de vue, dans lesquels l’enfant pourra se forger ses propres croyances.
ES : Avez vous rencontré des familles endeuillées lors de la réalisation ?
MH : Non seulement au cours de la réalisation du livre, mais tout au long de notre pratique depuis 10 ans!
ES : Pourquoi un livre ? Pensez vous que cette forme convient particulièrement bien pour aborder la mort avec les enfants ?
MH : Un livre reste, on peut le consulter, le laisser de côté et le reprendre plus tard. Il constitue un support non seulement pour l’enfant, mais aussi pour l’adulte, qu’il soit parent ou enseignant (car nous avons aussi beaucoup de demandes d’interventions au sein des écoles).
ES : Existe t il un livret pédagogique pour savoir comment aborder ce livre avec les enfants ?
MH : Non, car nous n’avons pas voulu rentrer dans une démarche trop pédagogique, ni trop figée. Nous avons préféré laisser chacun utiliser le livre selon ses besoins, selon l’âge de l’enfant aussi.
ES : Quel usage préconisez vous ?
MH : C’est un livre à lire avec l’enfant, que ce soit en famille, à l’école ou à l’hôpital. Il ne concerne pas seulement les enfants endeuillés, mais tous les enfants car la mort est un sujet qui nous concerne tous.
ES : Selon vote expérience , le livre est il bien reçu par les enfants ? Qu’en disent ils ? Et les parents ?
MH : Nous l’avons bien sûr utilisé lors des ateliers ou lors d’animations dans les classes et en avons eu de très bons retours.
ES : Comment et où le livre est il diffusé ?
MH : Il est édité chez Alice Édition et est diffusé en Belgique, en France, en Suisse et au Canada.
On le trouve dans toutes les librairies et il est également possible de le commander à l’association Cancer et Psychologie.
Pour commander « On va où quand on est mort de Martine Hennuy et Sophie Buyse , rendez vous en librairie , sur Internet , ou encore à l’asbl Cancer et Psychologie , avenue de Tervueren 215 à 1150 Bruxelles , Tél ./ fax : 02 735 16 97 , courriel : canceretpsy @ skynet . be , site : www . canceretpsy . be . Prix : 12 , 90 euros .

« Grand arbre est malade», rencontre avec Nathalie Slosse

Frimousse le petit hérisson aime beaucoup Grand Arbre . Quand le docteur des arbres découvre des petits vers sous l’écorce de Grand Arbre , l’univers de Frimousse est complètement bouleversé . Il va pourtant jouer un grand rôle dans sa guérison
Éducation Santé : Pourquoi avoir réalisé ce livre ?
Nathalie Slosse : Quand j’ai été confrontée au cancer du sein en 2007, mon fils n’avait pas encore 2 ans. J’ai cherché ce qui existait pour communiquer sur la maladie grave avec les tout-petits, mais j’ai trouvé très peu de matériel. C’est pourquoi une fois la période la plus pénible du traitement passée, j’ai décidé de créer un outil pour aider d’autres parents et accompagner les jeunes enfants.
ES : Quels sont les objectifs de votre livre ?
NS : En premier lieu, je voulais encourager les adultes à parler de ce qui se passe quand une maladie grave frappe un proche, car je pense qu’il ne faut pas cacher les moments difficiles sous prétexte qu’il ou elle «est encore tellement jeune». Les enfants sentent qu’il y a des gros changements autour d’eux, il est mieux de mettre des mots là-dessous.
J’ai voulu écrire une histoire métaphorique (la maladie étant bien entendu l’attaque des vers) qui laisse beaucoup d’espace pour l’interprétation de l’enfant. Ainsi, l’histoire peut s’adapter à un grand nombre de situations.
ES : Quels sont les thèmes abordés ?
NS : Les effets secondaires (fatigue, perte des cheveux), les amputations, la durée du traitement, la chimiothérapie et la radiothérapie, les émotions de l’enfant (triste, heureux, fâché, inquiet) et le lien illogique entre «rendre malade» (effets secondaires de la chimio) et guérir.
ES : Comment avez vous conçu le livre ?
NS : Pour moi la partie la plus importante est celle avec les idées pratiques de jeux et de bricolages adaptés aux plus jeunes. C’est ça que j’ai pensé à réaliser en premier lieu. Il ne s’agissait pas pour moi, comme dans beaucoup d’ouvrages, de proposer uniquement à l’enfant de dessiner. Parce qu’à 2 ans, un enfant ne sait pas encore s’exprimer par un dessin! Bien sûr, j’avais mon cobaye chez moi à la maison… mon fils. Certaines choses, comme le monstre cancer , je les avais testées avec lui pendant ma maladie. L’idée d’ajouter à ces activités l’histoire de Grand Arbre et Frimousse m’est seulement venue après… Il m’a semblé intéressant de collaborer avec des associations qui ont une expertise dans le domaine de l’enfance et de la santé. C’est pourquoi je me suis adressée à la division jeunesse des Mutualités socialistes et aux psychologues de Cancer et Psychologie. Ils étaient bien placés pour me guider et me dire si un tel outil existait déjà pour la partie francophone du pays…
ES : Comment avez vous « inventé » les animations proposées dans le livret pédagogique ? Vous avez été aidée par un pédagogue ?
NS : Comme expliqué avant, ma rencontre avec des personnes de Cancer et Psychologie m’a beaucoup aidée. Puis, j’aime être créative et bricoler avec les enfants. Donc, quand je regardais des livres avec des idées de bricolages (par exemple pour la fête des mères), j’essayais de les «traduire» dans un contexte de maladie grave. J’ai aussi consulté un livre sur l’aide aux victimes (la gestion des émotions après un choc est très semblable dans beaucoup de cas).
ES : Pourquoi avoir choisi le livre comme support ?
NS : Les enfants aiment écouter les histoires et regarder des images. J’ai pensé que c’était la porte d’entrée la plus facile pour ouvrir un dialogue avec eux sur un sujet si délicat.
ES : Avez vous rencontré d’autres familles confrontées au cancer ?
NS : Oui, mais surtout depuis l’édition du livre, pas tellement avant. Avant, j’ai essayé d’en discuter avec d’autres jeunes mamans via un forum sur Internet notamment.
ES : Pourquoi un arbre et un hérisson ? Est ce que vous pensez que les enfants s’identifient ?
NS : Pour de jeunes enfants, situer une histoire dans un autre milieu que le leur, en l’occurrence celui des animaux, est moins menaçant.
ES : Ici , l’histoire se termine bien mais malheureusement , ce n’est pas toujours le cas
NS : Les contes se terminent toujours bien… Les enfants ont besoin d’un «happy end» même s’ils savent bien que, dans la réalité, tout ne se passe pas comme dans un conte de fée. Ceci dit, j’ai quand même voulu y ajouter une fin ouverte avec Petit Arbre qui commence à pousser… Il signifie que, même si Grand Arbre disparaissait, il nous resterait toujours des souvenirs… Mais je pense qu’il ne faut pas pousser l’enfant à cette conclusion. D’habitude, ils ont assez d’imagination pour y trouver ce qui leur convient le mieux à ce moment-là.
ES : D’après vous , est ce que le livre peut être utilisé dans le cadre d’autres maladies que le cancer ?
NS : Oui, j’ai déjà eu des réactions en ce sens. Dans un journal, j’ai lu un article sur une maman qui l’avait lu à ses enfants après l’amputation d’une jambe et de quelques doigts suite à une attaque de bactérie. Le mot «cancer» n’est pas spécifié, mais le traitement ressemble très fort à la chimiothérapie et radiothérapie, habituellement administrées en cas de cancer.
ES : Quel usage préconisez vous pour le livre ?
NS : Pour favoriser l’usage en famille, j’ai insisté auprès de l’éditeur pour inclure quelques idées dans le livre même, dans la partie «trousse à trucs de Frimousse». Mais dans le manuel plus complet (téléchargeable gratuitement), il y aussi des choses qui sont plus adaptées à une utilisation en classe, par exemple des suggestions pour la discussion en groupe. Enfin, pour l’utilisation par des personnes comme les instituteurs qui ne sont pas familiarisés avec un traitement contre le cancer, des photos de l’hôpital et un glossaire se trouvent également dans le manuel.
ES : Selon votre expérience , le livre est il bien reçu par son public ?
NS : Le livre est très bien reçu par le public, petit et grand. Je n’ai jamais eu la chance de voir la réaction des tout-petits en direct mais j’apprends via les parents qu’ils ont aimé car ceux-ci doivent relire plusieurs fois l’histoire! Il y en a même qui veulent garder le livre avec eux dans leur lit.
Les parents qui ne sont pas confrontés à la situation mais qui ont quand même le courage de lire l’histoire à leurs enfants, l’apprécient également, pour les leçons de vie qu’on peut en tirer.
On me dit même que des enfants de 10-11 ans en profitent. Les animateurs de Cancer et Psychologie, de leur côté, ont tout de suite lu le livre aux enfants de 3 et 4 ans. Ils disent qu’il fonctionne super bien et bien sûr, cela me rend très heureuse!
ES : Comment et où le livre est il diffusé ?
NS : Le livre est en vente au prix de 12,95 euros dans les librairies ou chez le distributeur Weyrich Éditions. On peut aussi le commander chez Latitude Junior ou Cancer et Psychologie.
ES : D’autres projets en cours de votre côté ?
NS : En tout cas, les réactions positives sur ce premier livre m’encouragent à continuer. J’aimerais bien pouvoir éditer encore d’autres livres pour enfants délivrant un message pour les aider sur un sujet difficile… J’aime ce défi et j’ai déjà pas mal d’idées. En ce qui concerne le petit Frimousse, j’ai déjà écrit une suite intitulée «Gouttes magiques», dans laquelle il en apprend davantage sur le chagrin et les façons de consoler quelqu’un. Mais il reste difficile de trouver un éditeur pour des livres pour enfants avec des thématiques lourdes, donc je ne sais pas encore si cette histoire trouvera son chemin vers le grand public…
Pour l’instant, je prépare aussi un projet avec des sacs à jeux composés de plusieurs choses amusantes autour du livre «Grand Arbre est malade», par exemple une petite poupée Frimousse: il est certainement plus agréable pour les enfants d’aller se coucher avec un doudou qu’avec un livre à la couverture dure! Ces sacs seront mis à disposition via les hôpitaux. Mais cette année je vais d’abord lancer le projet en phase expérimentale du côté néerlandophone. Pour suivre tous ces développements, les lecteurs peuvent consulter le site https://www.talismanneke.be .
Pour découvrir l’histoire de Grand arbre et Frimousse : https://grandarbre.over-blog.com .
Pour commander le livre , rendez vous en librairie , sur le site de Weyrich Éditions https://www.weyrich-edition.be/fr/detail-produit/grand-arbre-est-malade.htm , de Latitude Junior https://www.latitudejunior.be/spip.php?article80&var;_mode=calcul ou via Cancer et Psychologie , avenue de Tervueren 215 à 1150 Bruxelles , tél ./ fax : 02 / 735 16 97 , courriel : canceretpsy@skynet.be , site : https://www.canceretpsy.be .

Éducation Santé a aussi rencontré Lisbeth Renardy, illustratrice de «On va où quand on est mort?» et «Alice au pays du cancer»

Éducation Santé : Parlez nous un peu de vous , votre formation , votre parcours , votre métier
Lisbeth Renardy : Je vis et travaille à Liège. J’ai effectué mes études à St-Luc, en illustration. En 2002, fraîchement diplômée, j’ai pris contact avec la maison d’édition Alice Jeunesse et là a commencé une collaboration en tant qu’illustratrice de livres pour enfants. J’ai publié 7 albums entre 2003 et aujourd’hui chez Alice Jeunesse dont « La princesse du jour et le prince de la nuit », « Samuel a peur du noir », et un aux éditions Asteline « Western Bolognaise ». De nouveaux albums sont en cours, dont un chez Alice.
À côté de cela, j’anime des ateliers d’arts plastiques avec un public composé d’enfants principalement. Je suis également conférencière en atelier d’illustration à l’Académie supérieure des Arts. Je n’ai pas encore de site Internet mais on peut voir mes différentes parutions sur le site des éditions Alice ( https://www.alice-editions.be ) et sur celui d’Asteline ( https://www.asteline.be/biolisbeth.html ).
ES : Comment avez vous vécu l’expérience d’ « Alice au pays du cancer » et de « On va où quand on est mort
LR : Je les ai plutôt vécues comme un défi. Illustrer des sujets aussi sensibles n’était pas simple pour moi au départ. Pourtant, j’y ai retrouvé la poésie et l’imaginaire que j’ai l’habitude d’évoquer dans mes illustrations, c’est ce qui m’a spontanément incitée à illustrer ces deux textes.
De plus, comme la plupart d’entre nous, je me retrouvais dans ces histoires car je vivais à cette même période une série de décès dans ma famille, c’était un cauchemar… J’ai alors vu ces livres un peu comme le prolongement du deuil pour moi, je m’y suis donc investie doublement.
Aujourd’hui, je ne regrette pas d’avoir fait le choix d’illustrer ces deux textes, malgré les réticences de nombreux éditeurs, lecteurs et non-lecteurs. Je perçois ces livres comme des outils plutôt que comme des livres d’illustrations qu’on lit aux enfants le soir avant de s’endormir.
Par contre, je sais que je n’en ferai pas d’autres de ce genre. Je ne veux pas être cataloguée comme illustratrice «médicale» ou dépressive! Même si personnellement je trouve qu’ils ne sont en rien déprimants.
ES : Comment « dessiner le cancer / la mort »… Comment choisir les bonnes illustrations pour parler aux enfants difficile comme thèmes , non ? Aviez vous déjà travaillé sur des thématiques similaires ?
LR : Non, c’était une première pour moi. Ce sont effectivement des thèmes difficiles, sensibles et délicats à la base; abordés avec des enfants, ils le deviennent d’autant plus. Le plus important pour moi était surtout de ne pas effrayer l’enfant, en essayant d’y apporter de la douceur et de la couleur. J’ai toujours travaillé avec beaucoup de couleurs, il allait de soi que je continue dans cette voie.
Il n’y a pas une façon de dessiner le cancer/la mort, je n’ai fait que transposer ma propre imagination (issue aussi de l’imagination collective), avec ma sensibilité, mes émotions, la façon dont moi, avec mes yeux d’enfants, je ressentais les choses. Sans perdre de vue qu’il s’agissait avant tout d’un outil, je voulais m’éloigner de l’aspect médical pour accompagner au mieux la poésie du texte et garder une certaine «légèreté» malgré tout.
Propos recueillis par Carole Feulien
Lisbeth Renardy , illustratrice , Rue Fond des Tawes 279 4000 Liège , courriel : lisbeth_renardy@hotmail.com.

(1) Extraits des interventions de Sophie Buyse et Martine Hennuy lors du colloque du 24-02-2010 « Des livres pour le dire », organisé par Cancer et Psychologie, Latitude Junior et Le Wolf.
(2) https://www.relaisenfantsparents.be
(3) Ateliers destinés à des enfants ou à des adolescents confrontés à un deuil. Nous reviendrons en détail sur les activités de Cancer et Psychologie dans un prochain numéro.

Explosion du nombre d’examens de la prostate. La Mutualité chrétienne appelle à une meilleure information des patients

Le 30 Déc 20

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Entre 2000 et 2009, le nombre de tests PSA réalisés en vue de dépister le cancer de la prostate est passé de 850.000 à 1,5 million, avec un coût de 4 millions d’euros à charge de la sécurité sociale, sans compter les coûts de biopsies parfois inutiles ainsi que les traitements et leurs complications éventuelles. Pour la Mutualité chrétienne (MC), le dépistage à grande échelle du cancer de la prostate ne se justifie pas, car des taux élevés de PSA ne prouvent pas l’existence d’un cancer et, inversement, des taux bas de PSA n’offrent pas la garantie qu’il n’y ait pas de cancer. Un dépistage ‘organisé’ risquerait d’entraîner des traitements inutiles ou trop lourds. Par ailleurs, la MC demande aux médecins généralistes de mieux informer les patients qui font la demande d’un test PSA dans le cadre d’un diagnostic précoce, de ses avantages et inconvénients.
En moins de dix ans, le nombre de tests PSA (Prostate Specific Antigen) a augmenté de 76%. Parmi les patients ayant subi un tel examen, un quart ont plus de 50 ans et un tiers ont plus de 70 ans. Plus de la moitié des patients de plus de 50 ans ont subi le test au moins tous les deux ans. Cette pratique vaut pour l’ensemble de la Belgique (un peu moins à Bruxelles qu’en Flandre et en Wallonie).
Ce test a été prescrit dans 80% des cas par un généraliste et semble désormais faire partie des examens de routine. Malgré la forte augmentation du nombre de tests PSA, la Fondation Registre du Cancer enregistre pourtant, chaque année, environ 9000 nouveaux cas de cancer de la prostate et ce de manière stable, depuis 2004.

Lenteur du cancer de la prostate et recours au test PSA comme outil de suivi

Le cancer de la prostate survient surtout chez les hommes de plus de 60 ans et évolue en général très lentement. Cette lenteur est telle que la plupart des hommes atteints d’un cancer de la prostate ne subiront aucun inconvénient de leur maladie et ne décéderont pas de cette cause. Les problèmes urinaires parfois rencontrés chez des patients sont généralement causés par une hypertrophie de la prostate et ne sont que rarement la conséquence d’un cancer. Dans ce contexte, on comprendra aisément l’inutilité d’un test de diagnostic précoce pour un patient de plus de 75 ans.
Le taux de PSA est mesuré par un test sanguin. Une valeur élevée peut être le signe d’une affection de la prostate: une hypertrophie bénigne de la prostate, une inflammation et, parfois, un cancer. Des taux élevés de PSA ne prouvent donc pas l’existence d’un cancer. Inversement, des taux bas de PSA n’offrent pas la garantie qu’il n’y ait pas de cancer de la prostate.
En cas de PSA élevé, le médecin propose généralement à son patient une biopsie. Il faut cependant savoir que cette biopsie peut entraîner des complications (hémorragies ou infections). La biopsie permet de déceler la présence de cellules cancéreuses et indique si l’on se trouve face à un cancer à faible ou à haut risque en termes d’évolution. Seuls les cancers à haut risque doivent être traités. Ces traitements (opération ou radiothérapie) peuvent engendrer des effets secondaires importants tels qu’impuissance ou incontinence. En cas de cancers de la prostate à faible risque, un simple suivi suffira. Le test PSA est alors l’outil de suivi indiqué. Ce test peut également être envisagé dans le cadre d’un diagnostic précoce mais à la demande du patient et après que ce dernier ait été correctement informé de ses avantages et inconvénients.
Alors qu’il est de plus en plus prescrit, le test PSA n’est pas repris dans la liste des examens préventifs recommandés par les deux principales organisations de médecins généralistes, la Société scientifique de médecine générale (SSMG) et Domus Medica. Dans l’état actuel des connaissances scientifiques, la Mutualité chrétienne estime que le test PSA à des fins de diagnostic précoce, chez des hommes ne présentant pas de plaintes et sans une information préalable, n’est pas indiqué.
La MC demande aux organisations de médecins et aux pouvoirs publics de rédiger des directives claires à destination des médecins ainsi que des brochures d’information neutres pour les patients. Par ailleurs, elle invite le Centre fédéral d’expertise des soins de santé à procéder à une mise à jour de son étude de 2006 sur le test PSA.
D’après un communiqué de presse de la Mutualité chrétienne

Les Belges sont conscients des dangers du tabagisme passif

Le 30 Déc 20

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Depuis le 1er juillet 2011, la Belgique est le 20e pays européen (1) à généraliser l’interdiction de fumer dans le secteur Horeca. La Fondation contre le Cancer a souhaité connaître l’opinion des Belges face à cette nouvelle réglementation, et les résultats de son enquête sont éloquents: ils sont 91 % à être conscients des dangers du tabagisme passif, et majoritairement favorables aux cafés sans fumée.
Le tabagisme passif est non seulement inconfortable, mais il peut également mener à de réels problèmes de santé. C’est l’amère expérience vécue notamment par Jean-Pierre Verbeeke , non-fumeur, ancien tenancier de café et aujourd’hui atteint d’un cancer: «Comme ancien tenancier de café, j’ai été pendant longtemps opposé à l’interdiction de fumer. Depuis que mon cancer a été diagnostiqué, bien que je n’aie jamais fumé, je comprends mieux. Je suis maintenant totalement convaincu de l’importance d’une interdiction généralisée de fumer dans l’Horeca. Il ne faut plus me raconter que le tabagisme passif n’est pas si grave» .
Suite à l’introduction de la nouvelle législation sur l’interdiction de fumer dans le secteur Horeca, la Fondation contre le Cancer a souhaité savoir si le public était conscient des dangers du tabagisme passif et de ses conséquences: cancers, maladies cardio-pulmonaires et affections respiratoires. En effet, la fumée secondaire, libérée par la cigarette en train de se consumer entre chaque bouffée, est particulièrement toxique du fait de sa température moindre de combustion. La recherche a démontré (2) que le tabagisme passif est une cause de cancer du poumon chez les non-fumeurs, et qu’il est responsable d’un décès toutes les 17 minutes, rien que dans l’Union européenne.
Une enquête, commanditée par la Fondation contre le Cancer et financée par le Fond anti-tabac, a été réalisée par l’institut de sondages Dedicated Research. Deux mois avant l’introduction de la nouvelle législation, un échantillon représentatif de la population belge a été interrogé (3).
L’enquête a montré que la population belge est particulièrement favorable aux cafés sans fumée:
-73% des personnes interrogées sont favorables à des cafés sans fumée. Ils étaient 65% en 2010, 61% en 2007, et 49% en 2004. Cela montre une nette évolution des mentalités;
-les jeunes sont majoritairement favorables à l’interdiction de fumer dans les cafés: 78% des 15-24 ans sont partisans de la nouvelle réglementation. La jeune génération est donc particulièrement sensible à l’impact du tabagisme dans les lieux publics;
-presque la moitié des fumeurs (46%) et la majorité des non-fumeurs (80%) sont favorables aux cafés sans fumée.
Les dangers du tabagisme passif et les avantages de cafés non-fumeurs sont aujourd’hui connus:
-91% des personnes interrogées déclarent être d’accord sur le fait que «le tabagisme passif dans les cafés peut provoquer un cancer du poumon chez ceux qui y travaillent»;
-61% déclarent être d’accord sur le fait que «l’interdiction de fumer dans tous les endroits publics (y compris les cafés) permet de réduire le nombre d’attaques cardiaques».
Depuis 2007, les restaurants sont non-fumeurs en Belgique et cette réglementation est très appréciée: 96% des personnes interrogées considèrent qu’il est plus agréable de se rendre dans un restaurant où il est interdit de fumer (ils étaient 84% à répondre favorablement à cette question en 2007).
Par ailleurs, les pays européens qui appliquent l’interdiction de fumer dans le secteur Horeca depuis quelques années constatent que les mentalités continuent à évoluer favorablement: les gens apprécient de plus en plus l’absence de fumée de tabac dans les lieux publics. Ainsi, en 2008 – et selon les chiffres de l’Eurobaromètre – la proportion de personnes en faveur de cafés non-fumeurs variait ainsi entre 80% et 94% en Irlande, en Italie et en Suède.
Christian De Bock , d’après le communiqué de la Fondation contre le cancer
(1) Angleterre, Chypre, Croatie, Écosse, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Irlande, Islande, Italie, Lettonie, Lituanie, Malte, Norvège, Slovénie, Suède, Turquie.
(2) Selon le Centre International de Recherche contre le Cancer.
(3) Soit 4000 personnes, dont 30,4 % ont accepté de répondre aux questions. La sélection a été faite dans les annuaires téléphoniques, et 20% des enquêtes ont été réalisées sur des numéros de portables sur base de random digital dialing.